🎬 Julian Assange : Ultime (!!!) actualité semaine #25 - Juin 2024 🎗⏳
WikiLeaks a (r)éveillé nombre de citoyens, son ingénieux & courageux fondateur a payé un lourd tribu, mais ce 3 juillet, nous pourrons réellement lui souhaiter : JOYEUX ANNIVERSAIRE Julian & MERCI !
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"Si vous comprenez pourquoi Julian Assange et David McBride, qui ont exposé la vérité quant aux guerres menées par l'Occident, sont persécutés, alors vous comprendrez Gaza et ses serial killers. Ces deux questions concernent la vérité et la liberté et nous alertent sur le fascisme en train de s'installer dans l'Occident "éclairé"."
- Feu John Pilger, 20 novembre 2023
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"En assistant, avec soulagement, au retour sans encombre de Julian Assange en Australie, en espérant sincèrement que la brutalité et les cicatrices des douze dernières années s'estomperont peu à peu pour lui, la compréhension de l'ensemble de l'histoire de son cas ne devrait pas s'en trouver affectée. Elle a mis en lumière des failles importantes, tant au niveau du traité d'extradition entre les États-Unis et le Royaume-Uni qu'au niveau de la protection des droits de l'homme dans les deux pays, que l'on croyait jusqu'ici absolue. La responsabilité d'aborder leur signification dans une expérience unique exige un engagement continu, même si l'affaire juridique, fort heureusement, est à présent terminée".
- Gareth Peirce, l'avocat britannique de Julian Assange, dans une de ses rares déclarations à la presse, le 26 juin 2024.
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Ce combat titanesque a débuté pour moi le 13 avril 2019 avec ma petite pancarte Assange et mon gilet jaune à Nancy (nord-est de la France) où personne, y compris le seul journaliste présent, ne connaissait l'histoire ...
Nous, manifestants certes bruyants mais pacifiques, avons été repoussés hors du centre ville pour nous invisibiliser mais avons néanmoins été massacrés par la police. J'ai alors décidé ce soir-là que chaque samedi, j'irai rejoindre le cortège des milliers de gilets jaunes à Paris et y porter la voix de Julian.
Le 2 mai 2019 vers 1 heure du matin et après la manifestation incontournable du 1er mai, je partais de la capitale pour un long voyage de nuit en bus avec 80 gilets jaunes, avec entre autres Juan Branco, conseiller juridique de WikiLeaks, et Maxime Nicolle (figure des gilets jaunes, pour le procès de Julian à la Westminster Court de Londres.
Là, une vingtaine de partisans anglais, voyant arriver à 8h du matin ces supporters tout de jaune vêtu, bourrés d'énergie, chantant à tue-tête, n'en ont pas cru leurs yeux (et leurs oreilles).
La suite ... Création d'un groupe Facebook, un Noël pour Assange à Paris et des voyages organisés en bus à Londres et à Belmarsh (1 puis 2 bus), avec toujours plus de monde et la prévision de 4 bus pour les audiences de mai 2020.
Oui mais la p*** de pandémie est arrivée avec sa panoplie de restrictions de liberté. Les 3 (à l'époque, 2 aujourd'hui) administrateurs du groupe ont employé la période du confinement pour organiser un live de 4 heures avec des intervenants du monde entier (notamment John Shipton), en publiant de nombreux articles traduits.
Puis ce fut une censure drastique des reséaux sociaux et l'entrain perdu des sympathisants du groupe alors que l'on a tenté d'organiser au moins un bus pour la chaîne humaine autour du parlement anglais.
C'est donc sur Substack que j'ai decidé de poursuivre ce combat, qui va bien au-delà, en créant mon blog sur cette plateforme le 11 septembre 2022, afin de proposer librement une large actualité entre autres.
Ceci est, pour mon plus grand bonheur, l'ultime actualité de la semaine dediée au héros qu'est Julian Assange. En apprenant cette surprenante et excellente nouvelle, mes pensées ont été pour Julian et sa famille bien évidemment mais aussi pour John Pilger, Daniel Ellsberg, l'infatigable et incroyable Éric Levy et notre troubadour gilet jaune Julien Nicollet alias "Joules".
Et comme l'a si bien dit Chris Hedges,
"les manifestations de masse et la désobéissance civile prolongée sont notre seul espoir. Si nous ne nous soulevons pas - ce sur quoi compte l'État corporatif - nous serons réduits en esclavage et l'écosystème de la Terre deviendra impropre à la vie humaine.
Prenons exemple sur ces hommes et ces femmes courageux qui sont descendus dans la rue pendant 14 ans pour sauver Julian. Ils nous ont montré la voie à suivre."
Alors, continuons le combat, en laissant tomber les égos !
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L'accord de plaidoyer complet peut être lu ici (23 pages en PDF). Les États-Unis y écrivent notamment :
"Les États-Unis n'ont identifié aucune victime pouvant prétendre à une réparation individuelle"
Cryptome a publié un lien audio de l'audience.
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SOMMAIRE :
Après un gros tri, voici un panel de 29 articles les plus pertinents et diverses, d'auteurs incontournables et assidus ou autres moins habituels, couvrant cette extraordinaire nouvelle.
Sans oublier la publication Enfin LIBRE regroupant des articles du jour où l'on a appris l'incroyable information.
Bonne lecture !
1 - Vous avez sauvé Julian Assange - Chris Hedges
2 - Julian Assange est sur le chemin de la liberté, mais le combat est loin d'être terminé - Srecko Horvat
3 - Libération de Julian Assange : Accords de plaidoyer et sombres héritages - Binoy Kampmark
4 - Les enseignements de la persécution d'Assange - Brownstone Institute
5 - Assange en liberté : Le combat contre l'empire du mensonge continue - Régis de Castelnau
6 - Une chasse aux sorcières longue de 14 ans prend fin - mais à quel prix ? - Shahid Buttar
7 - Pourquoi le plaidoyer d'Assange est une victoire pour les services de renseignement américains - Ken Klippenstein
8 - Les médias, sous la houlette du Guardian, sont responsables du maintien de Julian Assange derrière les barreaux - Jonathan Cook
9 - Diable, peut-être que TOUT est possible - Caitlin Johnstone
10 - Assange est libre, mais la guerre des autorités américaines contre la liberté d'expression se poursuit - James Bovard
11 - Un homme sort de prison ; nous, nous y sommes toujours - Julian MacFarlane
12 - Julian Assange : Enfin libre, mais coupable d'avoir pratiqué le journalisme - Pepe Escobar
13 - Leçons tirées du combat pour la liberté d'Assange - Kellie Tranter
14 - Julian Assange est libre, mais le journalisme reste menacé - Chronique de Democracy Now
15 - Julian Assange est libre, mais la justice n'a pas été rendue - Chip Gibbons
16 - Tant que Julian Assange n'est pas gracié, la liberté de la presse reste menacée - Stephen Rhode
17 - Assange a accepté de détruire les documents américains classifiés non publiés - Joe Lauria
18 - L'accord de plaidoyer d'Assange : pourquoi le gouvernement américain a brusquement mis fin à l'affaire - Mohamed Elmaazi & Kevin Gosztola
19 - Assange est libre, mais le sommes-nous ? - Slavoj Žižek
20 - Stella Assange exhorte les journalistes à demander des informations au gouvernement américain pour obtenir des détails sur l'affaire - Karen Middleton
21 - "On peut s'attendre à tout" : quelle suite pour Julian Assange et WikiLeaks ? - Ben Quinn
22 - Libération d'Assange : l'écurie des médias à l'épreuve de la réalité - Binoy Kampmark
23 - Julian Assange est enfin libre, mais n'oublions surtout pas les crimes de guerre qu'il a révélés - Marjorie Cohn
24 - La liberté de Julian Assange est aussi la nôtre - Robert Koehler
25 - Assange-Mélenchon : 14 ans d’un soutien indéfectible pour sa libération - L’Insoumission
26 - Le pouvoir vénézulien décerne un prix de journalisme à Julian Assange - La Croix
27 - Le Globe and Mail publie un article diffamatoire truffé d'erreurs sur Julian Assange - The Dissident
28 - Un mécène du Bitcoin règle les frais du jet charter de Julian Assange, d'une valeur de 520 000 dollars - Prashant JHA
29 - Bibliothèque Wikileaks et tous ses fichiers - Rappel du lien
Vidéos
30 - Arrivée de Julian Assange en Australie - Vidéo
31 - Glenn Greenwald : Démystification des mensonges et des mythes entretenus et véhiculés par les médias au sujet de Julian Assange - Vidéo
32 - La meilleure vidéo jamais réalisée sur la philosophie du fondateur Julian Assange - Vidéo
33 - Réaction d'Antoine VEY : "La liberté d’informer reste menacée de mort" - Vidéo
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1- ♟ Vous avez sauvé Julian Assange
Après 14 ans de persécution, Julian Assange va être libéré. Nous devons rendre hommage aux centaines de milliers de personnes qui, dans le monde entier, ont fait en sorte que cela se produise.
Par Chris Hedges, le 26 juin 2024, Blog personnel
La sinistre machinerie de l'empire, dont Julian Assange a exposé la perversité et la sauvagerie au monde entier, a consacré 14 ans à essayer de le détruire. Ils lui ont coupé les vivres, bloqué et annulé ses comptes bancaires et ses cartes de crédit. Ils ont inventé de fausses allégations d'agression sexuelle pour le faire extrader vers la Suède, d'où il aurait ensuite été expédié aux États-Unis.
Ils l'ont piégé dans l'ambassade de l'Équateur à Londres pendant sept ans après qu'il eut obtenu l'asile politique et la citoyenneté équatorienne, en lui refusant un laissez-passer sûr à l'aéroport d'Heathrow. Ils ont orchestré un changement de gouvernement en Équateur qui l'a privé de son asile, harcelé et humilié par un personnel d'ambassade complaisant. Ils ont chargé la société de sécurité espagnole UC global d'enregistrer toutes ses conversations, y compris celles avec ses avocats.
La CIA a envisagé de l'enlever ou de l'assassiner. Elle s'est arrangée pour que la police métropolitaine de Londres fasse une descente dans l'ambassade - territoire souverain de l'Équateur - et le kidnappe. Elle a fait en sorte qu'il soit détenu pendant cinq ans dans la prison de haute sécurité de Belmarsh, la plupart du temps à l'isolement.
Et pendant tout ce temps, ils ont orchestré une véritable bouffonnerie judiciaire devant les tribunaux britanniques, où les garanties d'une procédure régulière ont été ignorées afin qu'un citoyen australien, dont le site de publication n'était pas basé aux États-Unis et qui, comme tout journaliste, recevait des documents de la part de lanceurs d'alerte, puisse être inculpé au titre de la loi sur l'espionnage (Espionage Act).
Ils n'ont eu de cesse d'essayer de le détruire. Ils ont échoué. Mais Julian n'a pas été libéré grâce aux tribunaux soucieux de défendre l'État de droit et de disculper un homme qui n'avait commis aucun crime. Il n'a pas été libéré grâce à une subite prise de conscience de la part de la Maison Blanche de Biden et de la communauté du renseignement. Il n'a pas non plus été libéré grâce aux pressions exercées sur le gouvernement américain par les organes de presse qui ont publié ses révélations et l'ont ensuite jeté sous le boisseau en menant une campagne de diffamation vicieuse et acharnée.
Il a été libéré - moyennant un accord avec le ministère américain de la justice, selon des documents judiciaires - en dépit de ces institutions. Il a été libéré grâce à la mobilisation, jour après jour, semaine après semaine, année après année, de centaines de milliers de personnes à travers le monde pour dénoncer l'emprisonnement du journaliste le plus éminent de notre génération et sans laquelle Julian ne serait pas libre.
Les manifestations de masse ne fonctionnent pas toujours. Le génocide à Gaza continue d'infliger son effroyable tribut aux Palestiniens. Mumia Abu-Jamal est toujours enfermé dans une prison de Pennsylvanie. L'industrie des combustibles fossiles ravage la planète. Mais c'est là l'arme la plus puissante dont nous disposons pour nous défendre contre la tyrannie.
Cette pression constante - lors d'une audience à Londres en 2020, à ma grande joie, la juge Vanessa Baraitser, du tribunal de la Old Bailey chargé de l'affaire Julian, s'est plainte du bruit que faisaient les manifestants à l'extérieur - braque une lumière permanente sur l'injustice et expose l'amoralité de la classe dirigeante. C'est la raison pour laquelle les places dans les tribunaux britanniques étaient si limitées et que des militants aux yeux fatigués ont dû faire la queue à l'extérieur dès 4 heures du matin pour réserver une place à des journalistes qu'ils respectaient, la mienne étant réservée à Franco Manzi, un policier à la retraite.
Ces personnes sont anonymes et souvent ignorées. Mais ce sont des héros. Elles déplacent des montagnes. Elles ont encerclé le parlement. Elles se sont tenues sous une pluie battante devant les tribunaux. Elles se sont montrées tenaces et inébranlables. Elles ont fait entendre leur voix collective. Elles ont sauvé Julian. Et alors que cette épouvantable saga se termine, et que Julian et sa famille, je l'espère, trouvent la paix et cicatrise en Australie, nous devons leur rendre hommage. Elles ont poussé les politiciens australiens à défendre Julian, ressortissant australien, et la Grande-Bretagne et les États-Unis ont finalement dû renoncer. Je ne dis pas qu'ils ont fait ce qu'il fallait. Il s'agiit d'une capitulation. Et nous devrions en être fiers.
J'ai rencontré Julian lorsque j'ai accompagné son avocat, Michael Ratner, à des réunions à l'ambassade d'Équateur à Londres. Michael, l'un des plus grands avocats spécialisés dans les droits civiques de notre époque, a insisté sur le fait que la protestation populaire était une composante essentielle de tous les procès qu'il a intentés contre l'État. Sans elle, l'État pourrait persécuter les dissidents, mépriser la loi et se livrer à des crimes dans l'obscurité.
Des personnes comme Michael, ainsi que Jennifer Robinson, Stella Assange, le rédacteur en chef de WikiLeaks Kristinn Hrafnsson, Nils Melzer, Craig Murray, Roger Waters, Ai WeiWei, John Pilger et le père de Julian, John Shipton, et son frère Gabriel, ont joué un rôle déterminant dans ce combat. Mais ils n'auraient pas pu le faire seuls.
Nous avons désespérément besoin de mouvements de masse. La crise climatique s'accélère. Le monde, à l'exception du Yémen, assiste passivement à un génocide retransmis en direct. L'avidité insensée d'une expansion capitaliste sans limite a tout transformé, des êtres humains au monde naturel, en marchandises à exploiter jusqu'à leur épuisement ou effondrement. La décimation des libertés civiles nous a enchaînés, comme nous en avait averti Julian, à un appareil de surveillance et de contrôle interconnecté qui s'étend à l'ensemble du globe.
La classe dirigeante mondiale s'est dévoilée au grand jour. Elle a l'intention, dans le Nord, de construire des forteresses climatiques et, dans le Sud, d'utiliser ses armes industrielles pour enfermer et massacrer les désespérés de la même manière qu'elle massacre les Palestiniens.
La surveillance de l'État est bien plus intrusive que celle pratiquée par les régimes totalitaires du passé. Les critiques et les dissidents sont facilement marginalisés ou réduits au silence sur les plateformes numériques. Cette structure totalitaire - que le philosophe politique Sheldon Wolin a appelée "totalitarisme inversé" - s'est imposée par étapes. Julian nous avait prévenus. À mesure que la structure du pouvoir se sent menacée par une population rétive dénonçant sa corruption, l'accumulation de richesses obscènes, les guerres sans fin, son incompétence et la répression croissante, les fers qu'elle a imposés sur Julian le seront aussi sur nous.
Le but de la surveillance généralisée, comme l'écrit Hannah Arendt dans Les origines du totalitarisme, n'est pas, en fin de compte, de découvrir des crimes, "mais d'être présent lorsque le gouvernement décide d'arrêter une certaine catégorie de la population". Et parce que nos courriels, nos conversations téléphoniques, nos recherches sur Internet et nos déplacements géographiques sont enregistrés et stockés à perpétuité dans des bases de données gouvernementales, parce que nous sommes la population la plus photographiée et la plus fliquée de l'histoire de l'humanité, les "preuves" seront plus que suffisantes pour nous arrêter si l'État le juge nécessaire. Cette surveillance permanente et ces données personnelles attendent, tel un virus mortel, d'être exploitées contre nous au sein des coffres-forts gouvernementaux. Peu importe que ces informations soient insignifiantes ou anodines. Dans les États totalitaires, la justice, comme la vérité, n'a aucune importance.
L'objectif de tous les systèmes totalitaires est de faire régner un climat de peur afin de paralyser une population prisonnière. Les citoyens se réfugient dans les structures qui les oppriment. L'emprisonnement, la torture et le meurtre sont réservés aux irréductibles réfractaires tels que Julian. L'État totalitaire exerce ce contrôle, écrit Arendt, en écrasant la spontanéité humaine et, par extension, la liberté des hommes. La population se trouve paralysée par les traumatismes. Les tribunaux, ainsi que les organes législatifs, légalisent les crimes d'État. Nous avons vu tout cela à travers la persécution de Julian. C'est un sinistre présage pour l'avenir.
Si nous voulons restaurer notre société ouverte et sauver notre planète, il nous faut détruire l'État entreprise. Son appareil de sécurité doit être démantelé. Les mandarins qui gèrent le totalitarisme d'entreprise, y compris les dirigeants des deux principaux partis politiques, les universitaires bornés, les experts et les médias en faillite, doivent être chassés des temples du pouvoir.
Les manifestations de masse et la désobéissance civile prolongée sont notre seul espoir. Si nous ne nous soulevons pas - ce sur quoi compte l'État corporatif - nous serons réduits en esclavage et l'écosystème de la Terre deviendra impropre à la vie humaine. Prenons exemple sur ces hommes et des femmes courageux qui sont descendus dans la rue pendant 14 ans pour sauver Julian. Ils nous ont montré la voie à suivre.
📰 Lien de l'article original :
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2- ♟ Julian Assange est sur le chemin de la liberté, mais le combat est loin d'être terminé
Les forces responsables de l'emprisonnement de Julian pour le "crime" d'avoir exercé le journalisme n'ont toujours pas été vaincues.
Par Srecko Horvat, philosophe croate, le 25 juin 2024, Al Jazeera
Au cours de l'une des nombreuses conversations que j'ai eues avec Julian Assange lorsqu'il se trouvait à l'ambassade de l'Équateur à Londres, je lui ai demandé ce qu'il ferait en premier s'il pouvait sortir du bâtiment.
"Je regarderais le ciel", a-t-il répondu très calmement.
C'était en 2016, et à l'époque, il avait déjà passé plus de 2 500 jours sans voir le ciel.
Trois ans plus tard, en avril 2019, il a finalement été "invité" à quitter l'ambassade, mais n'a pas eu un seul instant pour regarder le ciel.
La police britannique a fait irruption dans le bâtiment, l'a arrêté et illico presto transféré à la prison de haute sécurité de Belmarsh, dans le sud de Londres, où il est resté emprisonné, essentiellement en isolement, pendant les cinq années suivantes.
Je connais Julian depuis plus de neuf ans, mais je n'ai jamais pu le rencontrer en tant qu'homme libre.
Ses deux enfants, aujourd'hui âgés de cinq et sept ans, n'ont jamais pu voir leur père en tant qu'homme libre non plus.
Cette injustice, enfin et espérons-le, semble toucher à sa fin.
À l'heure où j'écris ces lignes, Julian se trouve dans un avion en partance pour une île située au milieu de l'océan Pacifique, sous juridiction américaine.
Une fois sur place, il fera face à un juge américain et devra plaider coupable d'un "crime" - un chef d'accusation de conspiration en vue d'obtenir et de divulguer des documents classifiés de la défense nationale des États-Unis. Il sera ensuite condamné à une "peine déjà purgée" et, avec un peu de chance, retournera en Australie, son pays natal, en homme libre.
Aujourd'hui est donc un jour de fête. L'un des éditeurs les plus courageux de notre époque est - enfin - en route vers la liberté.
Alors que nous célébrons la liberté de Julian, nous ne saurions fermer les yeux sur le grave crime commis simultanément à son encontre, mais aussi à l'encontre du journalisme et de la liberté d'expression.
Aujourd'hui, Julian est contraint de plaider coupable pour un "crime" inventé après des années de détention arbitraire, mais les responsables des crimes bien réels qu'il a exposés - l'assassinat de journalistes de Reuters et de civils irakiens par les forces américaines, entre autres - sont toujours en liberté.
Aujourd'hui, en libérant Julian Assange dans ces conditions - en le forçant à plaider coupable pour le "crime" de pratiquer le journalisme et de demander des comptes au pouvoir - l'empire américain tente une fois de plus d'intimider les journalistes, éditeurs et activistes du monde entier se risquant à braquer les projecteurs sur ses propres crimes, bien réels et très meurtriers.
Je ne peux m'empêcher de poser la question suivante : pouvons-nous vraiment nous considérer comme libres si les principes fondamentaux du journalisme, tels que la protection des sources et la révélation des crimes de nos gouvernements, sont désormais considérés comme des crimes ?
Sommes-nous vraiment libres si ce ne sont pas ceux qui ont perpétré les crimes révélés par Wikileaks, ou ceux diffusés aujourd'hui en direct sur nos téléphones depuis Gaza, mais Julian Assange, qui est contraint de "plaider coupable" ?
En ce jour où Julian s'envole vers sa liberté, je veux garder espoir et dire : "Oui, nous sommes, contre toute attente, encore libres dans une certaine mesure".
Et nous resterons libres tant qu'il y aura des Julian Assange, Chelsea Manning, Edward Snowden, qui oseront remettre en question la conduite de nos gouvernements et exposer leur brutalité. Nous resterons libres tant que des journalistes, des éditeurs, des lanceurs d'alerte et des prisonniers politiques ayant des principes, partout dans le monde, continueront à faire entendre la vérité au pouvoir, quelles qu'en soient les conséquences.
Nous sommes libres et nous le resterons tant que ceux qui ont mené campagne pour la liberté de Julian pendant tant d'années, des milliers de personnes de tous horizons partout dans le monde, continueront à se battre pour le journalisme, la liberté d'expression et la justice.
Il y a toutes ces années, lors de notre conversation à l'ambassade d'Équateur, Julian m'avait dit que même s'il voulait "regarder le ciel", ne pas pouvoir le faire ne lui inspirait pas de ressentiment.
"Ce n'est pas la rançon payée par hasard, parce que je ne comprenais pas comment le monde fonctionnait", m'avait-il dit. "Je savais que c'était le prix à payer, pas ce prix-là, mais un prix de ce type. Oui, la situation est difficile, mais je suis convaincu qu'il y a un prix à payer pour ce en quoi vous croyez".
Julian a en effet payé un lourd tribut pour ce en quoi il croyait. Il a subi des sévices inimaginables pour avoir exercé un journalisme courageux, crucial et indispensable. Il a passé des années sans pouvoir lever les yeux vers le ciel bleu en tant qu'homme libre.
Mais à la fin, il a gagné. Et il nous a donné à tous une leçon très importante. Pendant ses années de détention arbitraire, illégale et injuste, il a réussi à ne jamais abandonner ses principes. Il savait comment le monde fonctionne et le prix élevé à payer pour le changer. Et il a assumé ce prix avec fierté et conviction.
Il nous a montré à tous comment se battre pour ce en quoi nous croyons.
Wikileaks vient de publier une photo de lui regardant le ciel depuis le hublot de son avion. J'ai perçu tant de joie et d'espoir dans cette photo. Certes, les criminels de guerre, des États-Unis à Israël, sont toujours libres, et tant de personnes dans le monde sont encore persécutées, maltraitées et poursuivies pour avoir osé exposer leurs excès. Mais le fait de voir Julian sur le chemin de la liberté me conforte dans l'idée que nous progressons. Le mouvement pour la justice et la responsabilité est aujourd'hui plus fort, plus uni et plus déterminé que jamais.
Célébrons la liberté de Julian, une fois qu'il aura atteint le sol australien en toute sécurité et retrouvé sa famille. Réjouissons-nous du fait qu'une fois sur place, il pourra regarder le ciel chaque fois qu'il le souhaitera.
Mais n'oublions pas que les forces qui l'ont privé de sa liberté, les forces qui menacent encore nos libertés aujourd'hui, ne sont pas encore vaincues. Et continuons à nous battre pour ce en quoi nous croyons.
Srećko Horvat est un philosophe croate. Ses derniers ouvrages sont "After the Apocalypse" et "Poetry from the Future". Il figure dans le documentaire d'Al Jazeera intitulé "Europe's Forbidden Colony".
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l'auteur et ne reflètent pas nécessairement la position éditoriale d'Al Jazeera.
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3- ♟ Libération de Julian Assange : Accords de plaidoyer et sombres héritages
Par Binoy Kampmark, le 26 juin 2024, CounterPunch
L'une des plus longues sagas de persécution politique touche à sa fin. Enfin, si l'on croit aux chapitres finaux. Rien dans le destin de Julian Assange ne semble déterminant. Ses accusateurs et inquisiteurs se réjouiront de l'accord conclu entre l'équipe juridique du fondateur de WikiLeaks et le ministère américain de la justice. D'autres, comme l'ancien vice-président des États-Unis, Mike Pence, l'ont jugé d'une indulgence injustifiée.
Alléguant la commission de 18 infractions, dont 17 liées de manière inédite à l'odieux Espionage Act, l'acte d'accusation de juin 2020 contre Assange était une attaque frontale contre les libertés de publication et de discussion d'informations gouvernementales classées secrètes. À l'heure où nous écrivons ces lignes, Assange est arrivé à Saipan, dans le territoire des îles Mariannes du Nord (Commonwealth des États-Unis), dans le Pacifique occidental, pour faire face à un nouvel acte d'accusation. L'une des conditions posées par Assange était qu'il ne se présente devant aucun tribunal aux États-Unis, où, avec une suspicion compréhensible, il pourrait légalement disparaître.
Comme le révèle la correspondance entre le ministère américain de la justice et le juge en chef du tribunal de district des États-Unis, Ramona V. Manglona, la "proximité de ce tribunal fédéral de district des États-Unis avec le pays de citoyenneté du défendeur, l'Australie, où nous nous attendons à ce qu'il retourne à l'issue de la procédure" a également joué un rôle.
Devant le tribunal fédéral de district des îles Mariannes du Nord, il plaidera coupable d'un chef d'accusation de conspiration en vue d'obtenir et de divulguer des informations relatives à la défense nationale en vertu de la loi sur l'espionnage de 1917, ou section 793(g) (titre 18, USC). Ce délit est passible d'une amende de 10 000 dollars et/ou d'une peine d'emprisonnement de 10 ans, mais le temps passé par Assange à la prison de Belmarsh, où il a passé quelque 62 mois en détention provisoire, lui permettra de satisfaire à cette exigence.
Selon l'acte d'accusation, Assange a sciemment et illégalement conspiré avec l'analyste du renseignement de l'armée américaine Chelsea Manning, alors basée sur la base opérationnelle Hammer en Irak, pour recevoir et obtenir des documents, écrits et notes, y compris ceux de nature secrète, relatifs à la défense nationale, a délibérément communiqué ces documents émanant de personnes légalement en possession de ceux-ci ou y ayant accès à des personnes non habilitées à les recevoir, et a fait de même avec des personnes non autorisées à posséder ces documents.
Avant d'aborder les graves implications de ce seul chef d'accusation et de l'accord de plaidoyer, les partisans d'Assange, y compris sa famille proche, ses associés et ceux qui ont travaillé avec lui et bu dans le même puits de publication, avaient toutes les raisons de ressentir un sentiment d'ivresse surréaliste. WikiLeaks a annoncé le départ d'Assange de la prison londonienne de Belmarsh le matin du 24 juin, après 1 901 jours, sa libération sous caution par la Haute Cour de Londres et sa mise en liberté à l'aéroport de Stansted. Son épouse Stella a régulièrement informé ses followers du déroulement du vol VJ199. Lors de la couverture de son arrivée au tribunal fédéral de Saipan, elle s'est demandé "à quel point ses sens devaient être exacerbés, traversant la mêlée de presse après des années de privation sensorielle et les quatre murs" de sa cellule de Belmarsh.
Quant à l'accord lui-même, il est difficile de le critiquer du point de vue émotionnel et personnel d'Assange et de sa famille. Il était malade et soumis à une lente exécution judiciaire. C'était également le seul point d'ancrage sur lequel le ministère de la justice et l'administration Biden pouvaient s'appuyer pour aller de l'avant. Cette année étant une année électorale aux États-Unis, la dernière chose que le président Biden souhaitait, c'était un rappel obsédant de cette sale saga de persécution politique planant sur les vertus du pays de la liberté.
Un autre aspect, plus sordide encore, que le ministère de la justice a dû garder à l'esprit en réduisant le nombre de chefs d'accusation : dans un procès Assange digne de ce nom, les fantasmes assassins de la CIA à l'égard de l'éditeur auraient été passés au crible. Ceux-ci incluaient diverses mesures possibles : enlèvement, restitution, voire assassinat, points explorés en détail dans une contribution de Yahoo News en septembre 2021.
L'un des auteurs de l'article, Zach Dorfman, a rappelé, alors que la nouvelle de l'accord de plaidoyer filtrait, que de nombreux responsables de l'administration Trump, même des critiques virulents d'Assange, "pensaient que le directeur de la CIA, Mike Pompeo, était extrêmement imprudent et probablement illégal dans ses projets de restitutions extraordinaires. Ils pensaient aussi - et c'est essentiel - que cela pourrait nuire aux poursuites engagées contre Assange". Si les stratagèmes de Pompeo venaient à être révélés, "cela rendrait le processus de découverte cauchemardesque pour l'accusation, si jamais Assange devait être jugé".
Du point de vue des éditeurs, journalistes et scribouillards soucieux de responsabiliser les puissants, ce plaidoyer doit être considéré comme extrêmement troublant. Il s'agit en fin de compte de l'exercice brutal du pouvoir extraterritorial des États-Unis à l'encontre de tout éditeur, quel que soit le point de diffusion et quelle que soit sa nationalité. Bien que le fardeau juridique et le poids de l'accusation aient été considérablement réduits (62 mois semblent bien moins imposants que 175 ans), la mesure extrait un pound de chair du quatrième pouvoir. Cela montre que les États-Unis peuvent traquer et traqueront tous ceux qui obtiennent et publient des informations relatives à la sécurité nationale qu'ils souhaitent garder secrètes en invoquant des notions fallacieuses de "préjudice".
La condamnation d'Assange conforte également la logique grossière adoptée dès le moment où WikiLeaks a commencé à publier des dossiers diplomatiques et de sécurité nationale américains : ces activités ne pouvaient pas être considérées comme journalistiques, malgré leur rôle dans l'information des commentaires de la presse ou dans l'exposition du côté vénal du pouvoir par le biais de fuites.
Du principal procureur Gordon Kromberg à des juges britanniques tels que Vanessa Baraitser, en passant par les observateurs de la sécurité nationale logés dans l'écurie des médias et de nombreux hommes politiques, dont feu la démocrate californienne Dianne Feinstein et l'actuel président Joe Biden, Assange n'appartenait pas au quatrième pouvoir et méritait d'être molesté. Il a révélé le pot aux roses. Il a volé les secrets de l'empire.
À cet égard, l'accord de plaidoyer tourne en dérision les arguments et les déclarations enthousiastes selon lesquels l'arrangement est en quelque sorte une victoire pour la liberté de la presse. Il suggère le contraire : que quiconque publie des informations relatives à la sécurité nationale des États-Unis émanant d'une fuite ou d'un lanceur d'alerte est en danger. Bien que ce point n'ait jamais été testé devant un tribunal, les éditeurs non américains pourraient ne pas être en mesure de se prévaloir des protections du premier amendement en matière de liberté d'expression. Pour la première fois dans l'histoire, la loi sur l'espionnage (Espionage Act) a été dotée d'une portée mondiale et tentaculaire, et est devenue une arme contre les éditeurs hors États-Unis, ouvrant ainsi la voie à de futures poursuites.
📰 https://www.counterpunch.org/2024/06/26/the-release-of-julian-assange-plea-deals-and-dark-legacies/
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4- ♟ Les enseignements de la persécution d'Assange
Par le Brownstone Institute, le 26 juin 2024
Après douze ans de détention, Julian Assange est aujourd'hui sur le point de recouvrer la liberté après avoir accepté de plaider coupable en échange de sa libération. S'il y a lieu de se réjouir de cette nouvelle, sa persécution nous rappelle solennellement que les puissants sont prêts à usurper tous nos droits pour faire avancer leurs intérêts.
Les gouvernements occidentaux, sous la houlette de l'État sécuritaire américain, ont abrogé les piliers de notre système judiciaire pour punir Assange d'avoir exposé leurs crimes. Le plaidoyer de culpabilité lui-même reflète leur censure éhontée.
Assange plaidera coupable de "conspiration en vue de diffuser des informations relatives à la défense nationale". Sans la diffusion d'informations classifiées, le journalisme ne serait officiellement rien d'autre qu'un porte-voix de la communauté du renseignement américain. Le plaidoyer d'Assange pourrait tout aussi bien décrire Daniel Ellsberg et les Pentagon Papers, longtemps salués comme l'étoile polaire du journalisme américain.
Mais alors que les médias traditionnels se plient toujours plus à l'État sécuritaire américain (des groupes comme le Washington Post ont plaidé à plusieurs reprises en faveur de l'emprisonnement de l'éditeur de WikiLeaks), Assange est resté déterminé dans sa quête de la liberté de l'information. C'est pourquoi ses ennemis et ses détracteurs ont renversé toutes les normes de la justice occidentale pour le punir.
Les libertés consacrées par le premier amendement, notamment la liberté d'expression et la liberté de la presse, ont été subordonnées à la soif insatiable de guerre des néoconservateurs et à leur intolérance implacable à l'égard des dissidents. L'application régulière de la loi a été réduite à néant puisqu'Assange a passé plus de dix ans en prison alors qu'il n'avait été condamné à aucun crime, si ce n'est à un délit pour non-respect des conditions de sa mise en liberté sous caution.
Le secret professionnel a été jugé inapplicable, la CIA ayant espionné les communications d'Assange avec ses avocats. En tant que directeur de la CIA, Mike Pompeo a envisagé d'enlever et d'assassiner le fondateur de WikiLeaks pour avoir publié des documents révélant que la communauté du renseignement avait utilisé l'argent des contribuables pour installer des mouchards dans les téléviseurs Samsung des Américains afin de porter atteinte à leur vie privée.
"Assange n'est pas persécuté pour ses propres crimes, mais pour ceux des puissants", écrit Nils Melzer, rapporteur spécial des Nations unies sur la torture et auteur de The Trial of Julian Assange.
En 2010, WikiLeaks a publié Collateral Murder, une vidéo de 38 minutes montrant des soldats américains tuant une douzaine de civils irakiens et deux journalistes de Reuters. L'enregistrement, toujours disponible en ligne, montre deux pilotes d'hélicoptères Apache déchaînant le feu sur les hommes en contrebas comme s'il s'agissait d'un jeu vidéo.
"Regardez ces bâtards crevés", dit l'un des tueurs. "Bien joué", répond son copilote.
Il n'y avait aucune base stratégique pour refuser aux citoyens américains le droit de visionner la vidéo ; la dissimulation était une manœuvre de relations publiques destinée à éviter le retour de flamme des crimes de guerre manifestes.
Mais au lieu de demander des comptes aux soldats ou aux commandants américains responsables du massacre, le gouvernement américain a lancé une vaste opération inter-agences pour réduire au silence, emprisonner et éventuellement assassiner l'éditeur.
Après Collateral Murder, le sénateur Joe Lieberman a réussi à faire pression sur Amazon pour qu'il retire WikiLeaks de son serveur et a convaincu des sociétés telles que Visa, MasterCard et PayPal de refuser d'offrir des services financiers à la plateforme.
Assange a ensuite été détenu pendant plus de cinq ans à la prison de Belmarsh, surnommée le "Guantanamo britannique", où il côtoyait des terroristes et des meurtriers. Il a été accusé en vertu de l'Espionage Act, une loi de 1917 rarement invoquée mais plutôt destinée aux véritables ennemis de l'État.
Aujourd'hui, Assange semble à quelques jours de la liberté, mais son emprisonnement de plus d'une décennie nous rappelle brutalement que les clauses de la Déclaration des droits ou de la Magna Carta ne sont pas des garanties suffisantes contre la tyrannie. Ce ne sont que des "garanties de parchemin", comme l'ont décrit les auteurs de la Déclaration.
Le juge Antonin Scalia a déclaré un jour :
"Si vous pensez qu'une déclaration des droits est ce qui nous distingue des autres, vous êtes fou. Toutes les républiques bananières du monde ont une déclaration des droits". "De simples mots", a-t-il ajouté, "n'empêchent pas la centralisation du pouvoir entre les mains d'un seul homme ou d'un seul parti, ce qui permet d'ignorer les garanties".
Dans le cas d'Assange, nous avons vu comment la centralisation du pouvoir au sein d'un parti pro-guerre a conduit à l'éradication délibérée de ces garanties et à la mise au cachot d'un journaliste pour avoir publié des informations que le Pentagone jugeait inopportunes pour le public.
En 2020, nous avons assisté au même processus lorsqu'un hégémon pro-fermeture a pris le pouvoir et a de nouveau utilisé sa domination sur les intérêts des entreprises pour contraindre les Américains à la soumission.
Julian Assange constitue un test de Rorschach pour deux types de visions du monde. Les puissants peuvent-ils se mettre à l'abri de tout recours juridique ou réputationnel, ou les citoyens ont-ils le droit de demander des comptes à leurs dirigeants ? Nos droits sont-ils inaliénables ou soumis au bon vouloir de nos dirigeants ?
Son cas représente bien plus que son droit à publier des informations - il s'agit de savoir si nous avons le droit d'accéder aux informations nécessaires pour exposer les crimes et la corruption de nos dirigeants.
Certains, comme l'ancien secrétaire d'État Mike Pompeo et le vice-président Mike Pence, restent inébranlables dans leur soutien à la centralisation du pouvoir.
Quelles sont les retombées de l'affaire Assange ? Personne ne s'est excusé ni ne s'excusera pour sa persécution et encore moins pour la guerre qu'il a exposée, même si personne dans la vie publique aujourd'hui n'est prêt à la défendre.
Il s'agit d'une victoire personnelle pour Julian, qui peut enfin goûter à la liberté après 14 ans d'emprisonnement. Est-ce une victoire pour la liberté d'expression ? Il pourrait tout aussi bien s'agir d'une déclaration explicite sur ce qu'il advient de la dissidence.
Les actions d'Assange d'il y a quelques années restent dans une zone grisâtre. C'est là toute l'idée. La peur vient combler le vide.
📰 https://brownstone.org/articles/lessons-from-the-persecution-of-assange/
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5- ♟ Assange en liberté : Le combat contre l'empire du mensonge continue
Par Régis de Castelnau, le 25 juin 2024, Vu du Droit
Après plus de 10 ans de tortures de diverses natures manipulées par l’Empire avec le soutien de ses valets européens, après 10 ans de lutte et de soutien pour le symbole de la liberté d’expression et d’informer, Julien Assange a été libéré.
Pour bien comprendre cette dernière péripétie judiciaire qui a vu Assange quitter son cachot anglais et monter dans un avion, il faut donner quelques explications juridiques. Julien Assange faisait l’objet de poursuites pénales pour espionnage devant la justice américaine. S’arrogeant un privilège d’extraterritorialité, les États-Unis le poursuivaient pour des "infractions" commises en dehors du territoire américain. Il s’est trouvé piégé lors d’un passage en Grande-Bretagne avec la complicité de l’État suédois. Sollicité par les Américains, celui-ci avait déclenché à l’encontre d’Assange une procédure fondée sur des accusations de viol. Ce qui permettait de demander son extradition en Suède, d’où il aurait été renvoyé aux États-Unis le temps que ces derniers aient régularisé leur procédure et formulé une nouvelle demande d’extradition auprès de Stockholm. Ne pouvant pas quitter la Grande-Bretagne, et pour échapper à ce piège Assange fut contraint de se réfugier à l’ambassade de l’Équateur. Le successeur du président de ce pays qui lui avait accordé cet asile le livra au bout de quelques années à la police britannique. Commença alors l’interminable procédure d’extradition sollicitée par la justice américaine. La justice britannique que l’on passe son temps à nous présenter comme un modèle, s’est alors constamment déshonorée, en violant systématiquement tous les principes, et donnant le spectacle abject d’une république bananière. La mobilisation internationale et la proximité de l’élection présidentielle américaine ont incité le département d’État et la Maison-Blanche à régler le problème grâce à une procédure de "plaider coupable". Le principe en est simple, le parquet propose à la personne poursuivie de reconnaître sa culpabilité, la peine applicable étant négociée avec le prévenu.
C’est la formule adoptée par Assange, qui a "reconnu" sa culpabilité et "accepté" une peine de prison qui couvre la détention qu’il a déjà effectuée dans une prison de haute sécurité de Belmarsh où les autorités britanniques toujours soucieuses de complaire à leur maître américain l’avait enfermé.
Le calvaire du journaliste Julian Assange s’est donc terminé après qu’on lui ait volé 12 ans de sa vie pour avoir dit la vérité sur les crimes de guerre américains.
Contrairement à ce que l’on peut lire à droite et à gauche sous la plume de ceux qui ne risquent rien et déplorent cette solution, cet accord de "plaider coupable" ne créera aucun précédent juridique qui serait préjudiciable aux journalistes à l’avenir.
Bruce Afran, un avocat constitutionnel américain, a déclaré à Consortium News :
"qu’un accord de plaidoyer ne crée pas de précédent juridique. Par conséquent, l’accord d’Assange ne mettra pas en péril les journalistes à l’avenir risquant d’être poursuivis pour avoir accepté et publié des informations classifiées".
Le combat pour la liberté de Julian Assange, qui fut celui de la liberté d’information a été long et harassant. Si la justice britannique s’est déshonorée, le système médiatico-politique français s’est également couvert de honte. Aux notables exceptions de Jean-Luc Mélenchon et de Marine Le Pen (ndr : Mouais, il y aurait beaucoup à (re)dire sur la question …) tous les membres normalement influents de la classe politique ont soigneusement refusé tout soutien à cette cause de la liberté d’information.
Il s’en est même beaucoup trouvé pour approuver la répression dont Assange était la victime. On se contentera de rappeler la position de François Hollande, notre limace nationale, un homme de gauche n’est-ce pas, puisque le "Nouveau Front Populaire" vient de lui donner son investiture. "L’ami de la finance", le fanatique la soumission à l’Amérique, le parjure international dans l’affaire ukrainienne, alors qu’il était Président de la république, avait refusé d’accueillir Assange pour que la France puisse lui accorder un asile politique plus qu’évident.
Quant aux journalistes des organes de la presse système, ce fut un festival de mensonges et de veulerie. Une mention particulière pour le spectacle de la lâcheté visqueuse du journal le Monde, rivalisant dans ce registre avec Libération. Les entendre aujourd’hui hypocritement se réjouir, a quelque chose de simplement écœurant. Et les pires ont trouvé le moyen de s’avilir encore plus.
Le travail pour libérer le monde des griffes de la machine à tuer de l’Empire ne doit pas s’arrêter. Mais il faut se réjouir de cette victoire qui est quand même le fruit d’un rapport de force construit et qui va permettre à Assange de retrouver sa famille.
Mais n’oublions pas la violence que l’empire a utilisée dans sa persécution de Julian Assange, parce qu’elle voulait en faire un exemple public pour montrer ce qui arrive à un journaliste qui dit la vérité sur l’Empire du mensonge.
📰 https://www.vududroit.com/2024/06/assange-en-liberte-le-combat-contre-lempire-du-mensonge-continue/
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6- ♟ Une chasse aux sorcières longue de 14 ans prend fin - mais à quel prix ?
Ce qui semble être une rare victoire pour la liberté de la presse pourrait s'avérer être un remède pire que le mal.
Établir un précédent juridique, c'est comme construire une bombe à retardement. Elle restera tapie dans l'ombre jusqu'à ce qu'une future administration l'invoque pour soutenir une nouvelle chasse aux sorcières visant les critiques publics.
Par Shahid Buttar, le 26 juin 2024, Blog personnel
Je me joins à d'autres personnes, dont Chris Hedges, Matt Taibbi et Stella Assange, qui se réjouissent de l'accord de plaidoyer grâce auquel l'éditeur australien Julian Assange sera enfin libre après 14 ans de persécution politique de la part des administrations de Washington, tant républicaines que démocrates.
Établir un précédent juridique, c'est comme construire une bombe à retardement. Elle restera tapie dans l'ombre jusqu'à ce qu'une future administration l'invoque pour soutenir une nouvelle chasse aux sorcières visant les critiques publics.
Pourquoi le plaidoyer d'Assange est passionnant
Peu d'exemples de la belligérance américaine en disent autant sur les machinations de Washington pour garder ses crimes hors de la vue du public. Assange a été détenu, poursuivi et a apparemment fait l'objet de complots d'assassinat de la part de la CIA, non pas parce qu'il représentait une menace pour les objectifs légitimes de sécurité nationale, mais parce que son travail avec WikiLeaks a exposé des crimes d'État, notamment l'assassinat de journalistes de l'agence Reuters en Irak.
Alors qu'Assange était salué en héros lorsque ses scoops révélaient les crimes de l'administration Bush, l'establishment de la presse s'est retourné contre lui lorsqu'il a fait de même sous l'administration Obama. Pour le meilleur ou pour le pire, la nature bipartisane de l'empire américain oblige des personnes comme lui à critiquer des acteurs de l'ensemble du spectre politique américain.
Quelques raisons de s'inquiéter
Certains ont suggéré que l'accord de plaidoyer permettant à Assange de sortir libre pourrait représenter une concession politique de Biden à ses détracteurs à travers le spectre politique qui sont restés douloureusement conscients de la continuité de Biden dans l'assaut de Bush et Obama contre la transparence et la responsabilité. Pourtant, la porte-parole du Conseil de sécurité nationale, Adrienne Watson, a déclaré que l'accord de plaidoyer mettant fin aux poursuites "était une décision indépendante prise par le ministère de la Justice et qu'il n'y avait pas d'implication de la Maison-Blanche".
Même si Assange est libéré, il risque d'avoir subi un préjudice irréparable pendant la période de sa détention. Alors qu'il était soumis à une détention arbitraire par les autorités britanniques répondant à leurs maîtres américains, il aurait souffert de crises de santé mentale susceptibles d'avoir eu des répercussions permanentes sur son psychisme. S'il n'obtient sa liberté qu'au prix de sa santé mentale, sa victoire pourrait finalement s'avérer pyrrhique (ndr : en référence à une victoire à la Pyrrhus excessivement coûteuse).
En outre, au-delà des faits liés à l'affaire Assange, le plaidoyer pourrait créer un dangereux précédent. Même si l'administration Biden tient les promesses qu'elle a faites, l'accusation crée un dangereux précédent, en accordant à Washington une condamnation au titre de la loi sur l'espionnage pour de prétendus "crimes" relevant carrément des protections du premier amendement sur la liberté de la presse.
Même si Assange est libéré, d'autres journalistes tireront des leçons non seulement des poursuites engagées contre lui, mais aussi de la condamnation réussie d'un éditeur pour avoir révélé des secrets militaires américains. Et la presse ne sera pas la seule à observer, les futurs juristes seront également avertis par le précédent juridique que même un plaidoyer-négociation permissif établirait.
J'ai souvent écrit que le fascisme est un vecteur gagnant en force avec le temps. De nombreuses voix qui célèbrent le plaidoyer-négociation se réjouissent à juste titre de la défense de la liberté de la presse dans ce cas particulier. Mais établir un précédent juridique, c'est comme construire une bombe à retardement. Elle restera tapie dans l'ombre jusqu'à ce qu'une future administration l'invoque pour soutenir une nouvelle chasse aux sorcières visant les critiques publics.
Considérer ce moment dans le temps non seulement comme une répudiation d'une histoire de 14 ans, mais aussi comme une ratification de la théorie juridique qui perdurera potentiellement pendant des décennies, révèle la dystopie implicite même dans les objets d'une célébration appropriée.
Par tous les moyens, célébrez Assange, l'héritage de son travail ainsi que le mouvement populaire mondial qui a contraint Washington à lui accorder la liberté. Veillez à ce que Biden ne s'attribue pas le mérite de sa libération, et ne retenez pas votre souffle. Assange pourrait très bien voir d'autres personnes connaître le même sort funeste que lui à l'avenir.
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7- ♟ Pourquoi le plaidoyer d'Assange est une victoire pour les services de renseignement américains
Par Ken Klippenstein, le 26 juin 2024, Blog personnel
Lorsque la nouvelle du plaidoyer de Julian Assange est tombée, WikiLeaks a publié un communiqué déclarant que "l'histoire" était écrite - un ton triomphal repris par de nombreux partisans de Julian Assange. Sorti de prison, sans crainte d'extradition, un homme libre.
Il existe un point de vue très divergent sur l'accord : celui de la communauté américaine du renseignement. Ses membres actuels et anciens semblent globalement satisfaits du résultat, mais pour une raison assez différente. Ils y voient une confirmation des actes répréhensibles commis par Assange et un triomphe de l'idée que les journalistes, même étrangers, peuvent être tenus pour responsables d'avoir porté atteinte à la sécurité nationale des États-Unis.
À en juger par les commentaires qu'ils ont formulés et qui ont reçu relativement peu d'attention, et d'après ce que j'entends, le plaidoyer d'Assange confirme le dogme de la communauté du renseignement selon lequel la possession et la publication de documents classifiés équivalent à de l'espionnage.
"Je me réjouis que Julian Assange plaide coupable d'avoir obtenu et diffusé illégalement des documents classifiés, et cela me rassure", a déclaré Larry Pfeiffer, ancien chef de cabinet de la CIA, lors d'une interview accordée à Sky News mardi. "Dans l'ensemble, je pense que tout le monde est gagnant".
Frank Figliuzzi, ancien directeur adjoint du contre-espionnage au FBI, a expliqué en des termes on ne peut plus clairs l'enjeu des poursuites engagées contre Assange : la capacité du gouvernement à définir ce qui constitue ou non du journalisme.
"Jamais un journaliste", a déclaré Figliuzzi sur X (anciennement Twitter). "Jamais. Il a causé un préjudice irréparable. Il a mis des vies en danger. Julian Assange a conclu un accord de plaidoyer avec les États-Unis, lui permettant d'être libéré".
La situation est complexe. C'est une victoire pour Assange, qui est libre, mais aussi pour la communauté du renseignement, qui, pour la première fois, a établi un précédent en matière de poursuites judiciaires contre des journalistes pour des raisons de sécurité nationale. L'équipe juridique d'Assange a toutes sortes de raisons soigneusement argumentées pour expliquer pourquoi son plaidoyer ne constitue pas un précédent juridique, mais elle passe à côté de l'essentiel. L'espionnage consiste à mener des activités d'espionnage contre un pays. Ce n'est pas ce qu'a fait Assange et, en tant que citoyen australien, on ne peut pas non plus prétendre qu'il y ait des répercussions juridiques pour l'atteinte à la sécurité nationale américaine, si jamais cela devait être prouvé. (Cela n'est toutefois pas le cas à ce jour et il n'existe aucune preuve d'un quelconque préjudice tangible).
Dans tout cela, le public est perdant, à savoir tous ceux qui voudraient lire des articles non autorisés sur la sécurité nationale, basés sur des informations non glanées dans les informations transmises aux médias par la Maison Blanche et la bureaucratie. Je ne dis pas que les reportages agressifs sur la sécurité nationale vont disparaître du jour au lendemain, mais une affaire pareille fournit une raison de plus aux avocats frileux des grands médias de dire aux rédacteurs en chef et aux journalistes que les sujets ne valent pas la peine d'être risqués. Et ce n'est pas comme si nous regorgions de reportages percutants sur la sécurité nationale.
Ce qui m'amène à Ken Delanian de NBC, un journaliste de sécurité nationale aux sources conventionnelles et, sans doute sans rapport avec ce qui précède, l'un des destinataires préférés de la communauté du renseignement pour ce qui est des fuites (il avait l'habitude de mettre à jour les brouillons de ses articles avec le bureau des affaires publiques de la CIA). Citant un post sur X d'un ancien fonctionnaire du département d'État qui a déclaré à propos du plaidoyer "bon débarras" et "12 ans d'emprisonnement, c'est une peine bien suffisante", Delanian a dit : "Cela semble être un point de vue partagé au sein de la communauté du renseignement". (L'ancien directeur de la CIA et de la NSA, le général Michael Hayden, a reposté un message similaire à celui de Delanian).
Il est amusant de constater que l'ancien fonctionnaire du département d'État, James L. Bruno, affirme avoir lui-même rédigé ou classifié un grand nombre des documents publiés par WikiLeaks, documents dont Assange reconnaît aujourd'hui qu'ils ont porté atteinte à la sécurité nationale des États-Unis (ndr : Ah ouais !? Où ça ?).
Dans l'affaire Assange, le gouvernement américain n'a jamais eu à prouver que les documents publiés par Wikileaks avaient réellement porté atteinte à la sécurité nationale des États-Unis, mais c'est cette hypothèse qui perdurera. L'affirmation sans preuve est une arme importante dans l'arsenal du gouvernement américain, et pas seulement pour convaincre (ou dissuader) les médias de traiter des documents "classifiés".
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8- ♟ Les médias, sous la houlette du Guardian, sont responsables du maintien de Julian Assange derrière les barreaux
Le plus terrible, c'est que le rôle infâme des médias dans l'enfermement d'Assange sera bientôt effacé des annales. En effet, ce sont les médias qui écrivent le scénario de ce qui se passe dans le monde.
Ils se présenteront rapidement comme des saints, et non comme des pécheurs, dans cet épisode. Et, en l'absence d'autres Assange pour nous ouvrir les yeux, il est fort probable qu'on les croie.
Et l'infamie de la presse sera bientôt effacée.
Par Jonathan Cook, le 26 juin 2024, Blog personnel
Il n'est que juste que nous prenions tous un moment pour célébrer la victoire de Julian Assange, libéré après 14 longues années de détention, sous diverses formes, et enfin réuni avec sa femme et ses enfants - deux jeunes garçons qui n'ont pas eu la chance de connaître véritablement leur père.
Il a passé les cinq dernières années dans la prison de haute sécurité de Belmarsh, alors que les États-Unis cherchaient à l'extrader pour le condamner à 175 ans de prison pour avoir publié des détails sur les crimes d'État commis par ce pays en Irak, en Afghanistan et ailleurs.
Pendant les sept années précédentes, il a été confiné dans une petite pièce de l'ambassade d'Équateur à Londres, après que Quito lui a accordé l'asile politique pour échapper aux serres d'un empire américain violant la loi et déterminé à faire de lui un exemple.
Sa saisie par la police britannique de l'ambassade au nom de Washington en 2019, après l'arrivée au pouvoir d'un gouvernement plus proche des États-Unis en Équateur, a prouvé à quel point ceux qui l'accusaient d'"échapper à la justice" avaient été malavisés, ou malveillants.
Tout ce qu'Assange avait dit que les États-Unis comptaient lui faire subir s'est avéré exact au cours des cinq années suivantes, alors qu'il croupissait à Belmarsh, totalement coupé du monde extérieur.
Personne dans notre classe politique ou médiatique n'a semblé remarquer, ou ne pouvait se permettre d'admettre, que les événements se déroulaient exactement comme le fondateur de Wikileaks l'avait prédit depuis tant d'années - et pour lequel il avait été, à l'époque, si vertement ridiculisé.
Cette même classe politico-médiatique n'était pas non plus prête à prendre en compte d'autres éléments essentiels montrant que les États-Unis n'essayaient pas d'appliquer une quelconque procédure légale, mais que l'affaire d'extradition contre Assange visait entièrement à assouvir une vengeance et à faire du fondateur de Wikileaks un exemple pour dissuader d'autres personnes de le suivre dans sa volonté de faire la lumière sur les crimes commis par l'État américain.
Il a notamment été révélé que, fidèle à elle-même, la CIA, démasquée en tant qu'agence de renseignement étrangère malhonnête dans 250 000 câbles d'ambassades publiés par Wikileaks en 2010, avait comploté pour l'assassiner et/ou le kidnapper dans les rues de Londres.
D'autres preuves ont montré que la CIA avait mené de vastes opérations d'espionnage à l'ambassade, enregistrant ses moindres faits et gestes, ainsi que ses rencontres avec ses médecins et ses avocats.
Ce seul fait aurait dû entraîner le rejet de l'affaire américaine par les tribunaux britanniques. Mais la justice britannique regardait par-dessus son épaule, vers Washington, bien plus qu'elle ne respectait ses propres lois.
Les médias ne respectent pas leur rôle de chiens de garde
Les gouvernements occidentaux, les hommes politiques, le système judiciaire et les médias ont tous laissé tomber Assange. Ou plutôt, ils ont fait ce qu'ils sont censés faire : empêcher la populace - c'est-à-dire vous et moi - de découvrir leurs véritables intentions.
Leur travail consiste à construire des récits suggérant qu'ils savent mieux que quiconque, que nous devons leur faire confiance, que leurs crimes, tels que ceux qu'ils soutiennent en ce moment même à Gaza, ne sont en réalité pas ce qu'ils semblent être, mais qu'il s'agit en fait d'efforts déployés dans des circonstances très difficiles pour faire respecter l'ordre moral, pour protéger la civilisation.
C'est pourquoi il est particulièrement nécessaire d'identifier le rôle critique joué par les médias dans le maintien de l'enfermement d'Assange depuis et pendant si longtemps.
La vérité, est qu'avec des médias correctement contradictoires jouant le rôle qu'ils s'attribuent, celui de chien de garde du pouvoir, Assange n'aurait jamais pu disparaître aussi longtemps. Il aurait été libéré depuis des années. Les médias sont responsables de son maintien derrière les barreaux.
Les médias de l'establishment se sont prêtés de bonne grâce au récit de diabolisation que les gouvernements américain et britannique ont soigneusement échafaudé à l'encontre d'Assange.
Aujourd'hui encore, alors qu'il a retrouvé sa famille, la BBC et d'autres médias colportent les mêmes mensonges depuis longtemps discrédités.
Il s'agit notamment de l'affirmation constamment répétée par les journalistes selon laquelle il aurait fait l'objet d'"accusations de viol" en Suède, accusations qui auraient finalement été retirées. Voici la BBC qui récidive dans ces mensonges lors de ses reportages de cette semaine.
En réalité, Assange n'a jamais fait l'objet que d'une "enquête préliminaire", que les procureurs suédois ont abandonnée à plusieurs reprises faute de preuves. L'enquête, nous le savons maintenant, a été relancée et maintenue si longtemps non pas à cause de la Suède, mais principalement parce que le Crown Prosecution Service britannique, alors dirigé par Sir Keir Starmer (aujourd'hui leader du parti travailliste), a insisté pour qu'elle s'éternise.
Starmer s'est rendu à plusieurs reprises à Washington au cours de cette période, alors que les États-Unis tentaient de trouver un prétexte pour enfermer Assange pour des crimes politiques, et non sexuels. Mais comme c'est souvent le cas dans l'affaire Assange, tous les comptes rendus de ces réunions ont été détruits par les autorités britanniques.
L'autre supercherie préférée des médias - toujours défendue - est l'affirmation selon laquelle les publications de Wikileaks mettent en danger les informateurs américains.
C'est totalement absurde, comme le savent tous les journalistes qui ont un tant soit peu étudié le fond de l'affaire.
Il y a plus de dix ans, le Pentagone a mis en place une procédure d'examen afin d'identifier les agents américains tués ou blessés à la suite des fuites. Il l'a fait précisément pour aider à amadouer l'opinion publique à l'encontre d'Assange.
Pourtant, une équipe de 120 officiers du contre-espionnage n'a pas été en mesure de trouver un seul cas de ce type, comme l'a admis le chef de l'équipe, le général de brigade Robert Carr, devant le tribunal en 2013.
Malgré une salle de rédaction regorgeant de centaines de correspondants, y compris ceux qui prétendent se spécialiser dans la défense, la sécurité et la désinformation, la BBC n'arrive toujours pas à faire la lumière sur ce fait fondamental de l'affaire.
Ce n'est pas un accident. C'est ce qui arrive lorsque les journalistes se laissent nourrir à la cuillère par ceux qu'ils sont censés surveiller. C'est ce qui arrive lorsque les journalistes et les responsables des services de renseignement entretiennent une relation incestueuse permanente.
L'assassinat de la personnalité d'un homme
Mais ce ne sont pas seulement ces manquements flagrants en matière d'information qui ont maintenu Assange confiné dans sa petite cellule de Belmarsh. C'est l'ensemble des médias qui ont agi de concert pour assassiner sa personnalité, rendant non seulement acceptable mais respectable le fait de le haïr.
Il était impossible de publier un article sur l'affaire Assange sur les réseaux sociaux sans que des dizaines d'interlocuteurs ne surgissent pour vous dire à quel point il était profondément antipathique, à quel point il était narcissique, à quel point il avait maltraité son chat ou barbouillé d'excréments les murs de l'ambassade. Bien entendu, aucune de ces personnes ne l'a jamais rencontré.
Il ne leur est pas non plus venu à l'esprit que, même si tout cela était vrai, cela n'aurait pas pour autant excusé la privation d'Assange de ses droits légaux fondamentaux, comme cela s'est très clairement produit. Et plus encore, cela ne pouvait en rien justifier l'érosion du devoir d'intérêt public des journalistes d'exposer les crimes d'État.
Ce qui était réellement en jeu dans les longues audiences d'extradition, c'était la détermination du gouvernement américain à assimiler le journalisme d'investigation en matière de sécurité nationale à de l'"espionnage". Le fait qu'Assange soit un narcissique n'avait précisément aucune incidence sur cette question.
Pourquoi tant de personnes ont-elles été persuadées que les supposés défauts de caractère d'Assange étaient d'une importance cruciale pour l'affaire ? Parce que les médias de l'establishment - nos supposés arbitres de la vérité - étaient d'accord sur ce point.
Les calomnies n'auraient peut-être pas tenu aussi bien si elles n'avaient été lancées que par les tabloïds de droite. Mais ces affirmations ont pris vie grâce à leur répétition incessante par des journalistes censés se situer de l'autre côté de l'allée, notamment ceux du Guardian.
Les libéraux et les gauchistes ont été exposés à un flux constant d'articles et de tweets humiliant Assange et sa lutte désespérée et solitaire contre la seule superpuissance mondiale pour l'empêcher d'être enfermé à vie pour avoir pratiqué le journalisme.
Le Guardian, qui avait bénéficié de l'alliance initiale avec Wikileaks pour la publication de ses révélations, n'a fait preuve d'aucune solidarité lorsque l'establishment américain est venu frapper à la porte, déterminé à détruire la plateforme Wikileaks ainsi que son fondateur, pour avoir rendu ces révélations possibles.
Pour ne jamais oublier, voici quelques exemples de la façon dont le Guardian a fait de lui - et non de l'État sécuritaire américain en violation de la loi - le scélérat.
Marina Hyde, dans le Guardian de février 2016 - quatre ans après sa captivité dans l'ambassade - a rejeté avec désinvolture les inquiétudes d'un panel d'experts juridiques de renommée mondiale des Nations Unies, les qualifiant de "crédules", préoccupations selon lesquelles Assange était "détenu arbitrairement" parce que Washington avait refusé de garantir qu'il ne demanderait pas son extradition pour des délits politiques :
Le même jour, Joshua Rozenberg, correspondant de longue date de la BBC pour les affaires juridiques, s'est vu accorder un espace dans le Guardian pour se tromper lourdemen, affirmant qu'Assange "se cachait" simplement dans l'ambassade, sans être menacé d'extradition (note : bien que sa compréhension analytique de l'affaire se soit révélée faible, la BBC lui a permis de s'exprimer davantage cette semaine sur l'affaire Assange) :
Deux ans plus tard, le Guardian continuait de colporter le même discours selon lequel, bien que le Royaume-Uni ait dépensé plusieurs millions pour assurer la présence de policiers cernant l'ambassade afin d'empêcher Assange de "fuir la justice", Assange ne restait détenu à l'ambassade que par "fierté" :
Ou que dire de celui de Hadley Freeman, publié par le Guardian en 2019, alors qu'Assange disparaissait pour plus de cinq années dans le goulag le plus proche de la Grande-Bretagne, sur le "bonheur intense" qu'elle présume que le personnel de nettoyage de l'ambassade doit ressentir :
Quiconque n'a pas compris à quel point tant de rédacteurs du Guardian étaient personnellement hostiles à Assange doit examiner leurs tweets, dans lesquels ils se sentaient plus libres de se lâcher. Hyde l'a décrit comme "peut-être même le plus grand trou du cul de Knightsbridge", tandis que Suzanne Moore déclarait qu'il était "le plus gros étron".
Le dénigrement constant d'Assange et le mépris de son sort ne se sont pas limités aux pages d'opinion du Guardian. Le journal a même participé à la rédaction d'un faux rapport - vraisemblablement fourni par les services de renseignement, mais aisément réfutable - destiné à contrarier les lecteurs du journal en le salissant comme un laquais de Donald Trump et des Russes.
Ce canular notoire - affirmant faussement qu'en 2018, Assange a rencontré à plusieurs reprises un collaborateur de Trump et des "Russes anonymes", sans qu'aucune des dizaines de caméras de vidéosurveillance surveillant les abords de l'ambassade ne l'ait enregistré - figure toujours sur le site web du Guardian :
Cette campagne de diabolisation a facilité le processus par lequel Assange a été traîné par la police britannique hors de l'ambassade au début de l'année 2019.
Elle a également permis au Guardian de ne pas être sous les feux de la rampe. En effet, ce sont des erreurs imputables au journal, et en aucun cas à Assange, qui ont conduit au "crime" supposé au cœur de l'affaire d'extradition américaine, à savoir que Wikileaks avait publié à la hâte une cache de fichiers non expurgés, comme je l'ai déjà expliqué en détail.
Trop peu et trop tard
Les médias de l'establishment qui ont collaboré avec Assange il y a 14 ans en publiant les révélations sur les crimes d'État américains et britanniques n'ont commencé à changer timidement leur fusil d'épaule que fin 2022, soit plus d'une décennie trop tard.
C'est à ce moment-là que cinq de ses anciens partenaires médiatiques ont adressé une lettre commune à l'administration Biden pour lui demander de "mettre fin aux poursuites engagées contre Julian Assange pour avoir publié des secrets". (ndr : le "minimum syndical")
Mais alors que Julian Assange a été libéré cette semaine, la BBC a continué à le dénigrer au goutte-à-goutte :
Si la BBC n'était pas un simple sténographe du gouvernement britannique, elle pourrait titrer comme il se doit : "Tony Blair : Multimillionnaire ou criminel de guerre ?".
En effet, alors que les médias de l'establishment se sont employés à fixer notre regard sur les prétendus défauts de caractère d'Assange, ils ont détourné notre attention des vrais coupables, ceux qui ont commis les crimes qu'il a exposés : Blair, George W Bush, Dick Cheney et bien d'autres.
Nous devons reconnaître un schéma ici. Lorsque les faits ne peuvent être contestés, l'establishment doit tirer sur le messager.
Dans le cas présent, il s'agissait d'Assange. Mais la même machine médiatique a été déployée contre l'ancien leader travailliste Jeremy Corbyn, une autre épine dans le pied de l'establishment. Et comme dans le cas d'Assange, le Guardian et la BBC ont été les deux médias les plus utiles à la diffusion des calomnies.
Pour obtenir sa liberté, Assange a malheureusement été contraint de conclure un accord en plaidant coupable de l'un des chefs d'accusation retenus contre lui au titre de la loi sur l'espionnage (Espionage Act).
Soulignant la mauvaise foi persistante du Guardian, le même journal qui a si facilement ridiculisé les années de détention d'Assange et la menace qui pesait sur lui d'être enfermé à vie (ndr : voir être condamné à la peine capitale) dans une prison super-maximale américaine, a publié cette semaine, alors qu'Assange était libéré, un article soulignant le "dangereux précédent" pour le journalisme créé par son accord de plaidoyer.
Le traitement réservé à Assange par Washington a toujours eu pour but d'envoyer un message glaçant aux journalistes d'investigation : s'il est bon d'exposer les crimes des ennemis officiels, les mêmes normes ne doivent jamais être appliquées à l'empire américain lui-même.
Comment est-il possible que le Guardian n'apprenne cela que maintenant, après avoir échoué à saisir la leçon plus tôt, quand cela comptait, durant les longues années de persécution politique d'Assange ?
Ce qui est encore plus terrible, c'est que le rôle infâme des médias dans l'enfermement d'Assange sera bientôt effacé des annales. En effet, ce sont les médias qui écrivent le scénario de ce qui se passe dans le monde.
Ils se présenteront rapidement comme des saints, et non comme des pécheurs, dans cet épisode. Et, en l'absence d'autres Assange pour nous ouvrir les yeux, il est fort probable qu'on les croie.
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9- ♟ Diable, peut-être que TOUT est possible
La vie réelle n'évolue pas de la manière dont Hollywood nous conditionne à l'attendre. La vie réelle apporte des victoires anticlimactiques et des miracles prosaïques. Et elle évolue d'une manière impossible à anticiper pour l'ego.
Assange a été libéré. Alors, pourquoi pas l'humanité tout entière ?
Par Caitlin Johnstone, le 26 juin 2024, Blog personnel
Ce qui me frappe le plus en regardant les images bouleversantes de Julian Assange rentrant chez lui en Australie, c'est à quel point tout cela semblait impossible jusqu'à ce que cela se produise.
Si vous suivez cette affaire depuis un certain temps, vous savez parfaitement de quoi je parle. C'était le moment dont vous rêviez dans vos moments de calme et d'intimité, mais dont vous ne pouviez jamais vous permettre de croire qu'il se produirait réellement.
Il était très facile d'imaginer Assange mourant dans une cellule de prison, que ce soit dans un futur proche à Belmarsh ou plus loin dans le temps dans un enfer américain. Il était possible de l'imaginer sortant de prison dans de nombreuses années, ses enfants ayant atteint l'âge adulte et plus de la moitié de sa vie lui ayant été volée. Il était même possible d'imaginer qu'il soit libéré un jour pour un motif juridique ou autre et qu'il passe le reste de sa vie dans un pays entretenant une relation conflictuelle avec Washington, à l'instar d'Edward Snowden, par exemple. Mais pouvoir rentrer chez lui, en Australie ? Il n'y avait aucune chance.
Et pourtant, il est là. C'est arrivé.
Il est facile de se perdre dans l'émotion, la controverse et les discussions sur les détails de l'affaire Assange et de son accord de plaidoyer, et d'oublier d'apprécier le fait qu'une chose impossible vient de se produire. Il s'agit d'un événement historique dont très peu d'entre nous pensaient qu'il se produirait un jour - jusqu'à ce cela arrive.
Je ne sais pas ce qu'il en est pour vous, mais pour ma part, je trouve tout cela plutôt humiliant. Je n'ai jamais exprimé publiquement mon pessimisme quant à l'avenir du sort d'Assange, parce qu'il est important de s'efforcer de remporter la victoire même lorsque toutes les chances semblent contre vous, mais je ne croyais vraiment pas que ce qui vient de se passer allait se produire. Et j'avais complètement tort.
Ce qui m'amène à me demander : Pour quoi d'autre ai-je agi de la sorte ? Quelles sont les autres batailles qui me semblent presque futiles en ce moment et qui, un jour, me ridiculiseront en m'offrant une victoire inespérée ?
Après tout, peut-être que TOUT est possible. Peut-être que ce qui vient de se passer avec Assange peut se produire avec n'importe laquelle des autres injustices et exactions que dont nous sommes témoins aujourd'hui dans le monde. Peut-être que cela peut arriver avec la Palestine. Ou avec la montée en puissance de la guerre des préparatif avec la Russie et la Chine. Ou avec la corruption, l'opacité et les malversations de nos propres gouvernements. Ou pourquoi pas avec l'empire lui-même ou avec le capitalisme tout court.
Peut-être que nous allons finalement gagner. Après tout, il ne s'agit peut-être pas d'une chimère. Comme dans l'affaire Assange, cela ne se produira peut-être pas de la manière la plus grandiose et la plus satisfaisante pour notre propre égo, mais qui sait ce qui peut arriver ? Il ne s'agit pas d'un film hollywoodien, mais de la vie bien réelle. La vie réelle n'évolue pas de la manière dont Hollywood nous conditionne à l'attendre. La vie réelle apporte des victoires anticlimactiques et des miracles prosaïques. Et elle évolue d'une manière impossible à anticiper pour l'ego.
Il est confortable d'être blasé et pessimiste. On se sent moins vulnérable. On a l'air plus cool. Vous n'avez pas à gérer le travail émotionnel de la déception. Et il est vrai que l'on vous donne très souvent raison. Du moins, jusqu'à ce que vous ayez tort.
Et peut-être que ce n'est pas la façon la plus authentique d'aborder la question. Peut-être vaut-il mieux se lancer dans ce combat non seulement en croyant que nous pourrions gagner, mais en sachant que nous gagnerons. Peut-être que tout ce pessimisme et cette réserve nous empêchent de nous lancer à corps perdu et de tout laisser sur le ring. Et peut-être que cela repose sur des hypothèses complètement fausses quant à ce dont nous sommes réellement capables quoi qu'il en soit.
Assange a été libéré. Alors, pourquoi pas l'humanité tout entière ?
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10- ♟ Assange est libre, mais la guerre des autorités américaines contre la liberté d'expression se poursuit
À moins de présumer que les politiciens ont le droit divin de tromper les gouvernés, l'Amérique devrait honorer les personnes qui exposent les crimes fédéraux.
Par James Bovard, le 26 juin 2024, The American Conservative
Après 1 900 jours d'enfermement dans la prison britannique de haute sécurité de Belmarsh, Julian Assange s'est finalement évadé cette semaine et a fui vers son pays d'origine, l'Australie. Son évasion a été rendue possible par une mascarade juridique éhontée et constituait un bien meilleur choix que la prison à vie.
Mercredi, Julian Assange doit comparaître devant un juge américain des îles Mariannes du Nord pour plaider officiellement coupable d'un chef d'accusation de complot en vue de violer la loi sur l'espionnage (Espionage Act), de "recevoir et d'obtenir" des documents secrets et de les "communiquer délibérément" à des personnes non habilitées à les recevoir. La loi sur l'espionnage est une relique de la Première Guerre mondiale que les présidents utilisent de plus en plus pour empêcher la révélation des crimes du gouvernement américain sur le territoire national et à l'étranger. Il n'est pas étonnant que tant d'organisations de presse aient défendu la cause d'Assange, car ce plaidoyer de culpabilité crée un précédent qui permettra, à l'avenir, de cibler beaucoup plus de journalistes. Comme l'a fait remarquer Trevor Timm, directeur exécutif de la Freedom of the Press Foundation, le ministère de la justice voulait faire condamner Assange "en vertu de la loi sur l'espionnage pour des actes de journalisme, ce qui exposerait de nombreux journalistes à la même chose".
Les avocats d'Assange ont conclu un accord pour s'assurer qu'il n'aurait jamais à comparaître devant un juge de la tristement célèbre cour fédérale d'Alexandria, en Virginie, réputée pour punir sévèrement toute personne accusée de ternir l'image du gouvernement américain ou de ses agences de l'État profond. Le ministère de la justice a déclaré dans son annonce du "marché" que le site basé dans l'océan Pacifique avait été choisi "en raison de l'opposition de l'accusé à se rendre sur le territoire continental des États-Unis pour plaider sa culpabilité". La seule chose qui aurait été plus appropriée que la comparution d'Assange dans une salle d'audience fédérale des Mariannes du Nord, c'est que son affaire soit jugée par la Force spatiale américaine sur Mars, étant donné que les motifs des poursuites sont si éloignés de ce monde.
Assange est dans le collimateur des autorités américaines depuis que son organisation, Wikileaks, a publié en 2010 des milliers de documents exposant les mensonges et les atrocités des guerres d'Afghanistan et d'Irak, grâce aux fuites du caporal Bradley (aujourd'hui Chelsea) Manning.
Entre autres exploits héroïques, le journaliste a poussé certaines des plus grandes crapules politiques américaines à montrer patte blanche. En 2010, le vice-président Joe Biden a dénoncé Assange comme étant un "terroriste de haute technologie". La secrétaire d'État Hillary Clinton a bizarrement affirmé que les divulgations n'étaient "pas seulement une attaque contre l'Amérique - c'est une attaque contre la communauté internationale", et que les fuites "déchiraient la structure" d'un gouvernement responsable. Clinton n'a jamais pardonné à Assange d'avoir exposé tant de ses mensonges en matière de politique étrangère.
Le secrétaire d'État de Trump, Mike Pompeo, a qualifié WikiLeaks de "service de renseignement hostile non étatique" et Assange d'"imposteur", de "lâche" et d'"ennemi". Pompeo a déclaré : "Leur donner l'espace nécessaire pour nous accabler de secrets détournés est une perversion de ce que notre grande Constitution représente".
Mais "notre grande Constitution" n'a jamais envisagé que Washington puisse cacher des secrets sans fin au peuple américain. L'ancien vice-président Mike Pence a dénoncé lundi l'accord conclu entre Assange et le ministère de la justice : "Il ne devrait pas y avoir d'accord pour éviter la prison à quiconque met en danger la sécurité de notre armée ou la sécurité nationale des États-Unis. Jamais". Mais qu'en est-il des hauts fonctionnaires qui trompent les Américains pour envoyer sans justification des troupes du pays dans des combats à l'étranger ? Nous attendons toujours que Pence expie son soutien à la guerre d'Irak de Bush.
Le marché conclu par le ministère de la Justice avec Assange est un exemple montrant que l'administration Biden est marginalement moins odieuse que l'administration Trump - du moins sur certaines questions. L'administration Obama avait envisagé d'inculper Assange mais avait reconnu que le dossier juridique était à la fois profondément défectueux et profondément dangereux pour la liberté d'expression. Ces obstacles n'ont pas empêché le ministère de la Justice de Trump d'inculper Assange. Selon Yahoo News, certains hauts responsables de la CIA et de l'administration Trump ont même envisagé d'assassiner Assange..... Des discussions sur l'enlèvement ou l'assassinat d'Assange ont eu lieu 'au plus haut niveau' de l'administration Trump, a révélé un ancien haut responsable du contre-espionnage. 'Il ne semblait pas y avoir de limites'".
Cette fixation pour détruire Assange n'est pas une aberration de l'ère Trump. Trump n'a eu de cesse de dénoncer l'État profond tandis que les personnes qu'il a nommées ont persécuté Assange, Edward Snowden et Daniel Hale, qui ont révélé le carnage des civils dans le cadre du programme d'assassinat par drone d'Obama. Le ministère de la Justice de Trump a invoqué le secret d'État pour couvrir les atrocités de la torture sous l'ère Bush et pour dissimuler le financement par la CIA de groupes terroristes syriens meurtriers (ces facétieux rebelles "modérés").
Trump s'est-il rendu compte de son erreur ? Lors de son discours à la convention nationale du Parti libertarien le mois dernier, il a déclaré : "Au cours de l'année écoulée, j'ai été inculpé par le gouvernement pour 91 affaires différentes, donc si je n'étais pas libertarien avant, je le suis assurément maintenant". Trump n'aurait pas besoin de devenir libertaire pour reconnaître la nécessité de tenir les procureurs en laisse et de respecter de tout cœur le premier amendement. Mais Trump est-il corrigible ?
Si Trump est réélu et qu'il veut vraiment respecter la liberté de la presse, il pourrait commencer par accorder une grâce totale à Assange, en effaçant son plaidoyer de culpabilité pour "sortir de prison". Mieux encore, comme je l'ai écrit dans USA Today en 2018, Assange devrait recevoir une médaille présidentielle de la liberté. À moins de présumer que les politiciens ont un droit divin de tromper les gouvernés, l'Amérique devrait honorer les individus qui exposent les crimes fédéraux. Comme l'a déclaré Assange, "Si les guerres peuvent être déclenchées par des mensonges, elles peuvent être enrayées par la vérité".
James Bovard est un rédacteur collaborateur de The American Conservative. Il est l'auteur de dix livres, dont Public Policy Hooligan, Attention Deficit Democracy, The Bush Betrayal et Lost Rights : The Destruction of American Liberty. Son dernier ouvrage s'intitule Last Rights : The Death of American Liberty. Il a écrit pour le New York Times, le Wall Street Journal, le Washington Post, la New Republic, le Reader's Digest et de nombreuses autres publications. Il est membre du conseil d'administration de USA Today et collabore fréquemment à The Hill.
📰 https://www.theamericanconservative.com/assange-is-free-but-feds-war-on-free-speech-continues/
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11- ♟ Un homme sort de prison ; nous, nous y sommes toujours
Julian Assange est libre. Mais pas la vérité.
Par Julian MacFarlane, le 26 juin 2024, Blog personnel
Julian Assange est libre. Mais pas la vérité.
Les États-Unis avaient besoin d'agir.
Les audiences d'extradition au Royaume-Uni n'allaient pas nécessairement dans leur sens - du moins, des doutes planaient. Il semblait qu'Assange pourrait rester à Belmarsh tandis que les chiffres de Biden continuaient à chuter. Les démocrates craignaient bien sûr que Trump ne promette fermement de gracier Assange, leur donnant alors une piètre image,
Et si Julian mourait ? Belmarsh n'est pas vraiment propice à sa santé.
Par conséquent, Assange s'est vu proposer un accord de plaidoyer qu'il a pu accepter, puisque les charges ont été réduites à une seule infraction concernant l'ancienne loi sur l'espionnage remontant à la Première Guerre mondiale, qui se résumait essentiellement à la mauvaise manipulation d'informations classifiées, à la réception et à la publication de documents confidentiels, ce que la moitié du gouvernement des États-Unis fait en permanence.
Pourquoi le New York Times et le Washington Post n'ont-ils pas été inculpés, puisque eux aussi ont reçu et publié ces documents ?
Parce que le gouvernement ne peut s'inculper lui-même. Ni son peuple.
Pas plus que les institutions et organisations d'information qu'il utilise pour manipuler la perception qu'a le monde de la réalité et de ce qui se produit. Les grands médias sont des prolongements de ce que l'on appelle "l'État profond".
Il s'agit d'une attaque contre la vérité. Ce qui signifie une attaque contre ceux qui révèlent la vérité et les médias alternatifs - tous ceux qui sont en désaccord ou qui cherchent à vous dire ce qui se passe réellement - ce qui signifie la publication d'informations que le gouvernement américain refuse de voir diffusées.
Je ne sais pas combien de fois j'ai entendu des représentants des médias, y compris ceux du club de la presse de Tokyo, dire : "Assange n'était pas un vrai journaliste".
J'avais l'habitude de répondre : "Peut-être pas, mais lui dit la vérité, vous êtes payés pour mentir".
Et je souriais. Et je partais.
Les journalistes continuent à dire ces foutaises !
C'était à Tokyo, bien sûr. Là où les journalistes à la petite semaine vont mourir.
Au Canada, ce n'est pas mieux. Vous pensiez que les Canucks étaient meilleurs ? LOL.
Julian Assange est un imposteur qui s'est autoproclamé journaliste et lanceur d'alerte tout en entravant et en compliquant considérablement la cause du journalisme et en rendant la vie beaucoup plus difficile aux véritables lanceurs d'alerte. Il est l'instrument de dictateurs dont le plus grand crime, pour lequel il n'a pas été inculpé, a été d'aider le président russe Vladimir Poutine à faire échouer l'élection américaine de 2016. - Doug Saunders. Toronto Globe and Mail.
Saunders est un "journaliste" canadien primé, visiblement allergique aux faits.
L'accord de plaidoyer certifie que les grands médias sont libres comme ils l'ont toujours été. Libres de mentir.
Julian Assange doit maintenant faire face à de nouveaux défis. Il doit recouvrer la santé et renouer avec la vie familiale. Il sait que s'il retourne au travail - en reprenant ce qu'il faisait avant - ils s'en prendront probablement à lui - une fois de plus.
Il a fait sa part. 14 ans d'incarcération sous une forme ou une autre, dont les cinq dernières années à l'isolement et dans l'une des prisons les plus brutales du monde.
Il nous appartient à présent de défendre la vérité et de soutenir ceux qui la disent, où qu'ils se trouvent.
Oh, et boycottez le Globe and Mail.
Prenez un moment et dites "merci" en votre for intérieur et du fond du cœur à Julian Assange. Il a été le premier et le meilleur.
Julian Assange est un imposteur qui s'est autoproclamé journaliste et lanceur d'alerte tout en entravant et en gênant considérablement la cause du journalisme et en rendant la vie beaucoup plus difficile aux véritables lanceurs d'alerte. Il est l'instrument de dictateurs dont le plus grand crime, pour lequel il n'a pas été inculpé, a été d'aider le président russe Vladimir Poutine à faire échouer l'élection américaine de 2016. Doug Saunders. Toronto Globe and Mail.
- Saunders est un "journaliste" canadien primé, apparemment allergique aux faits.
L'accord de plaidoyer certifie que les grands médias sont libres comme ils l'ont toujours été. Libres de mentir.
Julian Assange doit à présent faire face à de nouveaux défis. Il doit recouvrer la santé. Il doit rétablir sa vie de famille. Il sait que s'il retourne au travail - en reprenant ses activités comme avant - il est à prévoir qu'ils s'en prendront à lui - à nouveau.
Il a fait sa part. 14 ans d'incarcération sous une forme ou une autre, dont les cinq dernières années à l'isolement et dans l'une des prisons les plus brutales du monde.
Il nous appartient désormais de défendre la vérité et de soutenir ceux qui la disent, où qu'ils se trouvent.
Oh, et boycottez le Globe and Mail.
Prenez un moment et dites "merci" en votre for intérieur et du plus profond de votre cœur à Julian Assange. Il a été le premier et le meilleur.
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12- ♟ Julian Assange : Enfin libre, mais coupable d'avoir pratiqué le journalisme
L'impitoyable et tout-puissant appareil de renseignement américain ne recule devant rien ni personne pour punir quiconque, où que ce soit, ose exposer les crimes impériaux.
Par Pepe Escobar, le 26 juin 2024, Strategic Culture
Le gouvernement des États-Unis - en vertu de l'"ordre international fondé sur des règles" - a de facto décidé que Julian Assange était coupable d'avoir exercé le journalisme.
Edward Snowden avait déjà fait remarquer que
"lorsque exposer un crime est traité comme en commettre un, c'est que l'on est gouverné par des criminels".
Des criminels comme Mike "We Lie, We Cheat, We Steal" (Nous mentons, nous trichons, nous volons) Pompeo, ancien secrétaire d'État de Trump, qui avait prévu d'enlever et d'assassiner Julian lorsqu'il était à la tête de la CIA.
L'indomptable Jennifer Robinson et l'avocat américain de Julian, Barry Pollack, résument la situation : les États-Unis ont "poursuivi le journalisme comme un crime".
Julian a été contraint de subir une Via Crucis indiciblement vicieuse pour avoir osé exposer les crimes de guerre du gouvernement américain, les rouages de l'armée américaine dans sa guerre contre la terreur en Afghanistan et en Irak, et - le Saint des Saints - pour avoir osé publier des courriels prouvant que le Comité national démocrate (DNC) était de connivence avec la harpie Hillary Clinton, belliciste notoire.
Julian a été soumis à une torture psychologique implacable et a failli être crucifié pour avoir publié des faits qui devaient toujours rester invisibles pour l'opinion publique. Voilà ce qu'est le journalisme de haut vol.
Ce drame apprend à la planète entière tout ce qu'il faut savoir sur le contrôle absolu de l'Hégémon sur le pathétique Royaume-Uni et l'Union européenne.
Cela nous amène au kabuki qui pourrait - et le mot clé est "pourrait" - clore l'affaire. Titre de la pièce de moralité retorse : "Plaider coupable ou mourir en prison".
Le dernier rebondissement de l'intrigue de la pièce de moralité est le suivant : le combo derrière le cadavre de la Maison Blanche s'est rendu compte que torturer un journaliste et éditeur australien dans une prison américaine de haute sécurité au cours d'une année électorale n'était pas vraiment bon pour les affaires.
Dans le même temps, l'establishment britannique suppliait qu'on l'exclue de l'intrigue, alors que son système de "justice" était contraint par l'hégémon de garder un homme innocent et un père de famille en otage pendant plus de cinq ans, dans des conditions épouvantables, au nom de la protection d'un arsenal de secrets de l'intelligence anglo-américaine.
En fin de compte, l'establishment britannique a exercé discrètement toutes les pressions possibles pour se diriger vers la sortie, tout en sachant parfaitement ce que les Américains prévoyaient pour Julian.
La prison à vie était "juste et raisonnable"
C'est le kabuki de ce mercredi à Saipan, la plus grande des îles Mariannes du Nord, une terre du Pacifique non incorporée et administrée par l'Hégémon.
Enfin libre - peut-être, mais avec des conditions qui restent assez obscures.
Le tribunal américain du Pacifique a exigé de Julian qu'il ordonne à WikiLeaks de détruire des informations, ce qui était une condition de l'accord.
Julian a dû dire à la juge américaine Ramona Manglona qu'il n'avait pas été soudoyé ou contraint de plaider coupable du chef d'accusation crucial de "conspiration en vue d'obtenir et de diffuser illégalement des informations classifiées relatives à la défense nationale des États-Unis".
Ses avocats lui ont indiqué qu'il devait suivre le scénario "Plaider coupable ou mourir en prison". Faute de quoi, pas d'accord.
La juge Manglona - dans une étonnante mise à l'écart de ces cinq années de torture psychologique - a déclaré :
"il apparaît que vos 62 mois de prison étaient justes, raisonnables et proportionnés".
Le gouvernement américain, si bienveillant et si "juste", va donc prendre les mesures nécessaires pour effacer immédiatement les charges pesant encore sur Julian dans le district oriental de Virginie, notoirement sévère.
Julian a toujours été inflexible : il a insisté à maintes reprises sur le fait qu'il ne plaiderait jamais coupable d'une accusation d'espionnage. Il ne l'a pas fait ; il a plaidé coupable d'une accusation floue de crime/conspiration ; il a été condamné à une peine de prison ; il a été libéré ; et c'est tout.
À moins que ce ne soit le cas ?
L'Australie est un État vassal de l'hégémon, y compris en matière de renseignement, et sa capacité à protéger sa population civile est plus que nulle.
Déménager du Royaume-Uni vers l'Australie n'est peut-être pas vraiment synonyme d'amélioration, même si la liberté est incluse. Un véritable progrès serait de passer à un véritable État souverain. Comme la Russie. Cependant, Julian aura besoin de l'autorisation des États-Unis pour voyager et quitter l'Australie. Moscou sera inévitablement une destination interdite et sanctionnée.
Il ne fait aucun doute que Julian sera de retour à la tête de WikiLeaks. Il se peut même que des lanceurs d'alerte fassent la queue en ce moment même pour raconter leur histoire, documents officiels à l'appui.
Pourtant, le message sinistre et brutal reste bien ancré dans l'inconscient collectif : l'impitoyable et tout-puissant appareil de renseignement américain ne recule devant rien et ne fait aucun prisonnier pour punir quiconque, où que ce soit, ose dénoncer les crimes impériaux. Une nouvelle épopée mondiale commence maintenant : Le combat contre le journalisme criminalisé.
Pepe Escobar est analyste géopolitique indépendant, écrivain et journaliste
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13- ♟ Leçons tirées du combat pour la liberté d'Assange
La libération de Julian Assange, le fondateur de Wikileaks, est riche d'enseignements et d'avertissements.
Par Kellie Tranter, le 27 juin, 2024, Declassified
Il a survécu. Il est libre. Il est chez lui.
Malgré les mauvais traitements et les tortures endurés depuis plus de dix ans, le fondateur de Wikileaks, Julian Assange, a réussi à tenir le coup. Il ne fait aucun doute que les pressions politiques coïncidant avec l'imminence des élections américaines, la montée en puissance de la campagne Assange aux États-Unis et peut-être aussi la "diplomatie discrète" de l'Australie ont facilité sa libération, mais en réalité, d'autres facteurs sont probablement entrés en ligne de compte.
Étant donné qu'Assange a obtenu le droit de faire appel devant la plus haute juridiction du Royaume-Uni, et compte tenu des motifs d'appel parfaits déposés en son nom, il n'est pas improbable que les États-Unis aient été informés que les choses ne tenaient plus concernant leur demande d'extradition, et du risque d'humiliation mondiale qu'ils encouraient en échouant dans leur tentative d'extradition d'Assange.
Le risque de créer un dangereux précédent était également réel quant aux conclusions susceptibles d'être tirées sur des questions juridiques telles que l'application sélective du premier amendement et l'extraterritorialité, ainsi que sur des conclusions factuelles embarrassantes concernant les conditions de détention dans les établissements pénitentiaires des États-Unis, le traitement qui lui serait réservé et la fiabilité des assurances données par les États-Unis.
L'avocat de la défense pénale d'Assange, Barry Pollack, semble soutenir cette thèse lorsqu'il a confirmé hier que,
"les négociations ont été un long processus s'étalant sur plusieurs mois et se déroulant par à-coups. Elles n'étaient pas proches d'une quelconque résolution jusqu'à il y a quelques semaines encore, lorsque le ministère de la Justice s'est réengagé dans les négociations très intenses de ces dernières semaines".
Les 150 pages du Perfected Grounds of Appeal sont encore plus frappantes lorsqu'elles sont lues comme un résumé de la brutalité des actions des États-Unis à l'échelle mondiale. Dans le contexte d'AUKUS, tous les Australiens devraient se poser des questions bien plus larges sur l'entreprise criminelle qui sous-tend les relations de l'Australie avec les États-Unis.
L'affirmation de certains responsables américains, selon laquelle l'accord de plaidoyer et la condamnation d'Assange en résultant reflètent une victoire, est absurde. Comment quelqu'un ayant subi le traitement réservé à Assange pourrait-il ne pas accepter l'offre de plaider pour le délit relativement mineur de conspiration en vue de commettre des actes d'espionnage et être libre, plutôt que de jouer à la roulette judiciaire, pondérée par une législation favorable aux persécuteurs, et de risquer l'extradition et la mort ?
En outre, comme l'a souligné l'avocat de la défense pénale d'Assange, Barry Pollack,
"Mr Assange n'allait pas accepter une disposition dans cette affaire qui l'obligerait à accepter des allégations tout simplement fausses. Mr Assange n'a pas plaidé coupable, et ne plaidera pas coupable, de 17 chefs d'accusation au titre de la loi sur l'espionnage (Espionage Act) et du piratage informatique."
"Mr Assange reconnaît qu'il a accepté des documents de Chelsea Manning et a publié un grand nombre de ces documents parce qu'il était dans l'intérêt du monde entier de les publier. Malheureusement, cela viole les dispositions de la loi sur l'espionnage (Espionage Act). C'est ce que nous avons reconnu aujourd'hui. Nous avons également dit - Mr Assange l'a dit très clairement - qu'il pensait que cette conduite devrait être protégée par le premier amendement, mais le fait est que la loi sur l'espionnage, telle que rédigée, ne prévoit pas de défense pour le premier amendement. Ce qu'il a reconnu est donc ce qu'il doit reconnaître, c'est-à-dire la vérité, et il n'a pas à en avoir honte. Oui, il a reçu des informations classifiées de Chelsea Manning et oui, il les a publiées. Cela ne devrait pas être un crime."
Bien saisir les avertissements
Comparée à la position "de principe" indignée adoptée par les États-Unis depuis qu'Assange a commencé à publier des informations compromettantes, la condamnation après avoir plaidé pour le seul chef d'accusation "moins grave" est loin d'être une victoire.
Certains commentateurs s'interrogent tardivement sur les conséquences de cet accord pour les journalistes, qui sont restés les bras croisés pendant plus de dix ans au lieu de s'insurger contre cette chasse aux sorcières extraterritoriale sans précédent. L'effet dissuasif ne vient pas du plaidoyer d'Assange, mais de leur propre lâcheté, car ils craignent d'être poursuivis sans relâche, comme Assange, en cas de publication d'informations gênantes pour les États-Unis. C'est particulièrement le cas aux États-Unis, où ils sont citoyens et résidents.
Le plaidoyer d'Assange est postérieur à une tendance significative de journalistes d'investigation réputés ici, et plus encore aux États-Unis et au Royaume-Uni, qui quittent les médias traditionnels pour pouvoir publier sans censure la vérité sans fard. Le soutien populaire à ces journalistes est largement répandu et croissant, reflétant le mépris d'une grande partie du public pour les médias dominants cooptés. Plutôt que de reprocher à Assange d'avoir accepté de plaider coupable, ces médias mainstream et leurs propriétaires devraient se regarder dans le miroir.
Une fois encore, l'avocat de la défense, Barry Pollack, a confirmé à juste titre ce point :
"Ce qui crée un précédent effrayant, c'est l'accusation, le fait que les États-Unis aient choisi d'inculper Mr Assange pour violation de la loi sur l'espionnage (Espionage Act). La Cour a déterminé aujourd'hui que les publications de Mr Assange n'avaient causé aucun préjudice."
"Nous savons qu'elles étaient dignes d'intérêt. Nous savons qu'elles ont été citées par tous les grands médias de la planète. Et nous savons qu'elles ont révélé des informations majeures. Cela s'appelle du journalisme. Les États-Unis ont engagé des poursuites à l'encontre du journalisme. Ils ont exposé Mr Assange à 175 ans de prison. Voilà qui fait froid dans le dos."
"Aujourd'hui, une décision selon laquelle il est temps pour Mr Assange de rentrer chez lui n'a pas d'effet dissuasif. Ce qui fait froid dans le dos, c'est que les États-Unis considèrent le journalisme comme un crime. J'ose espérer que c'est la première et la dernière fois que cela se produira".
L'avocate d'Assange, Jennifer Robinson, a commenté :
"Je voudrais également prendre le temps de remercier le peuple australien et le gouvernement du pays pour tout le soutien que nous avons reçu depuis l'Australie. Je tiens en particulier à remercier notre Premier ministre, Anthony Albanese, pour ses qualités d'homme d'État, son leadership fondé sur des principes et sa diplomatie, qui ont permis d'aboutir à ce résultat. C'est en tant que chef de l'opposition qu'il a pris position en faveur de la justice et qu'il a déclaré : "Trop c'est trop, la poursuite de l'incarcération de Julian ne sert à rien". En tant que Premier ministre, il a tenu parole et a fait ce qu'il fallait pour garantir la liberté de Julian Assange. Il a soulevé la question au plus haut niveau à chaque occasion et lorsque des fonctionnaires australiens ont pris contact avec les États-Unis, leurs interlocuteurs savaient qu'ils agissaient avec la pleine autorité du Premier ministre australien. C'était son intention et nous ne serions pas ici aujourd'hui sans le soutien du Premier ministre australien."
"Je tiens également à remercier notre procureur général, Mark Dreyfus, notre ministre des affaires étrangères, Penny Wong, et tout particulièrement notre ambassadeur aux États-Unis et ancien premier ministre, Kevin Rudd, pour son habileté diplomatique et ses efforts incessants à Washington, qui ont facilité nos négociations avec le gouvernement des États-Unis et ont permis d'aboutir à ce résultat."
"Je tiens également à remercier notre haut-commissaire à Londres, Stephen Smith, dont le travail inlassable nous a permis d'être tous ici aujourd'hui..."
Une implication différente était possible
Il est compréhensible, dans ces circonstances et dans le moment présent, que des louanges soient adressées au gouvernement australien, mais il n'échappe pas à ceux qui suivent l'affaire Assange depuis plus d'une décennie que les gouvernements successifs ont répété à d'innombrables reprises au public australien ne pas pouvoir intervenir dans l'affaire Assange. Cette attitude a toujours été politiquement malhonnête.
Un compte rendu historique précis devrait montrer qu'en 2012, l'avocate générale travailliste Nicola Roxon a rencontré l'avocate d'Assange, Jennifer Robinson, et a déclaré, lorsqu'elle a été interrogée sur la protection de Julian, que'"nous pouvons sans doute faire certaines choses sur le plan diplomatique". Mais peu après, elle a écrit à Jennifer Robinson pour lui faire savoir que l'Australie ne chercherait pas à s'impliquer dans des échanges internationaux sur l'avenir de Julian. Et c'est ce qui s'est passé.
Parvenir à une solution politique aujourd'hui est une bonne chose, mais la solution ayant été négociée diplomatiquement, alors que les procédures judiciaires des États-Unis et du Royaume-Uni étaient en plein essor, on peut se demander pourquoi cela n'aurait pas pu être fait depuis une décennie et éviter à Assange d'être torturé et soumis à des traitements cruels, inhumains et dégradants. Les circonstances difficiles et les mauvais traitements infligés à Assange se sont étalés sur toute la durée des mandats des gouvernements Gillard, Rudd, Abbott, Turnbull et Morrison.
L'autre histoire non racontée est celle des hauts fonctionnaires anonymes et des nombreux politiciens actuels et antérieurs qui, au fil des ans, ont contribué à l'incarcération continue d'Assange par l'inaction ministérielle et diplomatique en matière de politique, comme l'a révélé mon travail approfondi sur la liberté de l'information pendant de longues années.
Alors qu'Assange se glisse dans une vie tranquille "ordinaire", pour l'instant, il devrait être prudent quant à sa liberté, étant donné la propension de certains membres de l'État sécuritaire des États-Unis à poursuivre leurs ennemis indéfiniment, y compris par des moyens extra-légaux. Mais si quelqu'un en est conscient et peut rester ferme face à l'incertitude et à l'adversité, c'est bien Assange.
Enfin, j'ai personnellement vu de nombreuses personnes de qualité payer le prix fort, tant sur le plan personnel que professionnel, pour avoir soutenu pendant plus d'une décennie le travail considérable de Wikileaks et d'Assange. Ils l'ont tous fait parce que c'était la bonne chose à faire et ils n'ont jamais hésité, au cours de batailles longues et difficiles, à soutenir Assange et, par conséquent, la liberté de la presse, la transparence officielle et la justice.
Comme l'a écrit Assange en 2013 :
"Rien de ce qui vaut la peine d'être fait n'est aisé. Les grands combats mettent en lumière nos caractères, nos forces, nos faiblesses et nos penchants. La lutte élimine les opportunistes, les conformistes et ceux incapables de sacrifier la minute pour l'heure. Nous avons saigné, mais désormais nous pouvons clairement reconnaître qui sont nos amis et apprécier leurs talents".
Allez, Julian Assange, porte-toi bien. Savoure la liberté avec ta famille, au grand air, en surfant et en profitant du soleil !
KellieTranter est avocate, chercheuse et défenseur des droits de l'homme. Elle tweete via @KellieTranter.
📰 https://declassifiedaus.org/2024/06/27/lessons-from-fighting-for-assange-freedom/
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14- ♟ Julian Assange est libre, mais le journalisme reste menacé
Chronique de Democracy Now !, le 27 juin 2024
Julian Assange est libre.
Après un calvaire judiciaire de 14 ans, dont plus de cinq ans passés dans la prison britannique de haute sécurité de Belmarsh, le fondateur du site web Wikileaks a accepté un accord avec les États-Unis, plaidant coupable d'un seul chef d'accusation, à savoir l'obtention et la divulgation de documents relatifs à la sécurité nationale. La sentence : Une peine d'emprisonnement.
Assange a comparu devant le tribunal de district des îles Mariannes du Nord, où la juge Ramona Manglona a déclaré :
"Cette affaire se termine avec moi, ici à Saipan... vous pourrez sortir de cette salle d'audience en homme libre".
Elle a ajouté :
"Je crois savoir que votre anniversaire est la semaine prochaine. J'espère que vous commencerez votre nouvelle vie de manière positive".
L'odyssée juridique d'Assange compte un an d'assignation à résidence dans un manoir de la campagne anglaise, sept ans d'asile politique dans la minuscule ambassade de l'Équateur à Londres, puis plus de 5 ans de détention à Belmarsh. Il se battait contre son extradition vers les États-Unis, où il encourait jusqu'à 175 ans de prison.
"Une date avait été fixée pour les 9 et 10 juillet [...] pour que Julian puisse invoquer le premier amendement devant la Haute Cour. Cela a révélé à quel point le gouvernement des États-Unis n'est pas à l'aise avec la diffusion de ces arguments, car cette affaire constitue une attaque contre le journalisme, une attaque contre le droit du public à l'information", a déclaré Stella Moris Assange, l'épouse de Julian, à la presse peu après l'atterrissage de son mari à Canberra, en Australie, en décrivant l'appel en faveur de l'extradition devant les tribunaux britanniques qui devait avoir lieu le mois prochain.
Stella, elle-même avocate spécialisée dans les droits de l'homme, espère que Julian sera finalement gracié. Elle était accompagnée des deux avocats de Julian, Jennifer Robinson, brillante avocate australienne spécialisée dans les droits de l'homme, qui défend Julian Assange depuis le début, et Barry Pollack, son avocat américain. Ce dernier a déclaré à la presse :
"Personne ne devrait passer un seul jour en prison pour avoir communiqué au public des informations pertinentes et dignes d'intérêt - en l'occurrence, des informations révélant que le gouvernement des États-Unis s'est rendu coupable de crimes de guerre, que le nombre de victimes civiles est exponentiellement supérieur à ce que le gouvernement des États-Unis a admis en Irak et en Afghanistan... Julian a communiqué ces informations au public. Il a rendu un service public extraordinaire, ce n'est en aucun cas un crime".
Les poursuites engagées par les États-Unis à l'encontre de Julian Assange ont suscité de vives inquiétudes dans le monde entier en raison de leur impact potentiellement dévastateur sur le journalisme.
"Nous avons évité une catastrophe pour la liberté de la presse", a affirmé Jameel Jaffer, directeur du Knight First Amendment Institute de l'université de Columbia, lors de l'émission Democracy Now ! news hour.
"L'acte d'accusation [...] reproche à Julian Assange d'avoir sollicité des secrets d'État et d'avoir publié des secrets d'État. Or, ce sont des choses que les journalistes font constamment, que les organes de presse doivent faire s'ils veulent jouer le rôle que nous attendons d'eux dans nos démocraties. La crainte a toujours été que si cette affaire était portée devant un tribunal américain, celui-ci jugerait ou pourrait juger que l'Espionage Act rendait ce type d'activité illégal et que le premier amendement ne protégeait pas ce type d'activité. Cela aurait eu des conséquences catastrophiques pour la liberté de la presse."
Interrogé sur l'impact de l'affaire Assange sur celle du journaliste du Wall Street Journal Evan Gerskovich, actuellement en procès en Russie, Jaffer a répondu,
"Il est devenu beaucoup plus difficile pour les représentants du gouvernement américain de défendre la liberté de la presse dans d'autres contextes. Et je pense que le cas d'Evan est l'un d'entre eux".
Depuis plus d'un siècle, la loi américaine sur l'espionnage n'a jamais été utilisée pour poursuivre un journaliste. Le président Barack Obama l'a invoquée pour cibler des lanceurs d'alerte du gouvernement, comme Thomas Drake, haut responsable de la NSA, qui a révélé le gaspillage de plus d'un milliard de dollars de l'argent des contribuables au sein de l'agence d'espionnage.
En avril 2019, les autorités britanniques ont fait une descente dans l'ambassade équatorienne, arrêtant Assange. Quelques semaines plus tard, l'administration Trump a dévoilé un acte d'accusation qui aurait été en préparation depuis 2010, accusant Assange d'espionnage et de piratage informatique.
Au fil des ans, Democracy Now ! a suivi Wikileaks de près et interviewé Julian Assange à de nombreuses reprises. Avant de se réfugier à l'ambassade d'Équateur, alors qu'il était assigné à résidence au Royaume-Uni mais autorisé à se déplacer pendant la journée grâce à un bracelet électronique, nous avons animé un après-midi avec Julian et le philosophe slovène Slavoj Zizek dans l'est de Londres.
C'était le 2 juillet 2011, un jour avant le 40ème anniversaire de Julian. Nous lui avons demandé ce qui lui donnait de l'espoir. Treize ans plus tard, sa réponse est toujours aussi pertinente :
"Il y a un grand avenir, un avenir profond, auquel on peut aspirer. C'est un avenir où nous pouvons tous communiquer librement nos espoirs et nos rêves, des informations factuelles sur le monde, et où le dossier historique est un élément totalement sacro-saint, qui ne sera jamais changé, jamais modifié, jamais supprimé... C'est de là que découle la justice".
📰 https://www.democracynow.org/2024/6/27/julian_assange_is_free_but_journalism
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15- ♟ Julian Assange est libre, mais la justice n'a pas été rendue
Après un calvaire de près de 15 ans, le fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, est enfin libre. C'est une victoire qui mérite d'être célébrée. Mais le message envoyé est très explicite : lorsqu'il s'agit d'exposer les méfaits de gouvernements et d'entreprises puissants, aucun acte de bravoure ne saurait rester impuni.
Par Chip Gibbons, le 27 juin 2024, Jacobin
Le 24 juin 2024, Julian Assange a quitté la prison de Belmarsh à Londres et embarqué à bord d'un avion à destination de Saipan, dans les îles Mariannes du Nord. À son arrivée sur le territoire américain le lendemain, le journaliste a été conduit dans un tribunal fédéral. À l'intérieur, Assange a du plaider coupable de conspiration pour violation de la loi sur l'espionnage (Espionage Act).
Lorsqu'on lui a demandé d'expliquer son crime, Assange a dit au juge :
"En tant que journaliste, j'ai encouragé ma source à fournir des informations qui étaient censées être classifiées afin de les publier. Je pense que le premier amendement protège cette activité. Je pense que le premier amendement et la loi sur l'espionnage sont en contradiction, mais j'admets qu'il serait difficile de gagner une telle affaire compte tenu de toutes ces circonstances".
Dans le cadre du plaidoyer, Assange a été condamné à une peine de prison. Lors du prononcé de la sentence, la juge en chef du district des États-Unis, Ramona V. Manglona, a déclaré :
"Le gouvernement a indiqué qu'aucune victime n'était à déplorer dans cette affaire. Cela me fait dire que la diffusion de ces informations n'a entraîné aucun préjudice physique connu".
Après avoir déclaré le journaliste libre, la juge a noté que la semaine suivante était celle de son anniversaire, déclarant :
"Il semble que ce soit un joyeux anniversaire un peu avant l'heure pour vous".
Assange est entré au tribunal comme l'un des prisonniers politiques les plus en vue au monde. Il en est ressorti libre pour la première fois depuis plus de dix ans.
Il ne fait aucun doute que sa libération est une bonne raison de se réjouir. Assange est un journaliste qui a exposé les crimes de guerre perpétrés par les États-Unis. En raison de ce travail, il a enduré une persécution vicieuse et implacable de la part du gouvernement américain. Pourtant, sa liberté est le fruit d'une victoire douce-amère. Jusqu'au bout, le gouvernement américain a refusé d'abandonner son argument selon lequel le journalisme de base peut constituer une violation de la loi sur l'espionnage (Espionage Act). Un accord de plaidoyer ne crée pas de précédent juridique, mais le prix élevé payé par Assange aura indéniablement un effet paralysant sur le journalisme.
La vérité contre la guerre
La plaidoirie d'Assange dans un tribunal de Saipan - celui-ci ayant refusé de se rendre sur le territoire continental des États-Unis - a été la dernière surprise d'une longue saga aux multiples rebondissements. En 2006, Assange a été l'instigateur de WikiLeaks. Cet organe d'information novateur a offert aux lanceurs d'alerte une plateforme leur permettant de communiquer anonymement aux médias des documents de première main. Aujourd'hui, la technologie qui sous-tend WikiLeaks est monnaie courante dans les salles de rédaction du monde entier, mais à l'époque, elle était révolutionnaire.
Sans surprise, WikiLeaks s'est rapidement fait des ennemis parmi les gouvernements et les entreprises dont il révélait les secrets. Mais la situation s'est considérablement aggravée après que la lanceuse d'alerte Chelsea Manning a remis à WikiLeaks une cache massive de secrets du gouvernement américain. Manning était un soldat de l'armée américaine qui a été bouleversé par les violences commises dans le cadre des guerres menées par les États-Unis au Moyen-Orient. Convaincu que le public était en droit de savoir et que la vérité sur ces guerres susciterait un débat public constructif, Manning a remis à WikiLeaks des dossiers secrets décrivant en détail la criminalité d'État et les abus de pouvoir.
De 2010 à 2011, WikiLeaks a travaillé avec une série de partenaires journalistiques dans le monde entier, y compris certains des principaux organes de presse, pour publier des articles révolutionnaires basés sur les révélations de Manning. Les partenaires d'Assange dans les médias grand public avaient besoin de WikiLeaks pour publier ces articles, mais se sont rapidement retournés contre Assange.
L'enthousiasme suscité par WikiLeaks s'explique en grande partie par les échecs cuisants des médias traditionnels lors de la préparation de la guerre en Irak, lorsque de nombreux journalistes ont délibérément joué le rôle de sténographes pour une administration manifestement en train de mentir pour lancer une guerre d'agression.
WikiLeaks, en revanche, voyait clairement le journalisme comme un outil permettant de remettre en cause le pouvoir en place. Assange disait aux militants anti-guerre :
"Si les guerres peuvent être déclenchées par des mensonges, la paix peut être restaurée par la vérité".
Sa conception du journalisme s'inscrit dans la fière tradition de personnalités telles que I. F. Stone, mais elle est en contradiction flagrante avec une industrie des médias souvent plus intéressée par les relations avec les responsables de la sécurité nationale que par la remise en question de ces derniers.
Les coups de poignard portés par la presse ont été le moindre des problèmes de WikiLeaks. La décision de s'attaquer à l'empire américain et de révéler ses secrets a déclenché une réaction de représailles dramatique de la part du gouvernement américain. Manning a été arrêté, torturé et condamné à une peine de prison sans précédent. Assange, craignant d'être le prochain, s'est vu accorder l'asile par l'Équateur. Il n'a jamais pu quitter l'ambassade équatorienne à Londres et y est resté pendant sept ans.
S'appuyant sur un certain nombre de prétextes légaux - tels qu'une enquête suédoise sur une inconduite sexuelle qui n'a pas abouti à des accusations criminelles, et une accusation de non-respect de la liberté sous caution portée au Royaume-Uni à la demande de la Maison Blanche - la police britannique a encerclé l'ambassade et s'est engagée à arrêter Assange s'il mettait un jour le pied dehors.
Le groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire a condamné ces actions comme étant une privation arbitraire et illégale de sa liberté. Le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants a estimé qu'Assange avait été soumis à des tortures psychologiques. Il sera plus tard révélé qu'à la suite de la publication par WikiLeaks d'outils de piratage secrets de la CIA, cette dernière aurait envisagé de le kidnapper, voire de l'assassiner. Des questions subsistent quant à l'étendue de la surveillance exercée par la CIA sur Assange, ses avocats, son médecin et les journalistes venus lui rendre visite, qui fait toujours l'objet d'une action en justice aux États-Unis et d'une enquête pénale en Espagne.
L'administration de Barack Obama, qui a poursuivi sans pitié les lanceurs d'alerte, a décidé que poursuivre un éditeur comme Assange était aller trop loin. Son raisonnement n'était pas par sympathie pour Assange, mais parce qu'en poursuivant l'éditeur de WikiLeaks, cela créerait un précédent susceptible d'être utilisé pour poursuivre des publications grand public telles que le New York Times. L'administration de Donald Trump a fait volte-face et procédé à une série d'inculpations contre Assange. La police londonienne a été autorisée à pénétrer dans l'ambassade équatorienne et à saisir le journaliste. Il a ensuite été détenu à la prison de Belmarsh, une prison de haute sécurité, durant plus de cinq ans.
Toutes les accusations découlent de son travail de publication des révélations de Manning. Les États-Unis criminalisent les actes de journalisme, la divulgation des crimes de guerre et les enquêtes sur les violations des droits de l'homme. Cet acte d'accusation choquant a suscité la condamnation unanime des organisations de défense des libertés civiles, de la liberté de la presse et des droits de l'homme, ainsi que des organes d'information ayant collaboré avec WikiLeaks.
Conspiration en vue de commettre des actes de journalisme
Assange devait finalement répondre de dix-huit chefs d'accusation, passibles d'une peine maximale de 175 ans d'emprisonnement. Dix-sept de ces chefs d'accusation ont été retenus au titre de la loi sur l'espionnage (Espionage Act), le dernier étant un complot visant à violer la loi sur la fraude et les abus informatiques (Computer Fraud and Abuse Act).
Trois des chefs d'accusation retenus contre lui étaient des accusations de publication pure et simple sans précédent. En d'autres termes, le crime en question n'était rien d'autre que la publication d'informations sur le site web de WikiLeaks. En plus d'être accusé d'avoir publié des informations relatives à la défense nationale, Assange devait également répondre de quatre chefs d'accusation au titre de la loi sur l'espionnage (Espionage Act) pour avoir reçu ces informations au départ. Il va de soi qu'un journaliste ne peut publier des informations provenant d'une source sans les avoir reçues.
Assange était également accusé d'avoir conspiré avec Manning pour violer la loi sur l'espionnage et la loi sur la fraude et l'abus informatiques, deux lois en vertu desquelles Manning a été condamné par un tribunal militaire. Les autres chefs d'accusation visaient tous à faire porter à Assange la responsabilité du "crime" que le lanceur d'alerte Manning avait commis en lui remettant les documents, en alléguant qu'Assange avait aidé et encouragé Manning. Poursuivre un lanceur d'alerte pour avoir communiqué des informations aux médias est un affront à la démocratie ; poursuivre un journaliste pour la décision du lanceur d'alerte de lui communiquer ces informations est kafkaïen.
Les défenseurs des efforts déployés par le gouvernement américain pour emprisonner l'un de ses détracteurs les plus influents se focalisent sur les affirmations selon lesquelles Assange a aidé Manning. Ils y voient la preuve que l'inculpation n'a pas été prononcée pour de simples raisons journalistiques. Une attention particulière est accordée aux allégations du gouvernement américain selon lesquelles Manning aurait demandé à Assange de l'aider à déchiffrer un "hachage de mot de passe" afin de pouvoir dissimuler ses traces lorsqu'elle accède à des documents secrets. Cette affirmation n'a pas été prouvée et est largement contestée.
Lors d'une audience d'extradition en février, les avocats britanniques représentant le gouvernement américain n'ont consacré que quelques mots aux hachages de mots de passe. Ils ont au contraire précisé que l'essentiel de la théorie américaine était qu'en exploitant un site web qui publiait des informations provenant de lanceurs d'alerte, Assange invitait d'autres personnes à commettre des actes de piratage et à "voler" des informations relatives à la défense nationale. Les accusations de complot et de complicité, comme toutes les accusations portées contre Assange, représentaient les efforts du gouvernement américain pour criminaliser le journalisme.
Assange a finalement plaidé coupable d'un seul chef d'accusation pour violation de la disposition relative à la conspiration de la loi sur l'espionnage. L'"information criminelle", c'est-à-dire la description du crime par le gouvernement, ne mentionne pas le piratage informatique. En revanche, il est allégué qu'entre 2010 et 2011, Manning et Assange ont participé ensemble à une conspiration criminelle. Dans le cadre de cette conspiration, ils ont violé trois dispositions de l'Espionage Act. Les actes criminels étaient les suivants : Manning, qui était en possession légitime d'informations relatives à la défense nationale, les a communiquées à Assange qui n'était pas autorisé à les recevoir ; Manning, qui était en possession non autorisée d'informations relatives à la défense nationale, les a communiquées à Assange qui n'était pas autorisé à les recevoir ; et Assange a reçu des informations relatives à la défense nationale de la part de Manning. Pour la faire courte, un lanceur d'alerte a communiqué à un journaliste des informations sur des abus de pouvoir, et le journaliste les a acceptées.
Le gouvernement américain appelle cela une "conspiration pour obtenir et divulguer des informations de défense nationale", mais le mot pour cela est journalisme.
Une arme chargée
En acceptant de plaider coupable, Assange n'a pas créé de précédent juridique. Mais en essayant impitoyablement de le détruire et en insistant sur le fait que le journalisme est un crime au titre de la loi sur l'espionnage, le gouvernement américain a créé un précédent politique qui fait froid dans le dos.
WikiLeaks n'a pas seulement publié les révélations de Manning. Pendant une brève période, qu'il s'agisse d'une entreprise ou d'un gouvernement, il semblait que si vous essayiez d'exploiter le public et de vous cacher derrière le secret, WikiLeaks vous démasquerait. C'est cette expérience de transparence radicale que le gouvernement américain a si sauvagement cherché à anéantir.
Le monde s'est bonifié grâce aux révélations de Manning et au journalisme courageux d'Assange et de WikiLeaks. Et il est devenu pire à cause de la décision du gouvernement américain d'intimider les futurs diseurs de vérité en cherchant impitoyablement à détruire les personnes impliquées.
Assange est libre. Et étant donné que l'on se demandait sérieusement s'il survivrait à cette épreuve, il s'agit d'une victoire extraordinaire méritant d'être célébrée. Mais la loi sur l'espionnage reste une arme chargée pouvant être utilisée contre les journalistes, les lanceurs d'alerte et le droit du public à être informé. Même s'il a finalement lâché prise, l'État sécuritaire a très clairement fait comprendre qu'il utiliserait cette arme. Il est de notre devoir de les désarmer une fois pour toutes.
Chip Gibbons est directeur politique de l'organisation à but non lucratif Defending Rights & Dissent.
📰 https://jacobin.com/2024/06/julian-assange-journalism-wikileaks-freedom
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16- ♟ Tant que Julian Assange n'est pas gracié, la liberté de la presse reste menacée
Quelles sont les retombées constitutionnelles de la première condamnation d'un éditeur en vertu de la loi sur l'espionnage de 1917 ?
Par Stephen Rhode, le 27 juin 2024, Truthdig
Cet article fait partie de la série "La persécution de Julian Assange".
Sans jamais avoir eu l'occasion de faire valoir son droit à la liberté de la presse, après 14 ans d'incarcération (asile et prison), une santé défaillante et la privation de la présence de sa femme et de ses deux jeunes fils, le fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, a plaidé coupable mercredi d'un seul chef d'accusation, celui de conspiration illégale en vue d'obtenir et de divulguer des secrets de la défense nationale des États-Unis. Selon les termes de l'accord, il a été condamné aux cinq ans de prison déjà purgés au Royaume-Uni et a été autorisé à retourner immédiatement en Australie.
Selon un article paru dans The Australian, la juge Ramona Manglona du tribunal de district des États-Unis a demandé à Assange ce qu'il avait fait pour enfreindre la loi. Assange a répondu :
"En tant que journaliste, j'ai encouragé ma source à fournir des informations qui étaient censées être classifiées".
Il a ajouté :
"Je pensais que le premier amendement protégeait cette activité, mais je reconnais qu'il s'agit d'une violation de la loi sur l'espionnage. Le premier amendement était en contradiction avec la loi sur l'espionnage, mais je reconnais qu'il serait difficile de gagner un tel procès compte tenu de toutes ces circonstances."
À l'extérieur du tribunal, Barry Pollack, l'avocat d'Assange, a réitéré la conviction de son client que
"le premier amendement devrait protéger [sa] conduite, mais [...] telle qu'elle est rédigée, la loi sur l'espionnage ne prévoit pas de défense du premier amendement".
Il faudra désormais attendre le jour où les tribunaux américains testeront rigoureusement la loi sur l'espionnage à l'aune du premier amendement. Pour l'heure, il convient de dire qu'Assange mérite sa liberté et notre plus profonde gratitude pour les immenses sacrifices qu'il a consentis au nom de la défense du droit de tous les journalistes à exposer les actes répréhensibles et les crimes de guerre des gouvernements. Il mérite également d'être gracié par le président Joe Biden.
Dans un contraste saisissant, le gouvernement américain mérite notre vive condamnation pour avoir poursuivi Assange en premier lieu, pour avoir cherché à l'extrader du Royaume-Uni, pour avoir refusé d'accepter la décision initiale du juge britannique ayant refusé l'extradition pour des raisons humanitaires et pour avoir bafoué la Constitution américaine en soutenant que ni un citoyen américain ni un citoyen étranger n'a le droit de s'appuyer sur le premier amendement pour publier des informations relatives à la défense nationale obtenues auprès de lanceurs d'alertes.
La réaction cruelle et vindicative du gouvernement américain est le résultat direct de son incapacité à imposer au Royaume-Uni d'extrader Assange afin qu'il soit jugé aux États-Unis pour 17 chefs d'accusation de violation de la loi sur l'espionnage (Espionage Act) de 1917. Le 20 mai, dans un exercice d'indépendance judiciaire tout à fait inattendu, la Haute Cour du Royaume-Uni a autorisé Assange à faire appel de l'ordre d'extradition au motif que les États-Unis n'avaient pas suffisamment garanti au Royaume-Uni la protection du droit à la liberté d'expression d'Assange s'il devait être traduit en justice aux États-Unis.
Cette décision a constitué une victoire majeure pour Assange et pour la cause de la liberté de la presse. Elle a ouvert la voie à la possibilité pour le journaliste de faire valoir qu'il ne devait pas être remis aux États-Unis parce que l'acte d'accusation violait ses droits en vertu de la Convention européenne des droits de l'homme. L'article 10 stipule que
"toute personne a droit à la liberté d'expression", y compris "la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontières".
Les États-Unis ne pouvaient prendre le risque d'une décision défavorable au Royaume-Uni ou devant la Cour européenne des droits de l'homme, qui aurait alors mis en lumière la brutalité du traitement qu'ils ont réservé à un journaliste acclamé pendant 14 ans. Ils ont donc fait miroiter la possibilité d'un accord qui permettrait à Assange de recouvrer sa liberté et sa famille.
Mercredi matin, devant le tribunal de district des îles Mariannes du Nord, Assange a payé le prix de sa liberté en plaidant coupable d'un chef d'accusation de violation de la loi sur l'espionnage pour avoir conspiré en vue d'obtenir et de divulguer des secrets de la défense nationale américaine. Il s'agit de la première condamnation d'un journaliste ou d'un éditeur en vertu de cette loi pour avoir prétendument travaillé avec une source afin d'obtenir et de diffuser des informations dans l'intérêt public.
Assange n'a pas plaidé coupable d'un crime odieux, mais d'"activités auxquelles les journalistes se livrent quotidiennement et auxquelles nous avons absolument besoin qu'ils se livrent".
Si cette condamnation ne constitue pas un précédent juridique ni une décision faisant autorité prise par un tribunal à l'issue d'un procès complet et équitable, elle portera à jamais un astérisque ignoble indiquant que la "condamnation" a été obtenue par l'utilisation d'un pouvoir brutal sur un homme qui a du vivre refugié pendant sept ans à l'ambassade de l'Équateur à Londres, où il avait demandé l'asile contre le long bras des États-Unis, et qui a été incarcéré dans des conditions sévères et déplorables à la tristement célèbre prison de Belmarsh durant plus de cinq années supplémentaires.
Assange n'a pas plaidé coupable d'un crime odieux, mais d'"activités auxquelles les journalistes se livrent au quotidien et dont nous avons absolument besoin. À cet égard, l'affaire crée un terrible précédent, même si les tribunaux ne l'ont pas entièrement approuvé", a déclaré Jameel Jaffer, directeur exécutif du Knight First Amendment Institute de l'université de Columbia.
Poursuivant :
"Les groupes de défense de la liberté de la presse et des droits de l'homme, dont le Knight Institute, ont critiqué à maintes reprises l'administration pour la poursuite de cette affaire, arguant que la poursuite d'Assange pour avoir publié des secrets gouvernementaux était impossible à concilier avec l'engagement déclaré de l'administration en faveur de la liberté de la presse".
James C. Goodale, ancien vice-président et avocat général du New York Times, qui a dirigé une équipe d'avocats représentant le Times dans l'affaire historique des Pentagon Papers, a pour sa part affirmé à Truthdig
"Cette affaire est une honte".
"L'accord conclu avec Assange lui demande de reconnaître avoir participé à un complot visant à obtenir des informations relatives à la sécurité nationale. Le ministère de la Justice cherche depuis longtemps à criminaliser les capacités de collecte d'informations de la presse et à utiliser cette affaire comme un précédent pour criminaliser les fonctions de base de la presse, parmi lesquelles figure la publication d'informations classifiées. Le fait qu'il ait dû accepter de régler cette affaire et de se plier aux exigences du gouvernement est certes décevant, mais on peut difficilement lui reprocher quoi que ce soit après tout ce qu'il a enduré".
Poursuivant,
"C'est un immense soulagement que l'affaire Assange ait pris fin. Si Assange avait perdu, cela aurait été une terrible défaite pour le premier amendement. Tout d'abord parce qu'il s'agirait de la première affaire intentée contre des éditeurs en vertu de la loi sur l'espionnage, et ensuite parce qu'elle aurait effectivement annulé la protection accordée aux éditeurs par l'affaire des Pentagon Papers, à savoir la possibilité de ne pas empêcher la publication avant qu'elle n'ait lieu."
Quant à Carey Shenkman, coauteur de l'ouvrage de référence, A Century of Repression : The Espionage Act and Freedom of the Press, elle a déclaré :
"Voir Julian aux portes de la liberté est un moment doux-amer pour tous ceux d'entre nous qui ont défendu ou suivi de près cette affaire depuis plus de dix ans. Bien qu'il soit réconfortant de le voir enfin libre, rien de tout cela n'était acceptable et il devrait être gracié. Le fait qu'il ait dû endurer des années de détention et de vide juridique, et qu'il ait finalement été contraint d'admettre sa culpabilité pour un acte que les journalistes accomplissent au quotidien, est un véritable affront au premier amendement".
Marjorie Cohn, doyenne de l'Académie populaire de droit international et ancienne présidente de la National Lawyers Guild a déclaré à Truthdig :
"Sans les efforts des personnes du monde entier qui réclament sa liberté, Julian Assange serait toujours en détention, confronté à une cruelle extradition vers les États-Unis où il serait détenu dans des conditions inhumaines, privé d'un procès équitable et passerait probablement le reste de sa vie derrière les barreaux".
La campagne visant à braquer les projecteurs sur l'affaire Assange et à susciter un effort mondial pour "libérer Assange" est l'un des mouvements de protestation internationaux les plus impressionnants de l'histoire de la liberté de la presse. Elle a été menée par Stella Assange, l'épouse de Julian, son père John Shipton, son frère Gabriel Shipton, son équipe juridique au Royaume-Uni et son avocat américain Barry J. Pollack.
Aux États-Unis, la Courage Foundation, créée trois ans plus tôt pour soutenir les diseurs de vérité et les lanceurs d'alerte, s'est intéressée à l'affaire Assange en 2017. Selon Nathan Fuller, directeur de la fondation,
" le mouvement pour libérer Julian Assange a déployé un effort véritablement mondial. Des militants sur presque tous les continents, dans des dizaines de pays et des centaines de villes ont chacun joué un rôle significatif pour obtenir la libération de Julian. Je suis fier et honoré d'avoir participé à cet effort et rencontré tant de personnes extraordinaires en cours de route".
"Ce qui s'est passé en dehors du tribunal a été tout aussi important que ce qui s'est passé à l'intérieur".
Ajoutant :
"Nous nous sommes mobilisés dans les rues, avons organisé des tables rondes, appelé nos représentants, écrit des articles d'opinion, partagé des articles de blog, produit des vidéos, créé des œuvres d'art.
Cet effort a nécessité un incroyable travail d'équipe et des voix dans tous les segments de la société civile, [y compris] des groupes d'avocats, de professeurs, d'artistes, de politiciens, de médecins, de journalistes et d'organisations de défense de la liberté de la presse et des droits de l'homme".
Assange Defense a organisé et mené à bien des dizaines de campagnes dans le cadre de l'objectif plus large de la libération d'Assange, notamment une série de webinaires avec Stella Assange, des actions de lobbying auprès du Congrès avec des lettres, des courriels, des appels téléphoniques et des cartes postales, la création de brochures, de dépliants, d'affiches, de collages et de montages, et la distribution de 150 banderoles pour des lâchers coordonnés de banderoles. Outre Assange Defense, plusieurs autres groupes se sont formés en Europe, en Amérique latine et aux États-Unis.
Le fantastique mouvement mondial ne ferme pas ses portes, mais se concentre désormais sur l'obtention d'une grâce totale et inconditionnelle de Julian Assange de la part du président Biden. La victoire "Libérez Assange" a été remportée. L'étape suivante est "Graciez Assange".
Des précédents existent en matière d'octroi de grâces pour promouvoir les valeurs du premier amendement et les droits constitutionnels. En 2003, le gouverneur de New York de l'époque, George Pataki, a gracié à titre posthume l'humoriste Lenny Bruce, condamné en 1964 pour ses numéros humoristiques controversés, à la suite d'une requête déposée par Robert Corn-Revere, éminent avocat spécialisé dans le premier amendement. En annonçant cette grâce, le gouverneur Pataki a déclaré :
"La liberté d'expression est l'une des plus grandes libertés américaines, et j'espère que cette grâce nous rappellera les précieuses libertés pour lesquelles nous nous battons afin de les préserver".
Il l'a décrite comme "une déclaration de l'engagement de New York à défendre le premier amendement".
Le président Donald J. Trump a gracié la suffragette Susan B. Anthony, condamnée en 1872 pour avoir déposé un bulletin de vote en violation des lois qui n'autorisaient que les hommes à voter. Elle a exhorté le Congrès à adopter un amendement constitutionnel étendant le droit de vote aux femmes, appelé à l'époque "amendement Susan B. Anthony". Cet amendement a été ratifié en 1920 en tant que 19ème amendement à la Constitution. Susan B. Anthony a été graciée à l'occasion du centenaire de sa ratification.
Lors du dîner de l'Association des correspondants de la Maison Blanche en avril dernier, le président Biden a appelé à la libération immédiate du journaliste du Wall Street Journal Evan Gershkovich, emprisonné en Russie depuis mars 2023 sous l'accusation d'espionnage.
"Le journalisme n'est pas un crime. Nous sommes ici pour envoyer un message au pays et, pour être franc, au monde entier : La presse libre est un pilier, voire LE pilier, d'une société libre, et non un ennemi", a-t-il déclaré.
Biden n'a aucune autorité sur la poursuite de Gershkovich, mais s'il croit réellement que "le journalisme n'est pas un crime", il doit utiliser son pouvoir incontesté pour gracier Assange.
Stephen Rohde est un constitutionnaliste, conférencier, écrivain, militant politique et avocat des droits civiques à la retraite. Il est l'auteur de "American Words of Freedom" et "Freedom of Assembly", et contribue régulièrement à la Los Angeles Review of Books et au magazine Los Angeles Lawyer.
📰 https://www.truthdig.com/articles/until-julian-assange-is-pardoned-press-freedom-remains-at-risk/
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17- ♟ Assange a accepté de détruire les documents américains classifiés non publiés
Par Joe Lauria, le 27 juin 2024, Consortium News
L'accord de 23 pages conclu entre Julian Assange et le gouvernement des États-Unis, qui a permis la libération de Julian Assange cette semaine, renferme une disposition prévoyant que Julian Assange accepte de restituer ou de détruire tous les documents américains non publiés encore en possession de WikiLeaks.
L'accord stipule à la page 29
"Avant que son plaidoyer ne soit enregistré par la Cour, le défendeur devra prendre toutes les mesures sous son contrôle pour provoquer le retour aux États-Unis ou la destruction de toute information non publiée en sa possession, sous sa garde ou sous son contrôle, ou sous celui de WikiLeaks ou de toute société affiliée à WikiLeaks.
L'accusé convient en outre que, si l'obligation susmentionnée lui impose d'ordonner au(x) rédacteur(s) de WikiLeaks de détruire ces informations ou de faire en sorte qu'elles soient détruites, il fournira aux États-Unis (ou fera fournir aux États-Unis) une déclaration sous serment confirmant l'instruction transmise et qu'il s'efforcera, de bonne foi, de faciliter le respect de ladite instruction avant le prononcé de la peine".
Interrogé à ce sujet lors d'une conférence de presse au Parlement de Canberra jeudi, Barry Pollack, l'avocat américain d'Assange qui a négocié l'accord, a rejeté l'importance de l'accord de destruction des documents.
Il a déclaré :
"Il faudrait demander au gouvernement des États-Unis pourquoi il a insisté pour inclure cette clause. Les documents dont nous parlons datent maintenant de plus de dix ans. Je ne sais pas dans quelle mesure ils existent encore, ni quelle valeur ils pourraient avoir, certainement aucune pour la sécurité nationale."
En fait, le tribunal américain de Saipan a reconnu hier, et le juge a estimé, qu'il n'y avait aucune preuve que les publications d'Assange aient porté préjudice à qui que ce soit, où que ce soit dans le monde.
Cela dit, ils ont insisté pour qu'il ordonne au rédacteur en chef de WikiLeaks de détruire tous les documents qu'il pourrait avoir et non publiés, et Julian s'est conformé à cette disposition et a émis cette instruction".
Étant donné que WikiLeaks dispose de la plupart de ces documents depuis plus de dix ans et qu'il a eu le temps d'examiner ses énormes archives, il est peu probable, mais pas certain, que ce qui n'a pas été publié soit d'une grande importance pour le public.
Cette partie de l'accord n'a été que vaguement mentionnée dans quelques articles de presse, ce qui a donné lieu à des spéculations sur le fait qu'elle pourrait signifier la suppression de tout ou partie des documents déjà publiés par WikiLeaks, dont l'accord précise qu'ils restent en sécurité.
📰 https://consortiumnews.com/2024/06/27/assange-agrees-to-destroy-unpublished-classified-material/
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18- ♟ L'accord de plaidoyer d'Assange : pourquoi le gouvernement américain a brusquement mis fin à l'affaire
Les procureurs américains ont ignoré les appels à mettre fin aux poursuites contre le fondateur de WikiLeaks, jusqu'à ce qu'une cour d'appel britannique accorde une audience sur le premier amendement.
Par Mohamed Elmaazi & Kevin Gosztola, le 27 juin 2024, The Dissenter
Cinq ans durant, le ministère de la justice des États-Unis a bravé les voix du monde entier l'exhortant à abandonner les poursuites engagées contre le fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, en vertu de la loi sur l'espionnage (Espionage Act). Les procureurs ont même subi la pression du gouvernement australien, qui a exigé qu'un proche allié mette fin à l'affaire et laisse l'un de ses citoyens retourner dans son pays d'origine. Pourtant, les procureurs sont restés déterminés à juger Julian Assange.
Tout a changé en mai, lorsque la Haute Cour de justice britannique a accordé à Assange une audience d'appel en matière d'extradition portant sur la question du premier amendement de la Constitution des États-Unis. Le ministère de la justice a "réengagé" l'équipe juridique d'Assange et participé à des négociations "très intenses" en vue d'un accord sur le plaidoyer.
Les procureurs américains ont accepté un plaidoyer de culpabilité pour une accusation de conspiration en vertu de la loi sur l'espionnage (Espionage Act), sans peine de prison supplémentaire. L'accord n'a pas été assorti d'une obligation de silence et les autorités ont accédé à la demande d'Assange de ne pas avoir à se rendre sur le territoire continental des États-Unis. Il a été libéré sous caution de la prison de Belmarsh et pris un vol charter pour se rendre à un tribunal situé dans un territoire américain de l'océan Pacifique, les îles Mariannes du Nord.
Plus important encore, le ministère de la justice s'est engagé à ne pas engager de poursuites pour toute conduite non incriminée qu'Assange aurait commise avant son plaidoyer de culpabilité.
Ce revirement soudain a mis un terme, le 26 juin, à une saga judiciaire longue de 14 ans. Le journaliste multiprimé a été détenu un peu plus de cinq ans à la prison de Belmarsh, souvent désignée comme le "le Guantanamo britannique". La juge en chef Ramona Manglona a accepté l'accord et condamné Assange à une peine de prison ferme.
"J'espère que vous retrouverez la paix. Je voudrais également souligner que la semaine dernière, l'île a célébré 80 ans de paix depuis la bataille de Saipan. Ce territoire a été le théâtre d'affrontements sanglants entre les Japonais et les Américains, et la population a célébré le fait que nous avons célébré la paix ici avec l'ancien ennemi", a fait remarquer Manglona.
"Et à présent, il vous faut rétablir une certaine paix avec vous-même lorsque vous sortirez du tribunal et que vous poursuivrez votre vie en tant qu'homme libre".
Avant de mettre fin à la procédure, Manglona a ajouté :
"Mr Assange, il semblerait que ce soit un joyeux anniversaire un peu en avance pour vous" et "c'est probablement le premier que vous passerez en dehors d'une prison ou de tout autre type de limitation" (Son anniversaire est le 3 juillet).
Stella Assange et l'équipe juridique du journaliste ont tenu une conférence de presse à Canberra après son atterrissage en Australie. Bien qu'Assange n'ait pas pris part à la conférence de presse, ses avocats ont révélé des détails clés sur la nature de l'accord ainsi que sur les facteurs juridiques et politiques ayant contribué à mettre un terme à cette affaire d'extradition et de poursuites judiciaires longue de plusieurs années.
Le retour des États-Unis à la table des négociations après l'octroi de l'audience d'appel
Ce n'est qu'il y a quelques semaines à peine, après que la Haute Cour de Londres a accordé à Assange le droit de faire appel de son extradition, que les procureurs du ministère de la justice ont été réellement motivés pour parvenir à un accord avec Assange.
"Les négociations ont duré plusieurs mois, par à-coups. Nous n'étions pas près d'une quelconque résolution jusqu'à il y a quelques semaines, lorsque le ministère de la justice s'est réengagé et que des négociations très intenses ont eu lieu au cours des dernières semaines", a expliqué Barry Pollack, son avocat américain.
Ce point a également été souligné par Stella Assange, qui a déclaré qu'il était
"important de reconnaître que la libération de Julian et l'avancée des négociations sont intervenues à un moment où une avancée était intervenue dans l'affaire juridique, au Royaume-Uni". La Haute Cour a "autorisé l'appel. Une date a été fixée pour les 9 et 10 juillet...., au cours de laquelle Julian pourrait soulever l'argument du premier amendement devant la Haute Cour".
"C'est dans ce contexte que les choses ont enfin commencé à bouger", a-t-elle précisé.
Assange s'est vu accorder le droit de faire appel de son extradition vers les États-Unis au motif que sa nationalité et sa citoyenneté pourraient lui causer un préjudice lors du procès. La loi britannique sur l'extradition de 2003 interdit l'extradition vers un pays où une personne peut être lésée au procès en raison de sa nationalité.
Le procureur adjoint des États-Unis, Gordon Kromberg, l'un des principaux procureurs dans cette affaire, a déclaré aux tribunaux que le gouvernement américain pourrait faire valoir, au cours du procès, qu'Assange ne bénéficiait pas de la protection du premier amendement.
"Kromberg a fait une déclaration officielle sous serment au nom du défendeur et à l'appui de la demande d'extradition."
"Il s'est présenté comme étant en mesure de fournir une assistance faisant autorité quant à l'application du premier amendement. On peut raisonnablement supposer qu'il n'aurait pas dit que l'accusation "pourrait soutenir que les ressortissants étrangers n'ont pas droit aux protections prévues par le premier amendement", à moins qu'il ne s'agisse d'un argument défendable que l'accusation était en droit de déployer avec une réelle chance de succès", a déclaré la Haute Cour dans son jugement du 26 mars.
La Cour a ajouté :
"Si un tel argument était retenu, il causerait (au moins de manière défendable) un préjudice au requérant du fait de sa non-citoyenneté américaine (et par conséquent, du fait de sa nationalité)".
Le gouvernement américain a déployé son argument hubristique sur Assange et le premier amendement dans le cadre de sa défense de la demande d'extradition, et cela s'est retourné contre lui.
Marjorie Cohn, doyenne de l'Académie populaire de droit international et ancienne présidente de la National Lawyers Guild, a déclaré :
"Le fait que le plaidoyer soit intervenu un peu plus d'un mois après que la Haute Cour d'Angleterre et du Pays de Galles ait décidé qu'Assange pouvait faire appel de l'ordre d'extradition à son encontre n'est nullement une coïncidence. Le ministère de la Justice redoutait semble-t-il de perdre l'appel".
Stella Assange a déclaré qu'elle pensait que
les négociations "révélaient à quel point le gouvernement des États-Unis n'était vraiment pas à l'aise, en fait, [avec] ces arguments".
"Le fait que cette affaire soit une attaque contre le journalisme, une attaque contre le droit du public à être informé, et qu'elle n'aurait jamais dû être intentée. Julian n'aurait jamais dû passer un seul jour en prison. Mais aujourd'hui, nous célébrons sa libération", a-t-elle conclu.
Les États-Unis ont accepté de ne pas engager d'autres poursuites
L'une des révélations les plus incroyables concernant le plaidoyer de Julian Assange est que le gouvernement américain
"a accepté de ne pas porter d'autres accusations contre Julian pour toute conduite, publication, collecte d'informations, ou quoi que ce soit d'autre s'étant produit avant le moment du plaidoyer", selon Barry Pollack.
Ce point est particulièrement important car, comme l'a expliqué Barry Pollack, même si Julian Assange avait obtenu gain de cause dans son appel contre l'extradition, ce succès "n'aurait fait que résoudre cette affaire".
L'acte d'accusation de 18 chefs d'accusation contre Assange se concentre presque exclusivement sur le rôle de l'éditeur de WikiLeaks dans l'obtention, la possession et la publication de documents entre 2009 et 2011, connus sous le nom de journaux de guerre en Irak (Iraq War logs), journaux de guerre en Afghanistan (Afghanistan War diaries), dossiers de détenus de Guantanamo Bay (Guantanamo Bay detainee files) et câbles diplomatiques (Cablegate).
Les procureurs ont élargi de manière troublante une accusation pénale en vertu de la loi sur la fraude et l'abus informatiques (Computer Fraud and Abuse Act) pour y inclure un discours prononcé par Assange devant une salle d'experts en informatique, au cours duquel il a encouragé chacun à fournir à WikiLeaks des informations d'intérêt public.
Toutefois, Assange n'a jamais été inculpé pour le rôle joué par WikiLeaks dans la publication de courriels appartenant au Comité national démocrate, actes dont même l'ancien directeur du FBI, Robert Mueller, a conclu qu'ils étaient vraisemblablement protégés par le premier amendement.
Il n'a pas non plus été inculpé pour la divulgation par WikiLeaks, en 2017, de l'important arsenal de cyberguerre de la CIA, connu sous le nom de Vault 7. La fuite et la publication des fichiers ont conduit Mike Pompeo, lorsqu'il était directeur de la CIA, à être obsédé par l'idée de prendre pour cible, enlever ou assassiner Assange en guise de vengeance.
Avec l'accord de plaidoyer [ PDF ], que The Dissenter a examiné, le gouvernement américain ne pourra plus jamais porter plainte contre Assange pour quelque autre acte de journalisme que ce soit.
"Les États-Unis acceptent de ne pas engager de poursuites supplémentaires contre le défendeur sur la base d'un comportement antérieur à cet accord de plaidoyer, à moins que le défendeur ne viole cet accord de plaidoyer", stipule l'accord de plaidoyer.
La juge Manglona a déclaré :
"J'ai été assez surprise, mais je pense qu'il s'agit d'une déclaration fort généreuse".
Elle a fait remarquer qu'elle s'appliquait à tout ce qui s'était passé au cours des 14 dernières années.
"C'est vraiment très large".
Une autre position clé adoptée par l'équipe juridique d'Assange au cours des négociations était que
"toute résolution devrait mettre fin à cette affaire", selon Pollack. Cela signifie que "Julian serait libre, [et ] ne purgerait pas de temps supplémentaire en prison. Il n'allait pas passer du temps sous surveillance. Il n'allait pas être soumis à un ordre de bâillonnement".
Le lobbying politique en coulisses
L'avocate australienne Jennifer Robinson, qui a représenté Assange au Royaume-Uni, a également décrit la forte dimension politique de l'affaire. Les efforts considérables de lobbying déployés par les membres du gouvernement australien se sont avérés cruciaux pour le résultat global.
Elle a remercié le premier ministre australien, Anthony Albanese, pour son "leadership fondé sur des principes", ses "qualités d'homme d'État" et sa "diplomatie". Elle a expliqué que le fait de s'opposer à l'extradition de Julian Assange aux "plus hauts niveaux" du gouvernement américain avait "complètement changé la donne pour Julian" et "permis les négociations avec le gouvernement américain grâce auxquelles nous sommes parvenus à ce dénouement".
Le premier ministre était soumis à une pression intense et croissante de la part du grand public, d'une partie de la presse et d'un nombre grandissant de députés australiens.
Robinson a cité Kevin Rudd, ambassadeur d'Australie aux États-Unis et ancien premier ministre australien, ainsi que Steven Smith, haut-commissaire d'Australie au Royaume-Uni, et le personnel consulaire à Londres. Steven Smith a accompagné Assange lors de son vol de Londres à Saipan.
Elle a expliqué :
"Les efforts incessants de Rudd à Washington, en travaillant de concert, en étroite collaboration avec nous, avec moi-même et mon co-avocat Barry Pollack, ont totalement changé notre relation avec les États-Unis et ont complètement modifié les négociations. Sans ses efforts et son habileté diplomatique, nous ne serions pas dans la position où nous sommes aujourd'hui. Et Julian ne serait pas de retour dans son pays".
S'adressant à l'Australia Broadcasting Corporation le 27 juin, Robinson a expliqué qu'une fois l'ambassadeur Rudd envoyé à Washington D.C., le ministère américain de la Justice a enfin commencé à traiter avec l'équipe de la défense de manière significative.
"Cela nous a permis d'entamer des discussions avec le ministère de la justice que nous nous efforcions d'avoir et auxquelles nous n'obtenions pas de réponse, faisant ainsi bouger les choses".
Comme nombre de personnes, y compris Stella Assange, l'ont affirmé au cours des dernières années, il s'agissait d'une poursuite à motivation politique, et il était donc logique que ce soit la pression politique qui permette de résoudre l'affaire en fin de compte.
Les efforts de lobbying des hauts responsables politiques et gouvernementaux australiens n'auraient pas été possibles sans le lobbying acharné des citoyens lambda, des activistes et des organisations de défense de la liberté de la presse et des droits de l'homme (ces dernières ayant été ralliées à la cause à la suite d'une intense pression ascendante).
Il y a quelques années, seules quelques personnalités politiques au Royaume-Uni et en Australie étaient prêtes à s'opposer ouvertement et clairement à l'extradition d'Assange. Ainsi des personnalités telles que Chris Williamson, alors député travailliste de Derby North, et George Galloway, récemment réélu au Parlement, ainsi qu'Andrew Wilkie, député indépendant de Clark, en Tasmanie, et George Christensen, homme politique conservateur, à l'époque membre de la Chambre des représentants du Parti national libéral, pour Dawson, dans le Queensland, se sont opposés à l'extradition d'Assange.
"Il a fallu des millions de personnes [...], des personnes œuvrant dans les coulisses, des personnes manifestant dans les rues, pendant des jours, des semaines, des mois et des années, et nous y sommes parvenus", a déclaré Stella Assange lors de la conférence de presse.
Assange tenu d'ordonner à WikiLeaks de détruire tout fichier non publié
Avant que le plaidoyer de sa culpabilité ne soit enregistré au tribunal, l'accord conclu avec le gouvernement américain exigeait d'Assange
"de prendre toutes les mesures en son pouvoir pour assurer le renvoi aux États-Unis ou la destruction de toute information non publiée en sa possession, sous sa garde ou sous son contrôle, ou sous celui de WikiLeaks ou de toute autre entité affiliée à WikiLeaks".
Barry Pollack a confirmé qu'Assange avait enjoint au rédacteur en chef de WikiLeaks, Kristinn Hrafnsson, de détruire "tout document en leur possession non publié".
Le rédacteur en chef de WikiLeaks, Kristinn Hrafnsson, a confirmé à The Dissenter qu'Assange lui avait demandé de détruire "tous les documents secrets américains non publiés".
Cette disposition de l'accord de plaidoyer fait écho à la décision tristement célèbre prise en 2013 par les rédacteurs du journal The Guardian d'utiliser une perceuse électrique et une meuleuse d'angle pour détruire un disque dur sur lequel se trouvaient des copies de vastes quantités d'informations divulguées par Edward Snowden, le lanceur d'alerte de la National Security Agency (NSA), à Glenn Greenwald, alors chroniqueur au Guardian.
Les rédacteurs ont été menacés de poursuites judiciaires en cas de non restitution des disques durs. Ils ont accepté de les détruire dans le sous-sol de leur siège à Londres, même s'il était entendu que des copies existaient ailleurs, en dehors du Royaume-Uni.
Des techniciens du Government Communications Headquarters - l'équivalent britannique de la NSA - ont filmé cette destruction tout en prenant des notes et en donnant des instructions aux rédacteurs en chef.
Le rédacteur en chef du Guardian, Paul Johnson, fait partie de ceux qui ont décrit la destruction comme un acte "purement symbolique", puisque toutes les personnes impliquées savaient que des copies des documents existaient, révélant les détails de l'espionnage et de la surveillance de masse anglo-américains sans mandat de centaines de millions de personnes aux États-Unis et dans le monde entier.
Pourtant, cet acte était plus que symbolique. Il rappelait avec force le pouvoir du gouvernement britannique (qui agit avec les encouragements de l'État de sécurité nationale américain) et sa capacité à menacer et à faire plier à sa volonté les médias de l'establishment, même les plus connus et les mieux dotés en ressources.
Comme l'a relaté l le journaliste d'investigation Kit Klarenberg pour The Dissenter, trois ans après la destruction du disque dur, l'équipe d'investigation du Guardian
"a été dissoute, et la couverture par le Guardian des questions militaires, de sécurité et de renseignement a chuté précipitamment".
En fait, à l'heure actuelle, de nombreux correspondants du Guardian chargés de la sécurité nationale n'ont que peu d'expérience dans ce domaine.
Les États-Unis n'ont pas - ou n'ont pas pu - identifier de victimes
Le gouvernement des États-Unis n'a pas voulu ou n'a pas pu identifier de "victime" des fuites publiées, et les procureurs n'ont pas demandé à Assange de dédommager les victimes présumées.
Toutefois, lors d'un point de presse tenu le 26 juin, le porte-parole du département d'État, Matthew Miller, a continué à affirmer qu'il y avait eu des "victimes".
"Si vous vous rappelez la première fois que WikiLeaks a diffusé et publié des câbles du département d'État, ils l'ont fait sans expurger les noms. Ils les ont simplement jetés en pâture au monde entier. Ainsi, les documents qu'ils ont publiés contenaient des informations permettant d'identifier des personnes qui étaient en contact avec le département d'État. Il s'agissait notamment de dirigeants de l'opposition, de militants des droits de l'homme dans le monde entier, dont les positions ont été mises en péril en raison de leur divulgation publique", a-t-il faussement affirmé.
Poursuivant :
"Ceux d'entre vous qui ont couvert le département d'État à l'époque se souviendront probablement que dans les jours qui ont précédé cette publication, le département d'État a dû faire des pieds et des mains pour mettre certaines personnes hors de danger, pour les mettre hors d'état de nuire".
Miller ne travaillait pas au département d'État. Il travaillait à l'époque comme porte-parole du ministère de la justice dans l'administration du président Barack Obama. En fait, avant d'être fonctionnaire dans l'administration du président Joe Biden, il s'était pourtant opposé aux poursuites engagées contre Assange.
L'ensemble du cache de plus de 250 000 câbles diplomatiques est devenu accessible sur le net à cause du rédacteur en chef du Guardian, David Leigh, qui a inclus le mot de passe d'un fichier crypté contenant les câbles dans un livre qu'il a coécrit sur son travail avec WikiLeaks.
Assange a alors appelé le département d'État pour l'avertir des risques posés par la publication de câbles non expurgés.
"J'apprécie que vous ayez reconnu que ce type de publication peut absolument constituer une menace pour les sources mêmes qui sont reflétées dans le matériel", a déclaré Cliff Johnson, alors conseiller juridique auprès du département d'État.
Miller s'est plaint de l'impact négatif supposé de la publication des câbles sur la diplomatie américaine. Mais le secrétaire à la défense, Robert Gates, a déclaré lors de la première publication des câbles :
"J'ai entendu dire que l'impact de ces communiqués sur notre politique étrangère était une catastrophe, qu'il changeait la donne, et ainsi de suite".
"Le fait est que les gouvernements traitent avec les États-Unis parce que c'est dans leur intérêt, pas parce qu'ils nous aiment, pas parce qu'ils nous font confiance, et pas parce qu'ils croient que nous pouvons garder des secrets". Déclaré également que "tous les autres gouvernements du monde savent que le gouvernement des États-Unis est une véritable passoire, et ce depuis longtemps".
Matthew Lee, journaliste de l'Associated Press, couvrait le département d'État lorsque WikiLeaks a publié les câbles pour la première fois. Comme il le rappelle, il n'y a eu
"aucune préoccupation publique concernant les risques potentiels pour la sécurité des sources qui auraient pu être citées".
En dehors des câbles, l'armée américaine n'a jamais été en mesure de trouver la moindre preuve que la publication des journaux de guerre de l'Irak et de l'Afghanistan ait entraîné la mort d'une seule personne.
Daniel Ellsberg, le lanceur d'alerte des Pentagon Papers, a témoigné lors de l'audience d'extradition d'Assange en septembre 2020. Il a indiqué que ce dernier avait retenu 15 000 fichiers lors de la publication des carnets de guerre afghans. Il a également sollicité l'aide du département d'État et du département de la défense pour expurger des noms, mais ces derniers ont refusé d'aider WikiLeaks à expurger un seul document, alors qu'il s'agit d'une pratique journalistique courante qui consiste à consulter des responsables pour minimiser les dommages.
"Je n'ai aucun doute sur le fait que Julian aurait supprimé ces noms", a-t-il déclaré.
Plutôt que de prendre des mesures pour protéger les individus, Ellsberg a suggéré que les responsables américains ont choisi de "préserver la possibilité d'inculper Mr Assange précisément des charges" qui pèsent sur lui.
Assange déclare devant le tribunal qu'il avait pratiqué le journalisme.
Le gouvernement américain a peut-être accepté un accord qui a fait preuve de clémence à l'égard d'Assange, mais il a tout de même contraint, ou forcé, le fondateur de WikiLeaks à plaider coupable de journalisme s'il voulait obtenir sa liberté.
Lors de l'audience à Saipan, la juge Manglona a demandé à Assange de décrire ce qu'il avait fait et qui constituait "le crime incriminé".
"En tant que journaliste, j'ai encouragé ma source à fournir des informations qui étaient censées être classifiées afin de les publier. Je pense que le premier amendement protège cette activité, mais je reconnais que, tel qu'il est écrit, il s'agit d'une violation de la loi sur l'espionnage" (Espionage Act).
"Vous aviez donc une certaine conviction, mais vous comprenez également ce que stipule la loi ?", a répondu Manglona.
Assange a dit à la juge :
"Pour moi, le premier amendement et la loi sur l'espionnage sont en contradiction, mais j'admets qu'il serait difficile de gagner une telle affaire compte tenu de toutes les circonstances".
En substance, Assange a rappelé un acte auquel les journalistes de nombreux médias se livrent couramment, et la juge a retenu cette pratique comme un "crime".
Matthew McKenzie, chef adjoint de la section du contre-espionnage et du contrôle des exportations au sein de la division de la sécurité nationale du ministère américain de la justice, a souligné que le gouvernement américain rejette l'affirmation d'Assange selon laquelle son comportement devrait être protégé par le premier amendement.
Le ministère américain de la justice aurait pu célébrer la fin de cette saga juridique et la présenter comme une victoire. Mais les procureurs ont publié un communiqué dans lequel ne figuraient aucune déclaration du procureur général Merrick Garland, du procureur du district Est de Virginie ou de tout autre procureur impliqué dans l'affaire. Il contenait une plaidoirie que l'on pourrait entendre avant que le jury ne délibère sur un verdict, mais aucune proclamation de victoire.
Stephen Rohde (ndr : son article vous est proposé traduit dans cette multipublication), constitutionnaliste et ancien président de l'ACLU Foundation of Southern California, a commenté :
"Lorsque les procureurs américains ont dû s'expliquer ou se taire pour convaincre la Haute Cour que le droit à la liberté d'expression d'Assange serait protégé s'il était extradé, ils se sont contentés de cligner des yeux. Un procès Assange comportait de sérieux risques d'embarras pour les États-Unis à la suite de révélations selon lesquelles la CIA avait comploté pour l'enlever ou l'assassiner".
L'affaire s'est terminée en queue de poisson pour le gouvernement américain. De leur côté, Assange et son équipe juridique étaient conscients des dommages causés à la liberté de la presse, mais se réjouissaient de la libération de l'un des prisonniers politiques les plus connus au monde.
Pour les journalistes et les organisations de médias du monde entier, ce résultat a un goût doux-amer.
Comme l'a expliqué Jennifer Robinson lors de la conférence de presse, l'accord de plaidoyer n'a aucun impact sur la jurisprudence. Ce sont les poursuites elles-mêmes qui ont créé le précédent selon lequel des professionnels des médias du monde entier peuvent être poursuivis par les États-Unis, en vertu d'une loi ne prévoyant aucune défense de l'intérêt public, pour le délit de journalisme.
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📰 https://thedissenter.org/inside-the-assange-plea-deal-why-the-us-government-abruptly-ended-the-case/
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19- ♟ Assange est libre, mais le sommes-nous ?
Par Slavoj Žižek, le 29 juin 2024, Klasse Kampen
ndr : N'ayant réussi à trouver l'article original de Slavoj Žiže, ceci est ma traduction d'un article en Norvégien, lui-même traduit de l'article original dont le lien n'est pas mentionné par Sigrid Strømmen, avec les erreurs que cela peut comporter.
Au cours des cinq années qui se sont écoulées depuis l'emprisonnement du fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, au Royaume-Uni, le monde a été secoué par des pandémies, de nouvelles guerres et des catastrophes climatiques de plus en plus graves au point de douter de notre avenir collectif. Mais la question de savoir si le public consommateur d'informations apprécie la nature désastreuse de notre situation est une toute autre affaire.
LJUBLJANA - J'ai lutté pendant des années aux côtés et pour Julian Assange. Mais lorsque j'ai appris qu'il avait retrouvé sa liberté, ma première pensée a été qu'il retournait dans un monde qui semble - et qui est - bien pire que celui qu'il a laissé derrière lui. Les pandémies, les guerres et l'effondrement écologique généralisé nous obligent à nous poser LA grande question : Dans quelle mesure sommes-nous encore libres, nous qui respirons l'air frais hors des prisons ?
Ce n'est pas seulement la réalité des guerres et autres crises qui s'aggrave, cela s'applique également à nos récits, eux vont aussi de mal en pis.
Inside Out 2 (Kelsey Mann, 2024) est, à mes yeux, le film le plus antifreudien de tous les temps. Il suit une jeune fille de 13 ans, Riley, à l'aube de la puberté. Ses émotions personnifiées - Joie, Tristesse, Peur, Colère, Dégoût - ont créé une nouvelle section dans son esprit appelée "Sens de soi". Puis, quatre nouvelles émotions - anxiété, Envie, Embarras, Ennui - font leur apparition, et un conflit s'ensuit. Joy pense que Riley devrait se concentrer sur le fait de s'amuser au camp, tandis qu'Anxiety veut que Riley gagne une place dans l'équipe et se fasse de nouveaux amis. En fin de compte, la première et la deuxième génération d'émotions apprennent à travailler ensemble pour protéger la perception de soi de Riley, en constante évolution, laissant les spectateurs avec une représentation tout à fait frauduleuse de la psyché humaine.
Dans le monde réel, ces tensions psychiques internes s'aggravent souvent jusqu'à la folie. Un bien meilleur film aurait dépeint les émotions d'un jeune Palestinien dans les ruines de Gaza, et non celles d'une jeune fille issue d'une riche banlieue de Los Angeles. Au lieu de travailler ensemble pour former un moi cohérent, ses émotions conflictuelles le pousseraient vers une rupture psychique et des actes de violence suicidaires. Rappelons la merveilleuse description de G.K. Chesterton :
"Un soldat entouré d'ennemis, s'il veut s'en sortir, doit combiner un fort désir de vivre avec une étrange insouciance à l'égard de la mort. Il ne doit pas simplement s'accrocher à la vie, sans quoi il deviendrait lâche et fuirait. Il ne doit pas se contenter d'attendre la mort, car alors ce serait un suicide et ne pourrait fuir. Il doit être défendre sa vie dans un esprit de furieuse indifférence à son égard ; il doit désirer la vie comme l'eau mais boire la mort comme le vin".
Le récent film d'Oleh Sentsov, Real, rend parfaitement compte de cette combinaison d'opposés. Après avoir passé plusieurs années comme prisonnier politique en Russie, Sentsov est parti combattre pour l'armée ukrainienne. Les 90 minutes du film comportent des séquences GoPro prises alors qu'il ne se rendait pas compte que sa caméra était allumée. Présenté sans montage, il dépeint l'étrange mélange de terreur et d'ennui qui caractérise la vie sur la ligne de front.
Sentsov, qui a été prisonnier politique en Russie pendant plusieurs années et qui combat désormais dans l'armée ukrainienne, a retrouvé les 90 minutes d'images tremblantes six mois après le combat, alors qu'il était chez lui pour une courte permission (il est maintenant de retour au front). Il a parcouru d'anciens fichiers sur sa caméra GoPro et a découvert qu'elle était restée allumée ce jour-là. Le film est inédit et capture la terreur et l'ennui de la vie sur le front :
"J'étais sur le point de tout effacer quand j'ai trouvé ceci et j'ai réalisé que j'avais capturé une impression très intéressante de cette bataille et de ce qu'est réellement la guerre - laide, incompréhensible, tordue et idiote". Le titre Real ne fait référence à aucune "réalité" - il porte le nom de la position où sont coincés les blessés (tous les postes de la guerre portent le nom d'équipes de football, et Real fait référence au Real Madrid). Celle de Sentsov est Marseille, une autre à côté, Chelsea. Le titre du film est à juste titre ambigu : le nom d'un grand club sportif et la guerre dans son essence laide, incompréhensible, tordue et idiote - bref, "le réel" au sens lacanien.
Le film tout entier est traversé par de telles dualités. L'absurdité et la brutalité ennuyeuse de la réalité sont ponctuées d'instants magiques que l'on peut qualifier d'insignifiants et insensés. Sentsov se souvient d'un moment survenu juste avant le début du tournage de Real : "Il y avait un soldat avec l'indicatif Johnny, un vétéran de la guerre d'Afghanistan. Il allait évacuer les blessés mais a été touché et a réussi à émettre un dernier message radio, dans lequel il disait : "Ici Johnny, je suis mort"". Un moment d'authentique absurdité métaphysique.
De nombreux critiques estiment que Real montre la guerre "telle qu'elle est réellement", mais cette affirmation est unilatérale et très trompeuse. Si tel était le message de Sentsov, son film ne serait qu'un énième hymne pacifiste à l'absurdité insensée de la guerre, une énième variation sur le thème "quand on expérimente la brutalité de la guerre, quand on voit les corps mutilés, quand on entend les cris des mourants". Soldats, vous réalisez que tous les appels au sacrifice pour votre pays, à accomplir votre plus grand devoir, etc., ne sont que des paroles vides de sens de ceux qui sont au pouvoir.
Sentsov est unique en ce sens que, bien qu'il révèle les horreurs et l'ennui du conflit, il n'en tire pas la conclusion cynique-pacifiste attendue. Même s'il accepte l’absurdité brutale, il faut quand même se battre pour une juste cause . Dépourvu de toute sorte de romantisation pathétique et émotionnelle de la lutte héroïque, Real montre ce que signifie le véritable courage : accepter héroïquement la misère du combat militaire et ne pas obscurcir sa réalité avec des fantasmes pathétiques.
Nous avons plus que jamais besoin de ce message, alors que - comme c'est le cas en Ukraine - le pacifisme est de plus en plus utilisé pour légitimer une agression militaire brutale, puisque le message est "nous ne devons pas résister à l'occupant - alors nous sommes comme lui".
À Gaza, où le pacifisme joue un rôle différent, bien plus positif, ceux qui contrôlent nos médias grand public tentent évidemment de gérer, façonner, manipuler et censurer soigneusement notre compréhension de ce qui se passe à Gaza et en Cisjordanie, afin de réguler et limiter l'impact émotionnelles émotions de l'actualité. Cela va jusqu'à décider quels verbes utiliser pour décrire les massacres – les soldats de Tsahal sont "tués", tandis que les Palestiniens sont "retrouvés morts". De nouvelles formes de censure "discrète" imprègnent ainsi notre espace public.
Saviez-vous qu'un groupe important d'intellectuels juifs israéliens a récemment appelé tous les États membres de l'UE, le Royaume-Uni et d'autres pays à reconnaître l'État de Palestine ? Cet acte courageux de véritables héros de notre époque n'a quasiment pas été couvert par les médias occidentaux ; ce n'est guère surprenant, c'est ainsi que fonctionne la censure aujourd'hui. Les événements majeurs susceptibles de heurter la sensibilité du public occidental ne sont pas mentionnés ou ne sont signalés que par une petite note en bas de page.
Combien ont remarqué ou entendu le rapport du 20 juin selon lequel Israël n’avait procédé à rien de moins qu'à une annexion de la Cisjordanie, lorsque l'armée israélienne a dit qu'elle transférerait le pouvoir à des "fonctionnaires favorables aux colons" ? L'ironie de cette décision frappante n'échappera pas aux Palestiniens. Alors qu'une occupation militaire implique une certaine distance avec Israël, cette nouvelle disposition signifie qu'ils sont intégrés dans l'ordre civil israélien, même si celui-ci est dominé par des nationalistes déterminés à les exclure.
Ces exemples montrent pourquoi nous avons plus que jamais besoin de héros comme Assange. Il fait ce qu'il fallait faire, ce qui était nécessaire, et en a payé le prix fort. Et le temps est désormais venu pour d'autres, nous tous, de poursuivre le travail qu'il a entamé. Par travail, j'entends non seulement le travail, mais aussi la vocation, quelque chose que l'on est appelé à faire. Dans le livre Shattered, Hanif Kureishi souligne que bien plus que de médecins spécialistes formés à l'université, nous avons besoin d'infirmières qui considèrent leur travail comme une vocation : "Dans chaque ville du monde, les hôpitaux sont remplis d'infirmières qui font un travail dévoué. D'après les conversations que j'ai eues avec les infirmières, avec qui j'ai passé la plupart de mes journées et certaines de mes nuits - sans en avoir connu auparavant - toutes considèrent leur travail comme une vocation, une attitude face à la vie".
Une vocation ne signifie pas que vous choisissez simplement ce que vous faites, vous êtes en quelque sorte appelé, choisi pour le faire. Et c’est précisément ce que l’on peut dire d’Assange : il n’a pas choisi de lancer WikiLeaks et de révéler des secrets d'État pour donner du piment à sa vie ou pour provoquer. Il l'a fait parce qu'il lui était inconcevable et impossible de faire autrement. C'est dans Wikileaks qu'il a trouvé sa vocation. C'est pourquoi je pense que, malgré toutes les souffrances qu'il a endurées, Assange est un homme heureux.
Slavoj Žižek, professeur de philosophie à l'European Graduate School, est directeur international du Birkbeck Institute for the Humanities de l'université de Londres et l'auteur, tout récemment, de Christian Atheism : How to Be a Real Materialist (Bloomsbury Academic, 2024).
📰 https://klassekampen.no/artikkel/2024-06-29/assange-er-fri-men-er-vi-det/BC85
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20- ♟ Stella Assange exhorte les journalistes à demander des informations au gouvernement américain pour obtenir des détails sur l'affaire
L'épouse de Julian Assange déclare que c'est maintenant à d'autres de trouver des informations après l'interdiction imposée au fondateur de WikiLeaks.
Par Karen Middleton, le 27 juin 2024, The Guardian
Stella Assange a exhorté les journalistes australiens à déposer des demandes de liberté d'information auprès du gouvernement des États-Unis afin d'obtenir des détails sur les poursuites pénales engagées contre son mari, car l'accord conclu par l'éditeur de WikiLeaks, aujourd'hui libéré, l'en empêche.
À l'occasion du premier jour complet du retour de Julian Assange en Australie, sa femme et son conseiller juridique ont une nouvelle fois remercié les parlementaires - en particulier le Premier ministre - et les sympathisants australiens et du monde entier dont la campagne, qui dure depuis 14 ans, a abouti à la libération de Julian Assange. Assange, 52 ans, a plaidé coupable mercredi à un chef d'accusation d'espionnage et a été condamné à une peine déjà purgée.
"Si Julian a plaidé coupable devant le tribunal fédéral de Saipan, c'est parce qu'il plaidait coupable d'avoir commis un acte de journalisme. Cette affaire criminalise le journalisme - l'activité journalistique, l'activité journalistique standard de collecte et de publication d'informations. Voilà donc la réalité de ces poursuites", a déclaré Stella Assange.
"C'est une affaire qui n'aurait jamais dû être intentée. Mais l'important est que Julian soit libre... Et que nous puissions tourner la page".
Julian Assange ne s'est pas exprimé publiquement depuis son arrivée à Canberra mercredi soir et sa femme a expliqué qu'il aurait besoin d'un temps de récupération avant de le faire. Elle s'est adressée directement aux journalistes lors d'une conférence de presse au Parlement jeudi, les exhortant à ne pas cesser d'enquêter sur la manière dont les États-Unis ont traité l'affaire contre son mari.
"Julian n'est pas autorisé à demander la liberté d'information, à faire des demandes d'information au gouvernement américain. Mais vous pouvez le faire et je vous encourage à le faire... alors s'il vous plaît, faites-le", a déclaré Stella Assange.
L'accord conclu avec Assange contenait une condition distincte, insérée sur l'insistance du gouvernement américain, selon laquelle l'éditeur australien devait supprimer toutes les informations américaines non publiées encore en sa possession ou détenues par WikiLeaks ou ses affiliés.
Son avocat américain, Barry Pollack, a déclaré que les documents publiés par WikiLeaks dataient maintenant de plus de dix ans et qu'il ne savait pas si d'autres documents non publiés étaient encore en leur possession. Il a toutefois confirmé que M. Assange avait fait ce qu'on lui demandait.
"Les États-Unis ont en fait reconnu hier devant le tribunal de Saipan - et le juge l'a constaté - qu'il n'y a aucune preuve que les publications d'Assange aient porté préjudice à qui que ce soit, où que ce soit dans le monde".
"Cela dit, ils ont insisté pour qu'il donne l'ordre au rédacteur en chef de WikiLeaks de détruire tous les documents qu'ils pourraient avoir et qui n'ont pas été publiés, et Julian s'est conformé à cette disposition, a déclaré Pollack.
Stella Assange a déclaré que son mari était "comblé et extrêmement reconnaissant" envers le public australien et tous ceux qui, au sein du spectre politique, y compris dans l'opposition et parmi les membres du gouvernement, ont fait campagne en faveur de sa libération.
Elle a qualifié cet événement de
"tout à fait unique, car il a rassemblé des personnes de tous bords, qui ont œuvré pour la liberté de Julian et l'ont maintenue en tête des priorités pendant des années maintenant".
"Je pense que le monde entier a fêté cela avec nous. C'est nous qui nous sommes rencontrés sur le tarmac, mais c'est le monde entier qui s'est réjoui".
Mais ce sentiment d'unité s'est brisé jeudi, lorsque le ministre des affaires étrangères fictif, Simon Birmingham, a accusé Anthony Albanese d'avoir fêté Assange à tort, déclarant que l'appel téléphonique du Premier ministre à l'éditeur de WikiLeaks alors qu'il atterrissait en Australie était inapproprié.
Birmingham s'opposait à ce qu'Albanese assimile l'accord négocié pour Assange et sa libération ultérieure au retour du conseiller économique australien et prisonnier politique Sean Turnell du Myanmar et du journaliste Cheng Lei de Chine.
"L'idée que Julian Assange devrait être honoré, traité et célébré de la même manière que les Australiens ayant véritablement été prisonniers politiques, détenus arbitrairement par des régimes qui n'offrent pas ce type de transparence - n'a absolument rien de comparable", a-t-il déclaré à ABC Radio National, jeudi matin.
Il a laissé entendre qu'Assange et WikiLeaks avaient fait preuve d'imprudence en publiant des documents entiers sans les expurger.
"Il ne s'agit pas d'un acte d'héroïsme. C'était simplement l'acte de quelqu'un heureux de prendre toutes les informations qu'on lui fournissait et de les publier. Ce n'est pas ce que l'on fait à l'Australian Broadcasting Corporation et ce n'est pas ce que tout autre journaliste responsable ferait".
Birmingham a également laissé entendre que le soutien publiquement apporté par Albanese à Assange avait endommagé l'alliance de l'Australie avec les États-Unis et que certains membres du Congrès américain auraient "une très mauvaise opinion" d'Albanese pour l'avoir accueilli chez lui. La ministre des affaires étrangères, Penny Wong, a rejeté cette idée.
Elle a déclaré :
"Il [Birmingham] doit savoir que nos relations avec les États-Unis sont profondes et solides, et c'est pourquoi nous avons pu plaider en ce sens".
La plus ancienne avocate de Julian Assange, l'Australienne Jennifer Robinson, a déclaré qu'Assange avait exposé des crimes de guerre américains et avait ensuite été puni pour avoir agi dans l'intérêt public. Elle a rabroué Birmingham pour ses observations.
"Il est tout à fait approprié que le premier ministre australien appelle un citoyen australien ayant traversé ce que Julian a traversé et venant juste d'atterrir en Australie", a-t-elle déclaré jeudi à des journalistes.
"Suggérer que se soucier d'un citoyen australien (...) qui a traversé tant d'épreuves pourrait nuire à notre alliance est, je pense, inapproprié".
Elle a affirmé que Birmingham devait "remettre de l'ordre dans ses priorités".
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21- ♟ "On peut s'attendre à tout" : quelle suite pour Julian Assange et WikiLeaks ?
L'utilité des divulgations du site a disparu et son cofondateur doit se rétablir, mais sa résilience pourrait permettre de le faire renaître.
Par Ben Quinn, le 28 juin 2024, The Guardian
Alors que Julian Assange profite de son premier week-end de liberté depuis plus d'une décennie, sa femme, Stella, ne semble pas douter des priorités de la famille.
Le cofondateur de WikiLeaks aura besoin de temps pour se rétablir, a-t-elle dit à la presse après qu'ils se soient retrouvés dans son pays natal, l'Australie, à la suite d'un accord avec les autorités américaines lui ayant valu de plaider coupable d'un seul chef d'accusation, celui de conspiration en vue d'obtenir et de divulguer des documents classifiés relatifs à la défense.
La suite des événements est l'une des questions les plus intrigantes pour tous ceux qui savent comment le site qu'Assange a fondé en 2006 a radicalement changé la nature des révélations d'irrégularités. Reviendra-t-il à sa mission initiale ?
Bien qu'il reste en ligne - et que les lanceurs d'alerte potentiels puissent théoriquement l'utiliser pour transmettre des secrets - à toutes fins utiles, l'organisation qui l'entoure a été réorientée ces dernières années pour faire campagne en faveur de la liberté d'Assange.
Julian Assange lui-même a déclaré au magazine Nation, lors d'une interview au sein de la prison de Belmarsh, à Londres, qu'il avait été impossible de publier des fuites en raison de son emprisonnement, de la surveillance exercée par le gouvernement américain ainsi que des restrictions financières.
D'autres questions sont également incontournables, notamment le fait que le type de technologie de cryptage et d'autres processus dont WikiLeaks a été le pionnier à bien des égards existent aujourd'hui dans toute bonne organisation de presse.
James Harkin, directeur du Centre for Investigative Journalism, basé à Londres, a déclaré que l'intérêt pour WikiLeaks - qu'il a qualifié d'"alliance souple entre journalistes d'investigation et anarchistes de l'information" - est né il y a plus de dix ans d'une profonde frustration face à l'incapacité des médias mainstream à rendre compte des véritables agissements des États occidentaux dans des pays tels que l'Afghanistan et l'Irak.
C'est l'une des raisons pour lesquelles le centre a prêté à Assange et à WikiLeaks une partie de son temps et de ses stagiaires : le site innovait.
Mais il ajoute :
"Aujourd'hui, certaines de ces leçons ont été tirées. Le type d'enquêtes transfrontalières et collaboratives portant sur d'énormes quantités de documents dont WikiLeaks a été le pionnier et son utilisation de gouttes d'information électroniques anonymes sont désormais de rigueur - et dans une large mesure dépassées".
"Rétrospectivement, il est frappant de constater que tout ce que WikiLeaks a publié était vrai - ce qui n'est pas un mince exploit à l'ère de la "désinformation" - mais la tragédie est qu'une grande partie de son énergie et de son éthique est désormais passée aux mains des fanfarons et des théoriciens de la conspiration. Peut-être, à la lumière de nos nouveaux engagements timides au Moyen-Orient et en Ukraine, avons-nous besoin d'un nouveau WikiLeaks".
Un autre problème pour beaucoup tient à certaines des fréquentations et des alliances formées par Assange, un personnage mercurien qui a eu son lot de démêlés, y compris avec le Guardian. Avant d'entrer dans l'ambassade d'Équateur, il avait commencé à animer des émissions d'interviews pour RT, le média d'État russe, une décision relativement facile à défendre à l'époque mais qui prend aujourd'hui une autre tournure depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine.
Cela dit, même certains détracteurs d'Assange suggèrent que WikiLeaks pourrait avoir un rôle à jouer, avec ou sans lui.
James Ball, journaliste et ancien membre du personnel de WikiLeaks, a déclaré que
"la bonne décision" serait qu'Assange et WikiLeaks deviennent une figure de proue de l'activisme en faveur de la transparence."
"Il est difficile de voir comment ils peuvent revenir à ce qu'ils faisaient avant. Ils avaient une nette longueur d'avance à l'origine, mais franchement, ils se sont relâchés et un problème s'est posé avec des volontaires inexpérimentés qui entraient et sortaient, et des personnes qui n'étaient pas contrôlées".
Ajoutant,
"Les gens qui l'entourent ont dit que cela avait pesé sur sa santé et je suis sûr qu'il voudra reprendre son souffle, alors s'il aspirait à une vie tranquille, ce serait compréhensible".
Alors que la plupart des publications de WikiLeaks se sont concentrées sur la situation difficile d'Assange, le site a continué à être présent en tant que plateforme permettant d'amplifier le journalisme d'autres personnes.
Pas plus tard que cette semaine, son compte Twitter X faisait la promotion du projet Gaza, une collaboration entre des journalistes de 13 organismes d'information différents enquêtant sur l'assassinat de journalistes à Gaza.
En outre, les répercussions de ces fuites originales continuent d'avoir un impact, petit ou grand. Cette semaine, au Royaume-Uni, le parti populiste de droite Reform a retiré l'un de ses candidats aux élections après la révélation qu'il figurait sur une liste divulguée à l'origine par WikiLeaks, indiquant l'appartenance en 2016 au parti d'extrême droite British National Party (BNP).
Quoi qu'il en soit, peu de ceux qui le connaissent s'attendent à ce qu'il passe le reste de sa vie sur une plage australienne.
Stefania Maurizi, journaliste au quotidien italien Il Fatto Quotidiano, partenaire médiatique de WikiLeaks depuis 2009, a souligné ce qu'elle a décrit comme "la résilience et la détermination exceptionnelles" de l'organisation et de son fondateur.
Elle a déclaré qu'elle comprendrait qu'Assange et les journalistes de WikiLeaks veuillent aller de l'avant, ajoutant :
"Ils ont tant donné et tant sacrifié, alors que Stella et lui méritent de profiter de leur vie avec leurs enfants.
"En même temps, WikiLeaks a souvent été considéré comme mort, disparu, et pourtant il fait toujours les gros titres à travers le monde. Vous pouvez vous attendre à tout de la part de Julian Assange et de WikiLeaks".
Ben Quinn est correspondant politique par intérim du Guardian.
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22- ♟ Libération d'Assange : l'écurie des médias à l'épreuve de la réalité
Par Binoy Kampmark, le 28 juin 2024, Counter Currents
Le projet WikiLeaks allait forcément mettre le feu aux poudres au sein de la profession journalistique. Imprégnés de paresse, facilement achetables, corvéable à merci, éternellement envieux, une bonne partie du quatrième pouvoir a toujours préféré ne pas critiquer le pouvoir et sympathiser avec son exercice brutal. Pour ces raisons, le point de vue de Thomas Carlyle, citant l'opinion d'Edward Burke dans sa conférence de mai 1840, selon lequel "au Parlement, on comptait trois pouvoirs, mais dans la galerie des journalistes, là-bas, siégeait un quatrième pouvoir, plus important que tous les autres", semble étrangement déplacé, en tout cas dans un contexte moderne.
La réaction des médias à la libération de Julian Assange, fondateur de WikiLeaks, de sa captivité scandaleuse après avoir plaidé coupable d'un chef d'accusation de conspiration en vue d'obtenir et de divulguer des informations relatives à la défense nationale en vertu de la loi américaine sur l'espionnage de 1917, offre un aperçu fascinant d'une tendance effroyable, crapuleuse et sycophante qui n'est que trop répandue parmi les journalistes de bureau de la presse écrite.
Prenons, par exemple, un certain nombre de journalistes travaillant pour l'Australian Broadcasting Corporation, radiodiffuseur national officiel et adepte de la ligne médiane sécuritaire. L'un d'entre eux, présentateur du journal télévisé du matin pour le service de vingt-quatre heures de la chaîne, affiche un palmarès plutôt terne en ce qui concerne les mauvais traitements infligés à Assange au fil des ans.
Michael Rowland, tortueusement insipide et dépourvu d'humour, avait exprimé sa joie inexprimable lorsque le gouvernement équatorien a coupé l'accès d'Assange à Internet alors qu'il était confiné dans l'ambassade londonienne du pays. "Une superbe étoile d'or à l'Équateur", avait-il piaffé le 28 mars 2018. Andrew Fowler, un autre journaliste et bien plus aguerri à la montée en puissance de WikiLeaks, lui a fait des reproches sur Twitter, comme s'appelait alors la plateforme X. "Pourquoi soutenir le fait de réduire au silence un collègue journaliste ?" Pour Rowland, la question était claire comme de l'eau de roche. "Cela reste une opinion controversée, Andrew. Éditeur et activiste, oui. Mais vous vous placez dans un cercle restreint en le qualifiant de journaliste".
Ces points ont toute leur importance, car ils touchent à la stratégie centrale de diffamation de l'accusation du gouvernement américain, adoptée avec tant de désinvolture par les médias mainstream. Grâce à un tel écran de fumée, il est possible de dissimuler des crimes et de faire passer ceux qui les révèlent pour des personnes de mauvaise foi. Les étiquettes peuvent être exploitées pour cloisonner la vérité, voire l'occulter totalement : un éditeur-activiste doit être considéré avec plus de circonspection qu'un journaliste approuvé par l'establishment.
Antony Loewenstein, lui-même journaliste indépendant désireux de débusquer les détails les plus obscurs d'un pouvoir abusif, a fort bien illustré ce point. Interviewé par nul autre que Rowland lui-même, il a expliqué, avec une patience inébranlable, les raisons pour lesquelles Assange et Wikileaks sont si honnis par les scribouillards orthodoxes du quatrième pouvoir. WikiLeaks, a-t-il déclaré avec insistance, a affronté le pouvoir, il ne lui a pas succombé.
Rowland n'a pu que réitérer le blabla habituel selon lequel Assange avait reconnu sa culpabilité pour un "délit très grave", refusant d'examiner les raisons de son geste ou ses implications. Une fois de plus, l'argument vulgaire selon lequel Assange avait "mis des vies américaines en danger" avec les révélations de WikiLeaks a été ressorti tel un roquet mal nourri. Une fois de plus, Loewenstein a dû rappeler à Rowland qu'aucune preuve indiquant que des vies avaient été mises en danger n'existait, un point soulevé dans plusieurs études sur le sujet réalisées tant par le Pentagone que par le ministère australien de la défense.
La tendance est pestilentielle. Peter Greste, ancien journaliste d'Al Jazeera, s'est montré plus prudent dans son rôle actuel de professeur de journalisme, mais il s'est déjà montré dédaigneux, dans le Sydney Morning Herald, à l'égard des contributions de Julian Assange, alors qu'il était brutalement expulsé de l'ambassade d'Équateur à Londres. "Pour être clair, Julian Assange n'est pas un journaliste et WikiLeaks n'est pas un organe de presse". Une organisation qui vante "l'idée libertaire d'une transparence radicale" est "une question tout à fait distincte de la liberté de la presse".
Tout en approuvant les activités de publication centrées sur la diffusion de la vidéo Collateral Murder révélant l'assassinat de civils, dont deux journalistes de Reuters, par des hélicoptères Apache, ainsi que la publication des journaux de bord de la guerre d'Afghanistan, de la guerre d'Irak et du Cablegate, Greste s'est laissé convaincre que l'éditeur ne caviardait pas les noms dans les documents pour "protéger les innocents" en les déversant "tous sur son site web, libre à quiconque de les consulter, indépendamment de leur contenu ou de l'impact qu'ils auraient pu avoir".
Il n'est nullement fait mention de la clé de décryptage négligemment incluse dans WikiLeaks: Inside Julian Assange’s War on Secrecy par ses auteurs maladroits David Leigh et Luke Harding, ou le fait que le site web Cryptome a été le premier à publier les fichiers non expurgés avant WikiLeaks. De même qu'il n'est nullement question des efforts considérables d'expurgation déployés par Assange avant la publication des documents en novembre 2010, comme en témoignent nombre de ses collaborateurs.
Dans un article paru le 25 juin dans The Conversation, Greste affiche la plume émétique de quelqu'un qui qui a fait volte-face. "Il vaut la peine de s'arrêter un instant pour réfléchir à tout ce qu'Assange a traversé, et de faire péter le champagne pour célébrer sa libération", écrit-il sur un ton détestable, en évoquant également sa propre expérience carcérale dans une cellule d'une prison égyptienne. Il affirme également que le rôle de WikiLeaks, qui consiste à vérifier "le pouvoir considérable exercé par les gouvernements", devrait être célébré, tout en déclarant, mollement, qu'il n'a jamais pensé qu'Assange aurait dû "être accusé d'espionnage".
De tels changements de points de vue révèlent des egos blessés, de la lâcheté et des craintes à propos d'un système dont les murs ont été percés par un éditeur audacieux et assidu. Il est tout à fait possible d'utiliser le butin d'Assange et de ses fuites, même si l'on s'interroge sur la manière dont il a été obtenu. Publiez-les et écrivez-les dans l'espoir d'obtenir un prix de la presse. Mais n'admettez jamais qu'Assange est lui-même un journaliste récompensé par plus de prix de journalisme qu'il n'y a de dîners chauds. Dans cette réalité grotesque, nous sommes désormais confrontés à un précédent terrifiant : l'application mondiale d'une loi américaine sur l'espionnage mettant en danger les journalistes et les éditeurs qui oseraient aborder et publier des documents relatifs à la sécurité nationale de Washington.
📰 https://countercurrents.org/2024/06/assanges-release-exposing-the-craven-media-stable/
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23- ♟ Julian Assange est enfin libre, mais n'oublions surtout pas les crimes de guerre qu'il a mis au jour.
Contrairement à ce que prétend le gouvernement américain, les révélations de WikiLeaks ont en réalité sauvé des vies - et amené les États-Unis à rendre des comptes.
Par Marjorie Cohn, le 28 juin 2024, Truthout
Après 14 ans à se battre, dont plus de cinq ans en détention à Belmarsh, une prison de haute sécurité près de Londres, Julian Assange, l'éditeur de WikiLeaks, est enfin libre. Dans le cadre d'un accord de plaidoyer conclu avec le ministère américain de la justice, il a plaidé coupable d'un chef d'accusation de complot en vue d'obtenir des documents, des écrits et des notes liés à la défense nationale en vertu de la loi sur l'espionnage (Espionage Act). Il encourait 175 ans de prison pour les 18 chefs d'accusation retenus dans l'acte d'accusation déposé par l'administration Trump et poursuivi par l'administration Biden.
Le ministère de la justice a accepté la négociation de peine un peu plus d'un mois après que la Haute Cour d'Angleterre et du Pays de Galles a décidé qu'Assange serait autorisé à faire appel d'un ordre d'extradition. Cette dernière a estimé que le gouvernement américain n'avait pas fourni de garanties satisfaisantes quant à la possibilité pour Assange d'invoquer le Premier Amendement s'il était extradé et jugé aux États-Unis. Craignant désormais de perdre l'affaire, le ministère de la justice, s'est empressé de conclure un accord avec lui.
L'accord prévoit qu'avant de plaider coupable, Assange doit avoir fait tout ce qui est en son pouvoir pour restituer ou détruire "toute information non publiée en sa possession, sous sa garde ou sous son contrôle, ou sous celui de WikiLeaks ou de toute société affiliée à WikiLeaks".
Comme stipulé dans l'accord de plaidoyer, Ramona Manglona, juge en chef du tribunal de district des îles Mariannes du Nord, a condamné Assange à 62 mois avec prise en compte du temps déjà passé à la prison de Belmarsh. Les lignes directrices américaines en matière de condamnation prévoient une fourchette de 41 à 51 mois pour ce "délit". Assange a donc purgé une peine 11 à 21 mois de plus que ce que ce type d'affaire devrait normalement entraîner.
Il a été poursuivi pour avoir exposé via WikiLeaks les crimes de guerre perpétrés par les États-Unis en Irak, en Afghanistan et à Guantánamo Bay. En 2010, l'analyste du renseignement de l'armée américaine Chelsea Manning, bénéficiant d'une habilitation de sécurité "TOP SECRET", a fourni à WikiLeaks 700 000 documents et rapports, dont un grand nombre étaient classés "SECRET".
Ces documents comprenaient les Iraq War Logs (journaux de bord de la guerre d'Irak), 400 000 rapports de terrain faisant état de 15 000 décès de civils irakiens non signalés, ainsi que de viols, de tortures et de meurtres systématiques après que les forces américaines eurent transféré des détenus à un célèbre groupe de torture irakien.
Ils contenaient également les Afghan War Diaries (journaux de la guerre en Afghanistan), soit 90 000 rapports faisant état d'un plus grand nombre de victimes civiles des forces de la coalition que ce que l'armée américaine avait rapporté. Ils incluaient également les "dossiers de Guantánamo", 779 rapports secrets apportant la preuve que 150 innocents avaient été détenus à Guantánamo Bay pendant des années. Ces rapports expliquent comment les quelque 800 hommes et adolescents qui s'y trouvaient ont été torturés et molestés, en violation des conventions de Genève et de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Manning a également fourni à WikiLeaks la tristement célèbre vidéo Collateral Murder de 2007, sur laquelle on voit l'équipage d'un hélicoptère d'attaque Apache de l'armée américaine prendre pour cible et tuer 12 civils non armés à Bagdad, dont deux journalistes de l'agence Reuters, ainsi qu'un homme venu secourir les blessés. Deux enfants ont été blessés dans l'attaque. Un char de l'armée américaine a roulé sur l'un des corps, le sectionnant en deux. Lors d'une conversation après l'attaque, l'un des pilotes a déclaré : "Regardez ces bâtards morts", et l'autre a répondu : "Bien joué". La vidéo révèle des preuves de trois violations des conventions de Genève et du manuel de guerre de l'armée américaine.
WikiLeaks a offert aux médias du monde entier des informations sur les atrocités perpétrées sous l'égide des États-Unis. En informant le public de l'illégalité de la "guerre contre le terrorisme" menée par George W. Bush, des voix se sont élevées pour demander des comptes.
"Dix ans plus tard, les registres de guerre restent la seule source d'information concernant plusieurs milliers de morts violentes de civils en Irak entre 2004 et 2009", a écrit John Sloboda, cofondateur d'Iraq Body Count (IBC), dans son témoignage soumis lors de l'audience d'extradition d'Assange en octobre 2020.
L'IBC est une ONG indépendante qui a effectué le seul suivi complet des victimes signalées de manière crédible en Irak depuis l'invasion de Bush en 2003.
"Les câbles de WikiLeaks ont contribué à ce que des tribunaux concluent que les frappes de drones américains constituent des infractions pénales et que des poursuites pénales devraient être engagées contre les hauts responsables américains impliqués dans ces frappes", a écrit Clive Stafford Smith, cofondateur de Reprieve et avocat de sept détenus de Guantánamo, dans le témoignage qu'il a présenté.
"Ils ont saisi un héros [Assange] et l'ont transformé en criminel", a déclaré Vahid Razavi, fondateur de Ethics in Tech, à Common Dreams. "Pendant ce temps, tous les criminels de guerre dont les dossiers ont été révélés par WikiLeaks via Chelsea Manning sont libres et n'ont jamais été sanctionnés ni même n'ont eu à comparaître devant un tribunal".
Les Iraq War Logs (journaux de bord de la guerre d'Irak)
Les registres de la guerre en Irak contiennent de nombreuses preuves des crimes de guerre commis par les États-Unis. Plusieurs rapports faisant état de mauvais traitements infligés à des détenus ont été étayés par des preuves médicales. Les prisonniers avaient les yeux bandés, étaient enchaînés et suspendus par les chevilles ou les poignets. Ils ont été soumis à des coups de poing, des coups de fouet, des coups de pied, des électrocutions, des perceuses électriques, des doigts coupés ou des brûlures à l'acide. Six rapports font état de la mort manifeste de détenus.
Des rapports secrets de l'armée américaine sur le terrain ont révélé que les autorités américaines ont refusé d'enquêter sur des centaines de cas de meurtres, de tortures, de viols et d'abus perpétrés par des soldats et des policiers irakiens. La coalition avait pour politique officielle d'ignorer ces allégations, les signalant par la mention "ne nécessite pas d'enquête".
Bien que les responsables américains et britanniques aient affirmé qu'il n'existait aucun registre officiel des victimes civiles, les registres font état de 66 081 décès de non-combattants sur les 109 000 décès survenus entre 2004 et 2009.
Le journal décrit une vidéo montrant des officiers de l'armée irakienne en train d'exécuter un prisonnier à Tal Afar. Il indique :
"Les images montrent environ 12 soldats de l'armée irakienne. Dix soldats discutaient entre eux tandis que deux autres tenaient le détenu. Le prisonnier avait les mains liées... Les images montrent les soldats de l'armée irakienne l'emmenant en pleine rue, le poussant au sol, lui assénant des coups de poing et lui tirant dessus".
Afghan War Diaries (Carnets de guerre afghan)
Les carnets de guerre afghans ont également révélé des preuves de crimes de guerre commis par les États-Unis entre 2004 et 2009. Les rapports décrivent comment une unité secrète "noire" composée de forces d'opérations spéciales a traqué des chefs talibans accusés pour les "tuer ou les capturer" sans procès. Les unités commando secrètes - des groupes classifiés d'agents spéciaux de la marine et de l'armée - utilisaient une "liste de capture et d'assassinat", ce qui a entraîné le meurtre de civils, provoquant la colère du peuple afghan.
En outre, la CIA a développé les opérations paramilitaires en Afghanistan, en menant des embuscades, en ordonnant des frappes aériennes et en effectuant des raids nocturnes. La CIA a financé l'agence d'espionnage afghane, qu'elle a gérée comme une succursale.
Les rapports font état d'une réunion tenue en 2007 entre des responsables de district afghans et des officiers des affaires civiles américains. Des responsables afghans auraient déclaré : "Le peuple afghan ne cesse de perdre sa confiance dans le gouvernement en raison du grand nombre de fonctionnaires corrompus. L'opinion générale des Afghans est que le gouvernement actuel est pire que les Talibans".
Les registres font état de nombreuses victimes civiles dues aux frappes aériennes, aux tirs perpétrés sur les routes, dans les villages et aux postes de contrôle ; de nombreuses personnes ont été prises entre deux feux. Les victimes n'étaient nullement des kamikazes ou des insurgés. Plusieurs décès n'ont pas été rendus publics.
Les Guantánamo Files (dossiers de Guantánamo)
Selon les Guantánamo Files, seules 220 des 780 personnes détenues dans le camp de prisonniers depuis 2002 ont été classées comme "dangereux terroristes internationaux". Parmi les autres détenus, 380 étaient considérés comme des fantassins de bas niveau et 150 comme d'innocents civils ou fermiers afghans ou pakistanais.
De nombreux détenus ont été incarcérés à Guantánamo pendant des années sur la base de preuves dérisoires ou d'aveux obtenus sous la torture et les mauvais traitements. Parmi les détenus, figuraient par exemple un villageois afghan de 89 ans atteint de démence sénile et un garçon de 14 ans, victime innocente d'un enlèvement.
Les dossiers témoignent d'un système visant davantage à obtenir des renseignements qu'à détenir de dangereux terroristes. Un homme a été transféré à Guantánamo parce qu'il était un mollah ayant une connaissance particulière des talibans. Un chauffeur de taxi a été envoyé au camp de prisonniers parce qu'il avait une connaissance générale de certaines régions d'Afghanistan. Un journaliste d'Al Jazeera a été détenu à Guantánamo pendant six ans pour être interrogé sur la chaîne d'information.
Près de 100 détenus ont été classés comme souffrant de troubles dépressifs ou psychotiques. Les dossiers révèlent que plusieurs d'entre eux ont entamé des grèves de la faim pour protester contre leur détention indéfinie ou ont tenté de se suicider.
Personne n'a été blessé par les révélations de WikiLeaks
Bien que le gouvernement américain ait affirmé que la publication d'informations par WikiLeaks avait causé "un grand préjudice", il a "admis qu'il n'y avait pas une seule personne, où qu'elle se trouve, qui ait été lésée par ces publications", a déclaré Barry Pollack, l'avocat d'Assange, lors d'une conférence de presse qui s'est tenue le 26 juin en Australie.
L'accord de plaidoyer stipule que
"certains de ces documents classifiés bruts ont été divulgués publiquement sans que soient supprimées ou expurgées toutes les informations personnelles identifiables relatives à certaines personnes qui ont partagé confidentiellement avec le gouvernement américain des informations sensibles sur leur propre gouvernement et sur les activités de leur pays".
Le gouvernement américain affirme qu'Assange a mis en danger des informateurs américains nommés dans les documents publiés. Mais John Goetz, journaliste d'investigation ayant travaillé pour le journal allemand Der Spiegel, a déclaré lors de l'audience d'extradition de 2020 qu'Assange s'était démené pour s'assurer que les noms des informateurs en Irak et en Afghanistan soient expurgés. Goetz a déclaré que WikiLeaks avait mis en place un "processus de rédaction extrêmement rigoureux" et qu'Assange avait rappelé à plusieurs reprises à ses partenaires médiatiques d'utiliser le cryptage. En effet, Goetz a expliqué qu'Assange avait tenté d'empêcher Der Freitag de publier des documents susceptibles d'entraîner la divulgation d'informations non expurgées.
Qui plus est, les révélations de WikiLeaks ont en fait sauvé des vies. Après que WikiLeaks a publié des preuves de l'existence de centres de torture irakiens créés par les États-Unis, le gouvernement irakien a refusé la demande du président de l'époque, Barack Obama, d'accorder l'immunité aux soldats américains qui avaient commis des infractions pénales et civiles dans ce pays. Barack Obama a donc dû retirer les troupes américaines d'Irak.
Le président Obama s'est attribué le mérite d'avoir mis fin à l'engagement militaire des États-Unis en Irak. Mais il a essayé pendant des mois de la prolonger au-delà de la date limite du 31 décembre 2011 que son prédécesseur avait négociée avec le gouvernement irakien. Les négociations ont échoué lorsque l'Irak a refusé d'accorder l'immunité pénale et civile aux troupes américaines.
Ce que signifie le plaidoyer d'Assange pour la liberté d'expression
Avant d'accepter le plaidoyer de culpabilité d'Assange, la juge Manglona lui a demandé ce qu'il avait fait pour violer la loi.
"En tant que journaliste, j'ai encouragé ma source à fournir des informations qui étaient censées être classifiées.
Je pensais que le premier amendement protégeait cette activité, mais je reconnais qu'il s'agit d'une violation de la loi sur l'espionnage", a déclaré Assange.
Il a ensuite ajouté :
"Le premier amendement était en contradiction avec la loi sur l'espionnage, mais j'admets qu'il serait difficile de gagner un tel procès compte tenu de toutes ces circonstances".
Même si Assange est libéré, son plaidoyer soulève des inquiétudes pour les défenseurs du premier amendement aux États-Unis.
"Pour la première fois en plus de 100 ans d'histoire de la loi sur l'espionnage, les États-Unis ont obtenu une condamnation en vertu de cette loi pour des actes journalistiques basiques", a déclaré David Greene, responsable des libertés civiles à l'Electronic Frontier Foundation, au New York Times.
"Ces accusations n'auraient jamais dû être portées".
Charlie Savage, qui a couvert l'affaire Assange pendant des années, a averti que le plaidoyer de ce dernier créait un "nouveau précédent" qui "enverra un message lourd de menaces aux journalistes spécialisés dans la sécurité nationale, qui hésiteront sans doute à faire leur travail de manière plus dynamique à cause d'un risque accru de poursuites". Toutefois, Savage a fait remarquer que le fait qu'Assange ait plaidé coupable et n'ait pas contesté la constitutionnalité de la loi sur l'espionnage éliminait le risque que la Cour suprême des États-Unis sanctionne en fin de compte une interprétation étroite des libertés de la presse énoncées dans le premier amendement.
"WikiLeaks a publié des articles révolutionnaires sur la corruption des gouvernements et les violations des droits de l'homme, obligeant les puissants à rendre compte de leurs actes", a déclaré WikiLeaks dans un communiqué annonçant l'accord sur le plaidoyer.
"En tant que rédacteur en chef, Julian a payé très lourdement pour ces principes et pour le droit du peuple à être informé. Alors qu'il rentre en Australie, nous remercions tous ceux qui nous ont soutenus, se sont battus pour nous et sont restés totalement engagés dans le combat pour sa liberté".
Il ne fait aucun doute que sans l'activisme ininterrompu de personnes du monde entier et le travail de sa superbe équipe d'avocats, Julian Assange croupirait encore derrière les barreaux pour avoir osé exposer des preuves de crimes de guerre perpétrés par les États-Unis.
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24- ♟ La liberté de Julian Assange est aussi la nôtre
Par Robert Koehler, le 30 juin 2024, Counter Currents
Après plus de douze ans, dont plus de cinq en isolement à la prison de Belmarsh à Londres, Julian Assange est enfin libre. Que Dieu bénisse l'Amérique ! Il n'a pas été extradé vers les États-Unis pour y être jugé, où il était passible d'une peine de 175 ans de prison pour avoir enfreint la loi dite Espionage Act.
Il a préféré conclure un accord avec le gouvernement américain, plaidant coupable d'un chef d'accusation pour violation de cette loi - vous savez, menacer la liberté de l'Amérique - pour lequel il a payé par le temps déjà passé en prison. Il a été officiellement déclaré libre par un tribunal fédéral américain à Saipan, capitale des îles Mariannes du Nord (un territoire américain), après quoi il s'est envolé pour rejoindre sa femme et ses deux enfants en Australie.
Mon soulagement émotionnel de le voir échapper aux serres de ce gouvernement l'emporte de loin sur mes sentiments concernant les implications plus larges du plaidoyer de culpabilité, qui a suscité à juste titre inquiétudes et controverses. Le gouvernement a obtenu son petit triomphe : une reconnaissance "légale" de son droit à garder des secrets abominables sur ce qu'il fait et à qualifier et juger d'"espionnage" toute divulgation non autorisée de ce genre de choses.
Selon Jameel Jaffer, directeur exécutif du Knight First Amendment Institute de l'université de Columbia, cité par le New York Times,
"il plaide essentiellement coupable pour ce que les journalistes font en permanence et doivent faire".
Pour Matt Taibbi,
cette décision "restera une épée de Damoclès au-dessus de la tête de quiconque s'intéresse et traite des questions de sécurité nationale". Les gouvernements n'ont pas le droit de garder secrets les crimes de guerre, mais le séjour de 62 mois d'Assange en prison commence à ressembler à un modèle pour les poursuites occidentales contre de telles fuites".
Bien que ces préoccupations soient sans aucun doute inquiétantes, je ne pense pas que le système juridique soit un mécanisme permettant d'y répondre sérieusement. Assange, le fondateur de WikiLeaks, était loin de pouvoir jouer à jeu égal dans cette controverse infernale. Il était dans le collimateur juridique du pays le plus puissant de la planète, qu'il avait eu le culot de défier en publiant une énorme quantité de données "classifiées" - autrement dit cachées - qui lui avaient été confiées par des lanceurs d'alerte employés par le gouvernement.
C'est ce qu'on appelle du journalisme, même si une partie du procès intenté par les États-Unis contre Assange consistait à dire qu'il n'était pas un vrai journaliste. Les journalistes d'entreprise savent comment se comporter, je suppose. Ils sont bien plus prompts à "respecter" les limites à ne pas franchir fixées par le gouvernement.
Comme je l'ai écrit en 2010, au début de la controverse sur WikiLeaks :
"À une époque de guerre sans fin, où la démocratie est une vaste comédie orchestrée et où l'engagement des citoyens est moins bien accueilli dans les couloirs du pouvoir qu'il ne l'a jamais été, où les freins et contrepoids traditionnels du gouvernement sont en collusion incontestée les uns avec les autres, où les médias agissent non pas comme des chiens de garde de la démocratie mais comme des chiens de garde des intérêts et des clichés du statu quo, nous avons WikiLeaks, qui perturbe le jeu de la sécurité nationale, qui fait tinter sa cloche, qui change les règles."
Tant que la "sécurité nationale" inclura la conduite de la guerre, le journalisme honnête - c'est-à-dire le journalisme authentique - sera un fléau pour les responsables, parce qu'il propose de véritables reportages, et pas seulement de simples communiqués de presse et du baratin de relations publiques. Dans le monde réel, la guerre est synonyme de meurtre. La guerre n'est pas un jeu abstrait de stratégie et de tactique. La guerre elle-même est un "crime de guerre", surtout lorsqu'elle est menée non pas pour obtenir la liberté d'un oppresseur, mais pour maintenir le contrôle sur l'opprimé.
Les publications de WikiLeaks étaient autant d'actes d'espionnage scandaleux - du point de vue d'un gouvernement en guerre - parce que les données étaient brutes, réelles et non aseptisées. Elles comprenaient 90 000 documents classifiés sur la guerre américaine en Afghanistan et près de 400 000 dossiers secrets sur la guerre en Irak, qui allaient au-delà de la propagande officielle et révélaient, entre autres, que les décès de civils dans les deux guerres étaient, selon Al-Jazeera, "bien plus élevés que les chiffres annoncés".
En outre, WikiLeaks a publié des données qui, comme le note Al-Jazeera,
"ont exposé comment les Conventions de Genève étaient régulièrement violées dans la prison de Guantanamo Bay, à Cuba".
Les documents, qui datent de 2002 à 2008, témoignent des mauvais traitements infligés à 800 prisonniers, dont certains avaient à peine 14 ans.
Et puis, bien sûr, il y a eu la fameuse vidéo Collateral Murder, sur laquelle on voit un hélicoptère américain tirer sur des gens dans une rue de Bagdad, tuant sept d'entre eux, dont un journaliste de Reuters, et en blessant plusieurs autres, dont deux enfants, qui étaient assis dans une camionnette venue porter secours aux blessés dans la rue. Tout cela s'est passé alors que les membres de l'équipage de l'hélicoptère se moquaient des victimes. C'était les États-Unis aux yeux de tous, menant leur "guerre contre le terrorisme" en déchaînant la terreur à un niveau que seule une superpuissance est capable de commettre.
Montrer des bribes de vérité sur la guerre contre le terrorisme est le crime de Julian Assange : son acte d'espionnage. Et je comprends le point de vue du gouvernement. Assange a mis la guerre elle-même au premier plan de la conscience humaine collective - comme une réalité hideuse, et non comme une abstraction politique. Ce qu'il a fait ressemble étrangement à ce qu'a fait la mère d'Emmett Till. Elle a exposé l'horreur crue du racisme sudiste en insistant pour que son fils, un garçon de 14 ans battu et noyé par des racistes du Mississippi pour avoir prétendument parlé à une femme blanche, ait des funérailles publiques avec un cercueil ouvert, afin que le monde entier puisse voir ce qui lui avait été fait. C'était en 1955. Peu de temps après, le mouvement des droits civiques était en marche.
L'évolution humaine n'est pas une question juridique, tranchée par les tribunaux. Elle implique que l'humanité affronte et transcende son propre côté obscur, ce qui peut s'avérer un processus désordonné et chaotique. Telle est la nature de la vérité.
Robert Koehler est un journaliste primé, basé à Chicago, et un écrivain syndiqué au niveau national. Il a reçu de nombreux prix d'écriture et de journalisme décernés par des organisations telles que la National Newspaper Association, la Suburban Newspapers of America et le Chicago Headline Club. Il contribue régulièrement à des sites web de premier plan tels que Common Dreams et le Huffington Post. Fuyant les étiquettes politiques, M. Koehler se considère comme un "journaliste de la paix". Il a été rédacteur chez Tribune Media Services et journaliste, chroniqueur et chef de rédaction chez Lerner Newspapers, une chaîne de journaux de quartier et de banlieue dans la région de Chicago. M. Koehler a lancé sa rubrique en 1999. Né à Détroit et élevé dans la banlieue de Dearborn, Koehler vit à Chicago depuis 1976. Il a obtenu une maîtrise en écriture créative au Columbia College et a enseigné l'écriture au collège et au lycée. Koehler est veuf et père célibataire. Il explore ces deux situations en profondeur dans ses écrits. Son livre, "Courage Grows Strong at the Wound" (2016). Contactez-le ou visitez son site web à commonwonders.com.
📰 https://countercurrents.org/2024/06/julian-assanges-freedom-also-belongs-to-us/
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25- ♟ Assange-Mélenchon : 14 ans d’un soutien indéfectible pour sa libération
Par L’Insoumission, le 26 juin 2024
Il était une fois, Julian Assange, l’un des plus grands lanceurs d’alerte du siècle (ndr : bon après 14 ans de soutien il serait temps de corriger cette grossière et cruciale erreur !). Fondateur de WikiLeaks, il fait trembler les États-Unis, en 2010, en révélant des centaines de milliers de documents sur les horreurs des guerres étasuniennes en Irak et en Afghanistan. Il prouve également que trois présidents français, Chirac, Sarkozy et Hollande, ont été écoutés par les services secrets américains. Ainsi commence une très (trop) longue bataille judiciaire, qui oblige Julian Assange à se réfugier dans l’ambassade de l’Équateur à Londres pendant 7 ans à partir de 2012.
Trahi par le nouveau président équatorien en 2019, il croupit ensuite dans une prison anglaise, tout en ayant failli être extradé aux États-Unis. Après 1901 jours passés dans une prison de haute sécurité, un accord a été trouvé ce lundi avec la justice américaine. Le lanceur d’alerte va enfin pouvoir retrouver sa femme et ses enfants, en Australie, libre. Dans cette longue bataille, Jean-Luc Mélenchon s’est distingué par son soutien indéfectible à Julian Assange, lui rendant visite et lui promettant l’asile politique s’il arrivait au pouvoir. Notre article.
Julian Assange, 14 années d’acharnement judiciaire contre l’un des plus grands lanceurs d’alerte
Il était une fois, Julian Assange, l’un des plus grands lanceurs d’alerte du siècle. Fondateur du média WikiLeaks, il révèle en 2010 des centaines de milliers de documents confidentiels de l’armée américaine. Plus de 700 000 documents sur les activités militaires et diplomatiques des USA, en particulier en Irak et en Afghanistan.
Un exemple ? Cette vidéo virale, montrant deux journalistes de l’agence Reuters abattus par les tirs d’un hélicoptère de combat américain en Irak, en 2007. Le retentissement est mondial. Julian Assange fait trembler l’Oncle Sam. Il révèle également comment les États-Unis ont espionné trois présidents français : Chirac, Sarkozy et Hollande. Ces révélations déclenchent la fureur du Pentagone. Dès lors, les autorités américaines lancent une enquête pour "espionnage" contre WikiLeaks et recherchent activement Assange.
Le 19 juin 2012 donc, Julian Assange se réfugie dans l’ambassade d’Équateur à Londres, qui lui accorde l’asile. Il y croupit 7 ans, dans une pièce de neuf mètres carrés. À partir du 11 avril 2019, jour de son arrestation à l’ambassade d’Équateur, il est placé en détention provisoire dans la prison de haute sécurité de Belmarsh. Le 10 décembre 2021, la justice britannique annule en appel le refus d’extradition de Julian Assange aux États-Unis, qui réclamaient 175 ans de prison contre lui, pour 18 chefs d’accusation. La justice britannique se prononce finalement en faveur de l’extradition en juin 2022, ce qui nécessite un arrêté d’extradition signé par la secrétaire d’État à l’intérieur pour devenir effectif. Cela n’arrivera pas.
Aujourd’hui, Julian Assange est enfin libre. Un accord a été trouvé avec la justice américaine. Julian Assange a plaidé coupable lors d’une audience dans la nuit du 25 au 26 juin devant un tribunal des îles Mariannes. Il a été condamné à une peine de 62 mois de prison. Puisqu’ils ont déjà été purgés, il peut rentrer en Australie, libre, mais profondément détruit par ces 14 années de harcèlement judiciaire.
Mélenchon aux côtés d’Assange depuis le début de son harcèlement judiciaire purgé
Jean-Luc Mélenchon n’a jamais caché sa sympathie et son admiration pour Julian Assange. Le 19 juin 2012 donc, Julian Assange se réfugie dans l’ambassade d’Équateur à Londres, qui lui accorde l’asile. Le 24 août 2012, le leader du Parti de Gauche (PG) publie sur Twitter : "Je viens d’avoir Julian Assange au téléphone. Une réunion des États américains se tient en ce moment pour décider de son asile politique".
Plus tard dans la journée, le fondateur de WikiLeaks intervient par téléphone lors d’un meeting de de Jean-Luc Mélenchon lors des journées d’été du PG. "La France a été un pays important pour WikiLeaks", a déclaré Julian Assange au cours d’une intervention en anglais. "Une partie de la presse française a été à nos côtés", a-t-il ajouté.
Les deux hommes se rencontrent en vrai le 6 décembre 2012. Jean-Luc Mélenchon se rend à l’ambassade d’Équateur à Londres. "C’est à l’Équateur, pays d’Amérique latine, qu’est revenu ce rôle que d’autres pays, peut-être le mien, la France, aurait dû avoir, en défense de M. Julian Assange. C’était mon devoir de manifester de la sympathie pour ce courageux pays. […] La situation est terrible pour lui. Imaginez-vous, cela fait 6 mois qu’il est là, cela fait 6 mois qu’il ne voit pas la lumière du jour ! Il est en quelque sorte reclus et prisonnier", déclare-t-il à l’AFP.
En 2016, alors candidat à l’élection présidentielle, Jean-Luc Mélenchon assure que s’il est élu, il accordera la nationalité française à Julian Assange et Edward Snowden, autre lanceur d’alerte, ayant révélé au monde la surveillance de masse menée par la CIA et la NSA américaines. Ces dernières ayant mis sur écoute notamment trois présidents français. "Ils ont rendu un immense service à la démocratie et à la liberté dans le monde en révélant de quelle manière les États-Unis espionnaient absolument tout le monde. Nous avons une dette à l’égard de messieurs Assange et Snowden", déclare le leader insoumis à Numerama le 30 novembre 2016
Les années passent et le leader insoumis n’en oublie pas moins le sort de Julian Assange. Le 11 avril 2019, quand l’actuel président équatorien décide de le livrer à la police britannique, Jean-Luc Mélenchon demande solennellement au Gouvernement français de lui accorder l’asile politique.
En 2021, le groupe parlementaire insoumis reçoit Stella Moris et John Shipton, la compagne et le père de Julian Assange. "Il faut mettre fin à son martyre et le rendre à sa famille. 12 ans de prison sans procès, ça suffit ! La France doit lui donner le droit d’asile et lui offrir la nationalité", déclare le leader insoumis à cette occasion. Durant la campagne présidentielle de 2022, Jean-Luc Mélenchon rappelle à plusieurs reprises sa volonté de lui accorder l’asile politique, et de le décorer.
Ce matin du 25 juin, à la surprise générale, la libération d’Assange est annoncée. Un accord est passé avec la justice américaine. "Enfin Assange est libre ! Enfin ! Enfin ! Tant d’années de vie brisées ! Enfin, Assange retourne à la lumière du jour", déclare Jean-Luc Mélenchon sur Twitter. Le leader insoumis d’ajouter : "Sa photo dans mon bureau m’a tant de fois aidé à tenir bon. Assange est libre. Nous pouvons tous l’être".
Au-delà du soutien indéfectible de Jean-Luc Mélenchon et des insoumis, soulignons la force de la mobilisation à travers le monde en soutien à Julian Assange. Pétitions, collectifs, manifestations… Aujourd’hui, son calvaire s’achève. Il va pouvoir retrouver sa femme, Stella, et leurs enfants. La France se serait honorée à lui accorder à la fois l’asile et la nationalité. De lâches dirigeants politiques en ont décidé autrement.
📰 https://linsoumission.fr/2024/06/26/assange-melenchon-soutien-2/
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26- ♟ Le pouvoir vénézulien décerne un prix de journalisme à Julian Assange
Par La Croix, le 28 juin 2024
Le gouvernement vénézuélien, qui remet chaque année un prix aux médias et aux journalistes qui lui sont favorables, a décerné jeudi un "prix spécial" au fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, libre depuis le 26 juin après une bataille judiciaire de 14 ans.
"Nous décernons un prix spécial à Julian Assange, à qui nous dédions cette édition du prix national de journalisme Simon Bolivar", ont déclaré les organisateurs dans un communiqué sur X.
"Nous lui rendons hommage en lui décernant un prix spécial (...) pour avoir défendu par ses actions le journalisme courageux, sans peur, et la vérité comme l’essence de la défense de la liberté d’expression et du droit du peuple à être informé", ajoute le texte
Les organisations de défense de la liberté d’expression, telles qu’Espacio Publico, dénoncent en revanche une "escalade" des attaques contre les médias au Venezuela ces 20 dernières années sous les présidences de Hugo Chavez (1999-2013) puis Nicolas Maduro, qui brigue un troisième mandat lors de la présidentielle du 28 juillet. Selon elles, quelque 300 journaux, stations de radio et chaînes de télévision ont été fermés pendant ces deux décennies.
Julian Assange avait été arrêté par la police britannique en avril 2019, après sept ans passés dans l’ambassade d’Équateur à Londres pour éviter son extradition vers la Suède dans une enquête pour viol, classée sans suite la même année.
La justice américaine réclamait elle son extradition pour avoir rendu publics à partir de 2010 plus de 700.000 documents confidentiels sur les activités militaires et diplomatiques américaines, en particulier en Irak et en Afghanistan.
Après cinq ans d’incarcération au Royaume-Uni, il a été libéré à la suite d’un accord de plaider coupable avec la justice américaine, et a regagné son Australie natale après avoir été condamné à une peine couvrant sa détention provisoire.
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27- Le Globe and Mail publie un article diffamatoire truffé d'erreurs sur Julian Assange.
Le "journal de référence" du Canada a publié un article diffamatoire sur Julian Assange, truffé d'erreurs factuelles et de théories de conspiration "Russia gate" démystifiées ici.
Par The Dissident, le 28 juin 2024
Le journal canadien The Globe and Mail a récemment publié un énorme article de diffamation sur Julian Assange, écrit par le journaliste Doug Saunders, et intitulé "Julian Assange n'a jamais été ni un journaliste ni un lanceur d'alerte. Mais ils ont raison de le libérer". Ce torchon n'est pas seulement une attaque brutale contre un journaliste qui a exposé des crimes de guerre et la corruption dans le monde entier, mais il est également truffé d'erreurs factuelles majeures et de manquements à la déontologie journalistique. Voici une liste des fausses affirmations, des faits erronés et des théories du complot démystifiées qui ont été répétés dans l'article.
Première fausse affirmation : "Julian Assange se qualifie lui-même de lanceur d'alerte"
Saunders débute son article en affirmant :
"Julian Assange est un imposteur s'étant autoproclamé journaliste et lanceur d'alerte tout en entravant et en incommodant grandement la cause du journalisme et en rendant la vie beaucoup plus difficile aux véritables lanceurs d'alerte".
La première erreur est d'affirmer qu'Assange se qualifie lui-même de lanceur d'alerte. Assange a clairement indiqué qu'il était un éditeur et un journaliste, et non un lanceur d'alerte. L'article de Reporters sans frontières intitulé "RSF dissipe les idées fausses dans l'affaire Julian Assange" répond à l'affirmation selon laquelle Assange est un lanceur d'alerte en ces termes :
"Assange a joué un rôle différent de celui d'un lanceur d'alerte ; il n'a pas divulgué lui-même des informations classifiées, il a publié des informations qui lui ont été divulguées".
Deuxième fausse affirmation : "La vidéo du meurtre collatéral diffusée par WikiLeaks a été éditée de manière trompeuse".
Dans son article, Saunders écrit :
"WikiLeaks a attiré l'attention du grand public pour la première fois au printemps 2010, lorsqu'il a publié ce qu'il a affirmé être une fuite exclusive d'une vidéo de l'armée américaine d'un incident survenu en 2007 au cours duquel des hélicoptères ont ouvert le feu sur un certain nombre de personnes, y compris des civils, à Bagdad. La vidéo, éditée de manière à en supprimer une grande partie du contexte, a été publiée sur un site de WikiLeaks sous le nom de Collateral Murder et présentée comme une exclusivité mondiale".
Une simple recherche sur Google de la vidéo de Collateral Murder sur WikiLeaks permet de démentir cette affirmation, la page affichant la version courte de dix-sept minutes de la vidéo de Collateral Murder avec la vidéo complète non éditée de trente-neuf minutes publiée juste en dessous.
Version complète
Les deux vidéos sont disponibles sur WikiLeaks depuis la publication de l'article, comme le corrobore un article du New York Times de 2010 :
"WikiLeaks a rendu publique une vidéo de 38 minutes de l'attaque de l'hélicoptère ainsi qu'une version éditée de 17 minutes qu'il a appelée Collateral Murder".
Troisième fausse affirmation : "Wikileaks corroboré avec la campagne de Trump concernant les fuites du DNC en 2016".
Dans l'article, Saunders écrit :
"L'enquête spéciale de Robert Mueller sur l'ingérence russe a révélé que le GRU avait fourni les courriels piratés à WikiLeaks, qui a ensuite communiqué à la campagne de Donald Trump et l'a mise au courant des piratages, souvent avant leur publication."
S'il est vrai que le rapport Mueller accuse Assange d'avoir obtenu les courriels du DNC auprès de la Russie, des rapports ultérieurs ont soulevé de sérieuses questions sur ce récit. Le journaliste Aaron Mate a signalé les lacunes dans la chronologie des accusations du rapport Muller dans les enquêtes de Real Clear. Dans son article, Mate souligne que le rapport Mueller accuse Wikileaks d'avoir reçu les courriels du DNC des comptes "DC leaks" et "Guccifer 2.0", qui seraient gérés par le GRU. Le problème avec ce récit est que le rapport Muller affirme que le premier contact d'Assange avec ces comptes a eu lieu le 14 juin, alors qu'Assange avait déjà annoncé qu'il avait des informations sur le DNC le 12 juin. Comme le souligne Mate dans l'article :
"Si le "premier contact" d'Assange avec DC Leaks a eu lieu le 14 juin, et avec Guccifer 2.0 le 22 juin, alors de quoi Assange parlait-il le 12 juin ? Il est possible qu'Assange ait entendu parler d'une autre source russe supposée avant cette date, mais si c'est le cas, Mueller ne le sait pas. Au lieu de cela, le rapport propose le scénario peu plausible selon lequel le premier contact a eu lieu après l'annonce d'Assange."
En outre, un témoignage de 2017 du PDG de Crowdstrike, Shawn Henry, a remis en question l'affirmation selon laquelle la Russie aurait même piraté le DNC. Comme l'a rapporté Aaron Mate dans un autre article de Real Clear Investigations, Shawn Henry, le PDG de Crowdstrike, l'entreprise de cybersécurité qui a été le premier à accuser la Russie d'avoir volé les courriels du DNC, a admis qu'il n'y avait aucune preuve concrète que cela s'était produit.
L'affirmation de Saunders selon laquelle WikiLeaks "a communiqué avec la campagne de Donald Trump et l'a mise au courant des piratages, souvent avant leur publication" fait probablement référence à la théorie selon laquelle Roger Stone communiquait avec WikiLeaks ou disposait d'un canal de communication avec WikiLeaks pendant l'élection de 2016. Cette affirmation est manifestement fausse. La seule communication prouvée entre Roger Stone et WikiLeaks pendant l'élection de 2016 consiste en ce que WikiLeaks a dit à Stone de "cesser de faire de fausses déclarations d'association".
Si Stone a tenté d'établir un lien avec WikiLeaks par l'intermédiaire de l'humoriste libéral Randy Credico et du conspirationniste conservateur Jerome Corsi, il n'existe aucune preuve que l'un ou l'autre ait eu des contacts avec WikiLeaks ou Assange au cours de l'élection de 2016. Dans le cas de Credico, son seul contact avec Assange a été une interview publique de ce dernier lors de son émission de radio le 25 octobre 2016. Ils ne se sont pas reparlés avant le 11 avril 2017. Pour ce qui est de Jerome Corsi, l'article du Washington Post intitulé "Inside the special counsel's long hunt to uncover whether the Trump campaign conspired with Russia" (Au cœur de la longue traque de l'avocat spécial pour découvrir si la campagne de Trump a conspiré avec la Russie) indique qu'en dépit d'une enquête approfondie, l'enquête Muller n'a pu mettre en évidence aucun contact entre Corsi et WikiLeaks ou Assange.
Quatrième fausse affirmation : "Les courriels du DNC ne contenaient rien de compromettant".
Dans l'article, Saunders écrit :
"Les courriels ne contenaient rien de compromettant ni même de particulièrement embarrassant pour les démocrates...".
Cette affirmation est tout simplement déconcertante. L'article de la BBC intitulé "18 revelations from Wikileaks' hacked Clinton emails" (18 révélations tirées des courriels piratés de Clinton) énumère de nombreux scandales mis au jour par les courriels, notamment le fait qu'Hillary Clinton ait déclaré qu'elle interviendrait secrètement en Syrie, qu'elle avait des "positions privées et publiques", qu'elle avait reçu à l'avance une question pour un débat sur CNN et qu'elle avait exprimé son soutien à l'ouverture des échanges commerciaux et à l'ouverture des frontières. L'article de The Wrap intitulé "7 Most Shocking Revelations in Hacked DNC Emails Released by WikiLeaks" (Les 7 révélations les plus choquantes dans les courriels piratés du DNC publiés par WikiLeaks) énumère quelques-uns des grands scandales révélés par les courriels du DNC. Les courriels révèlent que le DNC complotait secrètement contre Bernie Sanders tout en prétendant publiquement être neutre. Il s'agit notamment d'articles présentant la campagne Sanders comme un "bordel sans nom", de tentatives d'utiliser les croyances religieuses de Sanders pour détourner les électeurs de ce dernier et de réduire le nombre de bureaux de vote dans les régions favorables à Sanders. Ces scandales ont eu un tel impact qu'ils ont poussé Debbie Wasserman Schultz à démissionner de son poste de présidente de la DNC et CNN à couper les ponts avec Donna Brazile.
Cinquième fausse affirmation : "Assange a déclaré que sa source pour les courriels de la DNC était probablement la Russie".
C'est de loin la pire partie de l'article et l'un des pires cas de faute professionnelle journalistique qu'il m'ait été donné de voir. Dans l'article, Saunders affirme :
"Bien qu'il l'ait nié par la suite, Mr. Assange a dit à l'époque qu'il pensait que les fuites lui venaient "probablement" de Moscou".
Sur la version en ligne du Globe and Mail, ce passage renvoie à un article de The Hill intitulé "Assange : Certaines fuites pourraient avoir été russes". L'article dit :
"Lors de l'émission de radio de Sean Hannity, le fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, a déclaré que les documents démocrates piratés envoyés aux journalistes de Gawker et de The Hill pourraient provenir de Russie. Mais il a ajouté qu'il était certain que les courriels qu'il avait reçus ne provenaient pas de la même source."
Cette déclaration est extrêmement inquiétante, car Saunders affirme qu'Assange a admis que les fuites qu'il recevait provenaient de la Russie, en renvoyant à un article qui cite Assange rejetant totalement l'idée que sa source était liée à la Russie. Si, jusque là, l'article était truffé d'erreurs factuelles, celle-ci est de loin la plus flagrante et la plus grave. En effet, Saunders attribue une fausse citation à Assange tout en renvoyant à un article qui le cite en train de dire exactement le contraire de ce que Saunders prétend qu'Assange a dit. Les seules explications plausibles à cette erreur monumentale et gravissime sont que le Globe and Mail ne vérifie pas les faits avant de publier ses articles ou qu'il n'a pas d'objection à publier des articles truffés de mensonges flagrants et de fausses déclarations.
Sixième fausse affirmation : "Roger Stone est allé en prison pour ses liens avec WikiLeaks".
Dans l'article, Saunders affirme :
"En fin de compte, Roger Stone, l'agent de Mr. Trump, est allé en prison pour avoir utilisé WikiLeaks afin d'interférer avec l'élection...".
Il s'agit là d'une autre affirmation réfutable par une simple recherche sur Google. Selon le communiqué de presse du bureau du procureur des États-Unis :
"Stone a été reconnu coupable d'obstruction à une enquête du Congrès, de cinq chefs d'accusation de fausses déclarations au Congrès et de subornation de témoin."
La condamnation ne mentionne nulle part un lien entre Stone et WikiLeaks pendant l'élection de 2016. Cette affirmation est également dépourvue de preuves, comme indiqué ci-dessus.
Le Globe and Mail a écrit de nombreux articles sur la désinformation et les fausses informations. S'il se préoccupe vraiment sérieusement de la désinformation, il publierait les corrections suivantes à cet article.
Julian Assange ne s'est jamais qualifié de lanceur d'alerte et s'est toujours qualifié d'éditeur et de journaliste.
Wikileaks a publié la version complète de la vidéo Collateral Murder en 2010, ainsi que la version courte.
Il n'existe aucune preuve que Roger Stone ait eu un quelconque lien direct ou indirect avec Wikileaks pendant l'élection de 2016.
Les courriels du DNC et de Podesta contenaient des informations importantes qui ont conduit à des démissions au sein du DNC et de CNN.
Assange a nié que sa source pour les courriels du DNC était la Russie.
Roger Stone a été reconnu coupable d'obstruction à une enquête du Congrès, de fausses déclarations au Congrès et de subornation de témoins, et non pour un quelconque lien avec Wikileaks lors de l'élection de 2016.
📰 Lien de l'article original :
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28- ♟ Un mécène du Bitcoin règle les frais du jet charter de Julian Assange, d'une valeur de 520 000 dollars
Par Prashant JHA, le 26 juin 2024, CoinTelegraph
Dans un effort anonyme pour aider à garantir la liberté de Julian Assange, un bitcoiner anonyme a fait don de plus de 8 bitcoins, d'une valeur d'environ 500 000 dollars, pour aider la famille d'Assange à payer la dette encourue par son jet charter et les frais de règlement.
Le 24 juin, Assange a été libéré de la prison de haute sécurité de Belmarsh, au Royaume-Uni, après avoir conclu un accord avec les autorités américaines. Peu après sa libération, il a quitté le Royaume-Uni à bord d'un avion privé qui l'a conduit d'un aéroport londonien à Saipan, dans les îles Mariannes du Nord, un territoire américain.
Le 26 juin, le journaliste a comparu devant un tribunal de district de Saipan, où il a plaidé coupable d'avoir enfreint la loi américaine sur l'espionnage en divulguant des documents classifiés. Le voyage avait été planifié pour qu'Assange n'ait pas à poser le pied sur le sol américain.
Dans une interview, Stella Assange, l'épouse d'Assange, a déclaré que "la liberté a un prix". Il doit payer 520 000 dollars au gouvernement australien pour l'affrètement "forcé" du vol VJ199 afin de se rendre à Saipan et en Australie. Stella a lancé un appel à la générosité pour aider le fondateur emprisonné à rembourser ses dettes après son retour en Australie.
Le lien vers le don a été posté par Stella Assange le 25 juin et, en l'espace de 10 heures, un bitcoiner anonyme a versé plus de 8 bitcoins au fonds, atteignant presque l'objectif de 520 000 dollars. Il a également reçu plus de 300 000 livres sterling (380 000 dollars) de dons en monnaie fiduciaire jusqu'à présent.
Le don en bitcoins est le plus important jamais versé au fonds, plus que tous les autres dons, toutes devises confondues. Assange arrivera donc en Australie sans cette dette.
📰 https://cointelegraph.com/news/bitcoiner-donates-500k-assange-freedom
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29- ♟ Bibliothèque Wikileaks et tous ses fichiers
Pour rappel
Et retrouvez aussi, la traduction des révélations majeures de Wikileaks disponibles via ce lien.
📰 https://file.wikileaks.org/file/
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30- 🎥 Arrivée de Julian Assange en Australie
Le fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, retrouve sa femme Stella avec une vive émotion à son retour en Australie, sous les applaudissements de la foule.
Vidéo de 2'30
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31- 🎥 Glenn Greenwald : Démystification des mensonges et des mythes entretenus et véhiculés par les médias au sujet de Julian Assange
Vidéo de 23' avec sous titres disponibles
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32- 🎥 La meilleure vidéo jamais réalisée sur la philosophie du fondateur Julian Assange, avec Nozomi Hayase
Nozomi Hayase est l'autrice de WikiLeaks the Global Forth Estate (WikiLeaks, le quatrième pouvoir mondial)
Vidéo de 24' avec sous titres disponibles
"Le rythme stupéfiant auquel ce mouvement de solidarité pour Julian Assange s'est développé est révélateur du respect et de l'empathie universels pour le plus grand éditeur de cette génération. Plus les pouvoirs qui le persécutent le mettent en danger, plus ses partisans et défenseurs quotidiens sont motivés et actifs. Chaque militant qui se lève pour le protéger rapproche un peu plus notre espoir collectif de justice et de liberté".
- Suzie Dawson
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33- 🎥 Réaction d'Antoine VEY (Avocat français de Julian Assange) : "La liberté d’informer reste menacée de mort"
Vidéo de 13'
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