🚩 Julian Assange : Actualité semaine #7 - Février 2024 🎗⏳
Une semaine évidemment très chargées. D'excellents articles à lire avec attention, 33 sont d'actualité, 2 plus anciens mais pertinents & 4 vidéos.
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Introduction de cette semaine très chargée avec Renata Avila*
Je suis l'affaire Julian Assange depuis le premier jour. À la veille d'une nouvelle audience liée à sa procédure d'extradition, voici quelques points :
1. Il ne s'agit pas de l'État de droit. Les poursuites engagées contre Julian Assange sont politiquement motivées, le pays concerné a le bras long et s'immisce dans les tribunaux et les autorités de poursuite de nombreux autres pays. La diplomatie ne fonctionne pas pour les mêmes raisons.
2. Les preuves ont été recueillies au moyen de méthodes militarisées, allant de menaces à des dispositifs réels volés à ses avocats.
3. Des décisions arbitraires ont entaché le processus. Il est évident qu'aucun procès équitable, où que ce soit, ne sera jamais possible.
4. Un précédent créé il y a 13 ans a été terriblement préjudiciable au journalisme international. Une décision rendue aujourd'hui, avec un SCOTUS conservateur et un éventuel second mandat de Trump, serait désastreuse pour la presse qui tente de demander des comptes au gouvernement. Une extradition d'Assange ne profiterait qu'à ceux qui sont impliqués dans des guerres et des affaires douteuses.
5. Avec autant de conflits dans le monde, punir la révélation de crimes de guerre serait terrible.
Aux diplomates et agents de la CIA courroucés, vous avez volé une décennie et demie de la vie d'Assange et entravé l'innovation dans le domaine du journalisme. N'est-ce pas suffisant ?
* Renata Avila, fille d'une artiste et d'uningénieur guatémaltèques, est une avocate des droits de l'homme spécialisée dans la propriété intellectuelle et la technologie. Elle a travaillé comme l'une des avocates représentant le lauréat guatémaltèque du prix Nobel de la paix Rigoberta Menchu et plus récemment, Wikileaks, Julian Assange et de lanceurs d'alerte et éditeurs en fournissant des conseils juridiques. Impliquée dans la recherche sur Internet et les droits de l'homme depuis 2006, Renata a travaillé avec l'inventeur Web Sir Tim Berners-Lee et plus de 125 organisations du Sud, dans le but de défendre les droits de l'homme à l'ère numérique. Elle est membre du conseil d'administration de Creative Commons une organisation internationale qui milite pour la connaissance ouverte et la culture libre également membre consultatif actif pour différentes initiatives, du Whistleblower Network en Allemagne, Coding Rights, au Data Activism Project de l'Université d'Amsterdam et à l'initiative BITS de la municipalité de Barcelone, visant à réduire la surveillance et à donner aux citoyens des outils de confidentialité. Elle écrit actuellement un livre sur le colonialisme numérique. Cette jeune guatémaltèque est également membre du conseil d'administration du Mouvement pour la démocratie en Europe 2025 (DiEM25), une initiative paneuropéenne lancée par l'ancien ministre grec des Finances et économiste Yanis Varoufakis , qui cherche à démocratiser l'Union européenne.
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Pour rappel :
Le lien des articles de Kevin Kosztola traduits sur cette plateforme, série compte à rebours jusqu'au jour J - No Extradition !
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SOMMAIRE :
1 - Le prix Nobel argentin Adolfo Pérez Esquivel appelle à la libération de Julian Assange - Prensa Latina
2 - Julian Assange : héros persécuté, journalisme en danger - Fabien Rives
3 - L'extradition de Julian Assange aura d'énormes répercussions sur les droits de l'homme et la liberté de la presse dans le monde entier - Charlie Jaay
4 - Amnesty International appelle à l'abandon des charges à l'approche d'une audience cruciale pour Julian Assange - Brett Wilkins
5 - Libérez Assange. Libérez la Palestine. Libérez votre esprit - C.A. Matthews
6 - À l'approche du Jour J, voulez-vous vraiment être du mauvais côté de l'histoire ? - The Canary
7 - Quand la justice ouverte & transparente est une option facultative - Jack Waterford
8 - La liberté de la presse mondiale est menacée par le retour de Julian Assange devant la justice britannique, où il risque d'être extradé vers les États-Unis - Amnesty International
9 - Les Américains nous riraient au nez si nous essayions de saisir un homme n'ayant enfreint aucune loi, comme c'est le cas avec Julian Assange. Et nous avons TOUS intérêt à le sauver - Peter Hitchens
10 - Royaume-Uni : les poursuites contre Assange menacent la liberté de la presse - FEJ*
11 - L'appel des professeurs de droit au ministère de la justice : Abandonnez les poursuites à l'encontre d'Assange - Freedom of the Press Foundation
12 - RSF dissipe les idées reçues ou fausses les plus répandues dans l'affaire Julian Assange - RSF*
13 - Le Premier ministre australien Anthony Albanese soutient le vote appelant le Royaume-Uni et les États-Unis à libérer Julian Assange - Daniel Hurst
14 - Les États-Unis et l'affaire Assange : le côté obscur de la force, la face cachée du pouvoir - Michael Hesse
15 - Dernier appel pour Assange - Sevim Dagdelen : "Il s'agit d'une mort programmée" - Franz Becchi
16 - La juge nommée par les conservateurs tient la vie de Julian Assange entre ses mains - Mark Curtis
17 - Le sort résevé à Julian Assange est le prisme à travers lequel nous pouvons autopsier les démocraties occidentales - Moritz Müller
18 - La mort du journalisme - Edward Marotis
19 - Jusqu'à quel niveau de criminalité un service secret peut-il aller ? - La CIA, Joshua Schulte et Julian Assange - Herbert Ludwig
20 - Assange citoyen de Rome. Plus qu'un simple bout de papier - Marianela Diaz
21 - Kristinn Hrafnsson, le rédacteur en chef de WikiLeaks à Genève pour le "dernier baroud d'honneur" de Julian Assange - Swiss Info
22 - Julian Assange n'est pas un surhomme - ce qu'on lui inflige est indigne de toute démocratie - Emma Jones
23 - John Shipton, le combat d’un père pour faire libérer Julian Assange - Vadim Kamenka
24 - De nombreuses questions sur le jour J : de la condamnation de Schulte aux préoccupations de l'ONU - Giulia Calvani
25 - Stella Assange : "Julian pourrait être dans un avion pour les Etats-Unis au lendemain de l'audience" - Uli Kreikebaum
26 - La CIA entend invoquer le "secret d'État" pour faire taire les avocats et les journalistes illégalement surveillés lors de leurs rencontres avec Assange - Trevor FitzGibbon
27 - Inauguration de l'expositio de photographies éthiques "HURRY UP !". Regards sur le travail des molitants pour la libération de Julian Assange - Pressenza Italia
28 - Une conférence de presse à Londres alerte sur les dangers de l'extradition d'Assange - Thomas Scripps
29 - Réponses reçues par les journalistes et certains membres du public du tribunal britannique à leurs demandes d'assister physiquement ou par lien vidéo aux audiences du jour J - Source Twitter X La Fleur Productions
30 - Les "complots de mort" autour d'Assange - Kellie Tranter
31 - Joe Lauria : "L'extradition d'Assange mettra fin à la liberté de la presse" - Marco Cesario
32 - Julian Assange, ou la trahison du journalisme par les journalistes eux-mêmes - Adèle Debey
33 - Le dernier appel de Julian Assange - Chris Hedges
Vidéos
34 - Stella Assange : "Mon mari Julian Assange risque l’assassinat"
35 - Éric Alt, administrateur d'Anticor, revient sur l’affaire Assange
36 - The Trust Fall - Première du documentaire de Julian Assange à Londres
37 - Dernière chance pour Julian Assange ? - Entretien avec Viktor Dedaj
Articles plus anciens
38 - Pire que l'affaire Dreyfuss : la persécution de Julian Assange - Alfred de Zayas
39 - Les fichiers de WikiLeaks révèlent une importante faille de sécurité au sein de la CIA - Stefania Maurizi
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L'ultime recours de Julian Assange devant les tribunaux britanniques pour éviter l'extradition est prévu pour cette semaine. S'il est extradé, c'est la mort des investigations menées par la presse sur les rouages du pouvoir.
Aucun autre journaliste contemporain n'est parvenu à égaler ses révélations.
Julian est le premier. Nous sommes les suivants.
- Chris Hedges
1- ♟ Le prix Nobel argentin Adolfo Pérez Esquivel appelle à la libération de Julian Assange
Le prix Nobel de la paix et combattant argentin Adolfo Pérez Esquivel a exhorté aujourd'hui la communauté internationale à exiger la libération du cyberactiviste Julian Assange et à s'opposer à son éventuelle extradition vers les États-Unis.
Par Prensa Latina, le 11 février 2024
Buenos Aires, 11 février (Prensa Latina) - Dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux, il appelle à construire la paix, à soutenir Assange et à exiger de la justice britannique de ne pas le faire extrader vers les États-Unis.
"Je vous appelle à faire preuve de solidarité avec lui et sa famille, pour mettre fin à cette angoisse et à cette douleur qu'il endure depuis des années. Une énorme étreinte", a-t-il souligné. Assange est resté enfermé au Royaume-Uni depuis que l'Équateur lui a retiré l'asile politique accordé sept ans plus tôt en 2019 et autorisé la police à l'arrêter au sein de son ambassade à Londres.
À la mi-2022, le gouvernement britannique a annoncé sa décision d'autoriser son extradition vers les États-Unis, pays qui a l'intention de le juger pour avoir révélé des crimes de guerre perpétrés par l'armée américaine en Irak et en Afghanistan, ainsi que des milliers de dossiers diplomatiques secrets.
S'il est poursuivi et reconnu coupable par un tribunal de ce pays, il pourrait être condamné à 175 ans de prison sur la base de 17 chefs d'accusation liés à la loi sur l'espionnage dont il fait l'objet.
L'année dernière, le lauréat du prix Nobel et d'autres personnalités argentines ont remis des lettres à l'ambassade du Royaume-Uni dans cette capitale, dans lesquelles ils assuraient que ce pays avait la possibilité souveraine de créer un précédent international dans la défense de la liberté de la presse en tant que droit de l'homme fondamental. (ndr : publié sur cette plateforme)
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2- ♟ Julian Assange : héros persécuté, journalisme en danger
Assange, est ce journaliste héros persécuté & traqué par Washington et ses complices, sur lequel démocrates comme républicains s’acharnent.
Par Fabien Rives, le 12 février 2024, Off Investigation
Du 20 au 21 février, la Haute Cour d’Angleterre examinera la recevabilité de l’ultime appel de Julian Assange au Royaume-Uni pour empêcher son extradition vers les Etats-Unis – extradition pour laquelle le gouvernement britannique a donné son accord en juin 2022. Si son recours échoue, cet australien de 52 ans ne pourra plus compter que sur un éventuel ultime rempart : la Cour européenne des droits de l’homme. Rappel des principales étapes de sa persécution.
12 juillet 2007. Un hélicoptère américain patrouille au dessus de Bagdad. Son équipage décide, avec une insouciance déconcertante, d’abattre une petite foule repérée comme cible. Bilan du raid : 18 civils tués dont deux journalistes. Trois ans plus tard, choquée par ce crime de guerre, une source militaire américaine fait fuiter la scène en question grâce à WikiLeaks. Le scandale est mondial. Quant à celui dont le travail a permis de mettre en lumière ce massacre, en diffusant le devenu célèbre clip Collateral Murder, il encourt désormais jusqu’à 175 ans de prison aux États-Unis. Son nom ? Julian Assange. A l’heure où les griffes de l’administration américaine sont sur le point de se refermer sur ce héros de la liberté d’information, que retenir de son incroyable destin ?
WikiLeaks, une plateforme qui a changé le monde
C’est en 2006 que Julian Assange créé WikiLeaks : une plateforme sécurisée qui a permis à des lanceurs d’alerte du monde entier de transmettre anonymement des documents confidentiels témoignant de pratiques ou d’intentions peu avouables de la part de puissantes entités. Vous avez peut-être déjà entendu parler des Guantánamo Files, Iraq War Logs ou encore Afghan War Logs ? Autant de dossiers accablants pour l’armée américaine dans lesquels ont été mis en lumière : des incarcérations d’innocents, des traitements cruels pratiqués dans la prison de Guantánamo (Cuba) après les attentats du 11 septembre 2001, des attaques indiscriminées de l’armée la plus puissante du monde contre des populations civiles en Irak et en Afghanistan ; ou encore les actes de torture qu’elle a perpétrés dans ces pays. Une esquisse de ces massacres avait d’ailleurs choqué l’opinion publique à travers le monde, à l’occasion de la diffusion en 2010 de la vidéo Collateral Murder, évoquée plus haut.
Derrière toutes ces révélations : un ex-analyste militaire de l’armée américaine, Bradley Manning. Depuis les années 2010, c’est lui qui a fait fuiter une bonne partie des crimes de guerre commis par les Etats-Unis grâce au système de transmission cryptée offert par WikiLeaks.
S’ils ont marqué leur époque, ces exemples ne constituent qu’un fragment des révélations permises par la plateforme qu’a créée Julian Assange. Comme le rappelle l’ex-rapporteur de l’ONU sur la torture Nils Melzer, dans son livre L’affaire Assange, histoire d’une persécution politique (dont la version française est parue en août 2022 aux éditions critiques), "les premières révélations de WikiLeaks mirent en lumière, par exemple, la corruption du gouvernement kenyan, le déversement de déchets toxiques par la société Trafigura en Côte d’Ivoire, les méthodes de la scientologie, les pratiques douteuses de la banque suisse Julius Baer, etc.".
Scandales écologiques, surveillance de masse, corruption ou encore mensonges d’État : le panel des révélations permises par WikiLeaks est large et a touché de nombreux pays à travers le monde, tous continents confondus. En 2015, un dossier baptisé Espionnage Élysée nous apprenait qu’entre 2006 et 2012, trois chefs d’Etat français (Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy et François Hollande) ainsi que des ministres, hauts fonctionnaires, parlementaires ou encore diplomates, avaient été mis sur écoute pendant près d’une décennie par les services secrets américains.
"J’ai rapidement compris que si WikiLeaks avait réussi à obtenir des informations que personne n’était parvenu à avoir, c’est parce qu’ils offraient une plateforme et des technologies qui protégeaient les sources", expliquait récemment à Marianne la journaliste italienne Stéfania Maurizi, autrice de L’affaire WikiLeaks : médias indépendants, censure et crimes d’État, paru cette année en français, aux éditions Agone. Et la spécialiste de Wikileaks de conclure : "Ils ont ainsi attiré des gens avec des compétences particulières (…) qui ont compris qu’ils pouvaient faire fuiter des informations en toute sécurité grâce à la cryptographie [Quand je l’ai découvert], c’était pour moi un espoir dans une période sombre pour le journalisme d’investigation".
Assange, traqué par Washington et ses complices
Certains anciens partenaires médiatiques d’Assange, comme par exemple le journal Le Monde, n’eurent pas toujours cette reconnaissance, notamment à une époque critique pour Julian Assange. Après avoir bénéficié de la révolution WikiLeaks, ils dénigrèrent son fondateur en relayant abondamment les allégations de Washington selon lesquelles il aurait personnellement mis en danger des vies humaines de part et d’autre du globe.
Pourtant, le principal intéressé a toujours démenti de telles accusations et a lui-même reproché à la Maison Blanche de n’avoir pas répondu à certaines de ses sollicitations visant à éviter toute mise en danger d’autrui. Notons que Julian Assange a aussi pointé des imprudences chez ses anciens partenaires médiatiques, en accusant par exemple le Guardian d’avoir divulgué par négligence les mots de passe de Cablegate, le 1er septembre 2011.
Par ailleurs, les allégations visant Assange sont en total décalage avec certains contenus offrant un aperçu de ses précautions en matière de protection de vies humaines : en témoigne par exemple sa tentative de sensibiliser l’administration américaine à ce sujet, dans une séquence du documentaire Risk, paru en 2016 ; ou encore un échange téléphonique entre Assange et le secrétariat d’Hillary Clinton, datant de 2011.
"Washington a eu à deux reprises l’occasion de fournir dans un tribunal des exemples précis pour étayer ses allégations mais n’a à ce jour pu fournir aucun cas de personne tuée ou blessée en raison des publications de WikiLeaks", estime Laurent Dauré, porte-parole du comité de soutien français à Julian Assange.
"L’armée ne parvient pas à associer les fuites à des décès", confirmait en 2013 le média américain Courthouse News Service, en référence aux fuites de Bradley Manning publiées par WikiLeaks. A l’inverse, les accusations en question ont été mises à mal par plusieurs témoins lors du procès sur l’extradition d’Assange, fin 2020.
Quand démocrates et républicains s’acharnent
Démocrate comme républicaine, l’administration américaine a toujours fait preuve d’un acharnement intense contre le fondateur de WikiLeaks, à l’image des sorties fracassantes de plusieurs de ses hauts responsables. Pour ne prendre qu’un exemple parmi d’autres, notons le cynisme du haut fonctionnaire américain John Bolton qui, en octobre 2022, lors d’un échange en direct avec la femme de Julian Assange sur la chaîne britannique Talk TV, déclarait : "J’espère qu’il prendra au moins 176 ans de prison pour ce qu’il a fait".
Mais au delà des paroles, cet acharnement est aussi est surtout caractérisé par les actes. Procédures kafkaïennes à répétition, espionnage illégal dans l’ambassade d’équateur à Londres, comme le révélait Mediapart en avril 2019, plans d’enlèvement et d’assassinat concoctés par la CIA tels que le révelait Yahoo news en septembre 2021… Tout ou presque a été envisagé par Washington, avec parfois la complicité active de plusieurs Etats impliqués dans le dossier, comme le décrit en détails Nils Melzer dans son livre qui porte sur plusieurs rebondissements majeurs du calvaire que traverse le journaliste australien depuis plus d’une décennie.
La vraie-fausse "affaire suédoise"
L’ex rapporteur de l’ONU sur la torture fournit par exemple une chronologie précise de "l’affaire suédoise", basée sur de supposées agressions sexuelles, dont Julian Assange a été accusé (à tort) durant des années. L’ex-rapporteur de l’ONU, qui maîtrise la langue suédoise, a pu consulter de nombreux documents originaux pour comprendre le dossier. Il retrace minutieusement dans son livre la façon dont les autorités de ce pays nordique ont sciemment déformé la démarche d’origine des deux femmes concernées : après avoir compris qu’elles avaient eu avec Assange des rapports sexuels à quelques jours d’intervalle, elles cherchaient initialement auprès de la police une façon de le contraindre à leur fournir un test VIH. "Dans les deux cas, il a été faussement affirmé que les femmes elles-mêmes avaient l’intention de signaler un délit sexuel contre Assange, alors que ce n’était manifestement pas le cas […]. Les autorités suédoises détournèrent rapidement à leurs propres fins les histoires et les expériences personnelles des deux femmes", estime Melzer dans un chapitre entièrement consacré à ce sujet.
Après avoir servi de prétexte à une vaste campagne politico-médiatique de dénigrement visant le fondateur de WikiLeaks (notamment de la part de France Inter, comme le rappellait Laurent Dauré via Acrimed en juillet 2021), l’affaire suédoise a pris fin en novembre 2019 quand toutes les démarches engagées contre Assange furent définitivement abandonnées.
Dans son livre, l’ancien rapporteur de l’ONU sur la torture s’attache également à démontrer une coordination interétatique dans cette histoire, rappelant que l’administration américaine avait commencé, dès 2010, à explorer diverses possibilités de poursuivre Assange et avait demandé à ses alliés, dont la Suède, de faire de même.
Alors que l’incroyable travail d’Assange lui a valu de nombreux prix de journalisme à travers le monde (mis en avant à l’occasion d’une récente exposition au Parlement européen, consacrée à son œuvre journalistique), le fondateur de WikiLeaks a été contraint de vivre reclus à l’ambassade d’équateur à Londres entre 2012 et 2019, date de son arrestation par les autorités britanniques. Depuis cette date, il est enfermé dans une prison de haute sécurité en Grande Bretagne. Il est désormais visé aux Etats-Unis par 18 chefs d’inculpation, dont celui d’espionnage.
Un risque d’incarcération à vie dans des conditions atroces
Comme l’explique Nils Melzer, le fait que Julian Assange ait été inculpé par la célèbre Espionnage court du district Est de Virginie, ne lui laisse aucun espoir de procès équitable : là-bas, la procédure se déroulerait à huis clos et reposerait sur des preuves auxquelles ni lui, ni son avocat n’auraient accès. Il souligne : "À l’Espionnage Court d’Alexandria, aucun accusé au nom de la sécurité nationale ne fut jamais acquitté". De son côté, Laurent Dauré explique que dans le cadre de l’Espionnage act, il serait impossible à Julian Assange de plaider ses intentions journalistiques.
Si l’équipe juridique américaine a récemment tenté de rassurer la justice britannique sur l’hospitalité qui pourrait être offerte à Assange chez l’Oncle Sam, la vérité est donc qu’il y risque l’incarcération à vie dans des conditions atroces, comme celles qui caractérisent les prisons "Supermax". Cette funeste hypothèse a été appuyée par plusieurs experts, lors d’audiences portant sur l’extradition de Julian Assange.
"De nombreux prisonniers [y] gémissent interminablement, crient, cognent contre les murs de leur cellule. Certains se mutilent avec des rasoirs, des éclats de verre, des os de poulet aiguisés (…) des lames de rasoir, des coupe-ongles… D’autres ont des conversations délirantes avec des voix qu’ils entendent dans leur tête, oublieux de la réalité", rapportait notamment Le Figaro en 2015 à propos d’un de ces terribles établissements pénitenciers américains, où les tentatives de suicide sont fréquentes. "Supermax : La pire prison du monde", titrait également en 2019 Paris Match, après avoir enquêté sur l’une d’entre elles.
Trois faits marquants (mais méconnus) de l’affaire Assange

Un homme est emprisonné dans un pays où il n’a officiellement aucune peine à purger
"Il n’est ni en détention préventive, ni en train de purger une peine, il est sous écrou extraditionnel, c’est-à-dire qu’il est simplement en attente de l’issue de la demande d’extradition des Etats-Unis. Il n’y a pas de limite de temps fixé par la loi, ça peut s’étendre à l’infini", dénonce Laurent Dauré (porte parole du comité de soutien français à Julian Assange) à ce sujet.
Les autorités britanniques ont initialement justifié l’arrestation de Julian Assange en l’accusant d’avoir violé les conditions de sa liberté surveillée lorsqu’en 2012, il s’était réfugié à l’ambassade de l’Equateur. Pour rappel, le ressortissant australien y avait sollicité l’asile politique car, déjà à l’époque, il redoutait d’être extradé vers les Etats-Unis en cas d’immixtion de Washington dans l’affaire suédoise. Condamné en 2019 par la justice britannique à une peine de 50 semaines de prison, cela fait désormais plus de 252 semaines que Julian Assange est sous écrou…
Assange accusé de piratage : quand les médias français ignorent une information clé
Parmi les principaux chefs d’inculpation américains visant Julian Assange, l’allégation de piratage est régulièrement médiatisée sans nuance. Or, il y a maintenant plus de deux ans et demi, la presse islandaise mettait à mal cette accusation à la faveur de révélations explosives d’un sulfureux témoin qui admettait avoir menti dans le cadre d’un marché conclu avec les autorités américaines.
Condamné pour détournements de fonds, fraudes, vols et abus sexuels sur plusieurs dizaines de mineurs, l’Islandais Sigurdur Thordarson a en effet confessé au journal islandais Stundin, avoir "fabriqué" de toutes pièces des allégations selon lesquelles il aurait reçu de la part de Julian Assange des consignes de piratage visant un pays membre de l’OTAN.
Malgré le caractère sensationnel d’un tel rebondissement, celui-ci passa inaperçu en France. L’information fut uniquement traitée par des médias alternatifs, parmi lesquels RT France, désormais interdit sur le sol européen. "C’est sidérant qu’un élément aussi crucial n’ait pas eu d’écho en France, c’est quand même un témoin-clé de la partie étasunienne. Les médias ont tendance à ne rendre compte que des éléments à charge contre Assange, à l’inverse, les éléments qui pourraient jouer en sa faveur sont étouffés ou occultés", regrette Laurent Dauré.
Pression britannique et chantage américain au FMI : l’Equateur encouragé à abandonner Assange
"Les tractations entre Londres et Quito pour livrer Assange méritent d’être connues", estime Laurent Dauré. "Une enquête du journaliste britannique Matt Kennard en a rendu compte. Nous l’avons publiée dans le livre qui accompagne le DVD du documentaire Hacking Justice, édité par les Mutins de Pangée. Avec ce recueil d’articles, nous avons voulu faire un travail d’information face au silence médiatique en France. L’affaire Assange a connu des rebondissements incroyables, qui ont de quoi susciter l’intérêt des lecteurs. En plus de se montrer indifférents au sort d’un confrère journaliste, les médias privent leur public d’une histoire captivante", estime Laurent Dauré, en référence à un article initialement mis en ligne en avril 2021 par le média d’investigation DeclassifiedUK, intitulé : "Révélations sur la campagne du gouvernement britannique pour forcer Julian Assange à quitter l’ambassade d’Équateur".
On y apprend notamment comment le ministre britannique Sir Alan Duncan, alors en charge des négociations sur Assange, a poussé la cheffe du gouvernement Theresa May à "flatter" le président équatorien de l’époque, Lenin Moreno, pour faire sortir le ressortissant australien de l’ambassade. Entre autres révélations, l’enquête mentionne également des cadeaux offerts au président de l’Équateur pour le remercier d’avoir livré Assange au Royaume-Uni.
Outre la stratégie britannique pointée dans cet article, une pression étasunienne visant Quito a également été dénoncée par l’ex-chef de la diplomatie équatorienne, Ricardo Patiño, selon qui la décision de son pays de mettre fin à l’asile politique de Julian Assange est intervenue après un chantage de Washington au FMI. Dans un entretien du podcast Resumen del sur (dont des extraits ont été retranscrits ici), l’ancien ministre a dénoncé une "soumission honteuse" de son pays. "Attaquez le Venezuela, détruisez l’intégration, donnez-moi Assange, et je vous donnerai 10 milliards de dollars" : c’est avec cette paraphrase que l’homme d’État résume la pression selon lui exercée à l’époque par Washington pour contraindre le gouvernement équatorien à livrer Julian Assange. Là encore, silence radio en France. Aucun grand média ne jugera utile d’évoquer cette sortie fracassante. Ni pour l’étayer, ni pour la nuancer…
Fabien Rives est un journaliste indépendant, attaché au pluralisme de l’information, nécessaire pour appréhender au mieux les actualités françaises et internationales. "À compter de 2016, j’ai couvert sur le terrain de nombreux évènements sociaux en France et suis depuis plusieurs années l’affaire Julian Assange".
📰 https://www.off-investigation.fr/julian-assange-heros-persecute-journalisme-en-danger/
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3- ♟ L'extradition de Julian Assange aura d'énormes répercussions sur les droits de l'homme et la liberté de la presse dans le monde entier
Assange n'a été condamné pour aucun crime, mais incarcéré uniquement pour avoir acquis et publié des centaines de milliers de documents classifiés, qui ont révélé la criminalité de l'État américain.
Par Charlie Jaay, le 12 février 2024, Left Foot Forward
Les 20 et 21 février, la Cour royale de justice de Londres entendra la nouvelle demande d'appel de Julian Assange contre son extradition vers les États-Unis, où il risque l'emprisonnement à vie dans une prison de haute sécurité. Il s'agit de son ultime chance d'empêcher l'extradition devant les tribunaux britanniques, ce qui aurait des conséquences considérables non seulement pour lui, mais aussi pour les droits de l'homme et la liberté de la presse dans le monde entier.
Le journaliste primé Julian Assange, fondateur du site de divulgation WikiLeaks, est derrière les barreaux de la prison londonienne de Belmarsh depuis 2019. Surnommée autrefois le Guantanamo britannique parce que les étrangers y étaient détenus sans être officiellement inculpés, cette prison de très haute sécurité accueille les criminels les plus dangereux du pays : violeurs en série, barons de la drogue, meurtriers et personnes purgeant des peines pour des crimes liés au terrorisme.
Assange ne fait l'objet d'aucune condamnation. Il est uniquement incarcéré pour avoir acquis et publié des centaines de milliers de documents classifiés, qui ont mis en lumière la criminalité de l'État américain. Ces derniers ont été transmis à WikiLeaks en 2010 par Chelsea Manning, ancienne analyste du renseignement de l'armée américaine, et portaient sur le traitement abusif et la torture des détenus à Guantanamo Bay, ainsi que sur les actions illégales de l'armée et des agences de renseignement des États-Unis durant les guerres en Afghanistan et en Irak, et comprenaient des informations sur la mort de milliers de civils.
Iraq Body Count recense les décès de civils victimes de violences, résultant de l'intervention militaire de 2003 en Irak. Cette organisation a collaboré avec WikiLeaks et divers médias pour publier ces registres de la guerre en Irak (Iraq War Logs), qui mettent à nu l'ampleur et l'impact de la guerre et montrent que les abus et la torture sont monnaie courante.
"Julian Assange est le journaliste le plus important de notre génération, non seulement en raison de ses révélations, mais aussi parce qu'avec WikiLeaks, il a fait progresser la profession elle-même et renforcé sa capacité à servir l'intérêt général", déclare Hamit Dardagan, cofondateur d'Iraq Body Count.
Pour l'Irak, cela signifie que quelque 15 000 morts violentes de civils irakiens, connues de l'armée américaine mais cachées au public, ont pu être révélées. Non seulement sous la forme de simples statistiques, mais aussi en précisant comment, quand, où et, dans de nombreux cas par qui, ils ont été tués. Et parfois aussi, en fournissant des détails permettant de les identifier, y compris leur nom - un point non négligeable alors que tant de familles irakiennes recherchent aujourd'hui encore désespérément leurs proches portés disparus."
Dardagan ajoute :
"Le fait qu'un tel journaliste soit enfermé dans une prison de haute sécurité montre une fois de plus qui représente la véritable menace pour la liberté, y compris la liberté de pensée".
Le gouvernement américain a fait valoir que la fuite contenait des informations sensibles, y compris les crimes de guerre eux-mêmes, et a donc soumis une demande d'extradition au gouvernement britannique en 2019. S'il est extradé vers les États-Unis, Assange sera jugé pour avoir violé la loi sur l'espionnage de 1917, parce qu'il a reçu et publié des documents classifiés, et il risque jusqu'à 175 ans dans une prison de haute sécurité.
Le fait d'avoir été au centre de batailles juridiques pendant plus de dix ans a des répercussions sur sa santé. En 2021, après que plus de 100 médecins ont exprimé leur inquiétude, exigeant la "fin (de sa) torture et de la négligence médicale", et son transfert de la prison de Belmarsh, son extradition a été bloquée par les tribunaux britanniques, en raison du risque "substantiel" de suicide. Cependant, en 2022, son extradition a été approuvée par la ministre de l'intérieur Priti Patel, donnant lieu à un recours juridique contre l'ordre d'extradition américain, en juin de l'année dernière, qui n'a pas été couronné de succès.
Richard Burgon, député travailliste de Leeds East, a coordonné un groupe de parlementaires issus de tous les partis qui ont appelé à plusieurs reprises à l'abandon des poursuites.
"Rappelons que c'est l'administration de Donald Trump qui a porté les accusations contre Mr Assange pour son rôle dans la publication de preuves de crimes de guerre, de corruption et de violations des droits de l'homme.
Nous ne pouvons tout simplement pas rester les bras croisés alors que des pratiques courantes en matière de journalisme - pratiques qui servent depuis longtemps l'intérêt public - sont criminalisées de cette manière. Le moment est venu de mettre un terme à ces poursuites, d'abandonner les accusations et de lui permettre de rentrer chez lui", explique Richard Burgon.
Les partisans de Julian Assange, dont le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture, Alice Jill Edwards, ont inlassablement appelé le gouvernement britannique à mettre un terme aux projets d'extradition. La Fédération internationale des journalistes a demandé sa libération immédiate, en lançant la campagne Free Assange Now ! , soutenue par les syndicats de journalistes du monde entier, notamment la National Union of Journalists (NUJ), qui a également organisé des manifestations en faveur de la libération d'Assange.
"La NUJ s'oppose aux efforts déployés par les États-Unis pour extrader Julian Assange et condamne la complicité du Royaume-Uni, qui a récemment approuvé son extradition. Les journalistes ont exprimé leur incrédulité quant aux ramifications plus larges pour le journalisme et la capacité à publier des articles d'intérêt public impliquant le gouvernement américain si leur poursuite acharnée se poursuit plus longtemps", déclare Michelle Stanistreet, secrétaire générale de la NUJ.
Selon Simon Crowther, conseiller juridique d'Amnesty International, la liberté d'expression est protégée par le droit international relatif aux droits de l'homme, et si le Royaume-Uni facilite cette extradition, il violerait les obligations qui lui incombent en vertu de ce droit.
"Assange est poursuivi pour avoir publié des documents classifiés, dans l'intérêt public, ce qui est le travail de tout journaliste et ce que celui-ci fait constamment sans être poursuivi pour espionnage pour autant, pas plus qu'il n'est arraché à un autre pays pour être traduit en justice", ajoute-t-il.
L'inculpation d'Assange au titre de la loi sur l'espionnage, pour avoir divulgué des informations d'intérêt public, est une attaque contre la possibilité pour les citoyens d'obtenir des informations véridiques. Si les États-Unis obtiennent gain de cause, un précédent juridique clair s'établira : en cas de publication d'informations classifiées, tout État pourra demander l'extradition de la personne qui les a publiées et la poursuivre en justice, où qu'elle se trouve dans le monde. Cela affectera toutes les salles de rédaction, les journalistes se voyant contraints de faire très attention à ce qu'ils publient ou non, et constituera une menace majeure pour le journalisme d'investigation et la liberté de la presse. Si les puissants ne peuvent être tenus de rendre des comptes, la démocratie s'en trouvera profondément menacée.
Crowther prévient également qu'Assange risque d'être soumis à des mesures administratives spéciales, souvent utilisées aux États-Unis pour limiter les contacts que les prisonniers dangereux peuvent avoir avec le monde extérieur.
" Le risque de torture et d'autres peines ou traitements cruels et dégradants est très réel. L'isolement cellulaire est fréquemment utilisé aux États-Unis, et ses implications sont largement sous-estimées par le public mondial. Lorsqu'une personne est placée en isolement prolongé, elle est brisée. Cela a des conséquences considérables et est très bien documenté", ajoute-t-il.
"Bien que le Royaume-Uni ait cherché à obtenir des États-Unis un accord diplomatique garantissant que Julian Assange ne serait pas soumis à l'une de ces mesures administratives spéciales en cas d'extradition, ces engagements ne sont malheureusement jamais juridiquement contraignants. Et même dans ce cas, cet accord diplomatique stipule qu'à moins que les circonstances ne changent, Julian Assange continue de représenter un risque pour les informations confidentielles", explique Crowther.
"Notre gouvernement a été complice. Il l'a validée, et Amnesty affirme que le Royaume-Uni viole ses obligations en matière de droits de l'homme si Assange est extradé. Le Royaume-Uni a une obligation internationale claire de ne pas envoyer des individus vers des pays où ils risquent d'être torturés ou de subir des traitements dégradants".
L'affaire Assange se trouve aujourd'hui à un stade critique, sa vie est en jeu. La mobilisation britannique se tiendra devant la Cour royale de justice de Londres, à 8 h 30, les 20 et 21 février.
Charlie Jaay est un journaliste indépendant s'intéressant particulièrement à l'environnement, aux droits de l'homme et aux libertés civiles.
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4- ♟ Amnesty International appelle à l'abandon des charges à l'approche d'une audience cruciale pour Julian Assange
"Le risque pour les éditeurs et les journalistes d'investigation du monde entier est en jeu. Si Julian Assange est envoyé aux États-Unis et y est poursuivi, la liberté des médias dans le monde sera également mise à rude épreuve."

Par Brett Wilkins, le 13 février 2024, Common Dreams
Amnesty International a renouvelé son appel au gouvernement américain pour qu'il abandonne les poursuites contre l'éditeur de WikiLeaks Julian Assange, dont la dernière audience devant la Haute Cour du Royaume-Uni concernant son extradition vers les États-Unis approche à grands pas.
L'audience des 20 et 21 février devant la Haute Cour déterminera si le journaliste australien - incarcéré à la prison londonienne de Belmarsh depuis avril 2019 - a épuisé tous ses recours au Royaume-Uni et sera extradé vers les États-Unis, où il est accusé d'avoir violé la loi sur l'espionnage de 1917 ainsi que la loi sur la fraude et les abus informatiques (Computer Fraud and Abuse Act) pour avoir publié des documents et des dossiers militaires américains classifiés sur WikiLeaks voici plus d'une dizaine d'années.
"Le risque pour les éditeurs et les journalistes d'investigation du monde entier est en suspens. Si Julian Assange est envoyé aux États-Unis et y est poursuivi, la liberté des médias dans le monde sera également mise à mal", a déclaré Julia Hall, spécialiste de la lutte contre le terrorisme et de la justice pénale en Europe au sein d'Amnesty International.
Ajoutant,
"Assange souffrira personnellement de ces accusations motivées par des considérations politiques et la communauté mondiale des médias sera informée qu'elle non plus n'est pas à l'abri. Le droit du public à être informé de ce que leurs gouvernements font en leur nom sera profondément compromis. Les États-Unis doivent abandonner les poursuites engagées contre Assange au titre de la loi sur l'espionnage et mettre fin à sa détention arbitraire au Royaume-Uni".
Parmi les documents publiés par WikiLeaks figurent les journaux de guerre de l'Afghanistan et de l'Irak, qui révèlent les crimes de guerre commis par les États-Unis et la coalition, dont un grand nombre ont été divulgués par la lanceuse d'alerte américaine Chelsea Manning. La plus célèbre de ces fuites est sans doute la vidéo dite Collateral Murder, qui montre des équipages d'hélicoptères d'attaque de l'armée américaine riant alors qu'ils abattent un groupe de civils irakiens, parmi lesquels se trouvaient des journalistes et des enfants.
Alors que les soldats et les commandants impliqués dans les documents publiés par WikiLeaks ont largement bénéficié de l'impunité, Manning a purgé sept ans de prison avant que sa peine ne soit commuée par le président américain sortant Barack Obama en 2017. Quant à Assange, il encourt jusqu'à 175 ans derrière les barreaux s'il est reconnu coupable de tous les chefs d'accusation retenus contre lui.
Selon le groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire, Assange a été arbitrairement privé de sa liberté depuis son arrestation en décembre 2010. Depuis lors, il a été assigné à résidence, confiné pendant sept ans à l'ambassade d'Équateur à Londres alors qu'il était protégé par l'administration de l'ancien président équatorien Rafael Correa, puis incarcéré à Belmarsh.
En 2019, Nils Melzer, alors rapporteur spécial des Nations unies sur la torture, a déclaré qu'Assange présentait "tous les symptômes typiques d'une exposition prolongée à la torture psychologique".
Dans le cadre de l'affaire Assange, un juge fédéral de New York, a condamné Joshua Schulte au début du mois à 40 ans de prison en partie pour avoir remis à WikiLeaks Vault 7, une série de documents détaillant les activités et les capacités de la CIA en matière de surveillance et de cyberguerre.
Lundi, la CIA - qui, sous l'administration Trump, envisageait d'assassiner Assange - a invoqué le privilège des secrets d'État pour tenter de bloquer une action en justice intentée par les avocats de l'éditeur. La plainte allègue que les agents de la CIA ont "violé de manière flagrante" les droits des avocats et des journalistes qui ont rendu visite à Assange à l'ambassade d'Équateur à Londres en procédant à des perquisitions et à des saisies anticonstitutionnelles de leurs appareils électroniques.
Le célèbre réalisateur américain Oliver Stone a publié une vidéo au cours du week-end pour attirer l'attention sur les manifestations du "Jour J" - comme les partisans de Julian Assange désignent son audience à venir - et sur le maintien de sa "détention illégale".
"Le monde a besoin d'être secouru, et Julian aussi. Il est l'un des nôtres. Il est plus que cela, il est le nous collectif. S'il tombe, c'est une partie de chacun d'entre nous qui tombe", a déclaré Oliver Stone.
À New York, l'activiste et satiriste politique Randy Credico, animateur de "Julian Assange : Countdown to Freedom" sur la radio WBAI et le Progressive Radio Network, copilotera des camions d'affichage avec des messages "Free Assange" jusqu'à l'audience de Londres, selonCounterPunch.
Pendant ce temps, en France, l'artiste russe Andrei Molodkin attire l'attention du monde entier, menaçant de détruire une collection d'œuvres d'artistes comptant des Picasso, Rembrandt et Andy Warhol qu'il a amassée si Julian Assange - qui souffre d'un grand nombre de problèmes de santé - mourait en prison.
Brett Wilkins est rédacteur de l'équipe de Common Dreams.
📰 https://www.commondreams.org/news/julian-assange-extradition
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5- ♟ Libérez Assange. Libérez la Palestine. Libérez votre esprit
Libérez le magicien maintenant ! Libérez les peuples de l'oppression du corps et de l'esprit. #FreePalestine
Par C.A. Matthews, le 13 février 2024, Substack, The Revolution Continues
Le 20 février 2024 est une date qui pourrait bien rester gravée dans les mémoires comme une véritable infamie.
L'éditeur de Wikileaks, Julian Assange, pourrait être extradé du Royaume-Uni vers les États-Unis à cette date ou le lendemain. Il serait transféré de Belmarsh, prison infernale, à une autre prison de ce type de l'autre côté de l'Atlantique. Il serait enfermé toujours plus loin des yeux indiscrets du public et loin des bras aimants de sa femme, de ses enfants, de son père et de son frère, qui se sont tant battus pour sa libération. Et pour quelle raison ? Tout simplement pour avoir publié la vérité.
Pourquoi toute cette agitation autour d'un journaliste ? Ce n'est pas comme si c'était la fin du monde s'il mourait en prison, n'est-ce pas ? D'une certaine manière, ça l'est. Julian Assange est devenu une icône mondiale de la liberté d'expression. Il est l'homme qui a défié le système corrompu, l'establishment ou le statu quo. Il a publié sans crainte la vidéo Collateral Murder, révélant à quel point nos gouvernants sont crapuleux et ne se soucient guère des civils tués dans leurs guerres sans fin pour le pétrole, guerres dans lesquelles ils nous entraînent d'abord par la ruse et les mensonges.
On ne saurait trop insister sur la rage et la volonté de vengeance que la révélation de la vérité par Assange a suscitées au sein du pouvoir en place. Les mots ne suffisent pas à exprimer à quel point leur peur de voir Assange récidiver est immense. Il exposerait encore et encore leur cruauté sanguinaire au public, et d'autres journalistes et publications suivraient le mouvement et, en un rien de temps, le monde entier descendrait dans la rue pour réclamer justice. Les travailleurs vireraient ces scélérats qui nous gouvernent de leurs hôtels particuliers, les tireraient de leurs yachts de luxe et les conduiraient au goulag ou sur les marches de la guillotine.
Oui, Julian Assange et ce qu'il représente - la liberté d'expression - représentent un tel danger pour le pouvoir en place.
Le vrai journalisme n'est pas ce que veulent nos gouvernants. Il serait préférable que les travailleurs que nous sommes restent dans l'ignorance des transgressions qu'ils commettent régulièrement en notre nom dans un bon nombre de conflits militaires, de guerres par procuration ou de génocides à travers le monde. Assange doit donc être tenu pour responsable d'avoir commis le crime de journalisme - le vrai journalisme et non simplement de la propagande véhiculée par CNN et d'autres grands médias, réputés pour leurs pratiques, et qui sont même aujourd'hui dénoncés par leur propre personnel.
Appelez dès aujourd'hui votre représentant et vos sénateurs au (202) 244-3121 et demandez-leur de parrainer la résolution 934 afin d'abandonner les poursuites et de libérer Julian Assange. La liberté d'expression ne doit pas disparaître avec nos espoirs de démocratie.
#FreeAssange
Si Assange était libre aujourd'hui, je suis convaincu qu'il publierait des articles exposant les machinations génocidaires du régime de Netanyahou en Israël. Il dénoncerait la complicité de Biden et du gouvernement américain dans la fourniture d'armes pour alimenter le génocide à Gaza. Il n'y a aucun doute à ce sujet. Assange nous a imploré d'apprendre tout ce que nous pouvions sur ce qui est fait en notre nom par nos soi-disant élus. Une procédure judiciaire devant la Cour internationale de justice de La Haye n'aurait jamais dû être nécessaire pour déterminer qu'Israël a "plausiblement commis des actes de génocide". Une presse libre aurait dû crier ce fait dès le premier jour.
Dans un monde où les journalistes feraient leur travail plutôt que d'obéir aux ordres de la CIA et des gouvernements corrompus, les intentions du régime sioniste à l'égard du peuple palestinien auraient été plus qu'évidentes dès le départ. Le message aurait été répété à maintes reprises. Au lieu de cela, les publications indépendantes et les journalistes qui tentent de faire connaître le point de vue des Palestiniens sont contraints de recourir à la collecte de fonds pour continuer à fonctionner. Ils doivent se battre pour obtenir de la bande passante et de l'espace sur les plateformes sociales, alors que le ministère de la Vérité trouve des excuses pour les mettre hors ligne afin que sa propagande puisse continuer à brouiller les pistes et à semer la confusion dans l'esprit du public.
La grande majorité des Américains est convaincue qu'Israël est truffé de criminels de guerre qui se livrent à un génocide à l'encontre des Palestiniens. Cette opinion progresse à chaque sondage, en dépit de la propagande du gouvernement américain et de l'interprétation des médias mainstream. Il est étonnant de constater que la vérité finit par éclater, même lorsque des esprits malveillants s'efforcent de l'empêcher d'être révélée ! Sans une presse libre, ou un forum d'idées en ligne ouvert et des journalistes indépendants, l'histoire selon laquelle les Palestiniens sont les victimes de l'agression génocidaire d'Israël, et non l'inverse - les Israéliens d'éternelles "victimes des terroristes arabes" - n'aurait jamais pu parvenir aux oreilles du public.
La liberté d'expression, la liberté de la presse, la liberté des journalistes et des éditeurs indépendants de couvrir tous les aspects d'une histoire sont autant d'"armes" essentielles dans la lutte pour la protection des droits de l'homme des peuples indigènes partout sur la planète. Si le monde avait ignoré ce qui se passe à Gaza - véritable camp de concentration à ciel ouvert sous le feu des bombardements -, aurait-il massivement pris le parti de la cause palestinienne ? Les journalistes professionnels et les journalistes citoyens qui ont perdu leur vie pour cette cause doivent être admirés et leurs noms honorés par tous ceux qui accordent de l'importance à l'honnêteté.
Aux journalistes tués à Gaza qui ont gardé les yeux ouverts pour que le monde puisse se rendre compte des crimes d'Israël : https://therealnews.com/a-tribute-to-our-slain-journalist-colleagues-in-gaza
Repose en paix Hind Rajab, âgée de 6 ans, et tous les enfants innocents de Gaza massacrés sauvagement par les forces de défense israéliennes financées par les États-Unis. https://www.commondreams.org/news/hind-rajab
#FreePalestine
Il est difficile de rester optimiste en ces temps obscurs. Le vrai journalisme est présenté par le régime américain comme un crime passible de la prison à vie. Naître Palestinien à Gaza ou en Cisjordanie est considéré comme un crime passible de la peine de mort par le régime israélien. Y a-t-il une lumière au bout de ce tunnel sinistre ?
Qui sait ? En attendant, nous devons garder le moral et nous concentrer sur les tâches importantes à accomplir. Une connaissance en ligne a mentionné à quel point il était difficile de répéter les mêmes faits et histoires aux autres afin de les convaincre de la véracité du génocide qui se déroule à Gaza. Je partage cet avis. C'est difficile. Extrêmement ardu.
En début de semaine, je suis restée sans mots, incapable de penser clairement, épuisé et le cerveau confus, à l'image de l'air brumeux de ce matin. Je ne savais pas quoi écrire pour mon billet hebdomadaire. C'est alors que des camarades activistes m'ont encouragée à écrire un poème pour une réunion de poésie inspirée par la Palestine dans un café local.
Écrire m'a aidée à dissiper mon brouillard mental. Le simple fait de faire quelque chose de différent avec des mots peut aider votre esprit à se réinitialiser et à se recentrer. Au lieu de chercher à aligner des phrases cohérentes, je me suis concentrée sur ce que je ressentais à propos de ce qui se passait à Gaza. Un style d'écriture différent a permis de dissiper la confusion. J'ai découvert que je pouvais à nouveau écrire en prose après avoir écrit un poème pour partager ce qui me meurtrissait au plus profond de mon cœur.
Voici un poème écrit lorsque j'ai réalisé à quel point mon récent rituel quotidien était lié au chagrin et à la honte que je ressentais pour les personnes prises au piège à Gaza :
Poussière de Gaza
L'indice de qualité de l'air est plus élevé qu'il ne l'a jamais été
Le nombre de particules est des plus alarmant
Aucun incendie ne sévit actuellement en Californie ou dans l'ouest du pays
Serait-ce de la poussière en provenance de Gaza ?
Je respire un air saturé particules en suspension, je tousse et m'époumone.
Où est passé tout l'oxygène ?
A-t-il été brûlé dans les milliers d'incendies provoqués par les bombardements israéliens ?
La poussière de Gaza pourrait-elle en être à l'origine ?
On dit que rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme
que nous respirons le même air qu'exhalaient jadis les pharaons et les rois
que chaque grain de suie collé aux vitres de nos voitures a son origine.
Ces particules grises pourraient-elles être de la poussière de Gaza ?
Chaque matin, je consulte l'indice de qualité de l'air
Chaque jour depuis le mois d'octobre, il se situe entre modéré et malsain.
Une fois par jour, je prends mon médicament contre l'asthme et je me dis...
Est-ce que je respire de la poussière de Gaza ?
Quel air les habitants de Gaza respirent-ils ?
Quel air respirent les sionistes ?
Ne respirons-nous pas tous le même air ?
Pourquoi les Américains permettent-ils à Tsahal de désintégrer un peuple entier, de le réduire en poussière ?
Pour notre pénitence de ce mercredi des Cendres, nous devrions être couverts de poussière de Gaza
Oui, je sais que ce poème ne me fera pas remporter de concours de poésie, mais il m'a permis d'accepter la frustration, la tristesse et la colère que je ressens. Et écrire des poèmes inspirés par la Palestine a sans doute aidé d'autres participants à cette lecture de poèmes à surmonter, eux aussi, leurs émotions les plus oppressantes.
Quel que soit le sort qui nous attend, nous devons libérer nos esprits et rester vigilants pour qu'ils restent libres. Nous sommes les témoins vivants des événements qui secouent nos communautés ici et là-bas, à Gaza. Nous nous devons à nous-mêmes et à la postérité de ne jamais oublier, de ne jamais leur permettre d'oublier, de ne jamais laisser un génocide se produire à nouveau, pour qui que ce soit, où que ce soit.
#FreeYourMind (Et n'ayez pas peur de dire au monde ce que vous voyez et ressentez. Vos points de vue sont fondés et essentiels. L'histoire les chérira).
ndr : Voir aussi en fin de l'article original, les nombreux liens judicieux .
📰 Lien de l'article original :
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6- ♟ À l'approche du Jour J, voulez-vous vraiment être du mauvais côté de l'histoire ?
Le point de vue de Canary sur Julian Assange

Par The Canary, le 13 février 2024
La semaine prochaine, le journaliste emprisonné Julian Assange sera entendu en appel à Londres. Il pourrait s'agir de l'ultime tentative pour empêcher qu'il ne soit envoyé aux États-Unis, où il encourt 175 ans de prison. C'est pourquoi les citoyens se mobilisent déjà pour lui témoigner leur solidarité et leur soutien. Et si vous ne comptez pas vous mobiliser, demandez-vous de quel côté de l'histoire vous allez vous situer.
La dernière chance d'Assange ?
Comme l'a écrit le groupe de campagne Free Assange :
La Haute Cour du Royaume-Uni a confirmé qu'une audience publique aura lieu les 20 et 21 février 2024. Cette audience de deux jours pourrait être la dernière chance pour Julian Assange d'empêcher son extradition vers les États-Unis. S'il est extradé, Julian Assange risque une peine de 175 ans de prison pour avoir exposé les crimes de guerre commis par les États-Unis lors des guerres d'Afghanistan et d'Irak.
Le Canary a largement documenté le cas d'Assange, incarcéré dans la prison de haute sécurité de Belmarsh depuis son arrestation à la demande des autorités américaines, le 11 avril 2019. Depuis lors, il est devenu évident que ses accusations, son incarcération et la tentative d'extradition de l'État américain à son encontre relèvent non seulement d'une chasse aux sorcières et de violations des droits de l'homme, mais aussi d'une tentative de créer un précédent en ce qui concerne la liberté des journalistes et des éditeurs.
De multiples rebondissements
L'affaire Assange a connu de multiples rebondissements :
En 2017, Dana Rohrabacher, membre du Congrès américain, a rencontré le fondateur de WikiLeaks à l'ambassade d'Équateur à Londres, pour lui proposer un accord. Robinson était présente à la réunion. Rohrabacher voulait qu'Assange fournisse la preuve que la Russie n'avait pas piraté les courriels du Comité national démocrate. À l'époque, le président Donald Trump faisait l'objet d'une enquête dans le cadre de l'enquête Mueller sur l'ingérence présumée de la Russie dans l'élection de 2016. Rohrabacher a dit à Assange que s'il acceptait de fournir les preuves, Trump lui accorderait une grâce ou une protection contre l'extradition. Mais Assange n'était pas prêt à révéler le nom de l'auteur de la fuite. Un acte d'accusation a suivi.
Le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture, Nils Melzer, a conclu en 2019 qu'Assange avait été soumis à la "torture".
En mai 2020, le Canary a publié des détails sur les fameuses mesures administratives spéciales (SAM) auxquelles Assange serait probablement soumis s'il était extradé vers les États-Unis. Selon un rapport, les SAM constituent "le coin le plus sombre du système pénitentiaire fédéral américain, combinant brutalité et isolement des unités de sécurité maximale avec des restrictions supplémentaires interdisant aux individus presque tout lien avec le monde humain".
En janvier 2021, un juge a décidé que l'extradition d'Assange était refusée pour des raisons de santé et en raison du risque élevé de suicide.
Entre-temps, en octobre 2021, on a appris que la CIA prévoyait de kidnapper et d'assassiner Assange à Londres.
En décembre 2021, les États-Unis ont fait appel de la décision d'extradition, offrant l'"assurance" que, selon l'avocat d'Assange, les autorités américaines ne le "placeraient pas sous SAM à moins de juger qu'il le mérite plus tard". Le magistrat a alors décidé que l'extradition pourrait finalement avoir lieu, après approbation du ministre de l'intérieur.
En juin 2022, Priti Patel, alors ministre de l'intérieur du Royaume-Uni, a accepté qu'Assange soit extradé.
D'autres appels de l'équipe juridique d'Assange ont suivi, sans succès.
Sur les 18 chefs d'accusation retenus contre lui, l'un concerne simplement les mesures prises par un journaliste pour protéger une source, en l'occurrence Chelsea Manning. Les autres charges portent simplement sur la réception et la publication d'informations et violent donc la liberté d'expression d'un journaliste.
Manifestation de solidarité avec Assange
Aujourd'hui, Assange fait face à sa dernière chance d'empêcher l'extradition. C'est pourquoi des centaines de personnes le soutiendront en manifestant devant les Royal Courts of Justice pendant l'audience.
Les mardi 20 et mercredi 21 février, celles-ci se rassembleront à partir de 8h30. Elles seront les témoins de ce que Free Assange qualifie
"d'étape décisive dans les appels de Mr Assange [qui] déterminera l'une des deux issues suivantes : Mr Assange aura-t-il d'autres occasions de plaider sa cause devant les tribunaux nationaux (britanniques), ou aura-t-il épuisé tous les recours sans possibilité d'appel supplémentaire au Royaume-Uni et entrera-t-il donc dans le processus d'extradition. Une requête devant la Cour européenne des droits de l'homme reste possible."
La campagne pour la liberté est soutenue par Amnesty International, la National Union of Journalists, Reporters sans frontières et pratiquement tous les syndicats de défense des droits civils, de la liberté de la presse et des journalistes dans le monde.
Comme l'a déclaré John Rees, de la campagne "Free Assange",
cette affaire est la plus importante pour la liberté de la presse du 21ème siècle - nous devons nous assurer que nous ne perdons aucune liberté durement acquise.
De quel côté de l'histoire êtes-vous ?
Mais c'est peut-être sa femme Stella qui a le mieux résumé la situation.
Les quatre dernières années et demie ont fait payer un lourd tribut à Julian et à sa famille, y compris à nos deux jeunes fils.
Sa santé mentale et son état physique se sont considérablement détériorés.
Avec la myriade de preuves qui ont été révélées depuis l'audience initiale en 2019, telles que la violation du privilège juridique et les rapports selon lesquels de hauts fonctionnaires américains étaient impliqués dans la formulation de complots d'assassinat contre mon mari, il est indéniable qu'un procès équitable, sans parler de la sécurité de Julian sur le sol américain, est impossible s'il devait être extradé. La persécution de ce journaliste et éditeur innocent doit cesser.
Pour en savoir plus sur les journées d'action, cliquez ici.
Cette affaire ne concerne pas uniquement Assange. La liberté de tous les journalistes et éditeurs indépendants qui ont le courage de défier les entreprises, les capitalismes et les puissances coloniales est en jeu. Se taire aujourd'hui, c'est se placer du mauvais côté de l'histoire.
📰 https://www.thecanary.co/editorial/2024/02/13/assange-day-x
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7- ♟ Quand la justice ouverte & transparente est une option facultative
J'avais supposé que Julian Assange, dont l'affaire sera prochainement jugée par les tribunaux britanniques, était tout désigné pour être le prisonnier de conscience australien de la décennie, mais Michael Pezzullo*, qui semble avoir été condamné par une Chambre à huis clos australienne, sans que le public ne dispose d'une explication satisfaisante de ce qu'il aurait fait de mal, fait une entrée tardive dans la compétition.
[…]
En somme, l'Australie se prépare à hausser les épaules et à feindre la déception si les tribunaux britanniques confirment l'extradition. Elle n'épuisera pas une once de son crédit moral auprès du Royaume-Uni (sur des questions telles que le pacte AUKUS) en demandant au ministre d'exercer son pouvoir discrétionnaire pour empêcher l'extradition. Elle ne mettra pas non plus à l'épreuve la patience des États-Unis et n'agira pas comme si ses alliés et amis lui devaient quoi que ce soit.
Si (les autorités australiennes supposent que c'est le cas) Assange est condamné, on peut s'attendre à ce qu'Albanese annonce qu'il négocie (en fait, il le fait déjà) avec les États-Unis pour permettre à Assange de purger la majeure partie de sa peine en Australie, ce qui serait une sorte de faveur à notre égard. Albanese prétendra alors avoir défendu nos intérêts.
[…]
Pourquoi les Australiens, ou les gouvernements australiens, auraient-ils une plus grande confiance dans le système américain que la plupart des Américains ?
Michael Pezzullo, est un ancien fonctionnaire australien qui a été secrétaire du ministère de l'Intérieur de 2017 à 2023. Avant ce poste, il avait occupé celui de secrétaire du ministère de l'Immigration et de la Protection des frontières après avoir été le directeur général du Service australien des douanes et de la protection des frontières.
Par Jack Waterford, le 13 février2024, Pearls & Irritations
Pezzullo est peut-être un candidat improbable pour être le prisonnier sans nom, dans une cellule sans numéro. En effet, il a été l'un des architectes et des défenseurs de certaines des législations australiennes les plus oppressives en matière de sécurité nationale, qui ont conduit des Australiens en prison sans que le public ne soit autorisé à le savoir, ni à en connaître les raisons. Ces lois ont également permis des poursuites pénales dans le cadre desquelles des personnes pouvaient être inculpées dans des tribunaux secrets sur la base de preuves qu'elles ne pouvaient ni voir ni examiner en contre-interrogatoire. Pezzullo a également contribué à la mise en place d'un système honteux et irresponsable de camps de concentration à l'étranger pour ceux qui cherchaient la protection de l'Australie contre la guerre, et qui opéraient avec une cruauté consciente et un manque de respect pour les droits de l'homme. Ce n'est pas sa faute (ni celle du gouvernement travailliste actuel) si une partie de ce régime a été rejetée par les tribunaux.
Cela pourrait suggérer un karma spécial dans la condamnation publique de Pezzullo pour des délits que le public n'est pas autorisé à connaître. Je ne pense pas qu'il mérite une considération particulière ou de la pitié si ce qui est allégué contre lui est vrai. Mais quelle que soit sa conception et sa compréhension très limitées des droits de l'homme, il est un Australien et a droit à une justice australienne, transparente et responsable, et dont les explications s'appuient sur des faits et des lois. Si cela n'a pas été le cas, il est, à mon sens, victime d'une terrible injustice. Il en va de même pour l'ensemble de la communauté.
En affirmant qu'il a été victime d'un détournement de fonds, je ne mets pas en cause l'ancienne commissaire à la fonction publique, Lynelle Briggs, qui a mené une enquête sur sa conduite, ni les procédures qu'elle a utilisées. Ce n'est pas sa faute si le gouvernement et la Commission du service public ont jeté un voile sur l'ensemble de la procédure, en se contentant d'une déclaration peu informative résumant les violations présumées du code de conduite du service public.
En raison de cette chape, nous ne connaissons pas les faits, nous ne connaissons pas leur poids, ni les autres considérations prises en compte, et nous ne connaissons pas les facteurs dont Mme Briggs a tenu compte pour prendre sa décision. Nous ne pouvons pas porter de jugement sur la juge, dont le jugement vaut toujours autant que celui de l'accusé.
En effet, nous n'avons qu'une idée très vague du contenu de son enquête, si ce n'est qu'elle aurait porté sur une relation clandestine et, à première vue, inappropriée entre Pezzullo et un lobbyiste ayant des liens avec le parti libéral, dont on dit qu'il avait un fil conducteur jusqu'à l'oreille de Malcolm Turnbull, si l'on peut imaginer cela.
Paddy Gourley, un collègue et ami qui connaît bien les enquêtes du service public, a demandé une copie du rapport Briggs en vertu de la loi sur la liberté de l'information. Cette demande a été refusée dans son intégralité. Kylie Barber, la représentante de la commission de la fonction publique, affirme qu'aucune divulgation n'est possible parce que tout est exempté. Cela pourrait nuire aux enquêtes sur les violations de la loi, révéler l'existence ou l'identité de sources d'information confidentielles et peut-être mettre en danger leur sécurité. Elle pourrait impliquer la divulgation de documents transmis à Mme Briggs à titre confidentiel, dans des circonstances où l'abus de confiance pourrait donner lieu à une action en dommages-intérêts. Certains de ces documents seraient couverts par le secret professionnel et concerneraient des conseils donnés par des avocats extérieurs à un service gouvernemental (pas nécessairement le ministère de l'intérieur).
Elle a également affirmé que la divulgation "porterait ou pourrait raisonnablement porter atteinte à la sécurité, à la défense ou aux relations internationales du Commonwealth".
Existe-t-il une enquête secrète de la NACC sur Pezzullo ?
D'après ce qui a été révélé publiquement par le premier ministre ou la commission, il n'est pas du tout évident de savoir à quoi le décideur peut bien faire référence. Le rapport des médias dans les anciens journaux de Fairfax qui a déclenché le limogeage ne semble pas impliquer de matériel secret de défense ou d'affaires étrangères, ni quoi que ce soit à première vue impliquant des techniques d'enquête policière.
Bien que je puisse imaginer une conga line (ndr : "chaîne" ou "serpent" de personnes appelée "trenino" (petit train)) de personnes prêtes à dénoncer Pezzullo pour un certain nombre de griefs, réels ou imaginaires, je ne vois pas comment ces dernières pourraient fonder des obligations de confiance équitables, en particulier dans des circonstances où, parce que Pezzullo a disparu, il n'y a pas de perspective de représailles.
Je soupçonne qu'une déclaration soigneusement formulée, mais délibérément non informative, tente de dissimuler l'existence d'une enquête secrète en cours de la Commission nationale anticorruption sur des questions touchant à tout ou partie des allégations formulées à l'encontre de Pezzullo. La correspondance électronique secrète (sur un compte crypté) pourrait-elle provenir d'un membre de la NACC et être adressée aux journalistes ? Ces derniers se sont efforcés de souligner que la piste des courriels avait été obtenue à l'origine par des moyens légaux.
Au début de l'année dernière, un membre imprudent de l'AFP a fait référence à une enquête sur la passation d'un contrat avec le ministère de l'Intérieur pour des services destinés à nos camps de concentration. Le nom de Pezzullo n'a pas été mentionné, et il n'a pas été suggéré que l'enquête le concernait. Mais on n'a plus entendu parler d'une telle enquête, qui aurait pu aboutir au CNAC. Le fait qu'une partie de la brève description des conclusions de Mme Briggs ait suggéré qu'il avait tiré un avantage personnel d'un acte qu'il avait commis pourrait, bien que ce ne soit pas nécessairement le cas, y faire référence.
Mais il s'agit là d'une pure spéculation, et il peut y avoir des explications complètement différentes. Pour Pezzullo, l'absence de rapport public, le fait que les infractions présumées au code de conduite n'aient pas été précisées et l'absence d'explication des conclusions signifient que les gens peuvent tirer les pires conclusions possibles de conclusions superficiellement accablantes.
Mais Pezzullo n'est pas le seul à avoir un intérêt légitime à ce que les faits soient révélés. Le grand public a le droit de savoir. D'autant plus que le service public est en piètre estime, que les changements et les "réformes" sont peu convaincants depuis l'avènement du gouvernement travailliste et que le premier ministre et le procureur général, Mark Dreyfus, sont devenus des champions du secret, du manque de transparence et de l'absence de responsabilité à la hauteur de Scott Morrison et de son gouvernement. Malgré toutes les promesses et tous les faux-semblants.
On peut également le constater avec les procédures disciplinaires engagées contre des fonctionnaires à la suite de la commission royale Robodebt. Elle a progressé si lentement qu'elle pourrait, comme l'enquête Brereton sur les crimes de guerre, devoir être mise de côté parce que trop de temps s'est écoulé depuis que la commission royale a rendu son rapport. Seules des informations minimales sont communiquées, et les parties qui ont le plus intérêt à savoir ce qui s'est passé - les victimes et le public - restent dans l'ignorance la plus totale. Et ce, soi-disant, pour protéger la vie privée des fonctionnaires qui n'ont eu aucun scrupule à détruire la vie privée de quiconque se plaignait du traitement de la commission Robodebt.
Ce qui se profile, ce n'est pas que la justice soit rendue, mais que le ménage soit fait pour mettre sous le tapis les saletés des dirigeants de la fonction publique. La nouvelle commission du service public est l'ennemie de l'intérêt public, des fonctionnaires honnêtes, du service public et de la gestion publique en général.
Pendant ce temps, Julian Assange est à l'isolement dans une prison britannique, dans l'attente d'une décision judiciaire sur une exigence américaine d'extradition pour faire face à ce qui est, en fait, des accusations d'espionnage et de trahison. La décision est attendue prochainement, et peu de gens s'attendent à ce que la demande d'extradition soit rejetée.
Albanese a déclaré qu'Assange avait été enfermé assez longtemps, mais des communiqués occasionnels annoncent qu'il n'a pas réussi à persuader les Américains d'abandonner leurs poursuites. Cela semble mettre fin à l'affaire en ce qui concerne Albanese, bien qu'en vérité il y ait bien des choses, en poussant ses demandes sur la Grande-Bretagne et les États-Unis, qui auraient des chances d'aboutir si seulement le gouvernement faisait preuve d'un quelconque engagement envers ses citoyens. Une fois de plus, l'Australie est trop timorée pour faire valoir ses intérêts, surtout pas de la manière dont pratiquement tous les autres pays l'ont fait lorsque les États-Unis détenaient leurs ressortissants à Guantanamo Bay. Nous réservons nos mots durs à la Chine.
Les efforts diplomatiques et juridiques de l'Australie en faveur d'Assange ont semblé tièdes et désultoires. L'indifférence de l'establishment du renseignement (une filiale à 100 % de l'establishment américain, bien que plus zélée dans les intérêts américains) est particulièrement remarquable.
Beaucoup, y compris des hommes politiques travaillistes, ne seraient pas mécontents si Assange était extradé et jugé aux États-Unis. Certains ont été effrayés par les révélations d'Assange sur leurs propres relations avec les espions américains, y compris les ragots vicieux sur leurs collègues australiens.
En somme, l'Australie se prépare à hausser les épaules et à feindre la déception si les tribunaux britanniques confirment l'extradition. Elle n'épuisera pas une once de son crédit moral auprès du Royaume-Uni (sur des questions telles que le pacte AUKUS) en demandant au ministre d'exercer son pouvoir discrétionnaire pour empêcher l'extradition. Elle ne mettra pas non plus à l'épreuve la patience des États-Unis et n'agira pas comme si ses alliés et amis lui devaient quoi que ce soit.
Si (les autorités australiennes supposent que c'est le cas) Assange est condamné, on peut s'attendre à ce qu'Albanese annonce qu'il négocie (en fait, il le fait déjà) avec les États-Unis pour permettre à Assange de purger la majeure partie de sa peine en Australie, ce qui serait une sorte de faveur à notre égard. Albanese prétendra alors avoir défendu nos intérêts.
Le gouvernement australien a fait preuve de mollesse à l'égard d'Assange
Après tout, Assange est coupable du péché suprême contre l'Alliance occidentale. Il a révélé des informations qui ont révélé que les dirigeants de l'Alliance, en particulier les États-Unis, étaient des menteurs et des imposteurs dans nombre de leurs aventures désastreuses en matière de politique étrangère, notamment en Irak et en Afghanistan. Il a utilisé des documents officiels américains qui lui ont été divulgués par une Américaine aujourd'hui graciée, pour montrer l'énorme fossé entre ce que les politiciens, les fonctionnaires et les chefs militaires ont dit et ce qu'ils ont fait en réalité.
À une époque, on a prétendu que certaines des informations divulguées par Assange lui avaient été communiquées par les services de renseignement russes dans le but de discréditer Hillary Clinton. Assange avait effectivement une dent contre Clinton, mais il semble désormais admis que les informations la concernant ne provenaient nullement des Russes.
Le principal problème des documents relatifs à Hillary Clinton était qu'ils étaient embarrassants puisqu'ils révélaient ses mensonges en toute connaissance de cause. Elle disait une chose en public et une autre en coulisses. Trump, qui faisait campagne contre elle, a adoré cela à l'époque et a parlé de décerner une sorte de médaille à Assange. Ces jours-ci, son chef de la CIA, Mike Pompeo (qui sera bientôt un partenaire commercial de Scott Morrison), a décrit l'opération Wikileaks d'Assange comme un service de renseignement étranger et a suggéré que ses activités exposaient certains associés afghans de l'Amérique à des représailles ultérieures.
Certains affirment avec complaisance que si Assange doit être considéré avant tout comme un journaliste plutôt que comme un agent hostile, il devrait être en mesure de l'établir lors d'un procès aux États-Unis. Mais cela ne tient pas compte du fait que les États-Unis ne lui permettraient pas de présenter des défenses contre les accusations qui pourraient prospérer ailleurs qu'en Amérique même.
Les États-Unis affirment que leurs lois s'appliquent dans le monde entier et qu'elles couvrent les activités d'un homme qui n'a jamais séjourné aux États-Unis, qui ne leur doit aucune allégeance et qui, de l'avis général, n'a commis aucune infraction aux lois du Royaume-Uni ou de son Australie natale. De nombreuses lois américaines sur l'espionnage, en particulier celles qui comportent un élément de trahison implicite, supposent que la personne accusée a le "devoir" de garder l'information secrète. (C'est une loi que l'illibéral Mark Dreyfus tente de faire passer en Australie). Assange n'a aucune obligation envers les États-Unis, excepté s'il est physiquement présent dans la juridiction, un état de fait qui ne se produira que s'il est amené menotté.
Quiconque a vu le traitement anarchique réservé par les États-Unis aux prisonniers de Guantanamo Bay, les poursuites secrètes engagées en vertu de la loi sur la sécurité nationale, et même les copies australiennes de ces lois, comprendra que lorsque les États-Unis se sentent menacés, la loi et les procédures régulières ne sont pas respectées. Un climat d'hystérie règne, même, ou surtout, de la part des procureurs. Les injustices sont souvent dissimulées par des procédures secrètes et non publiées, par une recherche consciente de juges imprégnés des bonnes idées et par un système judiciaire gravement perverti et corrompu par la politique pratique.
J'ai fort peu de sympathie pour Donald Trump dans ses problèmes juridiques. Peut-être que ses procès, dans les deux sens du terme, prouvent que personne, pas même un ancien président, n'est au-dessus de la loi. Mais Trump, et nombre de ses partisans actuels, proclament un manque total de confiance dans le système judiciaire américain et dans la manière dont de nombreux procureurs et juges opèrent.
À l'inverse, de nombreux démocrates méprisent ouvertement l'intégrité de la Cour suprême. Et demandez à n'importe quel Afro-Américain ce qu'il pense des rouages de la justice.
Pourquoi les Australiens, ou les gouvernements australiens, auraient-ils une plus grande confiance dans le système américain que la plupart des Américains ?
John Waterford AM, mieux connu sous le nom de Jack Waterford, est un journaliste et commentateur australien.
📰 https://johnmenadue.com/when-open-justice-is-an-optional-ingredient/
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8- ♟ La liberté de la presse mondiale est menacée par le retour de Julian Assange devant la justice britannique, où il risque d'être extradé vers les États-Unis
Par Amnesty International, le 13 février 2024
À la veille de la prochaine audience de Julian Assange devant les tribunaux britanniques en vue de son éventuelle extradition vers les États-Unis, Amnesty International réitère ses inquiétudes quant au risque de graves violations des droits humains en cas d'extradition et met en garde contre un profond "effet paralysant" sur la liberté de la presse dans le monde.
"Le risque pour les éditeurs et les journalistes d'investigation du monde entier est en suspens. Si Julian Assange est renvoyé aux États-Unis et y est poursuivi, la liberté des médias dans le monde sera également mise à l'épreuve", a déclaré Julia Hall, spécialiste de la lutte contre le terrorisme et de la justice pénale en Europe au sein d'Amnesty International.
Les États-Unis doivent abandonner les charges retenues contre Assange au titre de la loi sur l'espionnage et mettre fin à sa détention arbitraire au Royaume-Uni.
- Julia Hall, spécialiste de la lutte contre le terrorisme et de la justice pénale en Europe à Amnesty International.
"Assange souffrira personnellement de ces accusations motivées par des considérations politiques et la communauté mondiale des médias recevra l'avertissement d'être, elle aussi, menacée. Le droit du public à l'information sur ce que leurs gouvernements font en leur nom sera profondément compromis. Les États-Unis doivent abandonner les charges retenues contre Julian Assange au titre de la loi sur l'espionnage et mettre fin à sa détention arbitraire au Royaume-Uni."
Si Julian Assange perd l'autorisation de faire appel, il risque d'être extradé vers les États-Unis et poursuivi en vertu de l'Espionage Act de 1917, une loi datant de la guerre dont l'objectif n'a jamais été de cibler le travail légitime des éditeurs et des journalistes. Il encourt jusqu'à 175 ans de prison. Le chef d'accusation moins grave de fraude informatique pourrait lui valoir une peine maximale de cinq ans.
Assange serait également exposé à un risque élevé d'isolement prolongé dans une prison de haute sécurité. Bien que les États-Unis aient offert des "assurances diplomatiques" au Royaume-Uni, censées garantir sa sécurité en cas d'incarcération, les assurances des autorités comportent tellement de réserves qu'elles ne peuvent être considérées comme fiables.
"On ne peut pas se fier aux assurances des États-Unis. Les assurances douteuses selon lesquelles il sera bien traité dans une prison américaine sonnent creux si l'on considère que Julian Assange risque des dizaines d'années d'incarcération dans un système bien connu pour ses abus, notamment l'isolement cellulaire prolongé et la médiocrité des services de santé offerts aux détenus. Les États-Unis ne peuvent tout simplement pas garantir son bien-être et sa sécurité, comme ils ne le font pas non plus pour les centaines de milliers de personnes actuellement emprisonnées aux États-Unis", a déclaré Julia Hall.
Une menace mondiale pour la liberté des médias
Si Julian Assange est extradé, cela créera un dangereux précédent : le gouvernement américain pourrait demander l'extradition d'éditeurs et de journalistes du monde entier. D'autres pays pourraient suivre cet exemple.
"La publication par Julian Assange de documents qui lui ont été divulgués par des sources dans le cadre de son travail avec Wikileaks reflète celui des journalistes d'investigation. Ceux-ci exercent régulièrement les activités décrites dans l'acte d'accusation : communiquer avec des sources confidentielles, demander des éclaircissements ou des documents supplémentaires, et recevoir et diffuser des informations officielles et parfois classifiées", a déclaré Julia Hall.
Les organes d'information et de publication publient souvent, et à juste titre, des informations classifiées pour informer le public sur des questions de la plus haute importance. La publication d'informations d'intérêt public est une pierre angulaire de la liberté de la presse. Elle est également protégée par le droit international relatif aux droits de l'homme et ne devrait pas être criminalisée.
"Les efforts déployés par les États-Unis pour intimider et réduire au silence les journalistes d'investigation qui révèlent des fautes gouvernementales, telles que des crimes de guerre ou d'autres violations du droit international, doivent être stoppés net.
Les sources telles que les lanceurs d'alerte légitimes qui dénoncent les malversations gouvernementales aux journalistes et aux éditeurs doivent également être libres de partager des informations dans l'intérêt du public. Or, ces personnes seront beaucoup plus réticentes à le faire si Julian Assange est poursuivi pour s'être livré à un travail d'édition légitime", a déclaré le président de la Commission européenne."
Il n'y a pas que Julian Assange sur le banc des accusés. Réduire Assange au silence et d'autres seront bâillonnés.
- Julia Hall
"Cette affaire est un test pour les autorités américaines et britanniques quant à leur engagement envers les principes fondamentaux de la liberté des médias qui sous-tendent les droits à la liberté d'expression et le droit du public à l'information", a déclaré Julia Hall. Il n'y a pas que Julian Assange sur le banc des accusés. Silence Assange et d'autres seront bâillonnés", a déclaré Julia Hall.
Contexte :
La Haute Cour du Royaume-Uni a confirmé la tenue d'une audience de deux jours les 20 et 21 février 2024. L'issue de celle-ci déterminera si Julian Assange aura d'autres occasions de plaider sa cause devant les tribunaux britanniques ou s'il aura épuisé tous les recours au Royaume-Uni, ce qui conduira à la procédure d'extradition ou à une requête auprès de la Cour européenne des droits de l'homme.
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9- ♟ Les Américains nous riraient au nez si nous essayions de saisir un homme n'ayant enfreint aucune loi, comme c'est le cas avec Julian Assange. Et nous avons TOUS intérêt à le sauver
Par Peter Hitchens, le 14 février 2024, Mail Online
Même un caniche qui se respecte s'opposerait à la manière dont nous nous comportons actuellement vis-à-vis des États-Unis. Nous sommes sur le point de permettre au gouvernement américain de s'introduire dans notre pays et de s'emparer d'un homme n'ayant enfreint aucune loi britannique.
Une fois saisi, il y a toutes les chances qu'il soit enterré vivant dans un donjon fédéral, probablement jusqu'à ce qu'il meure. Nous ne permettrions pas à la Russie, à l'Arabie saoudite ou à la Turquie de se comporter de la sorte. Et c'est très bien ainsi. Tout porte à croire que si les circonstances étaient inversées, les Américains nous riraient au nez et refuseraient de nous livrer une telle personne.
La personne en question est le journaliste australien Julian Assange, dont l'organisation Wikileaks est haïe par les États-Unis pour les avoir mis dans l'embarras, et qui croupit dans la prison de haute sécurité de Belmarsh depuis qu'il a été arraché à l'ambassade d'Équateur en 2019.
Comme je l'ai demandé dans le Mail on Sunday voici près de quatre ans :
"Voulons-nous vraiment que la main d'une puissance étrangère puisse pénétrer à volonté dans notre territoire national et en arracher tous ceux qu'elle veut punir ? Sommes-nous encore un pays indépendant si nous permettons cela ?"
Vous aurez entendu beaucoup de choses négatives sur Mr Assange. Moi aussi, mais, bien que je ne sois pas d'accord avec lui sur la plupart des points politiques, j'ai découvert, en me documentant, qu'il avait en fait été victime de nombreuses calomnies ne tenant pas la route avec un examen approfondi.
Ignorer les allégations selon lesquelles il aurait imprudemment mis en danger la vie d'Américains en publiant des documents fournis par la lanceuse d'alerte de l'armée américaine, Chelsea Manning. Pour reprendre les termes de mon éminent collègue Andrew Neil, qui est loin d'être un gauchiste et qui, comme moi, s'oppose à l'extradition de Mr Assange, ces documents ont révélé : "Des crimes de guerre dissimulés. Des actes de torture. Des brutalités. La restitution et l'incarcération de suspects sans procédure régulière. La corruption des enquêtes visant à demander des comptes. La corruption de fonctionnaires étrangers pour qu'ils détournent le regard lorsque l'Amérique agit mal".
En résumé, Julian Assange a publié des faits scandaleux que les journalistes dignes de ce nom dans une société libre ont le droit - et en fait l'obligation - de divulguer, dans l'intérêt de cette société.
Mais Julian Assange a pris grand soin de retravailler les documents pour éviter que des personnes ne soient mises en danger, et aucune preuve n'a jamais été apportée qu'un tel préjudice ait été causé.
Il est intéressant de noter que Chelsea Manning a été graciée par le président Barack Obama. Son administration a également décidé de ne pas engager de poursuites à l'encontre de Mr Assange. Mais le président Donald Trump les a ensuite relancées.
Il s'agit là de la preuve la plus claire possible que les poursuites sont ouvertement politiques, et non criminelles. Comme l'indique le texte du traité d'extradition entre les États-Unis et le Royaume-Uni, en utilisant l'orthographe américaine du terme "infraction", dans un document portant les armoiries royales : (article 4, clause 1) :
"L'extradition ne sera pas accordée si le délit pour lequel l'extradition est demandée est un délit politique".
Il est tout à fait étonnant que les tribunaux britanniques et plus d'un ministre de l'intérieur aient été persuadés par des avocats de prétendre qu'il ne s'agit pas d'une telle infraction.
La loi en vertu de laquelle Mr Assange est poursuivi est la tristement célèbre loi américaine sur l'espionnage (Espionage Act), utilisée autrefois contre l'héroïque Daniel Ellsberg, qui a divulgué les Pentagon Papers au New York Times en 1971.
Ces documents montraient que l'administration de Lyndon Johnson avait systématiquement menti, non seulement au public mais aussi au Congrès, au sujet de la guerre du Viêt Nam (qui s'est avérée par la suite être un désastre insensé). La Maison Blanche de Nixon a réagi en ordonnant l'intrusion dans le cabinet du psychiatre d'Ellsberg dans l'espoir d'y trouver des documents qui pourraient être utilisés pour le salir.

C'est en partie grâce à ce comportement grotesque qu'un juge courageux a abandonné les poursuites. Ellsberg lui-même a fortement défendu Julian Assange jusqu'à sa mort en juin de l'année dernière, estimant qu'il y avait un parallèle étroit entre les deux affaires.
Il est intéressant de noter que les partisans de Mr Assange affirment qu'il a lui aussi fait l'objet d'une surveillance de la part de la CIA. À la lumière de ce qui est sans doute arrivé à Mr Ellsberg, cette affirmation est loin d'être impossible à croire.
Mais la semaine prochaine, il y a pour le moins un risque que le système judiciaire britannique se prononce contre Mr Assange et le livre docilement au gouvernement américain.
Mr Assange a demandé l'autorisation de faire appel des décisions du ministère de l'intérieur et de la justice, statuant que son extradition doit avoir lieu. En cas d'échec, il pourrait se retrouver sur la voie express d'une prison américaine de très haute sécurité.
Les autorités américaines ont fait valoir que le premier amendement américain, qui garantit la liberté d'expression, ne s'appliquait pas à Mr Assange. Mike Pompeo, alors directeur de la Central Intelligence Agency, a déclaré le 13 avril 2017 à propos de ce dernier et de ses collègues de WikiLeaks :
"Ils ont prétendu que les libertés du premier amendement américain les mettaient à l'abri de la justice. Ils l'ont peut-être cru, mais ils se sont trompés".
C'est en soi un aveu que cette affaire concerne véritablement la liberté d'expression. Et évidemment, c'est bien le cas. Si l'extradition a lieu, aucun journaliste non américain recevant des informations confidentielles sur les activités du gouvernement américain de la part d'un lanceur d'alerte ne sera plus jamais à l'abri d'être embarqué, menottes aux poignets, vers les États-Unis.
Il est essentiel pour l'honneur de ce pays que cela ne se produise pas. L'importance de cette affaire va bien au-delà de la personne de Mr Assange, de sa courageuse et inflexible épouse Stella et de ses jeunes enfants - qui ont enduré des années de stress et de souffrances dans l'attente de l'issue de cette affaire.

La question pour moi est de savoir si ce pays est un véritable pays souverain régi par ses propres lois ou un satellite servile, entretenant avec Washington DC la même relation que les États du Pacte de Varsovie entretenaient autrefois avec Moscou.
Mais ce n'est pas tout. Je vis et je travaille dans la capitale du pays qui a plus ou moins inventé la liberté. Nous avons encore à Londres l'une des plus grandes concentrations de médias indépendants au monde, des journaux qui ont une longue histoire d'opposition au gouvernement et d'examen critique des tribunaux et de la politique étrangère.
Pendant les guerres d'Irak et du Viêt Nam - et au cours de nombreuses poursuites effrayantes de personnes honorables poursuivies à tort pour avoir révélé des faits gênants sur l'État et ses actions - notre capitale a toujours été le théâtre de protestations bruyantes et massives.
Mais alors que le jour de la décision sur l'affaire Assange approche, le silence des médias est si grand qu'on pourrait entendre une souris éternuer. Il y a des exceptions. Dans un excellent article paru dans Prospect Magazine, l'ancien rédacteur en chef du Guardian, Alan Rusbridger, se demande si trop de personnes dans la vie publique britannique n'ont pas été séduites par le prestige supposé de nos services de sécurité et d'espionnage.
Il écrit : "Je n'oublierai jamais un éminent rédacteur en chef qui, au plus fort des révélations d'Edward Snowden, a écrit : "Si les services de sécurité insistent sur le fait que quelque chose est contraire à l'intérêt public, qui suis-je pour ne pas les croire ? En d'autres termes, faites confiance à l'État. S'il vous dit "sautez", votre rôle est de demander "jusqu'où ?"".
Bravo, Alan. Mais où sont les autres ? Patriote de droite, libéral mou ou radical de gauche, nous avons tous intérêt à sauver Julian Assange. Et nous disposons de quelques jours pour agir.
J'aimerais que certaines des voix les plus puissantes du journalisme britannique, telles que Charles Moore, Danny Finkelstein, Janice Turner et Matthew Parris, s'expriment à ce sujet. Il n'est jamais trop tard pour rejoindre une cause juste.
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10- ♟ Royaume-Uni : les poursuites contre Assange menacent la liberté de la presse

Par la fédération européenne des journalistes (FEJ), le 14 février 2024
"Les poursuites en cours contre Julian Assange mettent sérieusement en danger la liberté des médias partout dans le monde", déclarent la Fédération internationale des journalistes (FIJ) et la Fédération européenne des journalistes (FEJ), dans un communiqué commun à la veille de son audience d'appel à Londres les 20 et 21. Février. La FIJ et la FEJ, qui représentent près de 200 syndicats et associations de journalistes, se sont opposées à l'extradition d'Assange depuis la publication des poursuites américaines en vertu de la loi américaine sur l'espionnage.
Les accusations portent sur la publication par Wikileaks en 2010 des journaux de guerre en Irak et en Afghanistan. Celles-ci ont fourni un compte rendu extraordinairement détaillé des actions militaires américaines entre 2004 et 2009. Les journaux comprenaient des épisodes tels que celui désormais connu sous le nom de vidéo du Collateral Murder, dans laquelle des soldats américains à bord d'un hélicoptère tirent sur des civils non armés, tuant 12 personnes. Les États-Unis accusent Assange d'avoir obtenu ces images par des moyens violant la loi sur l'espionnage (Espionage Act) - entre autres.
Dominique Pradalié, président de la FIJ, déclare :
"J'ai rencontré Julian Assange à deux reprises à Belmarsh et il est clair pour moi qu'il souffre énormément depuis bien trop longtemps. En avril, il aura passé cinq ans dans une prison britannique alors qu'il n'a été reconnu coupable d'aucun fait. Les actions pour lesquelles les États-Unis intentent des poursuites à son encontre relèvent manifestement du journalisme. La condamnation de Julian Assange nous menacerait tous."
Pour Maja Sever, présidente de la FEJ :
"Les journalistes et leurs syndicats ont reconnu depuis le début que Julian Assange est ciblé pour avoir accompli qui font partie du travail quotidien de nombreux journalistes, à savoir la quête d'un lanceur d'alerte et la révélation d'actes criminels. Nous sommes aux côtés des journalistes de toutes tendances politiques et nationalités et affirmons qu’Assange doit être libéré immédiatement."
L'audience se tiendra à la Royal Courts of Justice de Londres les 20 et 21 février. L'appel contre la décision du ministre britannique de l'Intérieur d'extrader Assange et la décision du juge Baraitser de rejeter une grande partie du dossier contre l'extradition, qui a été rendu en janvier 2021, y sera examiné. Si le recours d'Assange est accepté, un appel complet sera alors déposé et entendu plus tard dans l’année. Une audience devant la Cour européenne des droits de l'homme est également possible, bien que ces audiences soient à la discrétion de cette Cour et rarement accordées.
📰 https://europeanjournalists.org/blog/2024/02/14/uk-assange-prosecution-threatens-press-freedom/
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11- ♟ L'appel des professeurs de droit au ministère de la justice : Abandonnez les poursuites à l'encontre d'Assange
Par la Freedom of the Press Foundation, le 14 février 2024
POUR DIFFUSION IMMÉDIATE
Plus de 35 professeurs de droit ont adressé une lettre aujourd'hui au ministère de la Justice pour lui signifier que les accusations portées contre Julian Assange en vertu de la loi sur l'espionnage (Espionage Act) "constituent une menace existentielle pour le premier amendement".
Une audience d'appel sur l'extradition du fondateur de WikiLeaks de Grande-Bretagne vers les États-Unis est prévue à la Haute Cour de Londres les 20 et 21 février.
Les professeurs écrivent que, bien que leurs
"opinions personnelles sur Assange et WikiLeaks varient", ils sont néanmoins "unanimes dans leur inquiétude quant aux implications constitutionnelles de la poursuite d'Assange". Ces implications, expliquent-ils, "pourraient aller au-delà de l'Espionage Act et du journalisme de sécurité nationale [pour] permettre la poursuite de la collecte d'informations de routine en vertu d'un certain nombre de lois ambiguës et de théories juridiques non vérifiées".
L'un des signataires est James Goodale, ancien vice-président et avocat général du New York Times et professeur adjoint à la Fordham School of Law. Il estime que, si Assange est condamné, des poursuites similaires visant à criminaliser le journalisme d'investigation seront inévitables.
"Sur la base de mon expérience, qui m'a notamment amené à exercer les fonctions d'avocat général du New York Times lorsque l'administration Nixon a tenté d'inculper un journaliste en vertu de la loi sur l'espionnage pour avoir publié les Pentagon Papers, je suis convaincu qu'une poursuite aboutie de Julian Assange conduirait à des accusations similaires contre des journalistes de journaux tels que le Times lorsqu'ils découvrent des secrets qui embarrassent les autorités. Ce serait absolument désastreux pour la liberté de la presse aux États-Unis", a-t-il affirmé.
Cette lettre fait suite à des courriers exprimant des craintes similaires sur les conséquences de la poursuite d'Assange pour la liberté de la presse, émanant d'éditeurs de presse de premier plan, d'organisations de défense des libertés civiles et de membres du Congrès. Outre les professeurs de droit signataires de la lettre, de nombreux juristes ont exprimé indépendamment leurs inquiétudes quant aux répercussions sur le premier amendement des poursuites engagées contre Assange au titre de la loi sur l'espionnage (Espionage Act).
Comme le souligne la lettre, l'administration Obama a bien saisi ces préoccupations et s'est abstenue d'inculper Assange en vertu de la loi sur l'espionnage parce qu'elle aurait reconnu le "problème du New York Times", à savoir que toute théorie juridique qu'elle pourrait employer contre Assange pourrait être utilisée contre des journalistes du Times et d'autres journaux.
Mais l'administration Trump a fait volte-face et celle de Biden a insisté pour poursuivre les poursuites, alors même que Trump lui-même proclame son intention d'enfermer les journalistes - en particulier ceux qui s'aviseraient de publier des documents fuités - s'il obtient un nouveau mandat présidentiel.
Seth Stern, directeur du plaidoyer de la Freedom of the Press Foundation, qui a contribué à la rédaction de la lettre, a déclaré :
"Les universitaires, les avocats, les éditeurs de médias et les militants sont unanimement d'accord pour dire que les poursuites engagées contre Julian Assange en vertu de la loi sur l'espionnage ne manqueront pas d'entraîner des poursuites contre les journalistes dans l'exercice de leurs fonctions. Il semble que le ministère de la justice soit le seul à ne pas être d'accord. Il est temps qu'il abandonne enfin ces poursuites dangereuses. Que vous aimiez ou détestiez Julian Assange, si celui-ci prime, un journaliste que vous appréciez risque d'être poursuivi à son tour."
La lettre est disponible dans son intégralité ICI.
📰 https://freedom.press/news/law-professors-to-doj-drop-assange-prosecution/
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12- ♟ RSF dissipe les idées reçues ou fausses les plus répandues dans l'affaire Julian Assange
Par RSF, le 14 février 2024
À l'approche du "Jour J" (Day X), l'audience qui se tiendra les 20 et 21 février devant la Haute Cour britannique dans le cadre de la procédure d'extradition de Julian Assange, éditeur de WikiLeaks, Reporters sans frontières (RSF) passe en revue douze idées reçues sur le dossier présenté par le gouvernement américain à l'encontre de Julian Assange.
◾️ 1- Idée reçue : Julian Assange est un "traître" qui doit être jugé aux États-Unis.
Rectification : Julian Assange n'est pas un citoyen américain, il n'a jamais vécu aux États-Unis et n'a aucun lien substantiel avec ce pays. Il est un citoyen australien qui vivait et travaillait à Londres lorsque le gouvernement américain a lancé des poursuites contre lui. Les charges retenues à son encontre sont liées à la publication par WikiLeaks de documents d'intérêt public. L'extradition de Julian Assange créerait un dangereux précédent qui pourrait mettre en danger d'autres éditeurs et journalistes partout dans le monde, quelle que soit leur nationalité. Fait alarmant, le gouvernement américain a également déclaré que les protections du premier amendement ne s'appliqueraient pas à Assange en tant que non-citoyen.
◾️ 2- Idée fausse : Julian Assange est un lanceur d'alerte qui a divulgué des informations classifiées.
Rectification : Julian Assange a joué un rôle différent de celui d'un lanceur d'alerte : il n'a pas divulgué lui-même des informations classifiées, mais a publié des informations lui ayant été transmises. L'auteur de la fuite, Chelsea Manning, ancienne analyste de l'armée, avait déjà purgé plus de sept ans de prison avant que le président Obama ne commue sa peine de 35 ans, déclarant qu'elle était "très disproportionnée par rapport à ce que d'autres auteurs de fuites se sont vu infliger". S'il est extradé vers les États-Unis, Assange sera le premier éditeur jugé en vertu de la loi sur l'espionnage (Espionage Act), qui ne prévoit pas de défense de l'intérêt public, ce qui signifie que toute personne accusée de cette manière n'est pas en mesure de se défendre de manière satisfaisante. Il encourt une peine de 175 ans d'emprisonnement.
◾️ 3- Idée fausse : Si je ne considère pas Julian Assange comme un journaliste, je ne peux par conséquent pas le défendre.
Rectification : De nombreux points de vue divergent sur le statut de Julian Assange en tant que journaliste, éditeur ou source journalistique, mais ce qui importe le plus, c'est la raison pour laquelle Julian Assange a été pris pour cible et les implications de son extradition et des poursuites engagées contre lui. RSF défend Assange pour sa contribution au journalisme, la publication par WikiLeaks des documents classifiés ayant donné lieu à de nombreux rapports d'intérêt public dans le monde entier. Les poursuites dont il fait l'objet auraient des conséquences alarmantes pour l'avenir du journalisme et porteraient un coup sans précédent à la liberté de la presse.
◾️ 4- Idée fausse : La condamnation de Julian Assange n'aura pas d'impact plus large.
Rectification : La condamnation de Julian Assange aurait des répercussions sur l'avenir du journalisme dans le monde entier et sur notre droit de savoir. Il serait le premier éditeur jugé en vertu de la loi américaine sur l'espionnage, qui ne prévoit pas de défense de l'intérêt public et qui a grand besoin d'être réformée. Sa condamnation ouvrirait la voie à des poursuites similaires à l'encontre d'autres personnes publiant des articles basés sur des fuites d'informations classifiées, créant ainsi un dangereux précédent pour le journalisme. Cela menacerait de nombreuses organisations médiatiques et de nombreux journalistes, et aurait un effet dissuasif sur les reportages d'intérêt public. L'impact final affecterait le droit du public de savoir.
◾️ 5- Idée reçue : Julian Assange a sciemment mis des personnes en danger.
Rectification : Julian Assange n'a jamais sciemment exposé qui que ce soit à un risque, et il a cherché de manière proactive à protéger toute personne susceptible d'être lésée à la suite de la publication de l'ensemble de données non expurgées dans une situation inhabituelle sur laquelle il n'avait aucun contrôle. WikiLeaks n'a pas été à l'origine de la publication de l'ensemble de données non expurgées, et lorsque Assange a appris que cette publication était imminente, il a demandé instamment au gouvernement américain de prendre des mesures pour protéger toute personne susceptible d'être lésée. WikiLeaks a travaillé en partenariat avec une coalition d'organisations médiatiques professionnelles (The New York Times, The Guardian, Le Monde, Der Spiegel et El Pais) afin de traiter les informations divulguées de manière journalistique. Le mot de passe a été divulgué publiquement par l'un des médias partenaires et d'autres acteurs ont ensuite eu accès à l'ensemble des données non expurgées et les ont publiées. WikiLeaks a par la suite republié l'ensemble de données. Le ministère de la justice n'a jamais poursuivi les personnes responsables de la publication des données, à l'exception d'Assange. Jusqu'à présent, le gouvernement américain n'a pas apporté la preuve qu'un quelconque préjudice réel avait été causé à autrui à la suite de la publication.
◾️ 6- Idée fausse : Il n'y a pas d'urgence dans l'affaire Julian Assange, qui dure depuis très longtemps.
Rectification : Les poursuites engagées par le gouvernement américain contre Julian Assange ont atteint un point plus crucial que jamais, et sa possible extradition est imminente. Alors que l'affaire a débuté voilà plus de 13 ans, au lendemain de la publication par WikiLeaks de plus de 250 000 documents classifiés ayant fait l'objet d'une fuite en 2010, la procédure d'extradition arrive aujourd'hui à son terme devant les tribunaux britanniques. L'audience des 20 et 21 février devant la Haute Cour britannique marque le début de la fin de cette procédure, les motifs rejetés par les juges ne pouvant plus faire l'objet d'un appel au Royaume-Uni. Si tous sont rejetés, l'extradition d'Assange pourrait suivre sans délai. Son seul recours serait alors de s'adresser à la Cour européenne des droits de l'homme.
◾️ 7- Idée fausse : Julian Assange est toujours à l'ambassade de l'Équateur à Londres.
Rectification : Julian Assange est détenu dans une prison de haute sécurité depuis près de cinq ans. Après avoir passé près de sept ans à l'ambassade d'Équateur, où il avait cherché refuge pour échapper à une éventuelle extradition vers les États-Unis, Julian Assange a été expulsé de l'ambassade en avril 2019 et arrêté pour violation des conditions de sa libération sous caution en 2012, ce qui lui a valu une peine disproportionnée de 50 semaines à la prison de Belmarsh. Depuis lors, il est toujours en détention à la prison de Belmarsh, en attendant l'issue de la procédure d'extradition dont il fait l'objet. La dernière demande de libération sous caution d'Assange a été rejetée en janvier 2021.
◾️ 8- Idée reçue : Julian Assange a été protégé tout au long de ses années de refuge à l'ambassade d'Équateur.
Rectification : Julian Assange est resté une cible active du gouvernement américain et de ses mandataires tout au long de son séjour à l'ambassade d'Équateur à Londres. Un rapport d'enquête publié d'abord par YahooNews a exposé des discussions alarmantes de responsables de la CIA sous l'administration Trump proposant l'enlèvement ou l'assassinat possible d'Assange. Assange et ses visiteurs - y compris son équipe juridique et des journalistes - ont été activement surveillés par une société de sécurité espagnole qui a été engagée pour assurer la sécurité de l'ambassade (ndr : UC Global de David Morales). Le groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire a estimé que la période passée par Assange à l'ambassade d'Équateur constituait une détention arbitraire, et l'ancien rapporteur spécial des Nations unies sur la torture a constaté qu'Assange présentait les symptômes d'une exposition prolongée à la torture psychologique. Après près de sept ans, l'ambassade a fini par expulser Assange, permettant à la police britannique de l'arrêter, et les représentants du gouvernement équatorien ont fait des allégations de comportements absurdes à l'encontre d'Assange pendant son séjour à l'ambassade, alimentant ainsi une intense campagne de diffamation à son égard de la part des médias. Les fonctionnaires de l'ambassade auraient également pris le rasoir d'Assange plusieurs semaines auparavant, ce qui explique son apparence négligée sur les photos prises lors de son expulsion forcée de l'ambassade et de son arrestation, qui circulent fréquemment dans la presse comme étant ses dernières photos publiques.
◾️ 9- Idée fausse : Les droits de l'homme de Julian Assange ont été respectés.
Rectification : Julian Assange a été victime de violations massives de ses droits de l'homme dans le cadre des poursuites engagées contre lui par le gouvernement américain, de sa surveillance à l'ambassade d'Équateur et du traitement qui lui a été réservé par les tribunaux et le système pénitentiaire britanniques. En ciblant Assange et aucun autre éditeur pour la republication de l'ensemble de données non expurgées en 2010 et en le poursuivant sans relâche pendant 13 ans, le gouvernement américain l'a ciblé pour une persécution légale. À l'ambassade d'Équateur, les conversations légalement confidentielles d'Assange avec ses avocats ont été surveillées, et les journalistes qui lui ont rendu visite ont vu leurs appareils trafiqués. À la prison de Belmarsh, pendant une longue période au cours de la pandémie du Covid 19, les droits de visite d'Assange ont été totalement suspendus et il a parfois été entièrement confiné dans sa cellule en raison de la contamination par le virus au sein de son unité carcérale. Au cours de la procédure d'extradition, Assange a été fouillé à nu de façon apparemment punitive et s'est vu confisquer des documents protégés par la loi par les autorités pénitentiaires. Bien qu'il ait demandé à se présenter en personne au tribunal à chaque audience, Assange n'a pas été autorisé à le faire depuis l'audience de libération sous caution du 6 janvier 2021, n'étant autorisé à le faire qu'à distance, à partir d'une liaison vidéo en prison.
◾️ 10- Idée fausse : Le président Obama ou le président Biden ont engagé la procédure d'extradition contre Julian Assange.
Rectification : Bien qu'Assange soit resté à l'ambassade d'Équateur à Londres au cours de la présidence Obama, ce dernier ne l'a pas poursuivi activement. C'est le ministère de la justice de Trump qui a déposé le nouvel acte d'accusation à son encontre et qui a entamé des démarches actives en vue de son extradition. Lorsque le président Biden est entré en fonction, son ministère de la justice a poursuivi l'appel initié par le ministère de la justice de Trump à la suite de la décision de première instance du tribunal britannique d'empêcher l'extradition d'Assange pour des raisons de santé mentale - une décision ultérieurement annulée par la cour d'appel.
◾️ 11- Idée fausse : Les poursuites engagées par le gouvernement américain contre Julian Assange portent sur l'élection présidentielle américaine de 2016.
Rectification : Cette affaire juridique ne se rapporte qu'à la publication par WikiLeaks, en 2010, de plus de 250 000 fuites de documents militaires et diplomatiques classifiés, connus sous le nom de Cablegate, Afghan War Diary (journal de la guerre d'Afghanistan) et Iraq War Logs (journaux de la guerre d'Irak). Le nouvel acte d'accusation contre Assange repose sur 18 chefs d'accusation - 17 au titre de la loi sur l'espionnage (Espionage Act) et un au titre de la loi sur la fraude et l'abus informatiques (Computer Fraud and Abuse Act) - liés à la publication des documents classifiés ayant fait l'objet d'une fuite. Il n'y a aucun lien avec les activités de WikiLeaks qui ont suivi en 2016 ou à tout autre moment.
◾️ 12- Idée fausse : Julian Assange fait l'objet d'une procédure active en Suède.
Rectification : Aucune procédure n'est en cours contre Julian Assange en Suède. Les accusations de viol portées contre lui ont fait l'objet d'un examen approfondi et ont été contestées, notamment par l'ancien rapporteur spécial des Nations unies sur la torture, Nils Melzer, et Assange a nié ces accusations. Il n'y a jamais eu d'inculpation pénale formelle et l'enquête menée par le ministère public suédois sur Assange a été abandonnée en novembre 2019 en raison d'un manque évident de preuves. Les poursuites engagées par le gouvernement américain à l'encontre d'Assange, qui reposent sur la publication par WikiLeaks de documents classifiés ayant fait l'objet d'une fuite, sont totalement distinctes des accusations portées contre lui en Suède.
📰 https://rsf.org/en/rsf-dispels-common-misconceptions-case-against-julian-assange
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13- ♟ Le Premier ministre australien Anthony Albanese soutient le vote appelant le Royaume-Uni et les États-Unis à libérer Julian Assange
Voir aussi la publication spéciale postée isolément sur cette plateforme intitulée Le réveil des kangourous : Une motion parlementaire exhorte le R.U & les USA à abandonner toutes les poursuites & à libérer Julian Assange

Par Daniel Hurst, le 14 février 2024, The Guardian
Les députés fédéraux australiens – y compris le Premier ministre et les membres du cabinet – ont voté massivement pour exhorter les États-Unis et le Royaume-Uni à autoriser le retour du fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, dans son Australie natale.
Le député indépendant Andrew Wilkie a salué l'adoption de la motion, par 86 voix pour et 42 contre, comme "une démonstration sans précédent de soutien politique à Mr Assange de la part du parlement australien".
Le chef de l'opposition, Peter Dutton, s'est joint à ses collègues de la coalition pour s'opposer à la motion mercredi, bien que la députée de Tasmanie Bridget Archer ait rejoint les rangs pour soutenir la motion en faveur d'Assange.
Le vote coïncide avec la confirmation du procureur général, Mark Dreyfus, que la question d’Assange a été soulevée lors de sa rencontre avec son homologue américain, Merrick Garland, à Washington DC il y a deux semaines.
"La discussion était privée; cependant, la position de ce gouvernement à l'égard de Mr Assange est très claire et n'a pas changé.
Il est temps de mettre un terme à cette affaire", a déclaré Dreyfus au Guardian Australia.
Assange est toujours incarcéré à la prison de Belmarsh, à Londres, alors qu'il lutte contre une tentative des États-Unis de l'extrader du Royaume-Uni pour répondre à des accusations, notamment au titre de la loi sur l'espionnage, la Haute Cour britannique devant tenir une audience de deux jours la semaine prochaine.
Les accusations sont liées à la publication de centaines de milliers de documents divulgués sur les guerres en Afghanistan et en Irak, ainsi que de câbles diplomatiques, en 2010 et 2011.
Wilkie a réussi à faire suspendre le règlement du Parlement afin de débattre de cette question, avec l'appui de Josh Wilson, membre du gouvernement.
Le gouvernement d'Anthony Albanese a déclaré à plusieurs reprises que "trop c'est trop" et qu'il était temps que l'affaire Assange soit "menée à son terme".
Mais la motion de mercredi a levé l'ambiguïté sur ce que cette conclusion devrait impliquer : permettre à Assange de rentrer en Australie.
La motion parlementaire souligne en particulier "l'importance pour le Royaume-Uni et les États-Unis de clore l'affaire afin que l'Australien puisse rentrer chez lui et retrouver sa famille".
Au cours du débat, Wilkie a exhorté ses collègues députés à soutenir la motion déclarant qu'il était "temps pour chacun d'entre nous de prendre position".
Il a ajouté que si Assange perdait son dernier appel au Royaume-Uni la semaine prochaine,
"il pourrait être embarqué dans un avion pour les États-Unis dans les heures qui suivent.
Le temps nous est quasiment compté pour sauver Julian Assange", a-t-il déclaré au Parlement.
Le député travailliste Wilson a quant à lui rappelé que les mêmes documents au cœur des accusations portées contre Assange avaient été "publiés sans conséquence juridique par des organes de presse aux États-Unis".
"Il est significatif que le premier ministre et le chef de l'opposition aient tous deux exprimé clairement qu'il fallait mettre un terme à cette affaire", a-t-il souligné.
Malgré les commentaires passés de Dutton sur la question, ce dernier et ses collègues de la Coalition ont finalement voté contre la motion, qui incluait également la déclaration selon laquelle les documents "ont révélé des preuves choquantes d'une mauvaise conduite de la part des États-Unis".
Certains députés de la Coalition qui avaient précédemment soutenu les appels à la libération d'Assange, dont Barnaby Joyce, n'étaient pas présents lors du vote. Huit députés de la Coalition, présents lors d'un vote séparé tenu juste avant, n'ont pas voté sur la motion Assange.
Les Verts et de nombreux députés de l'opposition l'ont soutenue.
Le secrétaire d'État américain, Antony Blinken, a précédemment rejeté les plaintes du gouvernement australien selon lesquelles la poursuite d'Assange avait duré trop longtemps.
Après des entretiens à Brisbane en juillet, M. Blinken a déclaré qu'il était "très important" que "nos amis" australiens comprennent les préoccupations des États-Unis concernant le "rôle présumé de Mr Assange dans l'une des plus grandes compromissions d'informations classifiées de l'histoire de notre pays".
Les partisans d'Assange soutiennent qu'il était dans l'intérêt du public de publier des informations sur les guerres d'Afghanistan et d'Irak et affirment que les poursuites engagées contre lui constituent un dangereux précédent pour la liberté de la presse.
En septembre, plus de 60 politiciens fédéraux australiens ont explicitement appelé le ministère américain de la Justice à abandonner les poursuites, mettant en garde contre "un tollé vif et soutenu en Australie" si le fondateur de WikiLeaks était extradé.
Une petite délégation multipartite s'est ensuite rendue à Washington DC fin septembre pour faire pression sur les responsables de l'administration Biden et les législateurs américains en amont de la visite d'Albanese.
Daniel Hurst est le correspondant des affaires étrangères et de la défense du Guardian Australia. Courriel : daniel.hurst@theguardian.com
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14- ♟ Les États-Unis et l'affaire Assange : le côté obscur de la force, la face cachée du pouvoir
Le vernis est déjà écaillé depuis longtemps : les États-Unis d'Amérique étaient autrefois considérés comme le phare de la démocratie. Mais cette image a toujours été illusoire.
Par Michael Hesse, le 15 février 2024, Frankfurter Rundschau
Quel titre donner à un livre sur l'histoire des États-Unis ? L'historienne américaine Jill Lepore a opté pour "These Truth" (Ces vérités)(ndr : Plus exactement These Truths : A History of the United States). Pour elle, "ces vérités" représentent l'égalité politique, les droits naturels et la souveraineté du peuple. Lorsque Lepore a écrit son histoire des États-Unis d'Amérique, elle s'est penchée sur une époque pleine de contradictions. D'un côté, la promesse de droits inaliénables, que Thomas Jefferson voulait voir comme accordés par Dieu (Benjamin Franklin, quant à lui, soulignait le caractère évident de ces droits).
Ces droits devaient permettre de créer une société protégée des aléas de l'histoire et des interventions arbitraires des puissants. On croyait en la raison et en la capacité de l'homme à pouvoir déterminer lui-même le cours des choses par le biais d'institutions politiques.
Aux États-Unis, Julian Assange risque une très lourde peine de prison.
Par ailleurs, il existe de profondes fissures dans la société américaine, notamment en matière d'attribution de droits aux personnes. Le cas de Julian Assange n'est pas le premier à montrer à quel point ces droits sont si fragiles dans la réalité. Assange avait révélé au grand jour des crimes de guerre sans équivoque perpétrés par les États-Unis. Ces derniers veulent donc l'inculper d'espionnage et de conspiration. La Cour suprême de Londres peut stopper cette procédure ; les 20 et 21 février, dates auxquelles Assange sera entendu, montreront si tel sera le cas.
Assange n'est pas le seul exemple de réaction totalement disproportionnée de la part des États-Unis. Une décennie s'est écoulée depuis que le monde a appris pour la première fois les activités d'espionnage démesurées de la NSA. C'est un certain Edward Joseph Snowden, jusqu'alors totalement inconnu, qui les a rendues publiques. Jeune et pâle, il était assis dans une chambre d'hôtel de Hong Kong et donnait des informations sur un stratagème tout à fait inouï : "Je m'appelle Ed Snowden, j'ai 29 ans".
Snowden disposait d'un accès à des informations confidentielles sur les programmes d'espionnage de la NSA. En 2013, il s'est installé à Hong Kong avec les documents secrets. De là, il a informé le monde d'un programme d'espionnage américain tout à fait stupéfiant, d'une surveillance systématique d'Internet et de l'espionnage des appels téléphoniques. Ces révélations ont suscité l'indignation dans le monde entier. Comme dans le cas d'Assange, un mandat d'arrêt international pour espionnage a également été lancé contre Snowden. Il vit désormais en Russie, un pays autoritaire, afin d'échapper à l'emprise de son pays, les États-Unis.
Pour l'historienne Jill Lepore, il était tout à fait clair que les droits fondamentaux ne s'appliquaient dès le départ qu'à une certaine frange de la société américaine. Les États-Unis étaient au départ une société esclavagiste. Les Américains blancs avaient en outre combattu les peuples indigènes et les avaient en grande partie exterminés.
"De très nombreuses personnes ne trouvaient pas leur place dans le prétendu universalisme du nationalisme américain, tout comme elles étaient exclues de leur droit de cité dans la nation", écrit-t-elle.
Cette contradiction continue de marquer le pays aujourd'hui, comme le montre le débat sur la migration.
"Une nation qui déclare que la plupart des peuples du monde ne sont pas éligibles à la citoyenneté et qui se présente en même temps comme une terre d'asile est frappée par une contradiction", estime l'historienne.
Les droits sont-ils encore universels ou uniquement réservés à quelques-uns ayant le pouvoir de les faire valoir pour eux-mêmes ?
Les deux visages des États-Unis
Les États-Unis ont toujours eu deux visages, que l'on pourrait qualifier de Dr. Jekyll et Mr. Hyde - si Sebastian Haffner n'avait pas déjà réservé ce titre à l'Allemagne. Si d'un côté les États-Unis ont été un phare de la démocratie, ils ont aussi toujours été un pays d'inégalités massives et de capitalisme féroce et implacable. Un pays qui a mené d'innombrables guerres pour protéger ses routes commerciales, qui a également renversé des gouvernements démocratiquement élus lorsque cela servait ses intérêts - comme dans le cas de Salvador Allende au Chili.
Les États-Unis ont toujours incarné à la fois le méchant et le héros. Lors de l'enquête sur le Watergate en 1974, qui a entraîné la démission de Nixon, les républicains ont affirmé que de nombreux présidents américains avaient fait des choses graves, mais que dans le cas de Nixon, elles avaient été révélées par les enregistrements. Les démocrates ont répondu : "Nous pouvons le découvrir", rapporte Lepore dans son livre "These Truths. "De nombreux historiens se sont alors réunis durant l'été 1974 et ont dressé une liste des présidents américains s'étant rendus coupables d'une faute intentionnelle. Il en est ressorti une enquête fascinante". Parallèlement aux coups tordus, il y a justement toujours eu une volonté d'éclaircissement. L'anarchiste Noam Chomsky est néanmoins pessimiste. Selon lui,
"le risque de proto-fascisme et de guerre civile est réel aux États-Unis".
En termes de politique étrangère, les États-Unis ont joué un rôle malheureux de gendarme du monde. En fait, c'est même un euphémisme, estime l'américaniste et politologue Bernd Greiner :
"Depuis 1945, on peut écrire une chronique de l'échec, dans laquelle des désastres évidents comme le Vietnam, l'Irak ou aujourd'hui l'Afghanistan ont leur place, mais aussi l'intervention au Guatemala ou au Nicaragua et dans d'autres endroits. À long terme, ces interventions se sont toujours retournées contre les Américains, même s'ils ont pu enregistrer des succès sur le court terme", a-t-il récemment déclaré dans une interview au quotidien allemand FR.
On peut aussi se souvenir de l'Iran en 1953, explique Greiner.
"On a certes pu mettre en scène avec succès un putsch à Téhéran en collaboration avec les Britanniques, mais à long terme, cela a nourri l'anti-américanisme et gravement nui à la politique occidentale dans la région".
Retrait précipité d'Afghanistan
Le retrait précipité d'Afghanistan, qui a peut-être encouragé Poutine à déclencher la guerre contre l'Ukraine, rappelle à Greiner le retrait précipité de Saigon. Mais cela lui rappelle également une erreur fatale.
"Dans les deux cas, Washington savait que l'armée était une arme émoussée lors des conflits dans ces pays. Pourtant, ici comme là-bas, les guerres ont été prolongées. Et on s'est laissé aller à l'illusion d'un 'decent interval' - l'idée donc qu'après le retrait, il y aurait un délai de grâce permettant aux États-Unis de sauver la face et que l'on pourrait rendre les protégés prétendument incompétents responsables de l'effondrement inévitable". Cela a échoué au Vietnam de même qu'en Afghanistan. "Et pour cela, les États-Unis et leurs alliés devront encore payer un prix élevé", prédit l'expert américain.
Henry Kissinger a joué un rôle central. Il est décédé récemment à l'âge de 100 ans. Lorsqu'il s'agit du côté obscur de la force, le machiavélique se place toujours en haut de l'échelle en termes d'absence de scrupules, notamment dans son rôle pendant la guerre du Vietnam.
"L'administration Nixon a su très tôt que l'on se dirigeait vers une défaite cuisante au Vietnam. Pourtant, après l'accord d'armistice de janvier 1973, les attaques aériennes ont été encore une fois extrêmement étendues - surtout contre le Cambodge. Il s'agissait uniquement de retarder encore de quelques mois la victoire de l'armée nord-vietnamienne et du Viêt-cong", raconte Greiner.
Kissinger a ensuite reçu le prix Nobel de la paix, mais pour beaucoup, cela ressemblait à une véritable farce. On le considérait plutôt comme un criminel de guerre.
Les États-Unis sont responsables d'une longue série de guerres et de conflits, d'ingérences et d'assassinats. Mais il y a aussi eu des périodes d'exception.
"Sous Jimmy Carter, il y a eu une phase intermédiaire, il a été le seul président après 1945 qui, hormis l'échec de la libération d'otages en Iran, ne s'est pas lancé dans des aventures militaires. Il est d'autant plus intéressant qu'il ait été sanctionné par une majorité d'électeurs au bout de quatre ans", se souvient Greiner.
Carter avait aussi le défaut d'être quelque peu faible en politique étrangère.
"Mais rétrospectivement, il faut dire que depuis les années 1980, l'idée qui avait été embarrassée au Vietnam s'est à nouveau affirmée comme un style - à savoir l'idée d'authentifier le pouvoir en premier lieu par des moyens militaires, l'idée fixe de faire sortir la crédibilité du canon des fusils", souligne Greiner, auteur d'un livre très remarqué sur la guerre du Vietnam et d'une biographie de Kissinger.
Selon lui, la politique des États-Unis a été fondamentalement fatale.
"Les dommages ont été en premier lieu subis par les pays concernés, qui ont payé un prix exorbitant pour cette politique. Les dommages ont également été subis par les États-Unis, qui ont fini par ruiner précisément ce qu'ils voulaient protéger et préserver à savoir leur capacité à s'imposer, leur prestige et leur crédibilité".
Greiner poursuit :
"Comme on le dit si bien en Amérique, celui qui n'a toujours qu'un marteau à sa disposition voit un clou dans chaque problème".
L'historienne Jill Lepore redoute le nationalisme illibéral qui ne cesse de s'enflammer aux États-Unis. Son collègue Timothy Snyder met les États-Unis dans le même sac que la Russie. Aux États-Unis aussi, les oligarques prendraient le dessus. Snyder met en garde contre les conséquences : Si nous ne nous réveillons pas enfin, le monde libre ne sera bientôt plus qu'un souvenir du passé.
Michael Hesse dirige le département des reportages du Frankfurter Rundschau.
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L'affaire Assange
Les accusations portées par les États-Unis contre Julian Assange pour espionnage et complot menacent son intégrité personnelle et la liberté de la presse. À Londres, la Haute Cour se prononcera sur l'extradition d'Assange vers les États-Unis après une audience les 20 et 21 février.
Le Frankfurter Rundschau accompagne les jours précédant l'audience de Julian Assange d'analyses, de commentaires et d'interviews. Nous éclairons le contexte et donnons un aperçu des événements de Londres. Nous regroupons les textes dans notre dossier en ligne sur Assange.
Précédemment publié :
- Portrait de Julian Assange : Un homme, plusieurs visages
- Les USA et l'affaire Assange : La face cachée du pouvoir
- Analyse : Que reste-t-il de Wikileaks ?
- Essai rétrospectif : Pour Julian Assange, tout est question de maintenant
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15- ♟ Dernier appel pour Assange - Sevim Dagdelen : "Il s'agit d'une mort programmée"
Fin février, une audience de deux jours sur le cas de Julian Assange aura lieu à Londres. Les scénarios possibles ont été analysés lors d'un point presse au Bundestag.
Par Franz Becchi, le 15 février 2024, Berliner Zeitung
La pluie dégouline sur les vitres de la salle 6.556 de la maison Jakob Kaiser à Berlin. En arrière-plan, le Bundestag se dessine. Mercredi matin, la députée de l'alliance Sahra Wagenknecht (BSW), Sevim Dagdelen, lance à 10 heures un point presse sur le cas de Julian Assange. Sören Schomburg, avocat depuis plusieurs années dans l'équipe de défense du fondateur de Wikileaks, se trouve à ses côtés.
Du 20 au 21 février, une audience de deux jours se tiendra à la Haute Cour de Londres. À ce moment-là, l'extradition d'Assange vers les États-Unis, où il encourt une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à 175 ans, pourrait être prononcée. Deux juges décideront si Assange peut faire appel en Grande-Bretagne contre une extradition vers les États-Unis. La question de savoir ce qui se passera ensuite reste entière.
"C'est une mort à petit feu à laquelle nous assistons", déclare Dagdelen à propos de ce procès aux motivations politiques, qui sera sur place la semaine prochaine en tant qu'observatrice. Selon la politicienne, l'ensemble de la procédure est déjà une punition infligée à Assange pour ses révélations. Cela fait longtemps que Dagdelen se consacre à cette affaire. "Au début, nous ne formions qu'un petit groupe au Bundestag", dit-elle.
Mais entre-temps, une prise de conscience plus aiguë du cas Julian Assange a vu le jour au sein de la sphère politique. Le 7 juillet 2022, le Bundestag a condamné par une résolution la "persécution politique" du journaliste comme une atteinte à la liberté de la presse et a appelé le gouvernement fédéral à s'engager pour sa libération et sa non-extradition aux États-Unis. Mais le gouvernement ne donne pas suite à la résolution du Bundestag. "C'est un mépris inacceptable pour le Parlement", a estimé Dagdelen.
L'affaire Assange - les faits jusqu'à présent
L'histoire est connue : L'activiste australien Julian Assange est détenu depuis plus de quatre ans dans la prison de haute sécurité de Belmarsh à Londres. Mais il est privé de liberté depuis plus de dix ans déjà. Sa notoriété internationale et celle de Wikileaks ont éclaté en avril 2010, lorsque la plateforme a publié une vidéo d'une vingtaine de minutes révélant un épisode jusqu'alors secret en Irak.
La séquence vidéo en noir et blanc, enregistrée trois ans plus tôt, s'intitulait Collateral Murder et montrait un hélicoptère militaire américain ouvrant le feu sur un groupe de civils irakiens, dont deux journalistes de l'agence de presse britannique Reuters. Plusieurs personnes ont été tuées lors de l'attaque. Cette vidéo montrait également le mitraillage d'une camionnette dans laquelle se trouvaient des enfants.
"Manifestement, le seul tort de Julian Assange est d'être un dissident de l'Occident", poursuit Dagdelen. Il est passé du statut de divulgateur à celui de victime de la double morale occidentale. C'est pourquoi les pays occidentaux ne s'engagent pas en faveur d'Assange, suppose la députée.
Au fil du temps, la plate-forme de divulgation Wikileaks a accumulé des publications attestant entre autres de crimes de guerre, de tortures et d'assassinats. Rapidement, les Américains ont entrepris de poursuivre Wikileaks et ses partisans. Assange a trouvé une protection temporaire à l'ambassade équatorienne de Londres avant d'être arrêté par la police britannique en avril 2019 et emmené à Belmarsh. Depuis lors, le journaliste n'a plus été vu publiquement.
Il est reproché à Assange d'avoir, entre autres, enfreint l'Espionage Act, une loi américaine promulguée pendant la Première Guerre mondiale, qui interdit la transmission d'informations à des gouvernements étrangers ou à leurs représentants et punit les activités d'espionnage.
Dans le cas d'Assange, il s'agit du premier cas connu dans lequel un journaliste est accusé d'espionnage par un État occidental. "L'extradition d'Assange constituerait un précédent extrêmement dangereux", souligne Dagdelen. Elle se tourne alors vers le groupe de journalistes - il en va de l'avenir d'Assange, mais aussi de celui de la profession toute entière.
"Le risque d'un vérouillage généralisé est réel"
En ce jour pluvieux de février, seuls quelques représentants de la presse sont venus à la maison Jakob Kaiser. On peut les compter sur les doigts d'une main. De manière générale, l'intérêt des médias semble se focaliser sur d'autres sujets. Selon Dagdelen, l'audience de la semaine prochaine risque à nouveau d'être "largement verrouillée, un un huis clos quasi total". Elle-même ne sait toujours pas comment et où elle pourra observer l'audience.
Il est extrêmement difficile de suivre l'audience la semaine prochaine : La procédure d'accréditation n'est pas transparente et aucune indication n'est donnée, par exemple, sur le nombre maximal de places disponibles au tribunal. Jusqu'à présent, la salle dans laquelle l'audience doit avoir lieu ne semble même pas avoir été déterminée.

Une voie est toutefois possible en s'adressant par e-mail au ministère britannique de la Justice afin d'obtenir l'accès à un lien Internet par lequel les événements des deux jours du procès seront diffusés en temps réel. Mais l'accès pourrait être bloqué pour les personnes ne se trouvant pas en Grande-Bretagne à ce moment-là ou ne relevant pas de la juridiction britannique.
Que va-t-il se passer désormais avec Julian Assange ?
Deux scénarios sont désormais possibles pour Assange et son avenir, explique l'avocat Schomburg. Soit un ou plusieurs points soulevés par la défense sont acceptés. Dans ce cas, Assange ne serait pas extradé vers les États-Unis et la procédure se concentrerait sur de nouvelles négociations. L'Australien aurait alors le droit de faire appel.
Ou bien le tribunal ne reconnaît aucun des points soulevés, auquel cas la Grande-Bretagne devrait extrader Assange vers les États-Unis dans un délai de 28 jours. Dans ces circonstances, son équipe d'avocats se tournerait vers la Cour européenne des droits de l'homme à Strasbourg. Mais, comme précédemment, la Cour pourrait ne pas rendre de jugement.

Fin janvier, l'avocat Schomburg a rendu visite à son client pour la dernière fois. Il qualifie la santé du prisonnier de "médiocre". Comment un homme enfermé depuis des années dans l'une des prisons les plus tristement célèbres du monde peut-il espérer être en bonne forme ? Même dans le meilleur des cas, il est peu probable qu'Assange puisse se réjouir la semaine prochaine.
"Même un appel accepté lors de l'audience ne mènerait pas à une libération, et ce malgré près de cinq ans de détention", affirme Schomburg. Assange resterait dans le "Guantánamo anglais". Aucun délai n'est fixé pour que la Haute Cour statue. Il pourrait encore s'écouler des semaines, des mois, voire même un an.
Francesco (Franz) Becchi, Italien à l'âme allemande, a fait des études d'interprète et de traducteur dans son pays natal, Gênes, puis de relations internationales et de communication à Milan. C'est là qu'il a fait ses premières expériences professionnelles dans le journalisme, notamment à la télévision. Depuis janvier 2023, il est collaborateur bénévole au Berliner Zeitung.
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16- ♟ La juge nommée par les conservateurs tient la vie de Julian Assange entre ses mains
Les membres de la famille de la juge Dame Victoria Sharp ont accédé à des postes de haut niveau dans l'establishment britannique après avoir été nommés par des ministres conservateurs.
Par Mark Curtis, le 16 février 2024, Declassified
Dame Victoria Sharp a été désignée comme la juge de la Haute Cour qui se prononcera la semaine prochaine sur le recours de Julian Assange visant à empêcher son extradition vers les États-Unis.
L'éditeur de WikiLeaks est détenu en tant que prisonnier politique dans la prison de haute sécurité de Belmarsh, à Londres, depuis avril 2019. S'il est extradé, il encourt une peine de 175 ans de prison aux États-Unis.
L'un de ses précédents juges, la première magistrate de Westminster, Lady Arbuthnot, est mariée à un ancien ministre de la Défense conservateur et a déjà reçu des avantages financiers de la part d'organisations partenaires du Foreign Office.
Un autre ancien juge, le Lord Chief Justice Ian Burnett, est un bon ami de longue date du ministre britannique qui a permis l'arrestation d'Assange en le forçant à quitter son asile à l'ambassade d'Équateur à Londres.
La famille de Dame Victoria entretient également une relation particulière avec le parti conservateur.
En lien : Le juge qui a statué contre Assange a fait carrière en tant qu'avocat défendant le gouvernement britannique
Tous dans le même panier
Son père était le baron Sharp of Grimsdyke, un pair à vie qui a été anobli en 1984. Il a été président du géant de la téléphonie Cable & Wireless pendant les années 1980 et a privatisé l'entreprise après avoir été approché par le secrétaire à l'industrie de Margaret Thatcher, Keith Joseph.
Eric Sharp a commencé sa carrière en travaillant au ministère de l'énergie. Il est mentionné dans un câble de WikiLeaks en tant que président du géant américain de la chimie Monsanto, poste qu'il a occupé de 1975 à 1981.
Le frère jumeau de Dame Victoria, Richard, a été président de la BBC de 2021 à 2023, après avoir été nommé à ce poste par le premier ministre de l'époque, Boris Johnson.
Sharp a démissionné après qu'un rapport a révélé qu'il avait enfreint les règles relatives aux nominations publiques. Il avait contribué à l'obtention d'une garantie de prêt de 800 000 livres sterling pour Boris Johnson lorsqu'il était premier ministre.
Avant d'être nommé président de la BBC, Richard Sharp avait fait don de plus de 400 000 livres au parti conservateur.
Richard Sharp a également un lien avec l'actuel premier ministre, qui ne serait probablement pas désolé de voir Assange traverser l'Atlantique.
Sharp a travaillé pendant plus de 20 ans pour le géant bancaire Goldman Sachs et aurait supervisé le travail de Rishi Sunak au cours de ses premières années dans le secteur de la finance.
En lien : Le juge qui a présidé dans l'affaire Assange est un "bon ami" de 40 ans du ministre qui a orchestré son arrestation
Nomination
Dame Victoria a été nommée en avril 2019 à son poste prestigieux de présidente de la division de la Haute Cour, alors Queen's bench (aujourd'hui King's Bench Division), première femme à accéder à ce poste.
Elle a été nommée à ce poste sur les conseils de Theresa May, alors première ministre, et de David Gauke, ministre de la justice. Cette nomination fait suite à une recommandation du Lord Chief Justice Ian Burnett.
L'année dernière, Sharp a échoué de peu à être nommée Lady Chief Justice, le plus haut magistrat du pays, lorsqu'une autre haut magistrate, Dame Sue Carr, a remporté la compétition qui les opposait.
Avant d'être nommée à la Haute Cour, Sharp a agi dans plusieurs affaires très médiatisées, représentant par exemple les sociétés de médias Associated Newspapers et Times Newspapers.
En 2021, Sharp a condamné neuf manifestants pour le climat d'Insulate Britain à des peines de prison allant de deux à six mois pour leur perturbation pacifique de l'infrastructure routière.
Plus récemment, elle a présidé le procès en diffamation du partisan du Brexit Aaron Banks contre la journaliste Carole Cadwalladr. Sharp a décidé que Cadwalladr devait payer 60 % des frais de justice de Banks, qui s'élèvent à environ 1 million de livres sterling.
Cette décision a été largement critiquée par les groupes de défense de la liberté de la presse et les médias, qui ont estimé qu'elle encourageait à étouffer le journalisme d'intérêt public.
Le cas d'Assange illustre encore plus clairement une menace similaire : une personne qui révèle la vérité sur les politiques étrangères des États-Unis et de l'Occident devrait-elle être autorisée par les autorités britanniques à être envoyée à sa mort effective sur ordre d'une puissance étrangère ?
Mark Curtis est le rédacteur en chef de Declassified UK et l'auteur de cinq livres et de nombreux articles sur la politique étrangère du Royaume-Uni.
📰 https://www.declassifieduk.org/the-tory-appointee-holding-julian-assanges-life-in-her-hands/
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17- ♟ Le sort résevé à Julian Assange est le prisme à travers lequel nous pouvons autopsier les démocraties occidentales
Mardi et mercredi prochains se tiendra ce qui pourrait être la dernière audience de la procédure d'extradition d'Assange au Royaume-Uni. Si le requérant est débouté de sa demande de nouvelle procédure d'appel, seule la Cour européenne des droits de l'homme pourrait encore s'opposer à son extradition vers les États-Unis. Si les deux juges de la Haute Cour l'acceptent, il faudrait alors attendre encore des mois ou des années avant que la procédure ne prenne fin à la Cour suprême de Londres. La solution la plus évidente est que les politiciens compétents au Royaume-Uni comme aux États-Unis comprennent enfin que cette affaire, qui met en jeu la liberté de la presse, la liberté d'expression et la vie de Julian Assange, doit enfin être classée. Julian Assange ne sera pas oublié par ceux pour qui il s'est engagé et par ceux qui chérissent cet engagement. Et les veilleurs de Berlin, qui nous ont à nouveau fourni leur bulletin d'information cette semaine, en font partie.
Par Moritz Müller, le 15 février 2024, NachDenkSeiten
Le 5 avril 2010, la plate-forme de divulgation Wikileaks, jusqu'alors plutôt peu connue, a publié la vidéo intitulée Collateral Murder, dans laquelle on peut voir comment douze civils sont massacrés à Bagdad par les équipages de deux hélicoptères américains.
Depuis, Wikileaks et son fondateur, Julian Assange, sont poursuivis par les autorités des États-Unis, de la Grande-Bretagne, de la Suède, les empêchant de faire leur travail de révélation. Une procédure suédoise pour viol a duré neuf ans sans aller au-delà d'une enquête préliminaire ou d'une inculpation. En novembre 2019, cette procédure a été abandonnée.
En 2010 et 2011, d'autres révélations importantes ont été faites par Wikileaks sur la conduite de la guerre par les États-Unis en Afghanistan et en Irak et sur les conditions dans la prison de torture américaine de Guantanamo. En outre, Wikileaks a publié des dépêches diplomatiques américaines exposant les pressions et les méthodes utilisées par les États-Unis pour faire plier les gouvernements d'autres pays.
Ces révélations ont été faites en partenariat avec des médias établis comme LE SPIEGEL, The Guardian, El País et le New York Times. Ces médias se sont pour la plupart distanciés de Julian Assange et ont davantage parlé de son prétendu mauvais comportement que de ses mérites à travers ses rapports sur les crimes (de guerre) et la corruption.
Les grands médias d'entreprise semblent désormais tellement accaparés par les puissants de l'économie et de la politique qu'ils semblent avoir oublié que sans une réelle liberté de la presse, ils peuvent mettre un terme à un travail authentiquement sérieux et utile.
En 2012, craignant une extradition vers les États-Unis via la Suède, Julian Assange a dû demander l'asile à l'ambassade équatorienne de Londres. Pendant ce temps, les États-Unis ont affirmé qu'Assange était un prétentieux et qu'aucune charge ne pesait sur lui.
En 2013, Wikileaks et Assange ont aidé le lanceur d'alerte Edward Snowden à se soustraire à l'emprise des autorités américaines et à s'enfuir de Hong Kong. Apparemment, Snowden comptait se rendre en Amérique du Sud, mais avant une escale à Moscou, les autorités américaines ont déclaré son passeport invalide. Depuis, il est bloqué en Russie.
Avant les élections présidentielles américaines de 2016, Julian Assange s'est mis à dos le spectre "libéral", Wikileaks ayant publié des e-mails d'Hillary Clinton et du Parti démocrate, qui montraient entre autres que son adversaire au sein du parti, Bernie Sanders, était désavantagé. Assange a été accusé d'avoir apporté une aide à la campagne électorale de Donald Trump. Il avait lui-même déclaré à l'époque que choisir entre Clinton et Trump revenait à faire un choix entre le choléra et la gonorrhée.
En 2017, des publications sur les méthodes de la CIA et ses outils de piratage ont suivi avec Vault 7. Assange s'est ainsi mis à dos la partie républicaine de l'opinion publique américaine.
C'est cette intransigeance qui semble inquiéter le plus les dirigeants entre les mains desquels se trouve actuellement le destin d'Assange. Depuis que le gouvernement équatorien de Lenin Moreno l'a vendu aux États-Unis et à la Grande-Bretagne en avril 2019 - quasi simultanément, un prêt américain de quatre milliards de dollars a été accordé à l'Équateur -, Julian Assange est de facto détenu à l'isolement dans la prison de haute sécurité de Belmarsh.
Julian Assange est affaibli par des années de persécution et très malade. En octobre 2021, il a été victime d'une légère attaque cérébrale au moment des audiences d'appel.
Une heure après son arrestation par la police britannique, les États-Unis ont exigé son extradition, avec une accusation dont ils ont toujours affirmé qu'elle n'existait pas.
Le gouvernement australien n'intervient que sporadiquement depuis l'année dernière en faveur de son citoyen Assange, mais à ma connaissance, il n'a pas non plus menacé les États-Unis de conséquences au cas où ils poursuivraient Assange jusqu'au bout.
Ni la ministre allemande des Affaires étrangères ni le ministre fédéral de l'Économie n'ont publiquement levé le petit doigt pour Assange depuis leur entrée en fonction. Tous deux avaient pourtant affirmé, avant les élections fédérales de 2021, vouloir s'engager pour sa libération. Mme Baerbock et Mr Habeck se montrent intransigeants, du moins en ce qui concerne l'oubli de leurs propres déclarations et de leurs anciens idéaux verts. Les Verts ont été fondés en tant que parti du mouvement pour la paix et les droits civiques.
Le traitement impitoyable réservé à Julian Assange montre où en sont actuellement les systèmes du "monde libre". La seule chose à même de se développer librement est le capitalisme et le militarisme débridés avec, à leur tête, des quasi-monopoles comme YouTube, Google et Microsoft. Pendant ce temps, le gouvernement allemand contribue activement à faire tomber l'Allemagne et l'UE dans l'insignifiance.
Toute personne qui, à l'instar de Julian Assange, devient dangereuse pour ces activités meurtrières, est poursuivie sans ménagement. Les gilets jaunes français, tout comme les sceptiques des mesures Corona dans le monde entier, ont subi le même sort. Si autrefois, on était qualifié de "communiste" lorsqu'on critiquait le gouvernement, aujourd'hui, on est soudainement "de droite".
Après que le journaliste Tucker Carlson a interviewé le président de la Russie, des voix se sont élevées pour lui imposer des sanctions. Il semble absurde de menacer quelqu'un pour avoir fait son travail et laissé pour une fois l'autre partie s'exprimer.
Malgré, ou peut-être précisément à cause de la persécution dont Julian Assange fait l'objet depuis maintenant plus de 13 ans, de plus en plus de personnes s'engagent en sa faveur et descendent dans la rue pour exiger sa libération. Dans les jours à venir, des veillées en sa faveur auront à nouveau lieu dans de nombreux endroits, comme par exemple à Düsseldorf, Schwerin, Stuttgart, Brême, Berlin, Heidelberg, Baden-Baden, Cologne, Mannheim, Bielefeld, Fribourg, Londres, Berlin, Cottbus, Dresde, puis à nouveau à Düsseldorf, Berlin et Londres. Dans la plupart de ces villes et quelques autres, des événements non prévus se dérouleront mardi et mercredi de la semaine prochaine.
Vous trouverez plus d'informations sur les lieux et les horaires sur FreeAssange.eu.
Je serai moi-même à Londres la semaine prochaine pour assister à ce procès (spectacle) au tribunal. Peut-être que l'appel de Julian Assange sera accepté et qu'il sera autorisé à se présenter en personne dans la salle d'audience.
L'écriture de ces dernières lignes me fait à nouveau prendre conscience de toute l'absurdité de la procédure - une procédure dans laquelle il n'est pas certain que l'accusé puisse être présent lui-même. Dans la newsletter suivante, vous trouverez un lien vers un article récent de Craig Murray, dans lequel il expose les "règles kafkaïennes" établies par le tribunal pour obtenir un accès vidéo à l'audience de mardi et mercredi. (ndr : article traduit la semaine dernière sur cette plateforme).
Dans le cas d'Assange, il semble que les autorités compétentes édictent spontanément les règles comme bon leur semble, afin de démoraliser Assange et ses soutiens.
Avec tous nos remerciements à Berlin.
📰 https://www.nachdenkseiten.de/?p=111080
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18- ♟ La mort du journalisme
Les États-Unis prétendent être une nation de liberté. Pourtant, en persécutant Julian Assange au point qu'il pourrait être extradé, ils montrent leurs vraies couleurs autoritaires.
Par Edward Marotis, le 16 février 2024, Substack
Les 21 et 22 février, Julian Assange fera l'objet d'une audience finale à la Cour royale de Londres, qui déterminera s'il est ou non extradé vers les États-Unis, pays dans lequel il devra répondre de 18 chefs d'accusation au titre de la loi sur l'espionnage de 1917, ce qui pourrait lui valoir une peine d'emprisonnement de 175 ans dans une prison de haute sécurité.
Julian Assange est un journaliste, fondateur de WikiLeaks, dont le travail journalistique a permis de mettre au jour de nombreux crimes de guerre et des cas de corruption de la part des États-Unis, du Royaume-Uni et d'autres gouvernements.
Assange a passé les 12 dernières années en prison. De 2011 à 2019, il a vécu en exil dans une chambre de l'ambassade d'Équateur à Londres. En 2019, il a été chassé de l'ambassade et placé dans la prison de Belmarsh (une prison de haute sécurité), où il est resté ces quatre dernières années.
Durant toutes ces années, Assange a tenté d'éviter l'extradition vers les États-Unis ; une tentative compréhensible, étant donné les accusations portées contre lui en vertu de la loi sur l'espionnage (Espionage Act), qui non seulement l'empêcherait de se défendre adéquatement devant un tribunal, mais qui conduirait quasi certainement à son incarcération dans une prison de haute sécurité pour le restant de ses jours.
Dans la plupart des médias grand public, Assange a été présenté comme une sorte d'agent politique qui, entre autres, aurait piraté des bases de données gouvernementales et dont le journalisme aurait aidé Donald Trump à remporter l'élection présidentielle américaine de 2016 et à mettre le personnel militaire américain en danger. Rien de tout cela n'est vrai, car Assange n'a rien piraté, mais simplement aidé sa source à éviter d'être repérée ; les fuites des courriels d'Hilary Clinton ont été révélées des années après son emprisonnement, et même dans ce cas, je me demande si la révélation de la corruption d'un homme politique devrait susciter la haine d'Assange, même si elle a aidé Trump à gagner ; l'accusation n'a par ailleurs pas été en mesure de démontrer que le personnel militaire américain a subi un quelconque préjudice à la suite de ses reportages.
Néanmoins, de telles affirmations sont répétées et laissent le public dans un sentiment de confusion quant à l'attitude à adopter vis-à-vis d'Assange. La journaliste Caitlyn Johnstone a écrit une excellente réfutation des calomnies les plus courantes utilisées contre Assange, que l'on peut trouver ici.
L'affaire Assange est en fait des plus simples. Un journaliste découvre des preuves de crimes de guerre perpétrés par le gouvernement américain, un gouvernement dont la corruption est monnaie courante, et décide de partager ces informations avec le public.
Des informations qu'il est clairement dans l'intérêt du public de connaître.
Le gouvernement américain, soutenu par le gouvernement britannique, qui cherche à maintenir l'image d'un pays libre, démocratique et juste, entreprend alors de persécuter ce journaliste, en menant des campagnes de diffamation et en abusant de son propre système juridique pour le poursuivre en tant qu'espion.
C'est aussi simple que cela.

Bien qu'Assange n'ait pas encore été poursuivi aux États-Unis, la persécution dont il fait l'objet semble constituer un véritable avertissement pour le monde entier : quiconque défie le gouvernement américain se verra infliger le même sort. Il s'agit essentiellement de faire d'Assange un exemple pour dissuader quiconque oserait faire des révélations similaires, glaçant ainsi le sang de tous les lanceurs d'alerte ou journalistes potentiels dans le monde. Assange n'a pas encore été condamné pour quoi que ce soit, mais est néanmoins emprisonné depuis plus de dix ans.
Les États-Unis ont malicieusement décidé d'inculper Assange en vertu de la loi sur l'espionnage de 1917, sur la base de la fausse allégation selon laquelle il aurait aidé la lanceuse d'alerte Chelsea Manning à pirater les bases de données de défense du gouvernement américain, alors qu'en réalité, tout ce qu'Assange a fait, en dehors d'avoir reçu les documents classifiés de Manning, a été de l'aider à effacer ses traces et à protéger son identité contre toute révélation, comme l'ont rapporté Glenn Greenwald et Micah Lee. C'est un principe éthique fondamental pour les journalistes que d'aider leur source à protéger leur identité, et la tentative de l'accusation de présenter cela comme illégal révèle que cette affaire vise en réalité à criminaliser le journalisme.
Assange a reçu des documents classifiés de Chelsea Manning et, comme tout journaliste digne de ce nom, les a publiés de manière responsable. L'une des principales raisons pour lesquelles Assange n'a pas été inculpé plus tôt est que l'administration Obama a pris conscience qu'il y avait peu de différence entre ce que faisait Assange et ce que faisaient d'autres organes de presse comme le Guardian et le New York Times (parmi beaucoup d'autres), qui avaient également rendu compte des fuites.
Après l'entrée en fonction de Trump, le ministère de la Justice a inculpé Assange en vertu de la loi sur l'espionnage (Espionage Act), et l'allégation selon laquelle il aurait été "de connivence" avec Manning en l'incitant à divulguer les documents constitue son argument pour distinguer Assange des autres organes de presse.
Or, comme l'explique Dan Kennedy, professeur de journalisme à la Northeastern University de Boston, cet argument est absurde :
"Le problème est qu'il n'y a pas de distinction significative à faire.
Comment le Guardian, également, n'a-t-il pas été "de connivence" avec WikiLeaks pour obtenir les câbles ? Comment le New York Times n'a-t-il pas été "de connivence" avec le Guardian lorsque ce dernier lui en a donné une copie à la suite de la décision d'Assange d'exclure le Times de la dernière livraison de documents ?
D'ailleurs, je ne vois pas comment on peut dire qu'un organe de presse n'est pas de connivence avec une source lorsqu'il reçoit des documents ayant fait l'objet d'une fuite. Le Times n'était-il pas de connivence avec Daniel Ellsberg lorsqu'il a reçu de lui les Pentagon Papers ? Oui, il y a des différences. Ellsberg avait fini de faire des copies bien avant de commencer à travailler avec le Times, alors qu'Assange a peut-être incité Manning à le faire. Mais est-ce vraiment important ?"
Cette vérité fondamentale, à savoir qu'il n'y a aucune différence pertinente entre les actions d'Assange (WikiLeaks) et celles des autres organes de presse, est ce que l'accusation fait tout ce qu'elle peut pour l'occulter, car il est évident pour tout le monde que s'il n'y a aucune différence réelle, il n'est pas logique que tous les autres journalistes ayant rendu compte des fuites ne fassent pas l'objet des mêmes chefs d'accusation.
La vérité, c'est que c'est l'acte de journalisme lui-même qui est criminalisé.
C'est pourquoi tant d'activistes, de journalistes, de groupes de défense des libertés civiles et d'organisations de défense de la liberté de la presse, d'organisations de défense des droits de l'homme, d'hommes politiques et de citoyens appellent à sa libération ; il est évident que ce qui est fait à Assange sera fait à tous si on le laisse faire.
Même une majorité du Parlement australien (Assange est un ressortissant australien) a voté en faveur d'une résolution appelant à la libération d'Assange hier.
Ne vous laissez pas abuser par les calomnies et les manœuvres mensongères. Cette affaire ne concerne rien d'autre que la criminalisation du journalisme, à savoir la tentative du gouvernement américain de rendre illégal le fait de dénoncer ses propres crimes.
"Une société qui interdit la faculté de dire la vérité éteint celle de vivre dans la justice".
- Chris Hedges, journaliste
📰 Lien de l'article original :
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19- ♟ Jusqu'à quel niveau de criminalité un service secret peut-il aller ? - La CIA, Joshua Schulte et Julian Assange
Les médias mainstream ont rapporté, avec leur habituelle servitude envers les États-Unis, que Joshua Schulte, 35 ans, était responsable du plus grand vol de données secrètes de l'histoire de la CIA, un "Pearl Harbor numérique", et qu'il avait été condamné à 40 ans de prison (par ex. tagesschau.de). Mais ils ne font aucune mention de la ténuité des preuves, des contenus illégaux de ces données et des méthodes criminelles de la CIA. C'est pourtant ce qui a été fait à leur place par le satiriste Martin Sonneborn dans un article fulgurant. Mais ce qu'il écrit, avec à peine quelques touches ironiques, est d'une gravité amère qui vous colle à la peau. Je reprends son article de son canal X (Twitter). Les intertitres ont été ajoutés par mes soins.
Par Herbert Ludwig, le 16 février 2024, Fassadenkratzer
Des menteurs, des escrocs et des voleurs
Par Martin Sonneborn, le 4 février 2024
Si vous ne vous souciez pas du fait que votre gouvernement (et probablement vous aussi devant vos écrans) soit surveillé par les services secrets américains via des programmes illégaux, ou si vous trouvez cela tout à fait normal - après tout, au vu du taux de criminalité manifeste dans nos parlements, une surveillance (sans faille) de ces derniers serait effectivement appropriée - alors il est inutile de lire la suite.
40 ans de prison pour un lanceur d'alerte
Avant-hier (2 février 2014), Joshua Schulte, un ancien employé du Center for Cyber Intelligence (CCI), une division de la CIA chargée des cyber-opérations offensives, s'est vu condamné à 40 ans de prison par la Cour fédérale de New York. Schulte aurait dérobé 2 milliards de pages de données "top secrètes" de la CIA, portant des noms de code significatifs tels que "Brutal Kangaroo", "AngerQuake" ou "McNugget", en 2016 et les aurait transmises à WikiLeaks un an plus tard. Cette fuite, baptisée Vault 7 (par WikiLeaks), a révélé au grand public que la CIA était capable, même à l'ère du numérique, de se livrer à une pratique dont on la croyait de toute façon capable : des opérations de piratage et d'espionnage mondial hallucinantes.
Les programmes en question sont une série de techniques sur mesure permettant à la CIA non seulement de compromettre les réseaux Wifi et les navigateurs web, de pirater Skype, de passer outre les logiciels antivirus ou les cryptages des services de messagerie et de transformer les terminaux numériques (Apple & Android) en bugs d'écoute. Elle sait également se procurer un accès aux téléviseurs "intelligents", aux appareils ménagers semi-intelligents ou encore aux appareils de réfrigération, de chauffage, de mixage, de séchage, d'éclairage, de soufflage et d'aspiration (Heinzelmann) totalement stupides. Et même aux systèmes de direction (hop !) des voitures modernes.
Vault 7 a non seulement révélé la CIA comme le plus grand fournisseur mondial de logiciels malveillants (virus !), mais a également montré ses capacités de falsification de "preuves" numériques, grâce auxquelles la CIA peut facilement mettre ses propres opérations de piratage (malveillantes) sur le dos d'un de ses "adversaires" (ce que l'on appelle la "propagande noire"). On peut supposer sans risque que tout ce que le gouvernement américain a jamais reproché à d'autres pays en matière de cyberattaques a été réalisé de manière bien plus étendue par sa propre agence.
À propos de la publication de Vault 7, WikiLeaks a écrit :
"Dans une déclaration, la source explique les questions politiques qui, selon elle, doivent être discutées d'urgence en public, y compris celle de savoir si les capacités de piratage de la CIA outrepassent les pouvoirs qui lui sont conférés, et le problème du contrôle public de cette agence. La source souhaite lancer un débat public sur la sécurité, la création, l'utilisation, la prolifération et le contrôle démocratique des cyberarmes".
Le long procès de Joshua Schulte a suivi un cours tortueux et contient - comme d'autres représentations judiciaires menées par la CIA pour criminaliser les lanceurs d'alerte et les journalistes - une série de détails douteux et d'arguments spécieux que nous ne voulons pas retracer ici ni recommander à quiconque de consulter la nuit : il a trop ébranlé la confiance dans le système judiciaire. Juste ceci : alors que la CIA ne veut à aucun prix laisser impunie sa fuite de données la plus embarrassante, Schulte clame son innocence. Les doutes concernant les délits qui lui sont attribués étaient objectivement si forts qu'en 2020, les jurés n'ont même pas pu se mettre d'accord sur les chefs d'accusation prévus, faisant même échouer dans son intégralité le premier procès concocté par la CIA en 2020 ("procès raté").
Opérations criminelles de la CIA
Il convient ici de rappeler brièvement qui est ou ce qu'est la CIA. Bien que ce service, à l'origine uniquement chargé de la collecte d'informations, de l'analyse et de la prévision - le plus ancien des 17 frères des services secrets américains - ne soit juridiquement pas au-dessus de la loi en vigueur, il s'est surtout fait remarquer au cours de ses décennies d'existence par son comportement arbitraire et illégal :
des collectes illégales de données (par ex. des centaines de milliers de données privées de citoyens américains),
des méthodes d'interrogatoire illégales (par ex. le waterboarding),
des opérations illégales sur des territoires étrangers, y compris des tentatives de renversement illégales et des renversements illégaux (le dernier en date étant probablement le Pakistan, la place manque, veuillez chercher sur Google),
des tentatives d'assassinat et meurtres illégaux (par ex. en 1961 sur Patrice Lumumba),
la torture illégale (par ex. à Guantanamo et Abu Ghraib),
des programmes de recherche illégaux (par ex. MK-ULTRA pour la manipulation et le contrôle de l'esprit),
des expériences illégales (par ex. avec des produits chimiques, des drogues, du LSD, de la mescaline, de la poussière d'ange) sur des patients d'hôpitaux et des détenus (noirs) qui ne se doutent de rien,
et la collaboration illégale avec des réseaux terroristes absolument illégaux (p. ex. Al-Quaida).
En comparaison avec la CIA, WikiLeaks, Assange (et nous) sommes bien sûr désespérément en retard. Nous sommes en effet attachés à cette conception démodée de la démocratie, selon laquelle VOUS, DEHORS, avez le droit de savoir ce que les gouvernements que vous avez mis en place (ainsi que leur appareil secondaire confus de sous-organisations et de services) font en votre nom à longueur de journée - surtout si leurs pratiques s'avèrent éventuellement illégales. L'idée que les gouvernements sont toujours pleinement responsables devant leurs citoyens et qu'ils n'ont donc en aucun cas le droit de dissimuler au public leurs propres délits ou ceux de leurs autorités relève également du passé (et est même considérée depuis peu comme une "menace pour la démocratie").
Mike Pompeo : "J'étais le directeur de la CIA. Nous avons menti, nous avons triché, nous avons volé. Nous avions des cours d'entraînement entiers pour cela".
Méthodes de la CIA chez Julian Assange et Joshua Schulte
Si vous pensez qu'une organisation aussi sympathique devrait avoir le droit de continuer à ignorer impunément tout ce qui se trouve sur son chemin, alors tout va bien. Et si vous pensez qu'une organisation gouvernementale étrangère au casier judiciaire pléthorique est naturellement libre, ouverte ou autorisée à espionner systématiquement tous les gouvernements criminels du monde (à l'exception du sien) par des moyens interdits, alors vous pouvez être tranquille. Enfin, si vous pensez que les contrevenants récidivistes devraient avoir le droit de commettre leurs infractions collectives dans le secret de leurs chambres noires pré-démocratiques, au mépris de tout contrôle public, alors nous ne pouvons pas vous aider ici.
Vault 7, cette fuite de données la plus importante (et vraiment la plus embarrassante) de toute son histoire, a en tout cas incité la CIA et son pisse-froid en chef de l'époque, Mike "Fatty" Pompeo, à déclarer brutalement une "guerre tous azimuts" - non pas contre les criminels ou les contrevenants, cela va sans dire, mais contre WikiLeaks & Julian Assange, qui avaient publié (de manière irrévérencieuse) le matériel divulgué. Il n'est pas surprenant que cette "guerre totale" contre WikiLeaks, une plate-forme visant à rétablir le droit à l'information démocratique et à la transparence institutionnelle, ait débouché sur un autre crime : la planification minutieuse (illégale) du kidnapping (de facto) et de l'assassinat (en quelque sorte aussi, non ?) de Julian Assange, alors réfugié politique à l'ambassade d'Équateur à Londres. Le gouvernement américain n'a d'ailleurs porté plainte contre Assange qu'après l'échec du plan de la CIA visant à régler ce problème de manière extrajudiciaire.
Joshua Schulte a passé ses six ans et demi de détention provisoire (depuis octobre 2018) au Metropolitan Correctional Center (MCC) de la ville de New York. Dans des conditions de détention impensables pour les sociétés civilisées, appelées SAM - mesures administratives spéciales, qui visent à isoler complètement le détenu et à le priver de tout sens. Un isolement continu dans un box en ciment de la taille d'une place de parking (pas un SUV. Une petite voiture.) avec une petite fenêtre volontairement barricadée.
La description fournie par ses avocats au tribunal est documentée :
"Les box sont crasseux et infestés de rongeurs, de leurs déjections, de cafards et de moisissures ; il n'y a pas de chauffage ou de climatisation, pas de sanitaires en état de marche, la lumière est allumée 24 heures sur 24 et les détenus se voient refuser les visites normales, l'accès aux livres et au matériel juridique, les soins médicaux et dentaires".
Deux fois par semaine, le détenu a le droit de prendre une douche (eau chaude uniquement par voie légale). Il n'a pas le droit de regarder la télévision, d'écouter la radio ou de communiquer avec le monde extérieur, pas de téléphone, pas de courrier électronique, pas de signaux de fumée. Les visites ne sont autorisées que par les avocats. Dans la salle de réunion, il est enchaîné à un boulon à œil dans le sol, ce qui, ironiquement, correspond exactement à la pratique utilisée par la CIA pour interroger les prisonniers d'Al-Qaïda. Comme il n'a pas le droit d'aller aux toilettes en attendant son avocat, il est obligé de faire ses éventuelles affaires dans un sac en plastique qu'un gardien lui remet au début des séances. Au tribunal, il doit porter des entraves autour des chevilles et des chaînes autour de la taille, auxquelles ses mains, elles-mêmes emprisonnées dans une boîte en acier verrouillée séparément, sont menottées.
"Comment cela protège-t-il la sécurité nationale s'il ne peut pas voir le ciel pendant des années ? Est-ce que cela protège la sécurité nationale si on ne lui permet pas de consulter un médecin ? Est-ce que cela protège la sécurité nationale de lui interdire de lire ? Certainement pas. Cela prouve simplement que les États-Unis n'ont aucun respect pour les droits de l'homme ou l'État de droit", écrit John Kiriakou, ancien analyste de la CIA, enquêteur en chef de la commission des relations extérieures du Sénat et conseiller en matière de lutte contre le terrorisme.
Et voilà donc 40 ans de prison supplémentaires. Coupable de 13 chefs d'accusation, essentiellement en vertu de l'Espionage Act de 1917, établi dans des conditions historiques exceptionnelles et resté en vigueur sans changement depuis, bien que la Première Guerre mondiale soit terminée depuis 107 ans, si nous ne nous trompons pas dans nos calculs. On pourrait débattre de la question de savoir si l'on peut vraiment considérer comme de l'"espionnage" le fait que du matériel qu'une organisation gouvernementale criminelle garde secret au mépris des obligations démocratiques de rendre des comptes ne soit pas mis à la disposition d'un État ou d'un service secret étranger, mais simplement à celle du demos, cette opinion publique composée de citoyens majeurs, sans laquelle ce service secret ne posséderait pas la moindre once de légitimité.
Il en va de même pour l'accusation américaine dans l'affaire Assange, également basée sur l'Espionage Act de 1917. À la question de savoir quelle était la différence entre lui et Mark Zuckerberg, Assange a répondu un jour :
"Je vous donne gratuitement des informations privées sur des organisations et je suis taxé de crapule. Zuckerberg donne vos informations privées à des organisations moyennant de l'argent et il est l'homme de l'année".
En pensée, nous étendons ce bon mot pertinent aux paramètres "comportement criminel du gouvernement" et "crime de guerre" - et vous laissons le soin de décider s'il y a le moindre semblant de plausibilité à ce qu'un journaliste australien soit coupable d'"espionnage" en vous transmettant des informations véridiques là-bas. ("Espion de l'année" 2010 - 2019)
Les 20 et 21 février, une audience de deux jours sur l'appel d'Assange se tiendra à la Haute Cour de Londres - cette même Cour où le même groupe de perruques poudrées fera une fois de plus preuve de la même compréhension borderline du droit que la fois précédente (voir notre brochure sur Assange sur mon site web). Si sa demande d'autorisation d'une procédure d'appel propre n'aboutit pas, les possibilités d'Assange au sein du système juridique britannique seront épuisées. Il serait alors immédiatement extradé vers les États-Unis où, après sept ans d'isolement à l'ambassade équatorienne et cinq ans dans la prison de haute sécurité de Hellmarsh, il risquerait 175 ans de détention supplémentaires - y compris "de graves violations des droits de l'homme, notamment des conditions de détention équivalentes à la torture et aux mauvais traitements" (Amnesty International).
Selon Amnesty (et d'innombrables autres organisations), la publication de documents divulgués sur WikiLeaks ne devrait pas être punie, car
"il s'agit d'une pratique courante du journalisme d'investigation. Une inculpation de Julian Assange dissuaderait d'autres journalistes et publicistes d'exercer leur droit à la liberté d'expression".
Hélas ! Si cela ne devait pas déjà être le cas suite à l'exemple donné à Assange, alors qu'un cheval nous assène un coup de sabot immédiatement, s'il vous plaît.
P.S. à titre préventif :
Nous pensons qu'il est totalement absurde de penser que les cours de formation pour les menteurs, les tricheurs et les voleurs de service mentionnés par Pompeo pourraient inclure, à côté des chefs d'accusation standard pour espionnage, quelques autres chefs d'accusation pour quelque chose de plausible. Dans chacun des nombreux cas documentés contre des "ennemis" détectés par la CIA, cela n'a été que pure coïncidence. Les détails de l'accusation sur la possession (prétendument réelle) de matériel photographique de plus de 18 ans, qui serait apparu sur un ordinateur laissé par Schulte à la CIA, ne nous intéressent pas du tout. Elles peuvent être vraies ou - comme pour le viol attribué à tort à Assange pendant des années - ne pas l'être du tout. Cela n'aurait pas la moindre importance, ni pour la question traitée ici, ni pour notre évaluation de la fuite de la CIA (prétendument réelle) effectuée par Schulte.
P.P. supplémentaire :
Lorsqu'il est question de services secrets, il s'agit d'une question fondamentale à laquelle les sociétés européennes devront également répondre : de quels droits, de quelles libertés et de quels pouvoirs voulons-nous que nos services secrets soient dotés ? Et surtout : à quels objectifs voulons-nous qu'ils se consacrent et avec quels moyens ? Certainement pas ceux que les Verts allemands ont en tête, eux qui ont récemment réclamé une nouvelle fois une "agence européenne de renseignement" pour lutter contre le "terrorisme" et la "désinformation". Cette même "désinformation" pour laquelle le DSA, qui fait autorité en la matière, ne propose même pas un début de définition ou de spécification et qui rend donc le terme incriminé arbitrairement applicable à tout contenu imaginable (bonjour !). Nous doutons fortement que nous ayons encore besoin d'une agence d'espionnage de l'UE qui s'associe à l'hystérie de désinformation du gouvernement, alors que la surveillance de masse se met en place à différents niveaux dans l'UE. L'ingérence de l'État dans le façonnage de l'opinion publique - ou même la tentative de la contrôler - n'est pas un outil de démocratie "défensive", mais une pratique profondément antidémocratique.
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Source : https://twitter.com/MartinSonneborn/status/1754227768659730733 (copier le lien si nécessaire et le saisir dans le moteur de recherche)
Vidéo :
Voir également : https://www.wsws.org/de/articles/2024/02/04/iecw-f04.htm
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20- ♟ Assange citoyen de Rome. Plus qu'un simple bout de papier
Seule la pression constante des citoyens exercée sur leurs gouvernants et les médias pourra inciter les autorités britanniques à la compassion, et aujourd'hui, les citoyens de Rome, avec leurs représentants municipaux, ont lancé un formidable appel au monde : SAUVEZ JULIAN ASSANGE !
Par Marianela Diaz, le 17 février 2024, Articolo 21
Grâce à des efforts considérables, presque 10 mois après que la proposition de conférer la citoyenneté honoraire de Rome à Julian Assange a été envoyée à tous les membres du Conseil du Capitole, nous pouvons enfin nous exclamer que Julian Assange est désormais citoyen de Rome. La majorité du Conseil a voté avec le M5S et la liste civique Raggi, et ce succès, bien que laborieux, est doublement bienvenu et apprécié, non seulement du fait du moment historique dramatique que nous vivons, mais aussi parce que, face aux abus et à l'avancée de vieux fantômes que nous espérions enterrés à jamais, le consensus capitolin sur les thèmes fondamentaux de notre civilisation, tels que la justice et la paix, peut être la clé pour inverser le cours des choses.
Pour inverser la tendance, il ne suffit pas de lutter contre un autoritarisme de plus en plus marqué et contre le mépris des sentiments des gens, il faut également lutter contre une privation croissante des droits sociaux et du droit à l'information. L'avènement des réseaux sociaux et de l'internet nous a en effet brièvement donné l'illusion que nous pouvions recevoir des informations alternatives au courant dominant et à notre tour partager et informer sans limites. Il en a peut-être été ainsi pendant un certain temps, mais très vite, nous avons été séduits par les sirènes du "like", réduits sans le savoir à l'addiction, puis réduits à être la cible d'une censure absurde, parfaitement alignée sur les mystifications institutionnelles, menée sans faiblir, même pendant des années, sans aucun respect pour le citoyen, poussé à l'autocensure et à la dérision des uns et des autres.
Mais l'homme de la rue, aussi désarmé et dépourvu d'outils culturels valables soit-il, prend tôt ou tard conscience de la différence entre le récit dominant et la réalité qu'il touche de la main, ou des conséquences de celle-ci. Le risque, cependant, est aussi de tomber dans le piège de personnalités rustres et sans scrupules, avides d'exploiter la colère et le sentiment d'impuissance des masses. Mais on ne peut empêcher l'homme d'aller contre sa nature en lui interdisant de chercher la vérité en lui fournissant une "vérité de bureau". Sans la quête de la vérité, la civilisation se fige et le développement et l'évolution de l'humanité, qui, au cours de son existence millénaire, a été témoin de la lutte pour le pouvoir sous toutes les latitudes, s'arrêtent.
La lutte pour le pouvoir, dans l'ère numérique que nous vivons, voit le retour dramatique d'une nouvelle inquisition, qui prend la même forme dans l'ensemble du monde occidental, dominée par une poignée de protagonistes dont les sphères d'influence sont imbriquées et qui ont, dans le système actuel de gestion de l'information et des médias, leur facteur commun.
Contre cette nouvelle inquisition, toutes les forces démocratiques doivent lutter unies de toutes leurs énergies, pour être du côté de David et non de Goliath.
Le combat pour Assange devient donc aujourd'hui non seulement celui pour sauver la vie d'un homme généreux, qui a courageusement révélé au monde les hypocrisies du pouvoir, mais aussi celui permettant de poursuivre la quête de la vérité, sans censure prétexte, visant uniquement à dissimuler les véritables intentions du pouvoir, au détriment des intérêts des citoyens. Et seuls les citoyens, par leur pression constante exercée sur leurs gouvernants et les médias, sauveront Julian Assange, tandis que la majorité des médias et des collègues d'Assange, en période de précarité et de nouvelle inquisition, s'efforceront de sortir de leur zone de confort, en s'autocensurant pour ne pas finir comme lui.
Seule cette pression citoyenne pourra inciter les autorités britanniques à la compassion, et aujourd'hui, les citoyens de Rome, avec leurs représentants municipaux, ont lancé un formidable appel au monde : SAUVEZ JULIAN ASSANGE !
📰 https://www.articolo21.org/2024/02/assange-cittadino-di-roma-non-e-solo-un-pezzo-di-carta/
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21- ♟ Kristinn Hrafnsson, le rédacteur en chef de WikiLeaks à Genève pour le "dernier baroud d'honneur" de Julian Assange
Un responsable de WikiLeaks est venu à Genève pour dénoncer une nouvelle fois la "persécution" de Julian Assange, une semaine avant une nouvelle décision de la Haute Cour de justice de Londres sur son extradition. "C'est le baroud d'honneur", a-t-il déclaré mercredi.

Par Swiss Info, le 14 février 2024
En l'absence de Stella Assange, l'épouse du fondateur de Wikileaks qui devait être à Genève mais a du restée à Londres du fait de son extrême fatigue, Kristinn Hrafnsson a rappelé à la presse qu'Assange se battait depuis 13 ans pour sa liberté.
Il a souligné la "vengeance" et la "persécution politique" des États-Unis à l'encontre l’Australien, alléguant qu’ils avaient cherché à l’assassiner en 2017. S’il était détenu dans ce pays en mauvaise santé, Julian Assange serait confronté à "des conditions qui le tueraient", a déclaré Hrafnsson.
Hrafnsson a également critiqué les deux poids, deux mesures appliqués aux extraditions britanniques pour crimes politiques. Il a en outre condamné un juge de la Haute Cour pour avoir précédemment favorisé l'extradition en se basant sur la conviction que les garanties américaines d'emprisonnement étaient "sans valeur". Le rédaccteur en chef de WikiLeaks s'est dit "pas très optimiste" quant au fait que les deux juges chargés de l'affaire mardi et mercredi auront un avis différent.
Stella Assange s'est rendue à Genève à plusieurs reprises ces dernières années. Considérant son mari comme un "otage", elle a exhorté la Suisse à prendre des mesures pour empêcher son extradition vers les États-Unis.
Jusqu'à 175 ans de prison
Julian Assange est détenu depuis environ cinq ans dans une prison de haute sécurité près de Londres. Il a été arrêté par la police britannique après s'être réfugié pendant sept ans à l'ambassade d'Équateur à Londres. Hrafnsson a critiqué les autorités équatoriennes pour avoir laissé partir le fondateur de WikiLeaks en échange d'un milliard de dollars de prêts, et les autorités britanniques pour avoir utilisé une obscure accusation de "piratage".
Le gouvernement australien demande également que les poursuites contre ses citoyens cessent. Julian Assange fait face à des accusations aux États-Unis pour avoir publié plus de 700 000 documents confidentiels sur les activités américaines, notamment en Irak et en Afghanistan. Il est accusé d'espionnage et encourt jusqu'à 175 ans de prison. "Même s'il avait uniquement reçu ces documents, les États-Unis le considèreraient comme coupable", a déclaré Hrafnsson.
Plusieurs experts indépendants de l'ONU ont averti que Julian Assange était menacé de torture. Selon Hrafnsson, Assange s’attendait à être "attaqué" par Washington après sa démarche. "Et ces attaques continuent", a-t-il ajouté.
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22- ♟ Julian Assange n'est pas un surhomme - ce qu'on lui inflige est indigne de toute démocratie"
Stella Assange parle à Byline Times de ses craintes pour son mari si son extradition vers les États-Unis est autorisée à la suite d'une prochaine audience à Londres.
Par Emma Jones, le 15 février 2024, ByLine Times
L'épouse de Julian Assange craint pour la vie du fondateur de WikiLeaks s'il devait être extradé vers les États-Unis à l'approche d'une audience sur des accusations d'espionnage.
Avant l'audience à venir , Stella Assange a confié au Byline Times ses craintes que son mari
"soit envoyé dans le pays même qui a comploté son assassinat au Royaume-Uni" et "qu'une fois extradé, il soit placé dans une forme d'isolement carcéral, des conditions qui pousseraient n'importe quelle personne à vouloir mettre fin à ses jours".
Elle a ajouté :
"La perspective d'un procès équitable est nulle car il sera jugé pour avoir exercé son devoir démocratique d'informer le public de la criminalité sanctionnée par l'État. La menace qui pèse sur sa vie est évidente et réelle.
Julian sera jugé dans le district Est de Virginie, où la vaste majorité des jurés travaillent ou ont des parents qui travaillent pour des agences gouvernementales, telles que le FBI, la CIA et la NSA - ces mêmes agences impliquées dans les projets de son assassinat".
Le journaliste australien est incarcéré à la prison de Belmarsh, dans le sud-est de Londres, depuis avril 2019. En fonction de l'issue de l'audience, il pourrait se voir infliger une peine de 175 ans aux États-Unis s'il est expulsé pour avoir exposé les crimes de guerre commis lors des guerres d'Afghanistan et d'Irak.
Assange est accusé d'avoir publié des documents transmis par la lanceuse d'alerte de l'armée américaine Chelsea Manning, révélant des actes de torture, des assassinats, la liste des prisonniers de Guantanamo Bay et les règles américaines en matière de frappes aériennes.
Manning a été graciée par le président Barack Obama et libérée en mai 2017 après avoir purgé sept ans de prison. L'administration Obama a décidé de ne pas poursuivre Assange en raison du "problème du New York Times". Cette décision a été motivée par le fait qu'il n'y avait pas de distinction entre les activités de publication de WikiLeaks et celles du New York Times. Les poursuites ont ensuite été relancées sous la présidence de Donald Trump.
Depuis lors, l'homme de 52 ans est enfermé dans un quartier de haute sécurité à Belmarsh, séparé de sa femme - qu'il a épousée en 2022 - et de ses deux jeunes enfants.
Auparavant, Assange vivait à l'ambassade de l'Équateur à Londres après avoir obtenu l'asile pour éviter d'être extradé vers les États-Unis. Un ordre d'extradition a été émis vers la Suède, où il a fait l'objet d'accusations d'agression sexuelle, mais n'a jamais été inculpé et l'affaire a été classée depuis. L'équipe juridique d'Assange craignait qu'il ne soit extradé vers les États-Unis s'il se rendait en Suède.
Il a ensuite été arrêté en avril 2019 par la police britannique à l'ambassade.
Stella Assange est alarmée par les conditions auxquelles son mari serait confronté s'il était expulsé vers les États-Unis.
Elle a déclaré à Byline Times :
"Aucune famille ne peut se préparer à une telle chose. Les conditions dans lesquelles il serait détenu aux États-Unis équivalent à de la torture."
La nouvelle rapporteuse spéciale des Nations unies sur la torture a récemment publié une déclaration appelant le Royaume-Uni à libérer Julian et à bloquer l'extradition.
"Julian est détenu sous une forme ou une autre depuis 2010. L'affaire américaine est passible d'une peine de 175 ans. Le message est le suivant : publiez des preuves de crimes de guerre et de corruption au plus haut niveau et vous serez traqué et emprisonné.
Julian est un homme fort, mais pas un surhomme. Ce qu'on lui fait subir est indigne d'une démocratie".
Assange a demandé à assister à l'audience en personne afin de pouvoir communiquer avec son équipe juridique, mais sa femme a indiqué ne pas avoir été informée de l'acceptation de cette requête.
Son équipe juridique soutient que la demande d'extradition est motivée par des considérations politiques et a cité des articles de presse faisant état de projets d'assassinat et d'enlèvement du journaliste par la CIA. Elle a également dénoncé la société de sécurité précédemment employée pour le protéger lorsqu'il était réfugié à l'ambassade d'Équateur pour l'avoir espionné pour le compte de la CIA et avoir illégalement sorti les dossiers juridiques de Julian Assange de l'ambassade.
L'audience de deux jours sera probablement l'ultime chance pour Assange d'échapper à l'expulsion vers les États-Unis, où il sera incarcéré dans une prison de haute sécurité dans l'attente de son procès. Il est à craindre que le traité d'extradition conclu avec le Royaume-Uni ne permette aux États-Unis d'ajouter ou de modifier des chefs d'accusation susceptibles d'exposer Julian Assange à la peine de mort.
"Il s'agit de la dernière étape devant les tribunaux britanniques. Elle déterminera si Julian peut faire entendre son appel au Royaume-Uni ou si c'est la fin de son parcours juridique dans ce pays. Si l'appel est rejeté, il tentera de porter l'affaire devant la Cour européenne des droits de l'homme. Cependant, le climat entourant l'adhésion du gouvernement britannique à la Cour européenne des droits de l'homme suscite de vives inquiétudes", a expliqué son épouse.
Les défenseurs de la cause ont baptisé l'événement Global Day X : It's Now or Never (Jour J mondial : c'est maintenant ou jamais) et invitent le public à manifester devant les Royal Courts of Justice (Cours royales de justice). Des manifestations d'organisations de la société civile dans différentes parties du pays et dans d'autres parties du monde sont également prévues.
Si l'ultime appel est rejeté et Assange extradé, les États-Unis auront pour la première fois utilisé leur loi de 1917 sur l'espionnage contre un journaliste et un éditeur, poursuivi pour avoir obtenu ou publié des secrets d'État américains. Les avocats d'Assange affirment que l'extradition franchirait une nouvelle frontière juridique et l'exposerait à une extension imprévisible du droit pénal.
S'exprimant depuis le Parlement européen à Strasbourg, à l'occasion de l'inauguration d'une exposition destinée à mettre en lumière le statut de son mari en tant que journaliste le plus récompensé au monde, Stella Assange a ajouté :
"Cette affaire est un abus de droit sans précédent qui consiste à emprisonner un journaliste pour avoir pratiqué le journalisme. Julian est poursuivi pour les mêmes raisons que celles qui lui ont valu tant de récompenses journalistiques. Il est le journaliste le plus récompensé de l'histoire. La seule voie envisageable est l'abandon des poursuites".
Selon l'équipe du fondateur de WikiLeaks, les conséquences pour le journalisme d'investigation pourraient être effrayantes et d'une portée considérable. Elle estime que cela
"constituera une menace existentielle pour la liberté de la presse, les autres pays étant en mesure de faire valoir qu'ils devraient eux aussi être autorisés à extrader des journalistes et des éditeurs du Royaume-Uni pour avoir enfreint leurs lois sur la censure ou le secret".
Aux États-Unis, en tant que non-ressortissant, Assange ne pourrait pas bénéficier de la protection du premier amendement (liberté d'expression) normalement accordée aux accusés.
"Il s'agit d'une poursuite sans précédent concernant un discours protégé, ce qui constitue une grave violation de la liberté d'expression en vertu de l'article 10 de la CEDH et devrait mettre un terme à l'extradition.
La jurisprudence de la CEDH reconnaît le rôle vital que la publication de secrets d'État peut jouer dans une société démocratique et le fait que des poursuites pénales et des condamnations pour de telles publications dissuaderont totalement la presse de jouer ce rôle de 'chien de garde'", a déclaré son équipe juridique.
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23- ♟ John Shipton, le combat d’un père pour faire libérer Julian Assange
À 78 ans, John Shipton mène une bataille sans relâche depuis 2019 pour faire libérer son fils. New York, Paris, Berlin, Melbourne, Genève, le père de Julian Assange a promis de ne jamais cesser son combat alors qu’un dernier recours doit être examiné, les 20 et 21 février, à Londres. Un rejet pourrait déclencher son extradition vers les États-Unis.

Par Vadim Kamenka, le 16 février 2024, L'Humanité
Traits tirés, barbe blanche, John Shipton enchaîne les déplacements dans un seul but : faire libérer son fils, Julian Assange. Assez discret durant les sept années d’asile à l’ambassade d’Équateur, l’arrestation du fondateur de WikiLeaks en avril 2019 par la police britannique pousse cet ancien architecte à sortir du silence.
"Julian ne peut plus parler pour se défendre. C’est à sa famille et ses amis de parler pour lui. Je suis devenu un de ses ambassadeurs partout où je vais afin d’obtenir sa libération", explique John Shipton.
Dès les premières minutes d’incarcération de son fils, les États-Unis adressent une demande d’extradition visant l’Australien de 52 ans pour violation de la loi relative à l’espionnage, pour laquelle il risque cent soixante-quinze ans de prison. Washington le poursuit sans relâche pour la diffusion de 750 000 documents classifiés, à partir de 2010, qui ont révélé des crimes de guerre commis en Irak et en Afghanistan par les armées américaine et britannique.
Une lutte de tous les jours
Depuis l’Australie où il réside, John Shipton n’hésite pas et prend le premier vol direction Londres pour retrouver son fils, qui se trouve dans une cellule de la prison de haute sécurité de Belmarsh. Cette visite le marque profondément. Il y découvre le journaliste dans un état physique extrêmement dégradé et de santé mentale inquiétant.
"Il avait perdu plus de 10 kilos avec une pression psychologique constante. Je lui ai immédiatement promis de revenir régulièrement tant qu’il ne serait pas libre", raconte-t-il.
À Belmarsh, Julian Assange demeure dans une petite cellule, 22 heures sur 24, et ne reçoit que deux visites par semaine et un appel téléphonique de dix minutes. D’où la colère de John Shipton, qui interpelle les autorités britanniques sur le fait de
"mettre en prison un journaliste, sans jugement, dans un établissement de sécurité maximale, à l’instar d’un terroriste ou d’un meurtrier ! Qu’a-t-il commis si ce n’est publier des informations d’intérêt public ? Il s’agit d’une pierre angulaire de la liberté des médias, du droit des citoyens et des droits de l’homme qui fondent nos démocraties".
Les Nations unies ont reconnu et alerté sur une forme de "torture" que constitue sa détention.
À 78 ans, il n’a jamais renoncé à ce combat. Depuis cinq ans, ce militant antiguerre et progressiste n’a pas ménagé ses efforts en se rendant partout où il était invité.
"Nous avons visité plus d’une cinquantaine de pays pour donner des conférences aux États-Unis, en Grande-Bretagne, en Europe, en Amérique latine avec sa femme, Stella, ou son demi-frère, Gabriel. Nous avons également visité diverses institutions comme le Haut-Commissariat des Nations unies, le Parlement européen, le Conseil de l’Europe et plusieurs Parlements, comme l’Assemblée nationale à Paris".
Dans cette lutte constante, le regret demeure de devoir laisser sa fille à Melbourne.
Un épilogue le 21 février
Ce soutien remonte à près de vingt ans, lorsque Julian Assange, étudiant, s’installe à Newtown chez son père. Plus tard, ils entretiennent de longs échanges sur la création de WikiLeaks ; l’adresse de la société a été réalisée sous le nom de Shipton.
Malgré tout, ce combat sans relâche a un coût financier qui a poussé John à vendre sa maison de Newtown, faute de liquidités, et à compter sur les dons des particuliers, la vente de livres. "Après tout, cette procédure symbolise un bras de fer international entre un homme et un empire sur la liberté de la presse", résume-t-il.
L’épilogue de l’affaire Assange pourrait se jouer les 20 et 21 février. La Haute Cour de justice britannique examinera durant ces deux jours la recevabilité de l’ultime appel du journaliste au Royaume-Uni pour empêcher son extradition vers les États-Unis.
"À l’issue de ces deux jours d’audience, ou bien les deux juges autorisent le fondateur de WikiLeaks à présenter formellement cet appel ou bien ils le lui refusent. Dans ce cas de figure, le journaliste australien pourrait être extradé dans la foulée par Washington. On aura la possibilité de présenter un recours auprès de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) mais celui-ci ne sera pas suspensif. Il appartiendra au Royaume-Uni de prendre en considération cette décision car rien ne l’y contraint", alerte, inquiet, John Shipton.
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24- ♟ De nombreuses questions sur le jour J : de la condamnation de Schulte aux préoccupations de l'ONU
De la condamnation à 40 ans de prison de Joshua Schulte, lanceur d'alerte présumé de WikiLeaks, aux propos du rapporteur de l'ONU, en passant par le secret ambigu de l'audience publique qui se tiendra les 20 et 21 février.
À quelques encablures du jour J, qu'en est-il ? Les tensions montent, les doutes et les attentes se multiplient.
Par Giulia Calvani, le 15 février 2024, Free Assange Italie
Il reste moins de deux semaines avant l'audience de la Haute Cour britannique qui scellera le sort de Julian Assange en approuvant ou refusant la demande de son extradition. Entre-temps, les tensions montent, les doutes et les attentes se multiplient.
De la condamnation à 40 ans de prison de Joshua Schulte, lanceur d'alerte présumé de WikiLeaks, aux propos du rapporteur de l'ONU, en passant par le secret ambigu de l'audience publique qui se tiendra les 20 et 21 février.
À quelques encablures du jour J, qu'en est-il ?
Schulte condamné à 40 ans de prison : lanceur d'alerte ou terroriste ?
Le 1er février, Joshua Schulte, 35 ans, ancien programmeur de la CIA et source présumée de WikiLeaks pour les documents Vault 7, a été condamné à 40 ans de prison pour espionnage et autres infractions liées à la "sécurité nationale".
Depuis son premier procès en 2020, Schulte a toujours clamé son innocence en affirmant qu'il avait été piégé. Selon sa version, en tant qu'ancien employé mécontent et critique de la CIA, il était le bouc émissaire idéal pour faire payer ce qui est, à ce jour, la plus grande violation de données de l'histoire de l'agence.
Cela ne l'a pas empêché d'être condamné à 40 ans de prison pour violation de la loi sur l'espionnage (Espionage Act) et pour "terrorisme".
Les procureurs ont en effet fait valoir que Schulte avait agi par colère et par vengeance contre le gouvernement, et non pour des raisons idéologiques ou pertinentes.
"Le fait que Schulte ait commis ses crimes en utilisant un clavier et une souris, plutôt que des explosifs ou des armes à feu, ne change rien aux conséquences catastrophiques que ces actes ont eues pour la sécurité nationale.
La commission de ces crimes démontre la "difficulté particulière de le dissuader et de le réhabiliter" - précisément le type de préoccupation qui anime le recours au renforcement."
Après sa première arrestation en 2017, Schulte a passé cinq ans et demi en prison sous le régime des SAM (mesures administratives spéciales). Qui, selon l'un de ses avocats, est l'un des plus brutaux au monde.
"Il ne fait aucun doute que le niveau de vie des prisonniers soumis aux SAM s'avère pire que celui des personnes démunies vivant dans les pays du tiers-monde. Il est barbare et inhumain d'enfermer des êtres humains dans des boîtes pendant des années et des années : c'est un châtiment pire que la mort et il n'y a rien à faire. Il n'est pas étonnant que les détenus préfèrent les centres de détention provisoire plutôt que de continuer à vivre dans l'oppression la plus totale. Quel que soit le crime qu'un individu est censé avoir commis, la Constitution des États-Unis garantit à chacun la présomption d'innocence.
Vous vivez comme un animal en cage lorsque vous êtes accusé d'un crime : dépendant, abandonné, déshumanisé, démoralisé et détenu".
En fait, le présumé lanceur d'alerte a déclaré dans une lettre qu'il était victime d'une torture continue et inhumaine. Des conditions confirmées par un document déposé par les avocats au tribunal.
"Le gouvernement fédéral américain me torture en me faisant endurer des bruits blancs 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, et en me mettant à l'isolement. La fenêtre est occultée. Je dois uriner et déféquer sur le sol. On me laisse ainsi pendant neuf heures.
Je suis enfermé dans ma cage de torture avec des excréments de rongeurs. De la glace s'accumule près de la fenêtre. On me force à manger à mains nues comme un animal. Ils me regardent de haut, comme si je n'étais pas humain".
La condamnation de Joshua Schulte envoie non seulement un message fort à tous ceux qui révèlent les crimes des agences militaires et de renseignement, mais elle est aussi un signal de ce que le gouvernement américain a l'intention de réserver à l'éditeur de WikiLeaks, Julian Assange.
La Rapporteure spéciale des Nations unies sur la torture : risques et violations en matière d'extradition
Comme l'avait fait précédemment Nils Melzer, ancien rapporteur spécial des Nations unies sur la torture, l'actuelle rapporteure spéciale, Alice Jill Edwards, s'est elle aussi fermement opposée à l'extradition de Julian Assange.
La procédure exposerait en effet le journaliste à un haut risque de suicide. (Une évaluation qui, en 2021, a conduit la justice britannique à refuser l'extradition).
"Julian Assange souffre d'un trouble dépressif récurrent et de longue date. Il est évalué comme étant à risque de suicide. Aux États-Unis, il fait l'objet de nombreuses accusations, notamment au titre de la loi sur l'espionnage de 1917, pour avoir prétendument diffusé illégalement des câbles et des documents diplomatiques et autres par l'intermédiaire de WikiLeaks. S'il est extradé, il pourrait être maintenu en isolement prolongé dans l'attente de son procès, ou en tant que prisonnier. S'il est reconnu coupable, il pourrait être condamné à une peine pouvant aller jusqu'à 175 ans de prison".
En outre, si Assange était envoyé aux États-Unis, il risquerait des sanctions supplémentaires pouvant aller jusqu'à la peine de mort. Il s'agirait donc d'une grave violation des obligations internationales du Royaume-Uni en matière de droits de l'homme, puisque le pays est tenu de ne pas transférer une personne vers un lieu où sa vie ou sa santé serait menacée.
"Le risque d'être placé en isolement prolongé, malgré son état de santé mentale précaire, et de recevoir une peine potentiellement disproportionnée, soulève des questions quant à la compatibilité de l'extradition de Mr Assange vers les États-Unis au regard des obligations internationales du Royaume-Uni en matière de droits de l'homme. En particulier au titre de l'article 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Ainsi que l'article 3 de la Convention des Nations unies contre la torture et de la Convention européenne des droits de l'homme".
C'est précisément pour éviter de telles violations que le Royaume-Uni - qui détient Assange à la prison de Belmarsh depuis près de cinq ans - a demandé aux États-Unis l'assurance que le journaliste ne serait pas détenu dans le cadre du régime des SAM (mesues spéciales administratives).
Bien que le gouvernement américain ait répondu par des garanties, il s'est réservé le droit d'appliquer des mesures spéciales s'il le jugeait nécessaire.
En fait, selon le rapporteur de l'ONU, les assurances américaines n'ont aucune valeur.
"Les assurances diplomatiques de traitement humain formulées par le gouvernement américain ne constituent pas une garantie suffisante pour protéger Mr Assange d'un tel risque.
Elles ne sont pas juridiquement contraignantes, leur portée est limitée et la personne que les garanties visent à protéger peut n'avoir aucun recours si elles ne sont pas respectées".
En outre, comme l'a expliqué son épouse, Stella Moris Assange, en énumérant les arguments juridiques de la défense, le fondateur de WikiLeaks ne pourrait pas bénéficier d'un procès impartial et équitable aux États-Unis, ce qui constituerait une violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme.
"Le jury sera composé de personnes liées aux agences de sécurité nationale et aux entrepreneurs du gouvernement américain, et donc vraisemblablement susceptibles d'avoir des préjugés à l'encontre de Julian Assange. Ils seront également sensibles aux commentaires publics du président des États-Unis et du directeur de la CIA, qui portent atteinte à la présomption d'innocence."
En outre, il ne pourra pas bénéficier des protections du premier amendement (défendant la liberté de la presse aux États-Unis) puisqu'il n'est pas citoyen américain, mais australien.
Enfin, il est important de tenir compte du fait que le traité d'extradition entre le Royaume-Uni et les États-Unis interdit les extraditions politiques.
Les infractions dont Assange est accusé sont formellement des
"infractions politiques pures" et sont donc exclues en vertu de l'article 4, paragraphe 1, du traité d'extradition entre les États-Unis et le Royaume-Uni. La présentation d'une demande d'extradition par les États-Unis constituerait une violation de ce traité".
Face à cette situation, la rapporteure Alice Jill Edwards a lancé un appel au Royaume-Uni.
"J'appelle le gouvernement du Royaume-Uni à examiner attentivement l'ordre d'extradition de Mr Assange afin d'assurer le plein respect de l'interdiction absolue et indérogeable du refoulement vers la torture et d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Et de prendre toutes les mesures nécessaires pour préserver la santé physique et mentale de Mr Assange".
À quelques encablures du jour J : perspectives concernant l'audience
À quelques jours de l'audience, les sympathisants et les militants se mobilisent dans le monde entier en lançant de nombreuses initiatives.
Le Parlement européen s'est également impliqué en organisant une exposition intitulée L'affaire Assange : prix et distinctions, qui présente une série de prix et d'œuvres d'art à l'effigie du fondateur de WikiLeaks et de sa famille.
"Nous avons choisi d'exposer les prix reçus par Julian Assange pour souligner le soutien dont il bénéficie tant au niveau institutionnel qu'au sein de la société civile".
Plusieurs députés européens, dont l'initiatrice de l'exposition, Sabrina Pignedoli, ont déclaré qu'ils seraient présents dans la salle d'audience à Londres pour manifester leur soutien.
Cependant, l'accès à l'audience sera refusé à de nombreux autres citoyens (malgré le fait que, selon la loi, l'audience doit être publique).
En effet, seules les demandes émanant de l'Angleterre et du Pays de Galles seront acceptées. Celles provenant d'Écosse et d'Irlande du Nord "ne le seront normalement pas", pas plus que celles provenant d'Australie, le pays natal de Julian Assange.
Les violations peuvent entraîner un "outrage au tribunal", passible d'une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à deux ans.
Cela n'empêche pas les partisans de manifester leur soutien au fondateur de WikiLeaks.
Le jour de l'audience, en effet, des manifestations publiques auront lieu dans les rues et sur les places du monde entier pour réclamer justice. Pour Assange et pour la liberté de la presse.
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25- ♟ Stella Assange : "Julian pourrait être dans un avion pour les Etats-Unis au lendemain de l'audience"
Interview - Dans un entretien accordé à Der Freitag, Stella Assange parle de l'audition de son mari devant la Cour suprême britannique, de son regard sur l'État de droit en Grande-Bretagne et de ses craintes pour l'avenir des démocraties.

Par Uli Kreikebaum, le 16 février 2024, Der Freitag
🎙 Mme Assange, le silence a régné au sujet de votre mari ces derniers mois. Comment va-t-il ?
Physiquement, ses problèmes de santé se sont aggravés et il vieillit prématurément. Il est détenu depuis cinq ans dans une prison à sécurité maximale, soumis aux restrictions d'un grand criminel – sans avoir été condamné. Uniquement parce que les États-Unis ont demandé son extradition.
🎙 Comment va-t-il mentalement ?
C'est un combat de chaque bataille instant. Julian reçoit de nombreuses lettres et messages de soutien, il est très important pour lui de savoir qu'il n'est pas seul à se battre pour sa liberté. Les visites de mes enfants et les miennes en prison sont cruciales pour lui.
🎙 Quand l'avez-vous vu pour la dernière fois ?
Le 3 février. La prochaine visite aura lieu le 17 février, peu avant l'audience au cours de laquelle la décision concernant son extradition vers les États-Unis sera prise. C'est une période extrêmement difficile pour lui, mais il est concentré sur le procès à venir. Il espère pouvoir assister à l'audience cette fois-ci. La dernière fois, ce droit lui a été refusé.
🎙 À quel point votre vie a-t-elle changé depuis votre rencontre avec Julian Assange ?
C'est un virage à 180 degrés. Mes priorités dans la vie, la façon dont je comprends le monde qui m'entoure. Le monde a également changé depuis. Lorsque j’ai rencontré Julian, les démocraties occidentales étaient plus ouvertes et plus attachées aux libertés civiles et aux droits de l’homme. Le monde occidental a évolué vers l’autoritarisme à une vitesse folle.
🎙 Il semble que vous ayez perdu confiance dans l’État de droit.
Mon mari a été persécuté par l'abus de droit, j'ai donc une perspective cynique sur cette notion. J’ai vu une affaire politiquement motivée passer devant plusieurs tribunaux, j’ai vu plusieurs juges fermer les yeux sur la loi, ignorer nos preuves et rejeter les appels. Sans intérêts politiques, Julian n’aurait pas passé un seul jour en prison. Le pays qui souhaite son extradition a ourdi un complot d’assassinat contre lui. La demande elle-même viole l’article 4 du traité d’extradition entre les États-Unis et le Royaume-Uni, qui interdit les extraditions pour crimes politiques.
🎙 Dans quel état d'esprit abordez-vous l'audience des 20 et 21 février ?
Je connais trop bien le déroulement jusqu'à présent pour me faire beaucoup d'illusions. Julian est bien défendu, mais si même des preuves tangibles que le gouvernement américain a discuté et élaboré des plans concrets pour l'assassinat de Julian sont balayées par les tribunaux britanniques, on peut se demander ce qu'il faudrait faire pour rétablir l'objectivité au tribunal. Bien sûr, je ne souhaite rien d'autre que d'avoir tort : entendre le 21 février une décision très aisément motivable selon laquelle Julian ne sera pas extradé et sera libéré.
🎙 Si, comme on peut s'y attendre, l'appel est rejeté, quelle sera la prochaine étape ?
Julian s'adressera à la Cour européenne des droits de l'homme et demandera une ordonnance d'urgence pour empêcher le Royaume-Uni de le mettre dans un avion. Cela ne se fait pas automatiquement. La vie de Julian sera à ce moment-là entre les mains des juges européens. Et l'on peut se demander si le Royaume-Uni respectera une telle injonction.
🎙 Cela signifie que vous craignez que votre mari soit extradé sans délai ?
C'est fort possible. Julian pourrait être dans un avion pour les États-Unis au lendemain de l'audience s'il perd. Le Royaume-Uni enfreindrait le droit international s'il ne se conformait pas à la Cour européenne des droits de l'homme - mais je ne crois pas que ce soit impossible.
🎙 Le cas Assange n'est plus mentionné que sporadiquement dans la presse allemande - et lorsque c'est le cas, ce sont des politiciens de l'opposition ou des défenseurs des droits de l'homme qui prennent la parole, bien qu'Annalena Baerbock et Robert Habeck, par exemple, se soient prononcés pour la libération de votre mari avant d'assumer des responsabilités gouvernementales. Pourquoi une telle omerta ?
Le cas de Julian est politisé de bout en bout. Ce silence est inquiétant. Il n'y a pas de véritable engagement en faveur des droits de l'homme ou de la liberté de la presse lorsque les gouvernements européens hésitent à dénoncer les gouvernements qui font souffrir Julian en prison pour avoir publié des preuves de crimes de guerre. Je constate ici une évolution qui m'inquiète profondément. Mais il y a aussi des lueurs d'espoir, malgré tout.
🎙 Lesquels vous viennent à l'esprit ?
Le soutien international de la société civile, de célébrités, d'anciens ministres, d'Allemagne aussi, je pense à Günter Wallraff, Sigmar Gabriel ou Gerhart Baum. L'année dernière, j'ai rencontré un fonctionnaire allemand du ministère des Affaires étrangères et j'espère qu'il se passe plus de choses en coulisses, même si les politiciens au pouvoir ne dénoncent pas publiquement la comédie sordide autour de mon mari. J'espère qu'ils vont faire quelque chose en coulisses. Mais je l'ignore.
🎙 Votre époux a pressenti très tôt ce qui pourrait arriver. Dès l'été 2010, alors qu'il préparait la publication des documents secrets sur les crimes de guerre en Afghanistan et en Irak avec des médias internationaux comme le New York Times, The Guardian ou Der Spiegel, il pensait que les États-Unis pourraient le poursuivre en vertu de l'Espionage Act. Puis sont apparues en Suède des accusations de viol, certes réfutées depuis longtemps, mais qui ont orienté le discours dans une autre direction. A-t-il été trop imprudent ?
Il n'a pas été imprudent. La loi sur l'espionnage a été détournée pour criminaliser le journalisme. C'est la première fois qu'un journaliste est poursuivi en justice sur la base de la loi sur l'espionnage. Ce précédent a été créé pour que le gouvernement américain de Trump puisse l'utiliser comme une arme pour intimider la presse et emprisonner les journalistes - et pas seulement leurs sources. Les États-Unis ont usé de la loi sur l'espionnage de la même manière que les régimes autoritaires utilisent leurs lois sur le secret pour arrêter les journalistes.
🎙 L'administration Obama avait refusé les poursuites, l'administration Trump a exigé l'extradition d'Assange.
... et l'administration Biden l'a maintenue, à sa plus grande honte.
🎙 En tant que juriste, comment lisez-vous l'acte d'accusation ?
Les procureurs américains ont délibérément créé une ambiguïté. En réalité, Chelsea Manning (la lanceuse d'alerte qui a transmis des documents secrets à Wikileaks) avait accès à toutes les bases de données parce que c'était son travail. L'acte d'accusation est dangereux à plus d'un titre pour la communauté journalistique. L'utilisation d'outils d'anonymisation comme TOR est présentée comme une preuve d'activité criminelle. Tout bon journaliste d'investigation connaît et utilise TOR dans ses recherches en ligne. L'acte d'accusation criminalise l'obtention d'informations à partir d'une source. Il s'agit de la même accusation que celle portée par la Russie contre le journaliste du WSJ Evan Gershkovich.
🎙 L’acte d’accusation criminalise également la possession d’informations, ainsi que la divulgation d’informations au public.
Sur les 175 années de prison incriminées, 30 concernent le simple fait de publier. Cependant, les journalistes d’investigation doivent pouvoir communiquer avec leurs sources et publier des informations que le gouvernement cache au public, faute de quoi ils ne pourront pas remplir leur travail d’information du public.
🎙 Alors, que signifierait une condamnation de votre mari aux États-Unis pour l’avenir de la liberté de la presse ?
Sans les protections, qui sont violées par l’accusation, aucun journaliste n’est en sécurité et ne voudra pas risquer sa vie ou sa liberté. Julian est utilisé partout dans le monde pour dissuader les journalistes, mais cela établirait également une nouvelle norme politique et juridique selon laquelle les journalistes et les éditeurs seront désormais des proies équitables.
🎙 On ne parle presque plus du fait que Wikileaks ait publié des preuves de crimes de guerre graves. Sur le fait que l'armée américaine a abattu des civils, y compris des journalistes, pendant la guerre en Irak. Pourquoi ?
Il y a eu un effort concerté, encouragé par les plus hauts niveaux du gouvernement américain et ses alliés, en particulier l’armée et les services de renseignement, pour cibler Julian. Un rapport de Yahoo News de 2021 a révélé comment la CIA, dirigée par Mike Pompeo, a mené toute une opération contre Julian, notamment en diffusant des faux récits fabriqués dans les médias. Cette vaste campagne de propagande de haut niveau poursuit un objectif principal : détourner l’attention du fait qu’il est persécuté et emprisonné pour son journalisme. Il est désormais emprisonné sans condamnation depuis près de cinq ans. Sans avoir commis un quelconque acte criminel.
🎙 L'acte d'accusation stipule qu'Assange a "révélé les noms de sources humaines et généré un danger grave et imminent pour la vie et l'intégrité physique des personnes". Qu'en est-il de cette accusation ?
Julian Assange a pris toutes les précautions pour s'assurer qu'aucun nom de personnes risquant d'être détenues arbitrairement ou de subir des violences physiques ne soit mentionné. Dans le cas des journaux de guerre afghans, 15 000 documents ont été retenus pour cette raison. Les journaux de guerre en Irak comportaient des noms et des informations d'identification expurgés, ce qui a conduit Wikileaks à être critiqué par les médias américains pour sa rédaction excessive. En ce qui concerne les documents, Julian a posé comme condition à ses partenaires médiatiques que tout soit occulté afin de protéger les personnes. Cela a fonctionné pendant neuf mois, mais malheureusement, le Guardian a publié un livre qui violait son accord avec Wikileaks, notamment en divulguant un mot de passe de cryptage qui permettait à quiconque d'accéder aux données non cryptées - en utilisant le mot de passe divulgué dans le livre. Quoi qu'il en soit, tant devant la cour martiale de Manning que lors de l'audience d'extradition de Julian, les États-Unis ont admis sous serment qu'ils n'avaient aucune preuve qu'une seule personne ait été blessée à la suite de ces publications. Pourtant, ils propagent délibérément cette affirmation comme s’il s’agissait d’un fait.
🎙 Que signifierait l’extradition de votre mari vers les États-Unis pour l’avenir de la liberté de la presse et du journalisme ?
Cette affaire constitue la plus grande attaque contre le journalisme international que le monde ait jamais connue. Cela criminalise non seulement le processus journalistique, mais également le droit du public à l'information. N’importe quel pays peut s’inspirer de cette affaire et s’en servir pour inculper, extrader et emprisonner des journalistes étrangers hors de ses frontières. Comme nous l’avons vu, le Royaume-Uni est prêt à emprisonner Julian et à violer ses droits pour éviter de s’aliéner son allié – nous pouvons également nous attendre à cette dynamique de la part d’autres pays.
🎙 L'ancien représentant spécial des Nations unies pour la torture, Nils Melzer, a parlé de torture psychologique à propos du traitement de votre mari en prison. Votre mari aurait eu des tendances suicidaires. Êtes-vous d'accord avec l'estimation selon laquelle il ne survivrait pas à une extradition ?
S'il est extradé, il sera soumis à des conditions si pénibles qu'elles le pousseraient au suicide. La semaine dernière encore, la nouvelle rapporteure spéciale des Nations unies sur la torture a fait une déclaration dans laquelle elle exhorte le Royaume-Uni à ne pas extrader Julian. Sa vie est en grave et imminent danger.
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26 - ♟ La CIA entend invoquer le "secret d'État" pour faire taire les avocats et les journalistes illégalement surveillés lors de leurs rencontres avec Assange
Par Trevor FitzGibbon, le 14 février 2024, Intelligencer Today
Des avocats et des journalistes américains poursuivent la CIA en justice, alléguant qu'ils ont été espionnés à tort alors qu'ils rendaient visite à Julian Assange à l'ambassade d'Équateur à Londres.
L'honorable John G. Koeltl, juge du tribunal de district des États-Unis pour le district sud de New York à Manhattan, a refusé d'accéder à la requête de la CIA visant à rejeter le litige, estimant que l'allégation selon laquelle le gouvernement fédéral était impliqué dans un plan illicite visant à saisir les appareils électroniques des plaignants devait être maintenue contre la CIA. En rejetant la requête de la CIA, la Cour a déclaré :
"La plainte des plaignants contient suffisamment d'allégations selon lesquelles la CIA et Pompeo, par l'intermédiaire de Morales et de la société UC Global, ont violé leur attente raisonnable de protection de la vie privée en ce qui concerne le contenu de leurs appareils électroniques".
La Cour a poursuivi en stipulant que parce que "dans un discours d'avril 2017, Pompeo 's'est engagé à ce que son bureau s'engage dans une campagne 'à long terme' contre WikiLeaks'", il y avait suffisamment de raisons pour que l'affaire se poursuive.
L'avocat principal du plaignant, Richard Roth, du cabinet Roth Law Firm, PLLC a fait savoir :
"L'AUSA a indiqué qu'elle avait besoin de deux mois pour décider si elle invoquerait le privilège du secret d'État, ce qui, selon elle, prendra du temps, car la CIA et le Bureau du directeur du renseignement national doivent examiner la décision".
"Elle prétend en outre qu'elle ne peut même pas répondre à la plainte sans divulguer des secrets d'État, ce qui semble à première vue discutable puisque la réponse se contente d'admettre ou de nier les allégations. Le tribunal, se pliant en quatre pour ne pas porter atteinte à un quelconque privilège, a donné à l'AUSA jusqu'au 15 avril pour prendre cette décision. De notre point de vue, nous ne pouvons pas imaginer qu'il existe un quelconque privilège lié à des informations confidentielles concernant des citoyens américains qui se sont rendus à l'ambassade d'Équateur. Nous attendrons le mois d'avril pour en savoir plus", a-t-il déclaré.

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27- ♟ Inauguration de l'expositio de photographies éthiques "HURRY UP !". Regards sur le travail des molitants pour la libération de Julian Assange
Par Pressenza Italia, le 12 février 2024
"HURRY UP !", l'exposition itinérante de photographie éthique d'Antonietta Chiodo, reporter pour la Palestine et News Academy, après None, Turin, Chiusi, Cosenza et Naples (à l'occasion de la remise de la citoyenneté honoraire à Julian Assange par la ville de Naples) arrive enfin à Rome, au Parco delle Energie.
L'inauguration aura lieu le lundi 12 février 2024 à 17h00, dans la salle OVAL du Parco delle Energie, Via Prenestina n.175 et se fera en présence non seulement de la journaliste Antonietta Chiodo, auteur des photos, mais aussi de Vincenzo Vita, garant de Articolo 21 et cofondateur de La Mia Voce per Assange, de Davide Dormino, l'artiste auteur de Anything To Say ? et, bien sûr, les promoteurs de l'événement Free Assange Italia, le groupe qui rassemble les activistes en faveur d'Assange dans diverses régions d'Italie, et le Crossroads International Centre, l'organisation qui travaille sur des projets et des campagnes en faveur de l'agroécologie, de la pêche artisanale et des droits des agriculteurs et des travailleurs agricoles dans le monde entier depuis 1958.
L'exposition retrace le travail de citoyens ordinaires, actifs le long de la péninsule, pour la libération du journaliste australien, injustement emprisonné depuis bientôt cinq ans dans la prison de haute sécurité de Belmarsh, près de Londres.
Cette exposition arrive dans la capitale à un moment très délicat pour le journaliste puisque les 20 et 21 février, la Haute Cour de justice britannique se réunira pour statuer sur le recours déposé par les avocats de Julian Assange afin d'éviter son extradition vers les États-Unis, où la prison à vie l'attendrait.
Les institutions internationales et humanitaires les plus reconnues considèrent sa détention comme une violation manifeste des droits de l'homme à l'encontre d'une personne qui exerce librement son métier de journaliste, ainsi qu'une violation de notre droit à la garantie d'une information libre et indépendante, principe fondamental de toute démocratie.
En attendant, la capitale attend depuis des mois que l'Assemblée du Capitole conclue le processus d'octroi à Julian Assange de la citoyenneté honoraire de Rome. (ndr : c'est officiellement chose faite depuis cet article).
Du 12 au 20 février à la salle d'exposition du Parco delle Energie, via prenestina 175 (hauteur Pigneto) tous les jours de 16 à 19 heures.
📰 https://www.pressenza.com/it/2024/02/roma-mostra-per-julian-assange/
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28- ♟ Une conférence de presse à Londres alerte sur les dangers de l'extradition d'Assange
Par Thomas Scripps, le 15 février 2024, WSWS
Le fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, "pourrait se retrouver à bord d'un avion à destination des États-Unis dans les jours qui viennent". C'est ce qu'a déclaré son épouse Stella à l'ouverture d'une conférence de presse organisée par l'Association de la presse étrangère (Foreign Press Association) à Londres jeudi. Elle était accompagnée de Kristinn Hrafnsson, rédacteur en chef de WikiLeaks, et de Rebecca Vincent, directrice de Reporters sans frontières.
Assange, citoyen australien, est inculpé en vertu de la loi américaine sur l'espionnage (Espionage Act) et risque une peine de 170 ans de prison pour avoir dénoncé des crimes de guerre américains et d'autres violations des droits de l'homme, notamment pendant les guerres d'Afghanistan et d'Irak. Lors d'une audience qui se tiendra mardi et mercredi prochains devant la Haute Cour du Royaume-Uni, il demandera l'autorisation de faire appel de l'ordre d'extradition qui lui a été délivré.
Stella a souligné que
"c'est l'ultime instance, si la décision ne va pas dans le sens de Julian, il n'y a plus aucune possibilité d'appel devant la Cour suprême ou ailleurs dans cette juridiction".
Une décision en faveur d'Assange conduirait à une audience d'appel complète par la suite.
Résumant les enjeux, Hrafnsson a déclaré que l'extradition d'Assange aurait "des implications sombres et très graves sur les libertés de la presse dans le monde entier". Si Assange peut être poursuivi par les États-Unis,
"aucun journaliste, où qu'il soit, n'est à l'abri. Nous assistons à une attaque rampante contre la liberté de la presse dans le monde entier. Comme une maladie... Julian Assange a été le canari dans la mine de charbon".
Hrafnsson a évoqué la loi sur la sécurité nationale adoptée au Royaume-Uni en décembre dernier, laquelle est "fortement inspirée de la loi américaine sur l'espionnage (Espionage Act)".
Si les juges se prononcent contre Assange, a dit Stella aux journalistes,
il "s'adressera à la Cour européenne des droits de l'homme pour obtenir une ordonnance en vertu de l'article 39 afin d'empêcher l'extradition, ainsi qu'une requête complète soulevant tous les points que nous avons fait valoir au fil des ans, à savoir que les droits de l'homme de Julian ont été complètement violés, systématiquement violés pendant des années et des années".
Mais, prévient-elle,
"l'article 39 a fait l'objet de nombreux articles ces derniers temps ; nous connaissons tous la position du gouvernement en ce qui concerne les expulsions. Nous connaissons tous la position du gouvernement sur la question des expulsions et il s'agit bien sûr d'une préoccupation majeure".
Le gouvernement a envisagé des options afin de contourner ou d'ignorer totalement ses obligations en vertu de la Convention européenne des droits de l'homme dans le cadre de sa politique d'expulsion des demandeurs d'asile vers le Rwanda.
Stella a ajouté que les juges de la Haute Cour
"peuvent rendre leur verdict le jour même [de la clôture de l'audience, mercredi] et dire ensuite que leur argumentation écrite sera publiée en temps voulu - cela s'est déjà produit auparavant. Nous sommes bien sûr extrêmement inquiets que la décision puisse être prise sur-le-champ et que le ministère de l'intérieur prenne des mesures pour l'extrader sans tarder".
Hrafnsson a ajouté :
"Certains ont été amenés directement du palais de justice... à l'aéroport pour être embarqués à bord d'un avion d'extradition."
D'autres détails ont été donnés sur les conditions abusives dans lesquelles Julian Assange est détenu au Royaume-Uni pour le compte du gouvernement américain.
Stella a expliqué que Julian n'avait toujours pas été autorisé à comparaître en personne devant le tribunal, comme il l'avait demandé afin de pouvoir "demander des éclaircissements et consulter ses avocats devant le tribunal". Sa demande a été rejetée lors de sa précédente audience publique, à laquelle il avait eu accès "par vidéoconférence, comme un simple spectateur". La dernière fois qu'Assange a pu quitter la prison de Belmarsh, ne serait-ce que pour se rendre au tribunal, "remonte au 6 janvier 2021".
À Belmarsh, il est enfermé dans une cellule de 3 mètres sur 2 "plus de 22 heures par jour". Il a été malade pendant une semaine à Noël, et ce n'est "qu'après l'intervention du haut-commissaire [australien] qu'il a pu voir un médecin. Sa santé est en déclin, tant sur le plan mental que physique. Chaque jour supplémentaire passé en prison menace un peu plus sa vie".
Rebecca Vincent a ajouté que, lors d'une visite à Assange après sa maladie, "j'étais très préoccupé par son état de santé. À ce moment-là, il toussait tellement qu'il s'était cassé une côte et souffrait beaucoup. Sa situation est désormais bien sombre."
Décrivant son maintien en détention et son extradition comme une "question de vie ou de mort", elle a fait référence à la déclaration du rapporteur spécial des Nations unies sur la torture, le Dr Alice Edwards, qui a publié un communiqué la semaine dernière mettant en garde contre les "conséquences désastreuses pour la santé et le bien-être de Mr Assange".
Mme Edwards a prédit qu'il était
"très probable que toute forme d'isolement et de confinement solitaire, en particulier un confinement solitaire prolongé, ait un impact irréparable sur la santé psychologique et même, potentiellement, physique de Mr Assange".
Les conditions aux États-Unis seraient encore pires, Stella dénonçant l'hypocrisie des "soi-disant garanties américaines" selon lesquelles Assange serait bien traité, et qui ont servi de prétexte à la Haute Cour pour renverser la décision initiale contre l'extradition en raison de son risque élevé de suicide.
Se référant aux "rapports erronés" de ces faits, qui n'étaient pas seulement "trompeurs" mais "malveillants", elle a déclaré :
"Il ne s'agit pas de garanties. Tout d'abord, elles sont conditionnelles. Elles n'empêchent aucunement les États-Unis de faire ce que bon leur semble. En fait, elles autorisent ce pays à lui imposer les conditions mêmes qui, selon la juge Vanessa Baraitser, le pousseraient à se suicider..."
"Qui détermine les conditions dans lesquelles Julian sera placé s'il est extradé vers les États-Unis ? Les agences de renseignement. Celles-là mêmes qui ont comploté pour l'assassiner ".
"Julian sera mis au trou s'il est extradé. Il n'y a aucun doute là-dessus. Un trou si profond que je ne pense pas le revoir un jour. Et après 13 ans d'abus et de torture, pensez-vous vraiment qu'une personne puisse survivre à cela ?"
Stella a également fait référence au traitement récent de Joshua Schulte, présumé être la source derrière les fuites Vault 7 d'outils de cyberespionnage de la CIA publiées par WikiLeaks en 2017. Schulte "vient d'être condamné à 40 ans de prison. Je veux dire, réfléchissez à ce que cela signifie. C'est un coup digne de la mafia".
Avant et pendant son procès, il a été "détenu dans le cadre de mesures administratives spéciales, ce qui est un euphémisme pour désigner la torture."
Selon Hrafnsson, WikiLeaks serait également
"entravé dans ses activités aux États-Unis. Des avocats ont conseillé au personnel de WikiLeaks de ne pas se rendre sur le sol américain".
La raison, a-t-il expliqué, est la déclaration de l'ancien directeur de la CIA, Mike Pompeo, selon laquelle WikiLeaks est considéré comme un "service de renseignement hostile non étatique".
Il s'agit d'une "définition juridique très réfléchie dont nous savons maintenant qu'elle a été définie pour justifier le projet d'enlèvement ou d'assassinat de Julian Assange".
Dans ses conclusions, Hrafnsson a insisté sur la nécessité de mettre fin à l'affaire "immédiatement", soulignant la "punition par la procédure" qu'Assange devait subir dans "une tentative manifestement délibérée de l'épuiser" à travers des années de procédures judiciaires et d'abus.
"La demande initiale d'appel a été déposée devant les tribunaux en septembre 2022. Il a fallu dix mois pour que le juge Swift, c'est son nom ( en anglais, swift signifie rapide), présente deux pages et demie d'absence d'argument : simplement, 'J'ai lu tout cela, je ne vois aucun motif d'appel'. Et maintenant, nous en sommes là, huit mois plus tard...
Cela vous donne une idée du temps écoulé. Cinq ans. Pendant qu'il poireaute et meurt lentement en prison".
L'audience d'Assange débutera mardi matin 20 février. Le Parti socialiste pour l'égalité et le World Socialist Web Site encouragent leurs lecteurs et sympathisants à nous rejoindre lors de la manifestation devant les Cours royales de justice au centre de Londres.
📰 https://www.wsws.org/en/articles/2024/02/15/bsef-f15.html
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29- ♟ Réponses reçues par les journalistes et certains membres du public du tribunal britannique à leurs demandes d'assister physiquement ou par lien vidéo aux audiences du jour J
Source Twitter X La Fleur Productions, lien du document : https://drive.google.com/file/d/1xXu6EEyk-t-pfsYeJk6HjaJ1YGXHWY1Z/view
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30- ♟ Les "complots de mort" autour d'Assange
La CIA, puis le ministère américain de la justice pourraient prendre des mesures visant à tuer le fondateur de Wikileaks, Julian Assange.
Par Kellie Tranter, le 18 février 2024, Declassified
Des documents obtenus dans le cadre de demandes d'accès à l'information (FOI) ont révélé un aspect inquiétant des efforts officiels australiens concernant le fondateur de Wikileaks, Julian Assange.
En septembre 2021, le DFAT a pris connaissance d'articles de presse détaillant les plans de la CIA pour assassiner Assange à Londres. Le complot révélé aux journalistes de Yahoo News, qui se sont entretenus avec plus de 30 sources des services de renseignement, impliquait que la CIA envisage d'empoisonner Assange à l'ambassade d'Équateur ou de l'abattre s'il tentait de s'enfuir.
Les documents du DFAT obtenus par Declassified Australia ne font état d'aucune démarche en faveur de la vie d'Assange à la suite de ce développement. Cela ne veut toutefois pas dire que des démarches n'ont pas été entreprises ailleurs.
Aujourd'hui, alors qu'Assange fait face à une extradition imminente vers les États-Unis, un autre risque mortel se profile à l'horizon.
Il est tout à fait possible que de nouvelles accusations soient portées contre lui aux Etats-Unis. Rappelons que 17 chefs d'accusation supplémentaires ont été ultérieurement ajoutés par les autorités américaines au chef d'accusation initial pour lequel il a été arrêté à l'ambassade en 2019.
L'année dernière, des rapports ont fait apparaître que les enquêteurs du Federal Bureau of Investigations (FBI) continuaient d'interroger d'autres témoins à la recherche de nouvelles preuves potentielles contre Assange. La probabilité de nouvelles accusations après l'extradition vers les États-Unis doit être considérée comme une réelle possibilité.
Bien que l'État de Virginie, où Assange sera détenu et comparaîtra devant un tribunal en cas d'extradition, ait aboli la peine de mort, plusieurs lois fédérales susceptibles d'être utilisées pour porter d'autres accusations la prévoient toujours, et ce sont ces lois qui priment.
La législation britannique n'autorise toutefois pas l'extradition d'une personne vers une juridiction où elle risque la peine de mort. On ne sait pas comment, ni même si, le tribunal britannique abordera cette possibilité de nouveaux chefs d'accusation passibles de la peine de mort lors de l'examen de la demande d'extradition des États-Unis.
On peut penser que cette crainte réelle fait partie de l'appel final de l'équipe juridique d'Assange, qui sera présenté à la Haute Cour britannique la semaine prochaine.
Effort de dernière minute
Dans un surprenant effort de dernière minute pour sauver Assange, le parlement australien a approuvé la semaine dernière une motion appelant à sa libération.
Le 14 février, l'indépendant Andrew Wilkie a présenté une motion d'initiative parlementaire concernant Julian Assange à la Chambre des représentants australienne. Cette motion a été adoptée par 86 voix contre 42, y compris le vote favorable du Premier ministre Anthony Albanese.
Voici les termes de la motion :
1 a. Les 20 et 21 février 2024, la Haute Cour de justice du Royaume-Uni tiendra une audience pour déterminer si le journaliste lauréat du prix Walkley, Mr Julian Assange, peut faire appel de son extradition vers les États-Unis d'Amérique ;
b. Mr Assange est toujours incarcéré au HMP Belmarsh au Royaume-Uni, dans l'attente d'une décision quant à son extradition vers les États-Unis pour faire face à des accusations concernant des documents publiés en 2010, lesquels ont révélé des preuves choquantes de mauvaise conduite de la part des États-Unis [italiques ajoutés] ; et
c. le gouvernement australien ainsi que l'opposition ont tous deux déclaré publiquement que cette affaire n'avait que trop duré ; et
2. souligne qu'il est important que le Royaume-Uni et les États-Unis mettent un terme à cette affaire afin que Mr Assange puisse rentrer chez lui et retrouver sa famille en Australie.
Des documents obtenus en vertu des lois sur la liberté d'information révèlent que des fonctionnaires du DFAT ont défini en septembre de l'année dernière la délégation parlementaire australienne qui s'est rendue à Washington DC pour plaider en faveur de la libération de M. Assange et de son retour en Australie comme "un membre est un député du gouvernement, la délégation ne représente pas et n'est pas mandatée par le gouvernement australien ou le Parlement australien".
Ce n'est plus le cas. Lorsque Wilkie se rendra à Londres pour l'audition d'Assange cette semaine et qu'il fera face aux médias, il le fera avec un mandat très clair de soutien à Assange de la part du Parlement australien.
Les conséquences potentielles auxquelles Assange devra faire face s'il est extradé du Royaume-Uni vers les États-Unis ont été signalées par la ministre des affaires étrangères, Penny Wong, il y a trois ans, alors qu'elle était dans l'opposition. Lors d'un échange de vues au Sénat, elle a également posé la question suivante : "Quelles attentes ou demandes ont été faites au Royaume-Uni en ce qui concerne les conditions d'une éventuelle extradition ?"
Mme Wong a insisté auprès des représentants du DFAT sur le fait que Assange risquait de se voir infliger une peine cumulée qui correspondrait "en fait au reste de sa vie" et "qu'il ne serait pas exécuté mais condamné à 100 ans et quelques, ce qui correspondrait en fait à une peine d'emprisonnement jusqu'à sa mort".
Wong a demandé aux fonctionnaires du DFAT s'ils avaient fait des observations concernant les conditions qui pourraient être associées à une extradition. Le DFAT a confirmé qu'aucune démarche n'avait été entreprise.
Les fonctionnaires du DFAT savaient pourtant qu'en vertu de la législation britannique, une personne ne peut être extradée vers un autre pays si elle est passible de la peine de mort. Ils ont reconnu que les États-Unis appliquaient toujours la peine capitale au niveau fédéral et ont admis qu'il était possible que d'autres charges soient retenues contre Assange en cas d'extradition vers les États-Unis.
On ne sait toujours pas si le gouvernement actuel ou la ministre des affaires étrangères Wong elle-même a fait des démarches auprès du gouvernement britannique au sujet des conditions d'une éventuelle extradition, au cas où celle-ci serait ordonnée par la Haute Cour britannique cette semaine. De même, malgré les conséquences personnelles désastreuses pour Assange d'un atterrissage sur le sol américain, nous ne savons pas si un accord de plaidoyer post-extradition est toujours envisagé.
L'espionnage fait partie des infractions fédérales américaines passibles de la peine capitale. Même lorsqu'ils envisageaient d'expulser Assange de leur ambassade, les Équatoriens ont demandé aux États-Unis l'assurance qu'il ne serait pas passible de la peine de mort. Une assurance verbale a apparemment été donnée à l'époque, bien que l'accusation portée contre lui se limitait alors à une accusation de piratage informatique et ne s'étendait pas aux accusations ultérieures au titre de la loi sur l'espionnage (Espionage Act).
Greg Barns SC, conseiller de la campagne australienne contre Assange, a déclaré à Declassified Australia :
"L'importance de veiller à ce que Julian Assange ne soit pas condamné par un tribunal américain est monumentale, non seulement en termes de liberté des médias, mais aussi en termes de portée territoriale des États-Unis, qui cherchent à faire taire les éditeurs et les journalistes qui ne sont pas citoyens américains et qui n'ont pas publié à partir de leur pays."
"Si les poursuites contre Assange aboutissent, quiconque révèle des informations sur les opérations de défense et de sécurité des États-Unis s'exposera à une demande d'extradition".
Que se passe-t-il ensuite ?
Quelle est donc la situation d'Assange en ce qui concerne l'éventualité d'une condamnation à mort ? Nous pouvons trouver quelques indications dans le rapport actualisé du Service de recherche du Congrès des États-Unis intitulé Federal Capital Offenses : An Overview of Substantive and Procedural Law (les infractions fédérales capitales : un aperçu du droit substantiel et procédural) publié le 5 juillet 2023.
Les États-Unis pourraient faire valoir que les activités de publication d'Assange constituent un acte d'espionnage passible de la peine capitale parce qu'elles impliquent la divulgation d'informations relatives à des éléments de la stratégie de défense américaine dans l'intention de nuire aux États-Unis ou d'aider un gouvernement étranger, ou de communiquer des informations relatives à la défense nationale à l'ennemi en temps de guerre.
Il n'est pas nécessaire que quelqu'un ait été tué du fait de l'activité, comme c'est le cas ici où les États-Unis sont incapables de prouver qu'une personne a été tuée ou a subi un préjudice du fait des publications d'Assange, et depuis 1954, il importe peu que l'espionnage ait eu lieu en temps de paix ou en temps de guerre.
La question de savoir si des charges supplémentaires entraînant la peine capitale peuvent être présentées est toutefois un peu plus compliquée si Assange est extradé pour faire face aux charges contenues dans l'acte d'accusation modifié actuel. L'article 18 du traité d'extradition entre les États-Unis et le Royaume-Uni intègre la règle de spécialité prévue par le droit international, selon laquelle, sous réserve d'exceptions spécifiques, une personne extradée en vertu du traité ne peut être détenue, jugée ou punie dans l'État requérant que pour l'infraction pour laquelle l'extradition a été accordée, ou pour une infraction différemment qualifiée fondée sur les mêmes faits que l'infraction pour laquelle l'extradition a été accordée, à condition que cette infraction puisse donner lieu à extradition.
Si les infractions passibles de la peine capitale sont "non extradables" au Royaume-Uni, alors tout va bien. Toutefois, le traité permet à l'autorité exécutive de l'État requis (le Royaume-Uni) de renoncer à la règle de la spécificité et de consentir à ce que la personne soit détenue, jugée ou punie pour une infraction différente, même si la pratique habituelle et préférée du Royaume-Uni est de ne pas renoncer à la règle de la spécificité en l'absence d'une disposition spécifique du traité autorisant la renonciation. Malheureusement, la conduite des autorités américaines et britanniques à pratiquement tous les niveaux dans l'affaire Assange a été loin d'être "normale" ou "habituelle", de sorte qu'il n'est vraiment pas prudent de s'appuyer sur des hypothèses de régularité ou des assurances.
En vertu du droit fédéral américain, la peine de mort peut être appliquée indépendamment du fait que l'État dans lequel se déroule le procès dispose ou non de ses propres lois sur la peine capitale. Certains crimes relevant de la juridiction fédérale, notamment l'espionnage, peuvent être passibles de la peine de mort même si l'État dans lequel le procès a lieu ne l'applique pas.
Le fait que l'État dans lequel il est jugé "n'applique pas la peine de mort" ne réconforte donc en rien M. Assange, puisque le gouvernement américain peut toujours recourir à la peine capitale comme sanction potentielle. En effet, de 1988 à octobre 2019, des jurys fédéraux ont appliqué cette peine à huit personnes condamnées dans des États où la peine de mort n'existait pas.
L'application de la peine capitale est soumise à des lois fédérales spécifiques et la décision de l'appliquer est généralement prise par le Capital Review Committee du ministère américain de la justice et approuvée par l'Attorney General.
Compte tenu de l'antipathie exprimée et démontrée par d'innombrables législateurs américains républicains et démocrates depuis plus de dix ans, compte tenu de la manière dont les États-Unis sont revenus sur les assurances données aux tribunaux dans d'autres affaires d'extradition et compte tenu de l'incertitude quant à l'identité de la personne qui occupera la Maison Blanche dans douze mois, Assange, ou une Australie cherchant des "assurances", pourrait-il vraiment se fier à une quelconque garantie de la part des États-Unis, à moins qu'elle ne soit écrite, sans équivoque et sans réserve ?
Il y a plus de deux ans, Yahoo News a révélé que Mike Pompeo, alors directeur de la CIA – qui est le nouveau conseiller stratégique de l'Australie auprès du pacte AUKUS - préparait l'enlèvement ou l'assassinat d'Assange en 2017. Les Australiens n'ont jamais reçu d'explication satisfaisante sur ce que le gouvernement Turnbull savait de ce complot américain manifestement illégal contre un citoyen australien, ni sur le moment où il l'a su, ni sur les mesures prises en réponse à ces révélations.
Tout ce que nous savons, c'est que l'ancien Premier ministre, Malcolm Turnbull, et l'ancienne ministre des affaires étrangères, Marise Payne, ont affirmé qu'ils n'avaient découvert les plans de la CIA que "dans la presse". Le gouvernement australien n'a en tout cas pas manifesté d'indignation publique à l'égard du gouvernement de "notre plus proche allié".
Une demande d'accès à l'information déposée auprès du ministère des affaires étrangères et du commerce le 4 octobre 2023 pour obtenir des documents relatifs à l'enquête de Yahoo News a permis d'identifier un document pertinent. L'accès à ce dernier a été refusé pour diverses raisons, notamment parce que "le document comprend un contenu qui a été fourni à titre confidentiel par un tiers extérieur à un agent diplomatique du ministère".
Fin de l'histoire ? Non, loin s'en faut.
Demander des comptes à la CIA
Indépendamment de ce qui se passera cette semaine au Royaume-Uni, l'affaire Kunstler contre CIA se poursuit aux États-Unis. En décembre dernier, la CIA a perdu sa tentative de rejeter le procès intenté contre elle pour avoir violé de nombreux droits des personnes ayant rendu visite à Assange à l'ambassade d'Équateur.
Il est presque certain que la procédure de communication de pièces dans le cadre de ce litige en cours permettra de mettre au jour de nombreux documents d'information sur l'affaire. Cette affaire pourrait également être l'occasion de contraindre l'ancien chef de la CIA, M. Pompeo, à témoigner. Les révélations faites dans le cadre de cette procédure pourraient s'avérer fort embarrassantes pour le gouvernement australien.
Les enjeux de l'affaire Assange ne pourraient être plus élevés pour les journalistes du monde entier. L'issue de l'affaire déterminera si les États-Unis peuvent demander l'extradition d'un journaliste, quelle que soit sa nationalité, d'un pays avec lequel ils ont conclu un traité d'extradition, pour avoir révélé des crimes de guerre américains.
Et si Assange est extradé et contraint de plaider coupable d'un quelconque chef d'accusation en échange d'une peine relativement clémente purgée en Australie, il entérine implicitement l'affirmation des États-Unis selon laquelle leurs lois ont une portée internationale sur les journalistes du monde entier. C'en est fini de la "presse libre" et de toute perspective réelle d'obliger le pouvoir à rendre des comptes.
Enfin, si le gouvernement australien ne parvient pas à empêcher l'extradition par le Royaume-Uni ou les poursuites par les États-Unis, voire les deux, il montrera également que notre "alliance" avec ces pays ne sera guère plus qu'un acte de soumission.
Kelly Tranter est avocate, chercheuse et défenseure des droits de l'homme. Elle tweete de @KellieTranter Voir tous les messages de Kellie Tranter
📰 https://declassifiedaus.org/2024/02/18/the-assange-death-plots/
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31- ♟ "L'extradition d'Assange mettra fin à la liberté de la presse" - Joe Lauria
Dans un entretien exclusif pour Élucid réalisé à Paris lors de la projection à l’Assemblée nationale du documentaire "Ithaka" sur l'affaire Assange , le journaliste américain Joe Lauria revient sur la possible extradition de Julian Assange aux États-Unis. Ce dossier brûlant pour les deux présidents américains (sortant et candidat) pourrait avoir un impact considérable sur les prochaines élections. Joe Lauria est journaliste d'investigation pour le Sunday Times of London et Bloomberg News ; il a produit des reportages depuis l'ONU pour le Boston Globe, le Wall Street Journal, le Washington Post et le Guardian. Il est rédacteur en chef de Consortium News et a publié avec Daniel Ellsberg, A Political Odyssey: The Rise of American Militarism and One Man's Fight to Stop It.
Par Marco Cesario, le 18 février 2024, Elucid
🎙 Marco Cesario (Élucid) : Comment se situe le débat américain autour de l'éventuelle extradition de Julian Assange aux États-Unis ?
Joe Lauria : Pour être honnête, il n'y a que trop peu de débats sur le sujet aux États-Unis, et cela m'attriste profondément. Néanmoins, dès qu'une décision officielle aura été annoncée, elle fera tout de suite la Une des journaux américains. Et si Julian Assange est extradé vers les États-Unis, ce sera une toute autre histoire, un grand sujet pour les médias et la société civile, car le procès se déroulera à Washington, en Virginie, au beau milieu d'une campagne présidentielle. C'est pour cela que Joe Biden préférerait que la Haute Cour prenne sa décision un peu plus tard, d'ici neuf mois, c'est-à-dire après les élections de novembre. Si Biden remporte à nouveau les élections, il pourra faire ce qu'il veut ensuite, sans que cela ait des conséquences sur son mandat. Et s'il perd l'élection, il lui restera encore deux mois jusqu'à l'investiture du nouveau président, ce qui lui permettra de faire ce qu'il veut sur le dossier Assange.
Pour le moment, Donald Trump reste très prudent et se dit ouvert à l'idée de gracier Assange. Mais il est pour le moins difficile de croire aux mots qui sortent de sa bouche et de lui faire confiance sur un tel sujet. Aucun candidat ne peut réellement dire ce qu'il fera avec Assange s'il est réélu. Les électeurs et sympathisants de Biden sont inquiets à cet égard, car ils comprennent parfaitement que la question de l'extradition d'Assange pourrait faire gagner beaucoup de voix à Trump. Joe Biden voudrait donc éviter de traîner Julian Assange devant un tribunal en entrant dans l'Histoire comme le président américain qui a fait juger un journaliste enchaîné venu d'Europe pour avoir publié des informations factuelles sur des crimes du gouvernement américain.
Pour le moment, l'affaire Assange ne fait pas l'objet d'importants débats, du moins dans les médias mainstream. Nous essayons de combler ce manque à notre échelle avec Consortium News. Cette situation représente une nette différence par rapport à il y a dix ans. En effet, à l'époque des révélations de WikiLeaks, chaque nouvel événement autour d'Assange entraînait des appels à son incarcération ou à sa mise à mort en direct à la télévision. Lorsque les War Lorgs de WikiLeaks ont été publiés en 2010, il y a eu beaucoup de débats dans les médias américains et la société civile, mais le niveau était vraiment pitoyable.
"Toutes celles et ceux qui ont renoncé à leur liberté parce qu'ils ont fait ce qu'il fallait faire, devraient être applaudis et non poursuivis en justice."
🎙 Élucid : C'est la première fois qu'un journaliste est inculpé en vertu de l’Espionage Act et peut-être potentiellement jugé. La liberté de la presse aux États-Unis, garantie par le Premier amendement, est-elle réellement menacée par cette loi ?
Joe Lauria : La loi sur l'espionnage de 1917 stipule que toute personne non autorisée – y compris les journalistes – en possession d'informations relatives à la défense nationale ou qui révèle des informations sensibles est coupable d'un crime.Il est donc clair que cette loi est en totale contradiction avec le Premier amendement en ce qui concerne les médias et la presse. C'est pourquoi, de l'avis de nombreuses personnes, cette loi est inconstitutionnelle et devrait être contestée. Il faudrait s'adresser à la Cour Suprême et lui demander d'annuler au moins cette partie de la loi qui est clairement illégale.
Depuis quelques années, le Congrès américain propose de modifier la loi sur l'espionnage afin qu'elle ne s'applique qu'aux fonctionnaires qui ont signé un accord de non-divulgation et ont juré de protéger le secret d'État. Selon moi, même si des fonctionnaires révèlent des informations classées à la presse, comme l'ont fait Chelsea Manning, Daniel Ellsberg et d'autres, cela ne pose aucun problème constitutionnel.
Il s'agit là d'un problème strictement politique : toutes celles et ceux qui ont renoncé à leur liberté ou qui l'ont vue fortement limitée parce qu'ils ont fait ce qu'il fallait faire, devraient être applaudis et non poursuivis en justice, du moins au regard de notre Constitution, car c'est évidemment illégal pour ces fonctionnaires du gouvernement de révéler des secrets d’État. En revanche, dans le cas de Julian Assange qui est un journaliste australien, tout cela ne devrait pas le concerner.
🎙 Y a-t-il déjà eu des tentatives de poursuivre des journalistes en vertu de l’Espionage Act ?
Oui, à deux reprises le gouvernement américain a tenté de poursuivre des journalistes en vertu de la loi sur l'espionnage. D'abord en 1942, après que le Chicago Tribune ait publié un article dans lequel il fournissait des détails sur la manière dont les renseignements américains avaient découvert comment décoder les messages des Japonais pendant la Seconde Guerre mondiale, lors de la fameuse bataille de Midway dans le Pacifique. Après la publication de l'article, Roosevelt a convoqué un grand jury pour tenter d'inculper les journalistes et les rédacteurs en chef, mais les citoyens membres du jury ont refusé.
Ensuite, en 1972, l'administration s'est attaquée à Daniel Ellsberg après qu'il ait illégalement révélé les fameux Pentagon Papers. Le gouvernement américain ne s'est pas contenté de traîner Ellsberg devant la justice. Ellsberg lui-même m'a raconté que l'administration Nixon avait convoqué un grand jury à Boston pour faire inculper les journalistes du New York Times, comme le permet la loi sur l'espionnage.
Par la suite, nous avons appris que le FBI avait mis le téléphone d'Ellsberg sur écoute et qu'il s'était introduit dans le bureau de son psychiatre pour obtenir des documents confidentiels sur lui et enregistrer ses séances. En raison de ces révélations qui ont suscité beaucoup d'émoi, le juge a finalement décidé d'annuler l'affaire et c'est ainsi qu'Ellsberg a été libéré. Les services de renseignement américains ont tenté de corrompre le juge en lui promettant qu'il deviendrait directeur du FBI s'il obtenait la condamnation d'Ellsberg. Quant aux journalistes du New York Times accusés, ils ont pu démontrer que leurs téléphones avaient également été mis sur écoute. Bref, l'affaire Ellsberg a été abandonnée et les journalistes n'ont jamais été inculpés.
À deux reprises dans l'histoire récente des États-Unis, des journalistes ont donc failli être inculpés en vertu de la loi sur l'espionnage. L'affaire Assange constitue la troisième tentative du gouvernement américain de faire inculper un journaliste. Et ce n'est pas anodin que cela se soit produit sous l’administration Trump. Aujourd'hui, à mon avis, il ne reste qu'un seul espoir pour préserver la liberté de la presse aux États-Unis : après l'extradition d'Assange, la société civile remettra en question l'Espionage Act. Surtout, j'espère que ses avocats contesteront cette loi devant la Cour suprême pour qu'elle soit déclarée inconstitutionnelle.
"L'administration Obama n'a pas inculpé Assange car elle savait qu'il agissait en tant que journaliste et qu'il était protégé par le Premier amendement."
🎙 Le gouvernement américain persiste à rejeter le fait que Julian Assange soit un journaliste. Faut-il y voir une stratégie pour le blâmer plus facilement et le transformer en un terroriste qui, par ses révélations, mettrait en danger les citoyens américains ?
Permettez-moi de rappeler un élément très amusant : en décembre 2010, quelques mois après la publication des War Logs de la guerre d'Afghanistan et d'Irak par WikiLeaks, le vice-président de l'époque, Joe Biden, avait répondu ceci à la question de savoir s'il allait inculper ou non Julian Assange :
"Écoutez, si nous pouvions avoir des preuves pour le prendre en flagrant délit de vol de documents gouvernementaux, alors nous pourrions le poursuivre. Mais s'il est resté passif et que quelqu'un d'autre a volé ces documents puis les a donnés à Assange en tant que journaliste, nous ne pouvons pas le poursuivre parce que le travail de journaliste est protégé par le Premier amendement."
Assange a été inculpé pour des faits qui remontent à 2010, mais la situation juridique est restée la même depuis lors. L'administration Obama n'a pas inculpé Assange à la suite de cette déclaration de Biden. Elle savait donc qu'il agissait en tant que journaliste, même s'elle refusait de l'avouer publiquement. Et même si aujourd'hui, certains affirment qu'Assange n'est pas un journaliste, le gouvernement savait qu'il agissait en tant que tel au moment des faits ; c'est pour cela qu'il n'a pas été inculpé. En revanche, l'administration Trump est allée beaucoup plus loin et c'est elle qui a mis en œuvre cette stratégie du mensonge.
🎙 Comment les partis politiques et les médias américains ont-ils traité le dossier WikiLeaks ?
Tant que WikiLeaks s'en tenait à révéler des secrets qui portaient atteinte à l'image des Républicains, les Démocrates soutenaient fortement Julian Assange. C'était particulièrement le cas en 2010, essentiellement parce que l'Irak et l’Afghanistan étaient des "guerres républicaines". Les médias proches des Démocrates ne faisaient que suivre les directives du parti et ils publiaient les documents de WikiLeaks qui exposaient ces guerres républicaines. Cependant, dès que les révélations ont commencé à concerner les Démocrates, ces derniers ont retourné leur veste. Les médias démocrates se sont alors joint au mouvement de persécution contre Assange : ce n'est pas du journalisme !
Si vous vous laissez guider par l'agenda d'un parti politique, autant travailler directement pour lui. Mais qu'ils arrêtent de se prétendre objectifs et neutres dans leur analyse des informations. Voilà le vrai scandale : la double attaque contre Assange –une attaque d'une puissance sans précédent contre un journaliste – a été lancée précisément par ce sombre pacte entre les politiques et les médias soucieux de ne pas voir leurs secrets révélés. Le Wall Street Journal, le New York Times et d'autres journaux américains se sont appuyés sur WikiLeaks à l'époque tant que cela leur convenait. Ensuite, ils ont tourné le dos à Assange et ont rejoint la meute.
"En réalité, n'importe quelle prison américaine est un endroit extrêmement dangereux pour Assange aujourd’hui."
🎙 Selon vous, quelles sont les chances que Julian Assange soit emprisonné à vie aux États-Unis et quels sont les risques évoqués par le juge Baraitser concernant une éventuelle tentative de suicide ?
Si Julian Assange est extradé aux États-Unis, il sera probablement envoyé au Detention Center Bureau d’Alexandria. Il y restera pendant toute la durée du procès et même s'il est condamné, il y a toujours une possibilité de faire appel – tout cela peut durer jusqu'à dix ans. L'affaire serait ensuite portée devant la Cour suprême, et celle-ci pourrait alors l'envoyer à l’ADX Florence dans le Colorado, une prison fédérale de très haute sécurité où sont enfermés tous les criminels les plus dangereux. Mais le problème ne se limite pas à cette prison en particulier.
Il y a une chose à savoir sur le centre de détention d'Alexandria, nous le savons d'après les audiences d'extradition : il n'y avait pas de médecin dans les locaux de la prison. Or, nous savons que Julian a eu une attaque cardiaque pendant l'appel devant la Haute Cour de Londres ; il pourrait donc en avoir une autre, plus importante, et s'il ne reçoit pas immédiatement des soins médicaux, cela pourrait lui être fatal. En réalité, n'importe quelle prison américaine est un endroit extrêmement dangereux pour Assange aujourd’hui.
🎙 Dans le dossier d'extradition, il ne semble y avoir aucune trace de la valeur civile de ses révélations qui dénoncent la torture et les crimes de guerre de l'armée américaine et de l'OTAN...
La question a été soulevée au cours du procès. Mais c'est précisément la raison pour laquelle il est jugé : pour avoir révélé des crimes de guerre des États-Unis. C'est pour cela qu'il est actuellement emprisonné à Londres, allié proche des Américains. Washington veut dissuader quiconque de réitérer ce genre de révélations ; ils veulent détruire complètement WikiLeaks. C'est ce qui est ressorti de l'audience.
Dès le premier jour de l'audience, la défense des États-Unis s'est tournée vers les journalistes présents dans la salle pour leur dire la chose suivante : « Assange n'est pas comme vous. Ce n'est pas un journaliste comme vous ». C'est une carte importante qu'ils aiment jouer contre Julian, et qui empêche les journalistes traditionnels de le considérer comme un confrère persécuté. Comme l'a justement souligné son père, John Shipton, le New York Times a pourtant publié des éditoriaux très forts pour soutenir Assange, et on a même vu une présentatrice de MSNBC dire qu'il fallait le protéger. Mais après avoir publié leur éditorial et fait leur déclaration, ces journalistes ont laissé tomber l'affaire au lieu de faire activement campagne pour la libération de Julian Assange.
Marco Cesario est journaliste, écrivain, correspondant pour des médias italiens et français et fondateur du magazine Malleus Philosophorum. Il est l'auteur de Sansür : Journalisme en Turquie (MR Editori) récompensé au Concours international des journalistes de la Méditerranée, et coordonne depuis 2016, le Festival International de Journalisme Civil à Naples. Twitter : @marco_cesario
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32- ♟ Julian Assange, ou la trahison du journalisme par les journalistes eux-mêmes
Le destin du fondateur de Wikileaks est entre les mains de deux juges de la Haute Cour de Londres, qui prendront la semaine prochaine une décision capitale sur le dossier concernant son extradition.
Par Adèle Debey, le 18 février 2024, L'Impertinent
Le sort de Julian Assange est fondamentalement lié à celui de la liberté de la presse. C’est l’idée principale qui ressort de la conférence, tenue mercredi 14 février, au Club suisse de la presse de Genève, dirigé par Isabelle Falconnier.
Pour présenter la situation et répondre aux questions, le rédacteur en chef de Wikileaks et journaliste d’investigation islandais, Kristinn Hrafnsson et le secrétaire général de Reporters sans frontières Suisse, Denis Masmejan, étaient présents. Ils ont rappelé l’issue importante de la semaine prochaine.
En effet, les 20 et 21 février prochain, deux juges de la Haute Cour de Londres se prononceront sur le droit ou non de Julian Assange de faire appel de la décision d’extradition aux Etats-Unis prononcée à son encontre en juin 2023. Il pourrait bien s’agir de la dernière chance de l’Australien d’éviter d’être envoyé dans le pays où il risque 175 ans de prison pour avoir dévoilé les crimes de guerre de l’armée américaine en Irak et en Afghanistan.
"Étant donné que la plupart des grands journaux ont utilisé ces informations, nous pensions à l'époque que cela nous conférait une certaine protection", a expliqué Kristinn Hrafnsson. Ils ont rapidement déchanté.
Depuis les 13 ans que dure ce combat pour la libération de Julian Assange, le soutien de ceux qui ont profité de son travail est ambigu et c’est un euphémisme! Le silence global de la presse conventionnelle est d’autant plus incompréhensible qu’il se base sur des arguments absurdes. Le statut de Julian Assange – dont on se permet de se demander s’il est ou non vraiment journaliste – est notamment remis en question. Comme si cela justifiait l’abandon dont il est victime et l’indifférence réservée à son sort.
L’Impertinent s’est permis de demander à Kristinn Hrafnsson si Assange et son équipe se sentaient trahis ou non par la profession. Voici sa réponse:
"D’une certaine manière, mais je n’ai pas envie de rajouter dans la critique de mes collègues. Je peux comprendre que les journalistes aient été trompés, comme cela a été déjà été le cas à de nombreuses reprises tout au long de ma carrière. On peut notamment citer l’invasion de l’Irak en 2003. La presse a fini par reconnaître qu’elle avait été trompée et qu’elle avait privilégié un seul narratif. J’attends que cela arrive dans l’affaire qui nous occupe. Il y a beaucoup de facteurs qui entrent en ligne de compte. Un réveil est nécessaire. Il s’agit bien sûr d’un problème structurel pour les journalistes (…) Il s’agit en fait de l’existence même du journalisme qui est en question. Je ne me sens pas trahi, les journalistes se trahissent eux-mêmes, ainsi que le concept même du journalisme".
Sans grande surprise, cette conférence de presse n’a pas suscité le relais qu’elle méritait dans les médias mainstream. C’est pourquoi il est important d’en parler et d’en partager le contenu, que vous trouverez ci-dessous :
La semaine prochaine, des manifestations de soutien auront lieu à Berne et Genève, entre autres.
A noter que L’Impertinent a déposé une demande d’interview de Stella Assange, la femme de Julian et mère de ses deux enfants.
Affaire à suivre, donc.
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33- ♟ Le dernier appel de Julian Assange
L'ultime recours de Julian Assange devant les tribunaux britanniques pour éviter l'extradition est prévu pour cette semaine. S'il est extradé, c'est la mort des investigations menées par la presse sur les rouages du pouvoir.
Aucun autre journaliste contemporain n'est parvenu à égaler ses révélations.
Julian est le premier. Nous sommes les suivants.
Par Chris Hedges, le 18 février 2024, Substack
LONDRES - Si Julian Assange se voit refuser l'autorisation de faire appel de son extradition vers les États-Unis devant un panel de deux juges de la Haute Cour de Londres cette semaine, il ne disposera plus d'aucun recours au sein du système juridique britannique. Ses avocats peuvent demander à la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) un sursis d'exécution en vertu de l'article 39 du règlement, qui n'est accordé que dans des "circonstances exceptionnelles" et "seulement lorsqu'il existe un risque imminent de préjudice irréparable". Mais il est loin d'être certain que la Cour britannique accepte. Celle-ci peut en effet ordonner l'extradition immédiate de Julian avant l'instruction au titre de l'article 39 ou décider d'ignorer une demande de la Cour européenne des droits de l'homme visant à permettre à Julian de faire entendre sa cause devant la Cour.
La persécution de Julian, qui s'étend sur près de 15 ans et a lourdement pesé sur sa santé physique et psychologique, est menée au nom de l'extradition vers les États-Unis, où il serait jugé pour avoir prétendument violé 17 chefs d'accusation de la loi sur l'espionnage de 1917, ce qui lui vaudrait une peine potentielle de 170 ans.
Le "crime" de Julian est d'avoir publié en 2010 des documents classifiés, des messages internes, des rapports et des vidéos du gouvernement et de l'armée américains, fournis par la lanceuse d'alerte de l'armée américaine Chelsea Manning. Cette vaste collection de documents a révélé des massacres de civils, des tortures, des assassinats, la liste des détenus de Guantanamo Bay et les conditions auxquelles ils ont été soumis, ainsi que les règles d'engagement en Irak. Les auteurs de ces crimes - y compris les pilotes d'hélicoptères américains ayant abattu deux journalistes de Reuters et dix autres civils et grièvement blessé deux enfants, tous filmés dans la vidéo Collateral Murder - n'ont jamais été poursuivis en justice.
Julian a révélé ce que l'empire américain cherche à effacer de l'histoire.
Sa persécution est un message de très mauvais augure pour le reste d'entre nous. Défiez l'empire américain, exposez ses crimes, et peu importe qui vous êtes, peu importe le pays d'où vous venez, peu importe où vous vivez, vous serez traqué et amené aux États-Unis pour passer le reste de votre vie dans l'un des systèmes pénitentiaires les plus durs de la planète. Si Julian est reconnu coupable, cela signera l'arrêt de mort du journalisme d'investigation sur les rouages du pouvoir d'État. Posséder, et encore moins publier, des documents classifiés - ce que je faisais lorsque j'étais journaliste au New York Times - sera criminalisé. Et c'est là l'essentiel, comme l'ont compris le New York Times, Der Spiegel, Le Monde, El País et The Guardian, qui ont publié une lettre commune demandant aux États-Unis d'abandonner les poursuites à son encontre.
Le Premier ministre australien Anthony Albanese et d'autres législateurs fédéraux ont voté jeudi pour que les États-Unis et la Grande-Bretagne mettent fin à l'incarcération de Julian, notant qu'elle découlait du fait qu'il avait "fait son travail de journaliste" en révélant "les preuves d'une mauvaise conduite de la part des États-Unis".
L'affaire judiciaire contre Julian, que j'ai couverte depuis le début et que je couvrirai à nouveau à Londres cette semaine, a un aspect bizarre d'Alice au pays des merveilles, où les juges et les avocats parlent sur un ton solennel de droit et de justice tout en faisant fi des principes les plus élémentaires des libertés civiles et de la jurisprudence.
Comment diable peut-on poursuivre les audiences alors que la société de sécurité espagnole de l'ambassade d'Équateur, UC Global, où Julian a trouvé refuge pendant sept ans, a fourni à la CIA des enregistrements vidéo de réunions entre Julian et ses avocats, éviscérant ainsi le privilège avocat-client ? Rien que pour ce fait, l'affaire aurait dû être rejetée par le tribunal.
Comment le gouvernement équatorien dirigé par Lenin Moreno peut-il violer le droit international en annulant le statut d'asile de Julian et en autorisant la police métropolitaine de Londres à pénétrer dans l'ambassade d'Équateur - territoire souverain de l'Équateur - pour embarquer Julian dans un fourgon de police qui l'attendait ?
Pourquoi les tribunaux ont-ils accepté l'accusation selon laquelle Julian n'est pas un journaliste légitime ?
Pourquoi les États-Unis et la Grande-Bretagne ont-ils ignoré l'article 4 de leur traité d'extradition qui interdit l'extradition pour des délits politiques ?
Comment l'affaire contre Julian peut-elle se poursuivre après que le témoin clé des États-Unis, Sigurdur Thordarson - un fraudeur et un pédophile condamné - a admis avoir fabriqué les accusations qu'il a portées contre Julian ?
Comment Julian, citoyen australien, peut-il être inculpé en vertu de la loi américaine sur l'espionnage alors qu'il ne s'est pas livré à l'espionnage et qu'il n'était pas basé aux États-Unis lorsqu'il a reçu les documents qui ont fait l'objet d'une fuite ?
Pourquoi les tribunaux britanniques autorisent-ils l'extradition de Julian vers les États-Unis alors que la CIA - en plus de placer Julian sous surveillance vidéo et numérique 24 heures sur 24 à l'ambassade d'Équateur - a envisagé de le kidnapper et de l'assassiner, plans qui incluaient une fusillade potentielle dans les rues de Londres avec la participation de la police métropolitaine ?
Comment Julian peut-il être condamné en tant qu'éditeur alors qu'il n'a pas, à l'instar de Daniel Ellsberg, obtenu et divulgué les documents classifiés qu'il a publiés ?
Pourquoi le gouvernement américain n'accuse-t-il pas d'espionnage l'éditeur du New York Times ou du Guardian pour avoir publié les mêmes documents en partenariat avec WikiLeaks ?
Pourquoi Julian est-il maintenu en isolement dans une prison de haute sécurité sans procès depuis près de cinq ans, alors que sa seule violation technique de la loi est d'avoir enfreint les conditions de sa libération sous caution lorsqu'il a demandé l'asile à l'ambassade d'Équateur ? Qui, en principe, devrait ne se voir infliger qu'une amende ?
Pourquoi la libération sous caution lui a-t-elle été refusée après son incarcération à la prison de Belmarsh ?
Si Julian est extradé, son lynchage judiciaire ne fera qu'empirer. Sa défense sera entravée par les lois antiterroristes américaines, notamment la loi sur l'espionnage (Espionage Act) et les mesures administratives spéciales (ou SAM). On continuera à l'empêcher de s'adresser au public - sauf en de rarissimes occasions - et à le libérer sous caution. Il sera jugé par le tribunal fédéral du district Est de Virginie, où la plupart des affaires d'espionnage ont été gagnées par le gouvernement américain. Le fait que le jury soit composé en majeure partie de personnes travaillant pour la CIA ou ayant des amis ou des parents qui travaillent pour la CIA et d'autres agences de sécurité nationale dont le siège se trouve non loin du tribunal, a sans aucun doute contribué à cette série de décisions de justice.
Depuis le début, les tribunaux britanniques ont rendu l'affaire notoirement difficile à couvrir, en limitant considérablement le nombre de places dans la salle d'audience, en fournissant des liaisons vidéo défectueuses et, dans le cas de l'audience de cette semaine, en interdisant à quiconque en dehors de l'Angleterre et du Pays de Galles, y compris aux journalistes qui avaient déjà couvert les audiences, d'accéder à un lien vers ce qui est censé être une procédure publique.
Comme d'habitude, nous ne sommes informés ni des horaires ni du calendrier. La Cour rendra-t-elle une décision à l'issue des deux jours d'audience des 20 et 21 février ? Ou attendra-t-elle des semaines, voire des mois, pour rendre une décision, comme elle l'a fait précédemment ? Permettra-t-elle à la Cour européenne des droits de l'homme d'examiner l'affaire ou expédiera-t-elle immédiatement Julian aux États-Unis ? Je doute que la Haute Cour transmette l'affaire à la Cour européenne des droits de l'homme, étant donné que l'organe parlementaire du Conseil de l'Europe, qui a créé la Cour européenne des droits de l'homme, ainsi que son commissaire aux droits de l'homme, s'opposent à la "détention, à l'extradition et aux poursuites" de Julian parce que cela représente "un précédent dangereux pour les journalistes". La Cour honorera-t-elle la demande de Julian d'être présent à l'audience, ou sera-t-il contraint de rester dans sa cellule à la prison de haute sécurité HM Prison Belmarsh à Thamesmead, au sud-est de Londres, comme cela s'est déjà produit par le passé ? Personne n'est en mesure de nous répondre.
Julian a été sauvé de l'extradition en janvier 2021 lorsque la juge de district Vanessa Baraitser de la Westminster Magistrates' Court a refusé d'autoriser la demande d'extradition. Dans sa décision de 132 pages, elle a estimé qu'il existait un "risque substantiel" que Julian se suicide en raison de la sévérité des conditions qu'il endurerait dans le système pénitentiaire américain. Mais il s'agit là d'un fil ténu. La juge a accepté toutes les accusations portées par les États-Unis contre Julian comme ayant été déposées de bonne foi. Elle a rejeté les arguments selon lesquels l'affaire était motivée par des considérations politiques, qu'il ne bénéficierait pas d'un procès équitable aux États-Unis et que les poursuites engagées contre lui constituaient une atteinte à la liberté de la presse.
La décision de la juge Baraitser a été annulée après que le gouvernement américain a fait appel auprès de la Haute Cour de Londres. Bien que la Haute Cour ait accepté les conclusions de Baraitser concernant le "risque substantiel" de suicide de Julian s'il était soumis à certaines conditions dans une prison américaine, elle a également accepté quatre assurances contenues dans la note diplomatique américaine no. 74, remise à la Cour en février 2021, qui promettait que Julian bénéficierait d'un traitement adéquat.
Le gouvernement américain a affirmé dans la note diplomatique que ses garanties "répondent entièrement aux préoccupations qui ont poussé le juge [de la juridiction inférieure] à libérer Mr Assange". Les "assurances" stipulent que Julian ne sera pas soumis à des SAM (mesures administratives spéciales). Elles promettent que Julian, citoyen australien, pourra purger sa peine en Australie si le gouvernement australien demande son extradition. Elles promettent qu'il recevra des soins cliniques et psychologiques adéquats. Elles promettent que, avant et après le procès, Julian ne sera pas détenu dans le centre de détention administrative maximale (ADX) de Florence, au Colorado.
Tout cela semble rassurant. Mais cela fait partie de la pantomime judiciaire cynique qui caractérise la persécution de Julian.
Personne n'est détenu avant le procès à l'ADX de Florence. L'ADX de Florence n'est pas non plus la seule prison supermax des États-Unis où Julian pourrait être incarcéré. Il pourrait être placé dans l'un de nos autres établissements similaires à Guantanamo, dans une unité de gestion des communications (CMU). Les CMU sont des unités hyper restrictives qui reproduisent l'isolement quasi total imposé par les SAM. Les "assurances" ne sont pas juridiquement contraignantes. Elles sont toutes assorties de clauses dérogatoires.
Si Julian fait "quelque chose, après avoir reçu ces assurances, qui réponde aux critères d'imposition de SAM ou de désignation à ADX", il sera, selon la Cour, soumis à ces formes de contrôle plus sévères. Si l'Australie ne demande pas de transfert, cela "ne peut être un motif de critique à l'égard des États-Unis, ou une raison de considérer les garanties comme inadéquates pour répondre aux préoccupations du juge", peut-on lire dans l'arrêt. Et même si ce n'était pas le cas, il faudrait à Julian 10 à 15 ans pour faire appel de sa condamnation devant la Cour suprême des États-Unis, ce qui suffirait amplement à le détruire psychologiquement et physiquement. Amnesty International a déclaré que les "garanties ne valent pas le papier sur lequel elles sont écrites ".
Les avocats de Julian vont tenter de convaincre deux juges de la Haute Cour de lui accorder l'autorisation de faire appel d'un certain nombre d'arguments contre l'extradition que le juge Baraitser a rejetés en janvier 2021. Ses avocats, si l'appel est accepté, feront valoir que poursuivre Julian pour son activité journalistique représente une "grave violation" de son droit à la liberté d'expression ; que Julian est poursuivi pour ses opinions politiques, ce que le traité d'extradition entre le Royaume-Uni et les États-Unis ne permet pas ; que Julian est accusé de "délits purement politiques" et que le traité d'extradition entre le Royaume-Uni et les États-Unis interdit l'extradition dans de telles circonstances ; que Julian ne devrait pas être extradé pour être poursuivi alors que la loi sur l'espionnage "est étendue d'une manière sans précédent et imprévisible" ; que les charges pourraient être modifiées et entraîner la peine de mort pour Julian ; et que Julian ne bénéficierait pas d'un procès équitable aux États-Unis. Ils demandent également le droit de présenter de nouvelles preuves concernant les plans de la CIA pour kidnapper et assassiner Julian.
Si la Haute Cour accorde à Julian l'autorisation de faire appel, une nouvelle audience sera programmée au cours de laquelle il pourra faire valoir les motifs de son appel. Si la Haute Cour refuse d'accorder à Julian l'autorisation de faire appel, la seule option restante est de faire appel auprès de la Cour européenne des droits de l'homme. S'il n'est pas en mesure de saisir la Cour européenne des droits de l'homme, il sera extradé vers les États-Unis.
La décision de demander l'extradition de Julian, envisagée par l'administration de Barack Obama, a été poursuivie par l'administration de Donald Trump à la suite de la publication par WikiLeaks des documents connus sous le nom de Vault 7, qui exposaient les programmes de cyberguerre de la CIA, notamment ceux conçus pour surveiller et prendre le contrôle des voitures, des téléviseurs intelligents, des navigateurs web et des systèmes d'exploitation de la plupart des téléphones intelligents.
Les dirigeants du parti démocrate sont devenus aussi sanguinaires que les républicains à la suite de la publication par WikiLeaks de dizaines de milliers de courriels appartenant au Comité national démocrate (DNC) et à de hauts responsables démocrates, y compris ceux de John Podesta, président de la campagne d'Hillary Clinton lors de l'élection présidentielle de 2016.
Les courriels Podesta ont révélé que Mme Clinton et d'autres membres de l'administration Obama savaient que l'Arabie saoudite et le Qatar - qui avaient tous deux fait don de millions de dollars à la Fondation Clinton - étaient d'importants bailleurs de fonds de l'État islamique d'Irak et de Syrie. Ils ont révélé des transcriptions de trois entretiens privés que Mme Clinton a tenus avec Goldman Sachs et pour lesquels elle a reçu 675 000 dollars, une somme si généreuse qu'elle ne peut être considérée que comme un pot-de-vin. Dans ces courriels, on voit Mme Clinton dire aux élites financières qu'elle souhaite "l'ouverture du commerce et des frontières" et qu'elle pense que les dirigeants de Wall Street sont les mieux placés pour gérer l'économie, une déclaration qui contredit les promesses de réforme financière qu'elle avait faites pendant sa campagne. Ils ont révélé la stratégie de "joueur de flûte" de la campagne Clinton, qu'elle a elle-même décrite, et qui consistait à utiliser ses contacts avec la presse pour influencer les primaires républicaines en "élevant" ce qu'elle appelait des "candidats plus extrêmes", afin de s'assurer que Trump ou Ted Cruz remporte l'investiture de leur parti. Ils révèlent que Mme Clinton connaissait à l'avance les questions posées lors d'un débat de la primaire. Les courriels ont également révélé que Mme Clinton était une des architectes de la guerre et de la destruction de la Libye, une guerre dont elle pensait qu'elle renforcerait ses références en tant que candidate à la présidence.
Les journalistes peuvent faire valoir que ces informations, tout comme les carnets de guerre, auraient dû rester secrètes. Mais s'ils le font, ils ne peuvent se prétendre journalistes.
Les dirigeants démocrates, qui ont tenté de rendre la Russie responsable de leur défaite électorale face à Trump - dans ce qui est devenu le Russiagate - ont accusé les courriels de Podesta et les fuites du DNC d'avoir été obtenus par des pirates informatiques du gouvernement russe, bien que l'enquête menée par Robert Mueller, l'ancien directeur du FBI, "n'ait pas permis d'obtenir suffisamment de preuves recevables que WikiLeaks était au courant d'un piratage présumé par l'État russe - ou même qu'il l'ignorait délibérément".
Julian est persécuté parce qu'il a fourni au public les informations les plus importantes sur les crimes et les mensonges du gouvernement américain depuis la publication des "Pentagon Papers". Comme tous les grands journalistes, il n'était pas partisan. Sa cible était le pouvoir.
Il a rendu public le meurtre de près de 700 civils qui s'étaient approchés trop près des convois et des points de contrôle américains, dont des femmes enceintes, des aveugles et des sourds, et au moins 30 enfants.
Il a rendu publics les plus de 15 000 décès non signalés de civils irakiens ainsi que les tortures et les mauvais traitements infligés à quelque 800 hommes et garçons, âgés de 14 à 89 ans, au camp de détention de Guantánamo Bay.
Il nous a montré qu'en 2009, Hillary Clinton avait ordonné à des diplomates américains d'espionner le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, et d'autres représentants de la Chine, de la France, de la Russie et du Royaume-Uni, espionnant notamment leur ADN, leur iris, leurs empreintes digitales et leurs mots de passe personnels.
Il a révélé qu'Obama, Hillary Clinton et la CIA ont soutenu le coup d'État militaire de juin 2009 au Honduras qui a renversé le président démocratiquement élu Manuel Zelaya et l'a remplacé par un régime militaire meurtrier et corrompu.
Il a révélé que les États-Unis avaient secrètement lancé des attaques de missiles, de bombes et de drones au Yémen, tuant des dizaines de civils.
Aucun autre journaliste contemporain n'est parvenu à égaler ses révélations.
Julian est le premier. Nous sommes les suivants.
📰 Lien de l'article original :
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Vidéos
34- 🎥 Stella Assange : "Mon mari Julian Assange risque l’assassinat"
"Quiconque pense qu'Epstein s'est suicidé est naïf. Julian court un réel risque de se faire assassiner s'il est extradé et détenu aux États-Unis."
Andrew Gold, présentateur déchu de la BBC s’entretient avec Stella Assange avant l’audience finale de Julian Assange au Royaume-Uni du 20 au 21 février.
Stella Assange est pétrifiée à l'idée de voir son mari Julian Assange, fondateur de WikiLeaks et martyr de la liberté d’expression, suivre le même chemin que Jeffrey Epstein. Actuellement détenu à la prison de Belmarsh à Londres après avoir été réfugié à l’ambassade équatorienne, son dernier appel contre l’extradition vers les États-Unis est à venir à la Cour royale de justice les 20 et 21 février 2024. Elle est convaincu que la CIA aura sa peau.
Entretien de 59’ avec sous titres disponibles
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35- 🎥 Éric Alt, administrateur d'Anticor, revient sur l’affaire Assange
"Réduire la part d’ombre des États" – l’affaire Assange vue par Éric Alt, magistrat et administrateur de l’association de lutte contre la corruption Anticor. Il avait aussi pris la parole lors du concert du 3 juillet dernier à l'occasion de l'anniversaire de Julian.
Anticor, comme 55 organisations et médias, demandent la libération immédiate du fondateur de WikiLeaks.
Durée de cet entretien en français très intéressant : 58’
Interview : Nadia Genet
Image : Nicolas Eprendre
Montage : Yvan Bultel
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36- 🎥 The Trust Fall - Première du documentaire de Julian Assange à Londres
Date : dimanche 18 février 2024
Horaires : 13h-15h45
Lieu : Rio Cinemas, Dalston, Londres Billets : https://ttflondon2.eventbrite.com.au
Événement Facebook : https://facebook.com/events/764267455578921…
Don pour aider au financement : https://www.gofundme.com/f/u54gwd-free-the-truth-free-assange-documentary-film
Rejoignez la première à LONDRES de ce documentaire PUISSANT et hautement politique suivi d'une table ronde post-film avec Stella Assange, Tariq Ali, Kristinn Hrafnsson, le scénariste et réalisateur du film, Kym Staton ainsi que d'autres invités spéciaux.
Trailer de 3’ avec sous titres disponibles :
Bande-annonce de 15’ avec sous titres disponibles :
Bien qu’il ait été détenu, réduit au silence et caché à la vue du public dans la prison à sécurité maximale de Belmarsh, le journaliste et éditeur australien maintes fois primé Julian Assange est devenu l’une des voix les plus fortes de notre époque en faveur de la liberté d’expression. Il a également tout risqué pour faire éclater la vérité.
Les révélations de WikiLeaks et d’Assange à partir de 2010 ont déclenché une tempête de controverses et une poursuite incessante de la part de l’empire le plus puissant de la planète.
"THE TRUST FALL : JULIAN ASSANGE" examine le sens et l'importance des idées partagées par WikiLeaks avec le monde, le comportement qui en résulte des gouvernements impliqués, le risque personnel extraordinaire pris par Assange et les questions fondamentales plus larges autour de la liberté de la presse qui affectent tous. de nous et de notre droit de savoir.
Tourné durant deux ans sur trois continents et dans dix villes, le film présente un éventail de sommités dont Daniel Ellsberg, John Pilger, Tariq Ali et Chris Hedges, avec les conseils d'experts dont Jennifer Robinson, Jill Stein, Stefania Maurizi et Nils Melzer, en plus des réflexions de la famille d'Assange, dont Stella Assange, John Shipton et Gabriel Shipton.
Examinant les motivations de ce militant pour la paix et innovateur, ce film étonnant, choquant et inspirant invite les spectateurs à se lancer dans un voyage de compréhension, où les circonstances sont sans précédent et la destination inattendue.
"Si les guerres peuvent être déclenchées par des mensonges, la paix peut être restaurée par la vérité".
- Julian Assange
Réalisateur : Kym Staton
Producteurs : Kym Staton et Natalia Minana Editeurs : Endre Kvia et Richard Frankl
Année : 2023
Durée du film : 128 minutes + questions-réponses post-film
Pour en savoir plus sur le film : Les bénéfices de l'événement seront reversés à la sortie en salles (cinéma) du film.
L'événement est fièrement sponsorisé par TNT Radio
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37- 🎥 Dernière chance pour Julian Assange ? - Entretien avec Viktor Dedaj
Vidéo en français de 50’
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Articles plus anciens
38- ♟ Pire que l'affaire Dreyfuss : la persécution de Julian Assange
Par Alfred de Zayas, le 12 mai 2021, CounterPunch
Il peut sembler inutile de répéter le truisme selon lequel la démocratie requiert transparence et responsabilité, et pourtant, combien de fois l'ordre démocratique a-t-il été trahi par nos dirigeants dans un passé récent ? Combien de fois les médias ont-ils abandonné leur rôle de chien de garde, combien de fois ont-ils simplement accepté le rôle de chambre d'écho des puissants, qu'il s'agisse du gouvernement ou des sociétés transnationales ?
Parmi les nombreux scandales et trahisons de la démocratie et de l'État de droit, on peut citer la persécution des journalistes dérangeants par les gouvernements et leurs complices au sein des médias. L'exemple le plus scandaleux et le plus immoral de la corruption multinationale de l'État de droit est peut-être la "guerre juridique" menée contre Julian Assange, le fondateur de Wikileaks, qui a révélé en 2010 des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité perpétrés par les États-Unis et leurs alliés de l'OTAN en Afghanistan et en Irak.
Dans un monde où l'État de droit importe, ces crimes de guerre auraient fait l'objet d'enquêtes promptes et d'actes d'accusation dans les pays concernés. Mais non, l'ire des gouvernements et des médias s'est plutôt concentrée sur le journaliste qui avait osé exposer ces crimes. La persécution de Julian Assange est une attaque coordonnée contre l'État de droit par les États-Unis, le Royaume-Uni et la Suède, rejoints ensuite par l'Équateur. L'instrumentalisation de l'administration de la justice - non pas dans le but de rendre la justice, mais de détruire un être humain - a entraîné de plus en plus de personnes dans une conspiration criminelle commune de diffamation, de fausses accusations, d'enquêtes sans mise en accusation, de retards délibérés et de dissimulation.
En avril 2021, mon collègue, le professeur Nils Melzer, rapporteur des Nations unies sur la torture, a publié un ouvrage méticuleusement documenté et méthodiquement inattaquable sur cette saga presque incroyable. Son livre, The Case of Julian Assange (Piper Verlag, München 2021) (L’affaire Assange : Histoire d'une persécution politique), peut être qualifié de "J'accuse" de notre époque, nous rappelant combien nos autorités nous ont trahis, comment quatre gouvernements ont participé à la corruption de l'État de droit. À l'instar d'Émile Zola qui, en 1898, a dévoilé le tissu de mensonges entourant le scandaleux coup monté par la justice française contre le colonel Alfred Dreyfuss, Nils Melzer nous choque 122 ans plus tard en nous montrant comment des pays ostensiblement attachés à l'État de droit et aux droits de l'homme peuvent trahir l'éthique démocratique avec la complicité des médias mainstream. Melzer parle de "preuves concrètes de persécution politique, d'arbitraire flagrant de la part de l'administration de la justice, de torture et d'abus délibérés".
Ce livre est extrêmement important dans la mesure où il nous oblige à abandonner notre "zone de confort" et à exiger de nos gouvernements de faire preuve de transparence et de responsabilité. Il est en effet scandaleux qu'aucun des quatre gouvernements impliqués dans la machination n'ait coopéré avec le professeur Melzer et n'ait répondu que par des "platitudes politiques". J'ai moi aussi fait l'expérience du même manque de coopération de la part de pays puissants auxquels j'ai adressé des notes verbales concernant des violations des droits de l'homme - aucun d'entre eux n'a répondu de manière satisfaisante.
Melzer nous rappelle la fable de Hans-Christian Andersen Les habits neufs de l'empereur. En effet, toutes les personnes impliquées dans le coup monté contre Assange maintiennent constamment l'illusion de la légalité et répètent les mêmes contre-vérités, jusqu'à ce qu'un observateur dise - mais l'empereur est nu ! C'est bien de cela qu'il s'agit. Notre administration de la justice n'a pas de vêtements et, au lieu de faire avancer la justice, elle s'associe à la persécution d'un journaliste, avec toutes les implications que ce comportement a pour la survie de l'ordre démocratique.
Melzer nous convainc par les faits que nous vivons une époque de "post-vérité" et qu'il est de notre responsabilité de corriger cette situation dès maintenant, sous peine de nous réveiller dans une tyrannie.
Alfred de Zayas est professeur de droit à l'École de diplomatie de Genève et a été expert indépendant des Nations Unies sur l'ordre international de 2012 à 2018. Il est l'auteur de douze livres, dont Building a Just World Order (2021), Countering Mainstream Narratives 2022 et The Human Rights Industry (Clarity Press, 2021).
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39- ♟ Les fichiers de WikiLeaks révèlent une importante faille de sécurité au sein de la CIA
Julian Assange et son organisation viennent de publier des fichiers secrets détaillant la boîte à outils cybernétique de la Central Intelligence Agency. WikiLeaks affirme que cette fuite n'est que la partie émergée de l'iceberg : la CIA a perdu le contrôle de son arsenal de piratage informatique.
Par Stefania Maurizi, le 7 mars 2017, La Repubblica
Cela s'est à nouveau produit. Sept ans après Chelsea Manning et quatre ans après Edward Snowden, le complexe sécuritaire américain est confronté à ce qui semble être une nouvelle crise majeure. WikiLeaks vient de publier 8 761 documents internes sur le programme de piratage de la CIA. Selon l'organisation, cette fuite n'est que la première partie de sa nouvelle série sur la CIA : WikiLeaks pourrait détenir des dizaines de milliers de fichiers et même des cyber-armes de la CIA.
La Repubblica a bénéficié d'un accès exclusif et anticipé aux 8 761 fichiers. Les documents semblent récents : ils contiennent des références au système d'exploitation "Windows 10", seulement disponible depuis 2015. La Repubblica n'a pas été en mesure de les valider compte tenu de l'accès de dernière minute à des milliers de documents hautement techniques. Toutefois, maintenant que WikiLeaks les a publiés, les experts en logiciels devraient être en mesure de les vérifier relativement facilement, de nombreux fichiers étant constitués de détails techniques et de procédures susceptibles d'être évalués de manière indépendante.
Ces dossiers permettent de faire la lumière sur une partie high-tech de la CIA restée totalement dans l'ombre. Il y a trois ans, la nouvelle selon laquelle l'Agence avait espionné les efforts déployés pendant des années par la commission du renseignement du Sénat américain pour enquêter sur les tortures infligées par l'Agence en pénétrant dans les ordinateurs des membres du personnel de la commission a suscité l'indignation de l'opinion publique et l'ire des politiques. Cependant, on sait peu de choses jusqu'à présent sur les compétences et les capacités de l'Agence centrale de renseignement en matière de piratage, de logiciels malveillants et d'outils informatiques. Ces dossiers semblent en fournir pour la première fois un aperçu, en détaillant les équipes et les projets internes.
Nombre de ces documents sont classifiés et contiennent même les identités du personnel de la CIA, que WikiLeaks n'a pas publiées mais au contraire expurgées. Selon l'organisation, ces fichiers étaient disponibles dans "un réseau isolé de haute sécurité situé à l'intérieur du Centre de cyberespionnage de la Cia à Langley, en Virginie", mais la CIA a récemment "perdu le contrôle de la majorité de son arsenal de piratage" : ces archives "semblent avoir circulé parmi d'anciens pirates et contractants du gouvernement américain de manière non autorisée, dont l'un a transmis à WikiLeaks des parties de l'archive".
L'organisation de Julian Assange a décidé de publier ces documents, tout en évitant "la distribution de cyberarmes "armées", jusqu'à ce qu'un consensus se dégage sur la nature technique et politique du programme de la CIA et sur la manière dont ces "armes" devraient être analysées, désactivées et publiées", car "une fois qu'une seule cyberarme est "libérée", elle peut se répandre dans le monde entier en quelques secondes et être utilisée par des États rivaux, la cybermafia ou de jeunes pirates informatiques". WikiLeaks affirme que la source de ces documents a fait une déclaration à l'organisation, expliquant les raisons pour lesquelles elle a fourni ces fichiers :
"La source souhaite lancer un débat public sur la sécurité, la création, l'utilisation, la prolifération et le contrôle démocratique des cyberarmes".
Au cœur du programme de piratage de la CIA
Jamais auparavant il n'avait été possible de pénétrer au cœur du groupe de développement de logiciels de la Central Intelligence Agency (CIA). Des documents permettent de comprendre comment, au sommet, se trouve le "Engineering Development Group" (EDG), qui comprend des branches telles que l'Embedded Development Branch (EDB), l'Operations Support Branch (OSB), la Remote Device Branch (RDB) et bien d'autres encore, chacune d'entre elles ayant ses propres projets et missions.
La mission de l'EDB, par exemple, est "d'être le premier atelier de développement de solutions matérielles et logicielles personnalisées pour les opérations d'information". En utilisant ses connaissances en matière de systèmes d'exploitation, de conception de matériel, de savoir-faire logiciel et d'expertise réseau, l'EDB développe des solutions logicielles et matérielles pour soutenir la mission du "Centre d'opérations d'information".
L'année dernière, devant le Sénat américain, le chef de la communauté du renseignement américain, James Clapper, a déclaré : "À l'avenir, les services de renseignement pourraient utiliser (l'internet des objets) pour l'identification, la surveillance, le contrôle, le suivi de la localisation". Clapper n'était certainement pas un oracle prédisant l'avenir : selon les fichiers de WikiLeaks, la CIA est capable depuis 2014 d'implanter un logiciel malveillant sur un modèle bien connu de télévision intelligente pour capter les conversations à l'intérieur de la pièce où la télévision est connectée à Internet. Le programme est baptisé "Weeping Angel" et a été développé par l'Embedded Development Branch en collaboration avec les services de renseignement britanniques.
Cependant, tout au moins au début, Weeping Angel n'était pas exempt de problèmes délicats : "La mise à jour du micrologiciel sur l'internet", écrit l'Agence dans ses documents, "peut supprimer l'implant (non testé) ou des parties de celui-ci" et une LED bleue située à l'arrière a suscité un casse-tête à la CIA, en restant allumée même lorsque le téléviseur semblait éteint : c'est ce qu'ils appellent le Fake-off. Cette diode bleue pouvait révéler que quelque chose d'étrange se passait à l'intérieur du téléviseur espionné. Selon les documents, les techniciens de l'Agence ont tenté de résoudre ce problème en juin 2014 lors d'un atelier commun avec l'agence de renseignement britannique MI5 et l'Agence était prête à se concentrer sur de nouveaux défis : comment capturer des vidéos et des instantanés vidéo à partir de cette télévision intelligente. Depuis 2015, des inquiétudes avaient émergé quant à la capacité des téléviseurs intelligents à espionner : des fichiers publiés aujourd'hui par WikiLeaks semblent confirmer que ces préoccupations n'étaient pas de la paranoïa.
L'entreprise et les dinosaures
La Central Intelligence Agency cible les appareils anciens et nouveaux en utilisant des logiciels commerciaux et des logiciels libres pour développer ses produits afin d'espionner les technologies futures, comme les appareils de l'internet des objets, mais aussi les appareils très anciens, comme les disquettes.
Un programme appelé "Ptérodactyle", un nom curieux faisant probablement référence à une technologie de dinosaure comme la disquette, et développé par l'Embedded Development Branch, a pour objectif déclaré de "fournir à l'actif la capacité de copier rapidement une disquette de 3,5 pouces de manière secrète". Parmi les exigences requises pour ce programme figure celle de l'"obscurcissement" : "afin de dissimuler autant que possible les activités sur le dispositif, celui-ci doit se comporter aussi normalement que possible sur le système de fichiers du dispositif", précise la branche de l'Agence.
La technologie des disquettes est souvent considérée comme une relique des années 1980 sans utilité, mais l'année dernière, un rapport du gouvernement américain nous a permis d'apprendre qu'elles sont toujours utilisées pour contrôler le système qui coordonne les fonctions opérationnelles des forces nucléaires américaines : des missiles balistiques intercontinentaux aux bombardiers nucléaires.
La Hacking Team
Le groupe de développement de logiciels de la Central Intelligence Agency semble tirer des leçons non seulement des services britanniques comme le MI5, mais aussi des déboires d'autres entreprises.
En 2015, lorsque la société italienne Hacking Team a été piratée et que ses fichiers internes et sa correspondance ont été publiés par WikiLeaks, la CIA n'a pas perdu l'occasion d'examiner le matériel de Hacking Team.
"Le dépôt de données comprend tout ce que l'on peut imaginer qu'une entreprise possède dans son infrastructure", écrit l'Agence dans ses dossiers. "Dans l'intérêt d'apprendre des travaux existants et de les améliorer, il a été décidé d'examiner des morceaux choisis de données déposées publiquement".
Un agent de la CIA ? Remplissez le formulaire
Les opérations de renseignement soutenues par le groupe de développement de logiciels de la CIA ne sont pas identifiées dans les documents : ces dossiers ne permettent pas de comprendre l'identité et les opérations des cibles.
Ces outils logiciels et matériels sont-ils utilisés de manière légitime pour espionner des terroristes ? Sont-ils utilisés pour des opérations impliquant de graves violations des droits de l'homme, comme les tortures pratiquées par la CIA, ou même à des fins criminelles, comme l'espionnage de la commission du renseignement du Sénat américain ? Les documents n'apportent pas de réponses précises à ces questions, mais apportent des réponses sur les compétences et les capacités de la CIA, ainsi que sur ses programmes et ses objectifs. Selon WikiLeaks, "la division de piratage informatique de l'Agence lui a permis de ne pas avoir à divulguer ses opérations souvent controversées à la NSA (sa principale rivale sur le plan judiciaire) afin de tirer parti des capacités de piratage informatique de cette dernière".
Un questionnaire intéressant détaille les informations que les techniciens de la CIA doivent obtenir avant de concevoir les outils logiciels et matériels adaptés à une opération donnée. "Qui sera l'opérateur de l'outil ?", interroge le questionnaire, "Qui est la cible de la collecte (de données et d'informations) ?", poursuit le questionnaire, "Un actif ? Une opération d'information étrangère ? Une agence de renseignement étrangère ? Une entité gouvernementale étrangère ? Un administrateur de système ou une cible technique comparable ?" et "De combien de temps disposez-vous sur la cible ? moins d'une minute ? moins de 5 minutes ? entre 5 et 10 minutes ?".
Au cœur de l'Europe
Les dossiers mentionnent que le Center for Cyber Intelligence Europe Engineering (CCIE) de l'Agence est basé à Francfort et qu'il est responsable des principales régions du monde, de l'Europe (y compris l'Italie) à l'Afrique du Nord et au Moyen-Orient.
Lorsque le personnel de la CIA est appelé à voyager dans le cadre de ses fonctions, il dispose d'une liste d'"hôtels préapprouvés par la base de Francfort" et se voit suggérer une couverture pour l'action. Le dossier révèle que "si vous êtes OVERT CIA", "votre couverture (pour ce voyage) est un employé du département d'État" et que "la fonction réelle de votre point de contact" est "Officier de la base de Francfort ou CCIE TIO déclaré". Selon le livre The Wizards of Langley, écrit par l'expert en renseignement américain Jeffrey Richelson qui a reconstitué la direction de la science et de la technologie de la CIA, "TIO" est un acronyme qui signifie "Technology Investment Office" (bureau d'investissement technologique).
Commentant ce premier volet de sa série sur la CIA, WikiLeaks a indiqué avoir expurgé "des dizaines de milliers de cibles et de systèmes d'attaque de la CIA à travers l'Amérique latine, l'Europe et les États-Unis". Tout en soulignant sa décision "d'éviter la distribution de cyberarmes 'armées'", Julian Assange a mis en garde contre le risque de prolifération de celles-ci :
"Il y a un risque extrême de prolifération dans le développement des cyber-armes. On peut comparer la prolifération incontrôlée de ces "armes", qui résulte de l'incapacité à les contenir et de leur valeur marchande élevée, au commerce mondial des armes".
📰 Lien de l'article original : https://www.repubblica.it/esteri/2017/03/07/news/wikileaks_files_reveal_major_security_breach_at_the_cia-159969039/
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