♟ Arrestations, condamnations, censures : Maccarthysme à tout-va envers quiconque défend les Palestiniens, alors que des charniers sont découverts chaque jour
Citoyens, écrivains, universitaires, artistes juifs, organisations des droits de l'homme, étudiants, politiques, le Pape... Quiconque a une conscience fait désormais l'objet d'une chasse aux sorcières
Alors que des centaines de corps sont découverts (plus de 400 selon ce tweet) - certains les mains liées et d'autres sur lesquels il n'y avait plus ni peau, ni organes, ni tête - les gouvernements occidentaux censurent, arrêtent, condamnent ceux qui osent dénoncer les horreurs inpensables.
Qui sont les animaux ? La désobéissance civile doit s'étendre à tous les pays & continents. Nous ne nous tairons pas !
Il ne s'agit pas seulement de la Palestine ; la répression des manifestations en faveur de la Palestine fait partie d'une guerre plus large contre le discours et la pensée.
“De Paris à New-York, luttons pour la Palestine, contre la colonisation et le génocide depuis nos universités.”
- Le Poing Levé.
Info du jour : La présidente du groupe parlementaire de la France Insoumise vient d'être convoquée à son tour pour “apologie du terrorisme”
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Voici, en introduction de cette publication, la lettre de l'artiste Jonas Stahl prenant position contre le nouveau maccarthysme déchaîné en Allemagne
Lettre au DAAD (l'agence allemande pour la coopération internationale en matière d'enseignement supérieur et de recherche, proposant bourses, cursus, partenariats et événements)
Jonas Staal,
Athènes, le 18 avril 2024.
Cher Monsieur Joybrato Mukherjee,
C'est un honneur pour moi d'être nommé pour la résidence d'artiste du DAAD, organisée par l'Office allemand d'échanges universitaires, dont vous êtes le directeur. Je me dois malheureusement de rejeter cette candidature pour diverses raisons, notamment parce qu'elle n'a pas été approuvée par le DAAD.
La première est votre décision, en tant que recteur de l'université de Cologne, de retirer la chaire Albertus Magnus à la théoricienne politique juive-américaine Nancy Fraser, pour avoir signé, avec plus de quatre cents autres philosophes, une lettre exprimant sa solidarité envers le peuple palestinien et condamnant le "massacre en cours et en pleine escalade perpétré à Gaza par Israël".
Je ne parviens pas à imaginer comment, en tant que représentant d'une institution publique allemande, vous vous sentez autorisé à dicter aux Juifs ce qu'ils sont censés penser ou dire à propos des crimes de l'occupation israélienne. Je suis consterné par votre discours antisémite qui assimile le régime israélien à la diaspora juive mondiale. Et je ne comprends pas comment, compte tenu de l'histoire et de la honte révoltantes de l'Holocauste et de la persécution de masse qui a vu le massacre de Juifs, de Roms et de Sinti, ainsi que de personnes homosexuelles et de communistes, vous contribuez aujourd'hui activement à une culture dans laquelle l'oppression de la parole des personnes confrontées à un génocide se voit normalisée.
La situation est si sinistre que je me dois de vous rappeler l'article 5 de la constitution allemande, rédigé après la chute du régime nazi afin d'éviter tout basculement autoritaire tel que celui qui marque notre époque, lequel stipule que "Toute personne a le droit d'exprimer et de diffuser librement son opinion par la parole, l'écrit et l'image, et de s'informer sans entrave à partir de sources largement accessibles". L'article précise également que "la liberté de la presse et la liberté de rendre compte par des émissions et des reportages cinématographiques sont garanties" et qu'" aucune censure ne peut être exercée". Enfin, "les arts et les sciences, la recherche et l'enseignement sont libres".
Nancy Fraser est loin d'être la première à avoir été réduite au silence par des institutions étatiques anticonstitutionnelles comme la vôtre, comme l'ont montré en détail des plateformes telles qu'Archive of Silence. Pas plus tard que la semaine dernière, le 12 avril 2024, la police allemande a fait irruption au Congrès de la Palestine à Berlin, arrêtant des dizaines de militants et d'organisateurs. L'un des principaux orateurs, Ghassan Abu Sitta, chirurgien plastique reconstructeur qui a soigné les blessés de Gaza l'année dernière, a été retenu à l'aéroport pour interrogatoire et n'a pas été autorisé à entrer dans le pays. L'ancien ministre grec des finances et dirigeant du Mouvement pour la démocratie en Europe 2025, Yanis Varoufakis, qui devait s'exprimer en ligne lors de la conférence, s'est vu délivrer par le ministère de l'intérieur un Betätigungsverbot, c'est-à-dire une interdiction d'exercer une quelconque activité politique en Allemagne.
Selon les données recueillies par la journaliste Emily Dische-Becker, 30 % de tous ces exemples de censure autoritaire en Allemagne aujourd'hui visent des écrivains, des universitaires et des artistes d'origine juive. Tout cela se déroule alors que des partis politiques antisémites, comme l'Alternative pour l'Allemagne (AfD), dont les dirigeants ont déclaré que l'ère nazie n'était qu'un "grain de poussière" dans l'histoire supposée glorieuse du pays, ont les coudées franches au sein du parlement et des médias allemands. Alors que ceux qui mènent la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et l'homophobie sont réduits au silence, l'antisémitisme explicite s'installe dans l'appareil d'État sans aucune obstruction. En tant que citoyen d'un pays à l'histoire coloniale brutale et à la collaboration effroyable avec le régime nazi, je me dois de vous le faire savoir : Vous faites maintenant partie d'un climat dans lequel le "plus jamais ça" s'est transformé en "à nouveau ça".
J'ai une longue relation avec les institutions culturelles allemandes de même qu'avec mes collègues artistes et travailleurs culturels. J'ai grandement appris de l'esprit critique dont ont fait preuve les membres de la communauté artistique berlinoise au cours de ces années. C'est pourquoi il m'est pénible de me sentir obligé de rejeter les collaborations avec des institutions allemandes comme la vôtre, parce que je crains qu'en isolant les organisations allemandes, d'autres personnes telles que vous ne fassent que prendre le contrôle. Je sais en outre que de nombreuses personnes travaillant pour et au sein de ces institutions sont fondamentalement en désaccord avec la campagne de censure antisémite et raciste actuelle. Ils sont nombreux à vous combattre dans la rue et dans les coulisses, et je suis solidaire avec eux.
Et sachez que je suis loin d'être le seul : des artistes, des travailleurs culturels, des universitaires et des intellectuels publics en Allemagne et partout dans le monde retirent massivement leurs travaux d'institutions comme la vôtre, pour protester contre le virage autoritaire que vous propagez, votre incapacité à défendre une liberté artistique et universitaire digne de ce nom, et votre refus de lutter contre l'antisémitisme réel et le racisme structurel. En effet, comment puis-je, comment pouvons-nous prendre position, alors que vous et vos collaborateurs institutionnels estimez que vous avez le droit de censurer quiconque s'exprime contre le génocide aujourd'hui ? Nous ne parlerons pas en l'absence de la parole des autres.
En tout état de cause, le prix à payer pour nos carrières et nos moyens de subsistance est, en fin de compte, relatif. Relatifs par rapport au fait de veiller sur un orphelin à Gaza ou d'avoir à enterrer ses enfants. Vous êtes du mauvais côté de l'histoire, et j'imagine le terrible tribut psychologique qu'il faut payer pour maintenir un mur entre vous et la réalité des politiques antisémites, racistes et meurtrières que vous légitimez. Mais vous n'êtes pas obligé de faire cela. Vous pouvez être de ceux qui brisent le silence, qui refusent de perpétuer plus longtemps cette culture de l'apologie du génocide.
Je me dois de rejeter la nomination qui m'a été faite par votre institution, mais l'invitation à rejoindre le côté de l'histoire qui penche vers la justice reste toujours ouverte.
Sincèrement,
Jonas Staal.
Athènes, le 18 avril 2024.
Lien : https://www.e-flux.com/notes/603681/letter-to-the-daad
Jonas Staal est un artiste visuel dont le travail traite de la relation entre l'art, la démocratie et la propagande. Il est le fondateur de l'organisation artistique et politique New World Summit (2012-en cours). Avec Florian Malzacher, il codirige le camp d'entraînement Training for the Future (2018-en cours) et avec l'avocat des droits de l'homme Jan Fermon, il a lancé l'action collective Collectivize Facebook (2020-en cours). Avec l'écrivain et avocat Radha D'Souza, il a fondé le Tribunal des crimes climatiques intergénérationnels (2021-en cours) et avec Laure Prouvost, il est co-administrateur de l' Union obscure . Plus ici.
Lien actif de la lettre au DAAD.
Si tant est que vous doutiez encore qu'Israël ne se livre pas à un génocide, je vous invite à lire ou relire mon abécédaire sourcé, publié sur ce blog le 6 avril dernier.
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SOMMAIRE :
1 - 400 corps découverts dans des fosses communes à Gaza - Dr Marwan Asmar
2 - Alors que l'Occident se focalise sur l'antisémitisme, Israël transforme les hôpitaux en charniers - Caitlin Johnstone
3 - États-Unis, université de Columbia : Plus de 100 personnes arrêtées après que la présidente de l'université a ordonné à la police d'évacuer la manifestation des étudiants pro-palestiniens - Amy Goodman
4 - Rima Hassan convoquée par la police : un nouveau cap dans la criminalisation des soutiens à la Palestine - Roxane Sinigaglia
5 - Contre le délit d’opinion, pour défendre notre droit à soutenir la Palestine : il faut faire front ! - Nathan Deas
6 - Delescaut condamné à un an de prison, Mélenchon censuré à Lille : la démocratie en péril - Sylvain Noël
7 - L'attaque maccarthyste contre les manifestations à Gaza menace la liberté de pensée de tous - Ari Paul
8 - La présidente du groupe parlementaire de la France Insoumise est convoquée à son tour pour "apologie du terrorisme" - Hugo Simon
9 - À lire ou relire sur le sujet, Yanis Varoufakis : "Mon plaidoyer pour l'humanité et la justice en Palestine qui m'a valu d'être banni", article n°9 de la publication sur ce blog du 15 avril intitulée : Derrière la culpabilité collective, les dessous sales du soutien inébranlable de l'Allemagne à Israël -
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1- ➤ "Preuve évidente de génocide" : Découverte effroyable d'un charnier à l'hôpital Nasser de Gaza - 400 corps ont été découverts dans des fosses communes à Gaza
Les secouristes palestiniens ont déclaré avoir trouvé des centaines de corps, dont certains avaient les mains liées et d'autres sur lesquels il n'y avait plus ni peau, ni organes, ni tête.
Par le Dr Marwan Asmar, le 22 avril 2024, Counter Currents
En quittant l'hôpital Nasser de Khan Younès, l'armée israélienne a exécuté des Palestiniens et les a jetées dans deux fosses communes fabriquées à la hâte.
La véritable ampleur du génocide israélien à Gaza se dévoile peu à peu, jour après jour. Gaza est en effet devenue un cimetière pour les Palestiniens tués par l'armée israélienne.
Parmi les milliers de massacres perpétrés au cours des sept derniers mois par les avions de guerre et les chars israéliens, les derniers ont été découverts devant l'hôpital Nasser de Khan Younès, où les troupes israéliennes ont mené des combats acharnés au cours des quatre derniers mois.
Les équipes de la défense civile palestinienne ont découvert des centaines de corps entassés par l'armée israélienne dans deux fosses communes à l'extérieur de l'hôpital Nasser, dans la ville située à l'extrémité sud de la bande de Gaza.
Au moins 400 corps ont été retrouvés en état de décomposition, enfouis à la hâte par les bulldozers israéliens. La plupart d'entre eux étaient des enfants dont les mains étaient attachées dans le dos, selon les médias. La presse et les réseaux sociaux ont été inondés par cette découverte abominable.
L'affaire évolue depuis dimanche, mais l'exhumation des corps devrait encore se prolonger durant plusieurs jours.
La découverte de proches parmi les corps enterrés dans les fosses communes a profondément choqué les Palestiniens. Au départ, 200 corps ont été découverts, dont des femmes et des enfants tués avant le retrait israélien de la région le 7 avril.
Ce fut une découverte macabre.
"Nous avons trouvé des cadavres sans tête, des corps sans peau, et certains dont les organes avaient été volés", a rapporté dans un communiqué Ismael Al Thawabteh, directeur général de l'Office des médias du gouvernement.
Les équipes de secouristes ont déclaré avoir retrouvé des corps dans des sacs en plastique sur lesquels étaient inscrites des écritures en hébreu. Ils ont ajouté que beaucoup de ces corps avaient les mains attachées, ce qui laisse penser qu'ils ont été exécutés avant d'être enterrés dans les fosses communes.
Al Thawabteh a déclaré que 700 corps manquaient toujours. Les troupes israéliennes se sont retirées et les recherches se poursuivent.
"Nous pensons que des centaines de martyrs sont toujours portés disparus après avoir été exécutés et enfouis par les forces d'occupation israéliennes dans des fosses communes", a-t-il déclaré, cité par la chaîne turque TRT. Mais les chiffres continuent de varier en raison de la situation chaotique et meurtrière dans le sud de la bande de Gaza.
Selon l'agence de presse palestinienne Wafa, près de 2 000 personnes sont toujours portées disparues à Khan Younès après le retrait de l'armée d'occupation israélienne.
Vidéo de 1’35’’ avec sous titres disponibles
📰 https://countercurrents.org/2024/04/gruesome-400-bodies-found-in-mass-graves-in-gaza/
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2- ➤ Alors que l'Occident se focalise sur l'antisémitisme, Israël transforme les hôpitaux en charniers
Par Caitlin Johnstone, le 22 avril 2024, Blog de l'auteure
Un charnier, "oeuvre" des forces de défense israéliennes, a été découvert dans un hôpital de Gaza, où des civils palestiniens semblent avoir été victimes d'un effroyable massacre.
"Bah, ça date, Caitlin", dites-vous peut-être. "Nous savons déjà à propos du massacre et des charniers découverts il y a quelques semaines à l'hôpital al-Shifa de Gaza".
Non, non, il s'agit encore d'un autre charnier résultant d'un autre massacre perpétré par les forces de défense israéliennes et mené dans un tout autre hôpital de Gaza. L'hôpital al-Shifa, aujourd'hui totalement détruit, se trouvait dans la ville de Gaza ; je parle du complexe médical Nasser à Khan Younès, où quelque 210 corps auraient été découverts dans une fosse commune après le retrait des forces israéliennes de la ville au début de ce mois. Deux carnages différents, deux hôpitaux différents, deux fosses communes différentes pleines de civils palestiniens.
Les forces de défense israéliennes attaquent les hôpitaux, fauchent les civils et tentent d'enfouir les preuves de leurs crimes. C'est donc tout naturellement que la classe politico-médiatique occidentale se concentre sur le problème des allégations d'antisémitisme sur les campus universitaires.
"Biden dénonce l'antisémitisme sur les campus universitaires lors des manifestations à Columbia", lit-on dans un nouveau titre du Washington Post.
Le New York Times avertit ses lecteurs :
"Alors que les manifestations se poursuivent à Columbia, certains étudiants juifs se sentent visés".
Fox News annonce :
"La Maison Blanche condamne les manifestations "manifestement antisémites" alors que les agitateurs envahissent l'université de Columbia".
CNN affirme :
"L'université de Columbia est confrontée à une véritable crise alors qu'un rabbin appelle les étudiants juifs à "rentrer chez eux"".
Quant à la BBC, elle rapporte :
"L'université de Columbia : La Maison Blanche condamne l'antisémitisme lors des manifestations universitaires".
Le fait qu'Israël ait pris l'habitude de massacrer des civils et de les ensevelir dans des fosses communes à l'extérieur des hôpitaux de Gaza, le fait que les FDI aient massacré des enfants à Rafah ou le fait que la Cour pénale internationale envisagerait d'inculper Benjamin Netanyahou ainsi que d'autres responsables israéliens pour crimes de guerre sont des questions qui retiennent sacrément moins l'attention contrairement à celle accordée au fait que certains étudiants universitaires sionistes éprouveraient un sentiment de malaise parce que d'autres étudiants affirment que les Palestiniens sont des êtres humains.
Ces questions comptent, mais elles sont loin d'être aussi importantes que la façon dont certains Juifs occidentaux se sentent émotionnellement bouleversés par les manifestations pro-palestiniennes. Pour cela, le monde doit s'arrêter de tourner jusqu'à ce que ce problème extrêmement grave soit résolu.
Toutes les manipulations et distorsions occidentales autour des atrocités massives commises par Israël à Gaza au cours des six derniers mois ont consisté à faire primer les sentiments sur les vies humaines. Ce que ressentent les sionistes juifs occidentaux face aux sentiments pro-palestiniens. Ce que Joe Biden ressent secrètement à l'égard de Netanyahou. Ce que les Israéliens pensent du 7 octobre.
Chaque fois que l'occasion se présente d'axer le récit sur ce que ressent une population politiquement utile, la presse occidentale se met en quatre pour le faire avec un enthousiasme démesuré. Chaque fois que l'occasion se présente de mettre l'accent sur les atrocités commises par Israël, la presse occidentale est aux abonnés absents.
Si vous êtes issu d'un groupe ne jouissant pas du soutien de l'empire occidental, vous pouvez voir votre famille entière se faire assassiner sous vos yeux et la classe politico-médiatique occidentale ne vous considérera toujours pas comme une victime. Si vous appartenez à un groupe que l'empire considère comme humain, même le fait d'offenser vos sentiments sera considéré comme un crime de haine impardonnable.
📰 Lien de l'article original :
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3- ➤ États-Unis, université de Columbia : Plus de 100 personnes arrêtées après que la présidente de l'université a ordonné à la police d'évacuer la manifestation des étudiants pro-palestiniens
Par Amy Goodman, le 19 avril 2024, Democracy Now !
La présidente de l'université de Columbia, Nemat "Minouche" Shafik, a fait appel jeudi à la police new-yorkaise pour faire évacuer par la force une occupation étudiante sur la pelouse de l'établissement, baptisée Gaza Solidarity Encampment, entraînant plus d'une centaine d'arrestations. Les manifestants exigeaient que l'école de l'Ivy League se désengage des entreprises et institutions qui tirent profit de l'occupation israélienne de la Palestine, mais Shafik a ordonné le raid au lendemain de son audition au Capitole au sujet des manifestations pro-palestiniennes en cours sur son campus. Cette décision a suscité l'indignation des étudiants et de nombreux professeurs, qui l'ont qualifiée de censure et de violation de la liberté académique. Le célèbre professeur et candidat à la présidence Cornel West, président de l'Union Theological Seminary, affilié à Columbia, s'est joint jeudi aux étudiants en solidarité avec leur manifestation et a déclaré à Democracy Now ! que ces jeunes "représentent le meilleur (...) de l'esprit humain" et les a félicités pour "leur lutte face à la domination, à l'occupation et à l'asservissement, et ce, avec une détermination sans faille".
À New York, la police anti-émeute a investi un campement pacifique d'étudiants, arrêtant au moins 108 personnes à Columbia. La présidente de l'université de Columbia, Minouche Shafik, a appelé la police de New York à évacuer le campement de solidarité avec Gaza sur la pelouse sud du campus, où des étudiants de Columbia et de Barnard s'étaient installés la veille pour exhorter la direction de l'université à se désengager d'Israël. Le chef de la police de New York, John Chell, a déclaré que Mme Shafik avait identifié la manifestation comme un "danger manifeste et immédiat", mais que les officiers avaient trouvé des étudiants pacifiques et coopératifs. Mme Shafik a prévenu que tous les étudiants participant au campement seraient suspendus. Au moins trois suspensions d'étudiants de Barnard ont été confirmées jeudi avant les arrestations, dont celle d'Isra Hirsi, la fille du membre du Congrès Ilhan Omar.
L'affrontement de jeudi avec la police de New York a été la plus grande arrestation sur le campus de Columbia depuis 1968, lorsque la police a arrêté plus de 700 étudiants protestant contre les liens de l'école avec la guerre du Vietnam et ses projets d'expansion à Harlem en y construisant un gymnase.
Après les arrestations d'hier, les étudiants se sont rassemblés sur le campus tout au long de la nuit, tandis que les grandes manifestations se poursuivaient et continuent. Les étudiants ont reçu le soutien de nombreux professeurs de Columbia en ligne et la visite en personne de Cornel West, professeur à l'Union Theological Seminary, situé à proximité, qui est également candidat à l'élection présidentielle de 2024. Democracy Now ! s'est entretenu avec le professeur West après qu'il ait escaladé une clôture pour aller à la rencontre des manifestants.
Cornel West : Eh bien, vous savez, à la lumière de notre profonde solidarité avec nos précieux frères et sœurs palestiniens qui subissent un génocide vicieux, qui luttent contre l'apartheid depuis si longtemps et continuent de faire l'objet d'un nettoyage ethnique, nous voulons que le monde sache que leur souffrance n'a pas dit son dernier mot. La résilience et la volonté de se battre existent.
La présidente de Columbia devrait avoir honte d'être incapable de se concentrer sur un génocide réel se déroulant sous nos yeux et de s'inquiéter d'un appel potentiel au génocide des juifs. Personne ici n'appelle au génocide des Juifs. Personne n'appelle à l'anéantissement. Nous appelons à la fin d'un génocide et d'un anéantissement réels.
Il est vraiment navrant que l'université de Columbia puisse dispenser tant de cours sur les textes canoniques de la civilisation occidentale et ne puisse pas écouter Diderot ou Karl Marx. Ils ne peuvent écouter ni Martin Luther King Jr. ni Muriel Rukeyser. Et surtout, ils ne peuvent écouter les cris de nos précieux Palestiniens à Gaza et en Cisjordanie.
Je suis donc profondément solidaire de ces étudiants. Ils représentent le meilleur, non seulement de Columbia, non seulement de l'empire américain, mais aussi de l'esprit humain, luttant contre la domination, l'occupation et l'asservissement, et ce avec une énorme détermination.
La veille, Amy avait donné la parole aux étudiants
Par Amy Goodman, le 18 avril, Democracy Now !
Manifestants : Mettons fin à l'occupation ! À bas, à bas l'occupation ! Levez vous, levez vous vers la libération ! Levez vous, levez vous avec la libération !
Maryam Alwan : Je m'appelle Maryam Alwan et je suis membre de Columbia SJP, Students for Justice in Palestine (Étudiants pour la justice en Palestine). Nous sommes ici aujourd'hui pour exiger que Columbia se désengage immédiatement de tous les enjeux de l'apartheid israélien. Plus de 33 000 Palestiniens ont été massacrés. Et au moment où nous parlons, notre président témoigne devant la Chambre des représentants dans une mise en scène politique faisant l'amalgame entre l'antisionisme et l'antisémitisme. Nous voulons attirer l'attention sur ce qui se passe à Gaza et faire savoir à Columbia que nous ne bougerons pas. Quelle que soit la répression du gouvernement à laquelle nous sommes confrontés, nous continuerons à nous battre jusqu'à ce qu'ils désinvestissent.
Ils ont été d'une répression totale. Je veux dire que nous avons été confrontés à des brutalités policières. Nous avons dû faire face à d'innombrables changements de politique. Mon groupe, ainsi que Jewish Voice for Peace, a été suspendu au cours du semestre d'automne sans aucune légitimité. J'ai intenté une action en justice pour contrer cette mesure. Il semble que la répression ne fasse qu'empirer. Mais plus ils nous répriment, plus nous nous soulevons. Et c'est pourquoi nous sommes montés en puissance - c'est aussi pourquoi nous le faisons encore aujourd'hui.
Non seulement ils ne nous écoutent pas lorsque nous protestons pacifiquement, lorsque nous tentons de faire passer des référendums pour que les étudiants puissent se faire entendre, mais ils ne veulent absolument pas entendre les étudiants. Ils refusent de savoir ce que pensent les étudiants. Nous sommes donc ici pour leur dire que nous occuperons l'espace et que nous serons présents sur ce campus, et qu'ils ne pourront pas effacer notre soutien à la Palestine.
Manifestants : Ce que voulons-nous ? La justice ! Quand la voulons-nous ? Tout de suite ! Si Gaza ne l'obtient pas, fermez la boutique !
Soph : Je m'appelle Soph. Je fais partie de Jewish Voice for Peace à Columbia. Je suis ici aujourd'hui parce que je ne resterai pas les bras croisés pendant que des milliers et des milliers de personnes meurent à cause de l'argent de nos impôts dans ce pays, alors que l'argent de Columbia sert à financer un génocide. L'argent qui devrait financer notre éducation va aux bombes qui pleuvent sur Gaza en ce moment même. Columbia est actionnaire majoritaire de diverses organisations, comme Lockheed Martin, qui approvisionnent Israël en bombes en ce moment même, et nous ne serons plus complices.
Dans un campus comme celui-ci où la répression fait rage, nous nous réveillons chaque matin et l'administration tente de nous faire taire chaque jour davantage. Nous sommes ici pour dire : "Plus vous chercherez à nous faire taire, plus forte sera notre voix". Nous ne serons pas complices. Nous serons solidaires, car nous savons que nous assurons notre sécurité.
Nous refusons de croire qu'Israël est lié de quelque manière que ce soit à notre judaïsme. En réalité, nos valeurs juives expliquent pourquoi nous sommes ici, pourquoi nous nous tenons ici - des valeurs juives de tikkun olam, d'amour, d'appréciation, de respect, de libération mutuelle. Ainsi, en tant que Juifs, nous sommes ici pour dire que nous soutiendrons toujours la libération de la Palestine, parce que c'est ce que les Juifs ont fait historiquement. Nous avons défendu d'autres peuples opprimés, car nous savons qu'il ne peut y avoir de liberté tant que nous ne sommes pas tous libres.
Manifestants : Palestine libre, libre ! Palestine libre, libre ! Libérez, libérez, libérez la Palestine ! Libérez, libérez, libérez la Palestine !
Sarah Borus : Je m'appelle Sarah Borus. Je suis étudiante au Barnard College. Je suis ici parce que j'ai été élevée en tant que juive antisioniste. Il est capital pour moi d'être aux côtés de la Palestine. Je fréquente une université qui profite activement du génocide des Palestiniens et qui se cache derrière les étudiants juifs en disant qu'elle veut sévir contre nous à cause de l'antisémitisme. Mais en tant que juif antisioniste, je sais que cela est tout à fait faux. Ils agissent ainsi parce qu'ils savent que nous sommes du bon côté de l'histoire, qu'ils agissent de manière profondément condamnable. Et il est de notre devoir, pendant ce génocide, de nous manifester et de résister.
Des juifs qui protestaient contre ce génocide ont été harcelés, puis attaqués à l'arme chimique. Cette question n'est pas abordée. C'est - très franchement - du maccarthysme une fois de plus. Et nos dirigeants doivent être conscients de l'expérience des juifs antisionistes, de la façon dont l'antisémitisme est instrumentalisé pour réprimer ce mouvement.
Amy Goodman : Des voix s'élèvent de la pelouse sud de l'université de Columbia, où des étudiants ont installé un campement de solidarité avec Gaza. Nous remercions tout particulièrement Hana Elias, Tey-Marie Astudillo et Eric Halvarson de Democracy Now ! pour ce reportage.
📰 https://www.democracynow.org/2024/4/19/columbia & https://www.democracynow.org/2024/4/18/columbia_university_gaza_solidarity_encampment
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4- ➤ Rima Hassan convoquée par la police : un nouveau cap dans la criminalisation des soutiens à la Palestine
En pleine campagne pour les élections européennes, la militante franco-palestinienne et candidate LFI Rima Hassan a reçu ce vendredi une convocation pour "apologie du terrorisme". Face à l'escalade répressive et à la censure politique, il faut construire un front commun.
Par Roxane Sinigaglia, le 19 avril 2024, Révolution Permanente
Dans la continuité du cap franchi par le gouvernement dans la répression de tout soutien à la Palestine, Rima Hassan, militante franco-palestinienne et candidate LFI aux européennes, a reçu ce vendredi une convocation par la police judiciaire "afin d’être entendue librement sur des faits d’apologie publique d’un acte de terrorisme, commise au moyen d’un service de communication au public en ligne". Comme l’explique Le Monde, les faits dont elle est accusée seraient "survenus, selon la police, entre le 5 novembre et le 1er décembre 2023, soit avant qu’elle ne soit candidate sur la liste de LFI".
À quelques heures de l’annulation d’une conférence de LFI par l’Université de Lille puis par la préfecture du Nord sous prétexte de la tension de la situation internationale, cette convocation illustre le nouveau pas franchi, ces dernières semaines, par l’État dans la criminalisation de tout soutien à la Palestine. La convocation d’une des figures propalestiniennes les plus connues et médiatisées de la période n’a rien d’anodin. En cette période d’élections européennes, elle est le signe de la volonté du pouvoir de censurer celles et ceux qui portent une autre voie que celle du gouvernement, et des soutiens au génocide d’Israël.
Rima Hassan avait déjà subi une campagne d’intimidation et de harcèlement de la part de l’extrême-droite et de la macronie, lors de l’annonce de sa campagne aux côtés de La France Insoumise pour les élections européennes. Le chef des députés Renaissance, Sylvain Maillard, avait par exemple estimé le 8 mars dernier que la présence de Rima Hassan sur la liste LFI était une "honte absolue" qui visait à toucher "l’électorat antisémite". Ces attaques le mois dernier visaient déjà à criminaliser toute politique débordant le cadre du discours du gouvernement, et de renvoyer sans cesse le soutien à la Palestine à un soutien au terrorisme.
Comme le rappelle le communiqué de LFI suite à l’annonce de la convocation de Rima Hassan par la justice, "Il n’y a rien dans les propos de Rima Hassan qui justifient une telle convocation pleine d’insinuations calomnieuses (…) Nous affirmons solennellement que rien, ni personne, ne nous empêchera de continuer à porter une parole de paix vis-à-vis des actions intolérables du gouvernement Netanyahu à Gaza".
Cette condamnation s’inscrit dans la continuité des dizaines de poursuites pénales engagées contre des militants ces dernières semaines. Jean-Paul Delescaut, secrétaire de l’UD CGT du Nord, a été condamné ce jeudi à un an de prison avec sursis pour apologie du terrorisme pour un communiqué. D’autres figures, comme des militants de Solidaires Etudiant·es EHESS ou encore Anasse Kazib, porte-parole de Révolution Permanente, ont également été convoqués pour "apologie du terrorisme" par la justice pour leur soutien à la Palestine.
Dans ce contexte de répression et de criminalisation massives de tout soutien à la Palestine, il faut opposer un front politique et syndical commun et ferme. Loin de toute logique électoraliste, c’est bien sur le terrain de la mobilisation par en bas que l’on pourra construire un rapport de force à même de mettre un frein à l’important arsenal répressif et anti-démocratique déployé par l’État ces derniers mois. Comme Anasse Kazib l’affirmait sur Le Média hier, "Je suis prêt à discuter avec Mélenchon, Poutou, Besancenot, Arthaud etc… Il est temps que nous fassions front ensemble face à l’autoritarisme et la répression".
"Je suis pret à discuter avec Melenchon, Poutou, Besancenot, Arthaud etc… Il est temps que nous fassions front ensemble face à l’autoritarisme et la repression. Peu importe nos désaccords nous sommes attachés à lutter pour les libertés démocratiques". pic.twitter.com/Qte9q8Qb8U
- Anasse Kazib (@AnasseKazib) April 19, 2024
5- ➤ Contre le délit d’opinion, pour défendre notre droit à soutenir la Palestine : il faut faire front !
Conférence de LFI interdite, condamnation d’un secrétaire syndical CGT, multiplication des procédures pour "apologie du terrorisme" et mobilisation de "l’antiterrorisme" … : face au cap franchi ces derniers jours dans la répression des soutiens de la Palestine, il faut faire front.
Par Nathan Deas, le 19 avril 2024, Révolution Permanente
Convocation de militants de Révolution Permanente, et notamment de son porte-parole, Anasse Kazib, mais aussi de Solidaires Etudiant.e.s EHESS et de plusieurs dizaines de soutiens de la Palestine par les services de "lutte contre l’antiterrorisme" dans le cadre d’une enquête pour "apologie du terrorisme". Condamnation d’un an de prison avec sursis de Jean-Paul Delescaut, le secrétaire de l’UD CGT 59, pour un communiqué de soutien au peuple palestinien évoquant "l’occupation militaire et coloniale" menée par Israël en Palestine.
Interdiction d’une conférence de la France Insoumise sur la Palestine en pleine campagne des européennes par la présidence de l’université de Lille puis par la préfecture. Interdiction à nouveau de la marche parisienne de ce dimanche contre le racisme et l’islamophobie, les violences policières et les infanticides à Gaza. Convocation enfin ce vendredi de Rima Hassan, candidate palestinienne de LFI aux Européennes, cette fois encore, pour "apologie du terrorisme".
Il y a parfois des coïncidences de calendrier riches de sens. Ces derniers jours, la répression, sous diverses formes, des soutiens de Palestine s’est abattue de façon scandaleuse et avec une intensité nouvelle. Jusqu’à interdire donc une conférence de la troisième force politique des dernières élections présidentielles.
Celle-ci n’est bien évidemment pas déconnectée du soutien inconditionnel de la France à Israël et son génocide derrière les appels hypocrites de Macron au "cessez-le-feu". Ni des tentatives depuis des mois de l’État français, appuyé par la plupart des "grands médias" et un arc politique large (de certaines des composantes de "l’ex NUPES" au RN) de chercher à réduire au silence et criminaliser toute expression publique en solidarité avec le peuple palestinien et/ou qui aurait "l’audace" de dénoncer les crimes de Tsahal et de l’apartheid israélien.
Cette surenchère, dénonce Elsa Marcel, avocate au barreau de Seine Saint Denis et militante à Révolution Permanente, s’inscrit dans la continuité du durcissement politique et judicaire du régime ces dernières années.
"Tout l’arsenal judiciaire qui a été construit de manière méticuleuse par les gouvernements successifs exprime ces derniers mois tout son potentiel. En 2014 par exemple on a retiré l’infraction "d’apologie du terrorisme" de la loi sur les délits de presse pour l’insérer dans le code pénal. Le régime de cette infraction a continué d’être durci avec la loi Séparatisme. Aujourd’hui, les conséquences de ces "modifications" sautent aux yeux, notamment au sujet de la répression des oppositions politiques. Ce qui est en train de se jouer va bien au-delà de la question palestinienne, mais concerne les libertés politiques fondamentales. À ce rythme rien n’empêcherait Darmanin de poursuivre des militants "éco-terroristes" qui soutiennent Sainte-Soline par exemple pour "apologie du terrorisme". L’ensemble du mouvement social et politique est concerné".
Dans ce contexte, l’accélération de ces derniers jours doit être prise au sérieux. Symptôme d’une atmosphère nauséabonde, entre cavalier solitaire du RN aux Européennes et surenchères bellicistes, mais aussi d’un tournant autoritaire qui n’en finit pas de s’élargir (à l’école, contre les quartiers, le mouvement écolo, le monde du travail, en préparation de la guerre et de l’austérité …), l’Etat semble vouloir s’attaquer à toutes les voix dissidentes. Et n’hésite pas à mobiliser des prétextes fallacieux et notamment à salir la lutte légitime contre l’antisémitisme pour le faire.
Pour nos droits démocratiques, politiques et syndicales, pour le droit à exprimer notre solidarité avec le peuple palestinien : il y a urgence. L’ensemble du mouvement de soutien à la Palestine, les organisations du mouvement ouvrier et politiques de notre camp social doivent faire front et préparer une réponse commune à la hauteur de ces attaques. Une urgence d’autant plus centrale qu’à Gaza les puissances impérialistes "marchandent" plus que jamais le massacre des Palestiniens et l’offensive à venir à Rafah en échange de quelques gages du gouvernement de Netanyahu pour éviter un embrasement régional dont Israël et ses soutiens sont responsables. Contre le délit d’opinion que le régime souhaite instaurer, pour la Palestine et pour la défense de nos droits démocratiques : nous ne nous tairons pas !
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6- ➤ Delescaut condamné à un an de prison, Mélenchon censuré à Lille : la démocratie en péril
Par Sylvain Noël, rédacteur en chef de L'Insoumission, le 18 avril 2024
Mélenchon. Le secrétaire général de la CGT du Nord, Jean-Paul Delescaut, vient d’être condamné à un an de prison avec sursis pour "apologie du terrorisme" en raison… d’un tract de l’UD CGT appelant à la paix à Gaza. Une condamnation d’une gravité absolue. Le 20 octobre, il était menotté à 6 heures du matin, devant chez lui, par des policiers cagoulés. Son accusateur : le préfet du Nord, Georges-François Leclerc, à l’initiative de la plainte. Un militant politique et complice du génocide à Gaza par sa volonté farouche d’interdire toutes les voix qui dénoncent les massacres.
Le 17 janvier, ce préfet militant a été remplacé par un autre : Bertrand Gaume. Du même calibre. Ce dernier vient de décréter un arrêté d’interdiction de la conférence de Mélenchon et Rima Hassan. Deux censures en deux jours. Les motifs indiqués sont d’un délire sans précédent en ce qu’ils reprennent les arguments de l’extrême droite. Où va la démocratie quand le refus d’un génocide est considéré comme apologie du terrorisme ou motif de censure ? Tous ceux qui protestent sont jugés coupable.
Tantôt accusés d’être "antisémites" : le Pape, Edgard Morin, de Villepin, Mélenchon. Tantôt traînés en justice. Tantôt censurés. Les modes opératoires des amis français de Netanyahu varient, mais la cible est commune : les partisans de la paix, les syndicalistes, les insoumis. Ces derniers appellent à la mobilisation générale : un rassemblement est prévu ce jour à Lille à 19 heures avec une prise de parole de Jean-Luc Mélenchon et Rima Hassan. Notre article.
Un an de prison avec sursis pour avoir… appelé à la paix à Gaza
La décision est tombée ce jour. L’œuvre d’une "justice partiale" pour une décision "d’une gravité absolue", souligne le député LFI du Nord Ugo Bernalicis. Jean-Paul Delescaut, dirigeant syndicaliste de la CGT, a été condamné à un an de prison avec sursis. Le 20 octobre 2023, ce dirigeant syndicaliste de la CGT était réveillé à 6 heures matin chez lui. Menotté par des policiers cagoulés, devant sa femme, effrayée. Pourquoi ? Pour avoir appelé à la "paix en Palestine" en dénonçant "l’occupation, l’apartheid et la colonisation". Le tout, dans un tract publié par la CGT Nord, dont il est secrétaire général. En somme, pour avoir repris dans un tract les mêmes mots et positions que les instances internationales.
Son accusateur ? Le préfet du Nord, militant politique. Le 28 mars, un important rassemblement avait eu lieu à Lille pour le soutenir. "Jean-Paul lutte pour la justice et la paix ! Sa place n’est pas au tribunal !", avait déclaré Jean-Luc Mélenchon sur place, accompagné d’une délégation insoumis.
Lors de ce rassemblement, le leader insoumis a également dénoncé le racisme de classe du Gouvernement et des médias contre les quartiers populaires et les musulmans, en saluant le combat pour la paix du syndicaliste Jean-Paul Delescaut. "Il n’y a pas d’apologie du terrorisme dans la CGT, ni dans la classe ouvrière. Honneur et soutien à lui !", avait rappelé Jean-Luc Mélenchon, rappelant avec force cette vérité : "Qui avait raison sur le génocide à Gaza ? Jean-Paul Delescaut. Il a défendu notre honneur !".
"Tous les démocrates et les républicains de ce pays doivent se réveiller et s’insurger contre cette décision, et cette loi", a alerté le député insoumis Ugo Bernalicis.
Après Delescaut, Mélenchon censuré à deux reprises en deux jours
Deux jours, deux censures. La première est intervenue hier. Jean-Luc Mélenchon et Rima Hassan étaient invités ce jeudi 18 avril à une conférence sur la géopolitique à l’invitation d’étudiants de l’Université de Lille. Cédant à la pression de la droite, de l’extrême droite, sous l’impulsion du député PS Jérôme Guedj, la Présidence de l’Université de Lille a annoncé cet après-midi l’interdiction de la conférence. Toute la clique des partisans et complices du génocide à Gaza s’est déchaînée et y est allé de sa petite musique.
En cause, deux mots : "Libre Palestine". C’est le nom d’une association agréée par l’Université, qui était à l’initiative de l’invitation du leader insoumis et de Rima Hassan. Association également enregistrée par… la préfecture et agréée par l’université de Lille. Le logo de l’association était présent sur l’affiche, à la demande de la faculté. Ces deux mots et ce logo, représentant la région du monde concernée, reviendraient à "nier l’existence de l’État d’Israël".
L’association a déjà répondu aux accusations : elle ne nie pas l’existence de l’état d’Israël. En aucune façon. Ce logo représente la région, comme le fait par exemple l’UEJF (Union des Étudiants Juifs de France, ndlr) sur son site internet. Le cap est franchi. Parler de la liberté des Palestiniens reviendrait à nier l’État d’Israël. Les Guedj, Spillebout, CNEWS, Chenu, et désormais Darmanin vont-ils aussi demander l’interdiction des audiences de la Cour internationale de Justice et de toutes les instances internationales qui, par leurs décisions et résolutions, appellent à l’arrêt du génocide, le cessez-le-feu, et la protection du peuple Palestinien ?
La deuxième censure est tombée ce jour. Après l’interdiction d’hier, les insoumis avaient reprogrammé leur conférence dans une salle privée de Lille. Décidée à interdire par tous les moyens la tenue de cette réunion, la Préfecture a déposé un arrêté d’interdiction de cet évènement. Un "acharnement intolérable" dénoncé les insoumis par voie de communiqué. L’interdiction intervient en effet dans un contexte de campagne électorale. Elle crée un précédent d’une gravité absolue pour deux raisons : la censure des voix de la paix et la censure de la première force d’opposition politique du pays à deux mois de l’échéance électorale du 9 juin.
Les considérants invoqués par la Préfecture ont un point commun : le délire. Une signature politique des amis de Benjamin Netanyahu, prêts à tout pour bâillonner toutes celles et ceux qui protestent face aux massacres à Gaza, lesquelles ont déjà fait plus de 34 000 tués dont plus de 15 000 enfants.
Pour justifier sa décision, la préfecture invoque des réactions de personnalités, y compris celles de l’extrême droite : "considérant que l’organisation de cet évènement a suscité de vives réactions de nombreuses personnalités locales demandent l’interdiction de cette conférence en raison des propos tenus par la principale conférencière sur l’action terroriste du Hamas". Elle reprend ainsi mot pour mot les arguments de l’extrême droite qui, après plus de 6 mois de tueries à Gaza, continue de les plébisciter activement.
Pour aller plus loin : Lille : la conférence de Mélenchon et Rima Hassan interdite, LFI organise un rassemblement contre la censure et pour la paix
Elle mentionne aussi l’appel à contre-manifester de l’UNI (Union nationale inter-universitaire, organisation étudiante d’extrême droite, ndlr) et de l’UEJF : "que des appels à mobilisation contre cette conf avaient été lancés par plusieurs organisations dont l’UNI ou l’UEJF (…) que ces appels à une contre-manifestation laissaient craindre des rassemblements pouvant entraîner des heurts". Comprendre : un appel à manifester de l’UNI ou de l’UEJF devient désormais un argument force de loi, utilisé par les autorités pour faire annuler des évènements de la France insoumise et, plus largement, tout évènement ou initiative qui n’irait pas dans le sens des partisans de Netanyahu.
L’arrêté évoque aussi la polémique inventée de toutes pièces par la droite, l’extrême droite et le député PS Jérome Guedj sur le logo "Libre Palestine" : "considérant que la présence sur l’affiche de l’évènement d’un logo pouvant être interprété comme niant l’État d’Israël majore tant le risque d’affrontements physiques entre militants antagonistes, que le risque est élevé qu’un tel évènement puisse donner lieu à des propos ou agissements pénalement sanctionnés, relevant notamment de l’incitation à la haine et à la violence".
La formule est claire et militante "pouvant être interprétée" : la Préfecture reprend là aussi les arguments des partisans de Netanyahu en France. Ce logo est pourtant celui d’une association agréée en… préfecture ! L’association a déjà répondu aux accusations : elle ne nie pas l’existence de l’état d’Israël. En aucune façon. Ce logo représente la région, comme le fait par exemple l’UEJF sur son site internet.
Arrestations, condamnations, censures : la démocratie en péril
Où va la démocratie quand le refus d’un génocide est considéré comme apologie du terrorisme ou motif de censure ? Tous ceux qui protestent sont jugés coupables. Tantôt accusés d’être "antisémites" : le Pape, Edgard Morin, de Villepin, Mélenchon. Tantôt traînés en justice. Tantôt censurés. Les modes opératoires des amis français de Netanyahu varient mais la cible est commune : les partisans de la paix, à commencer par les insoumis. Ces derniers appellent à la mobilisation générale : un rassemblement est prévu ce jour à Lille à 19 heures, place Vanhoenacker, avec une prise de parole de Jean-Luc Mélenchon et Rima Hassan.
📰 https://linsoumission.fr/2024/04/18/gaza-delescaut-melenchon-censure/
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7- ➤ L'attaque maccarthyste contre les manifestations à Gaza menace la liberté de pensée de tous
Avec l'encouragement de l'État, les universités prennent des mesures draconiennes pour faire taire le débat sur la violence soutenue par les États-Unis au Moyen-Orient.
Par Ari Paul, le 22 avril 2024, Fair
Avec la bénédiction de l'État, les universités d'un bout à l'autre du pays prennent des mesures draconiennes pour faire taire le débat sur la violence soutenue par les États-Unis au Moyen-Orient.
La communauté de l'université de Columbia a été choquée de voir des policiers en tenue anti-émeute arrêter au moins une centaine de manifestants pro-palestiniens qui avaient installé un campement au centre du campus (New York Post, 18/4/24). La présidente de l'université, Nemat Shafik, avait témoigné la veille devant une commission du Congrès dominée par les républicains, ostensiblement préoccupée par l'"antisémitisme" sur les campus - une étiquette désormais appliquée à tort à toute critique d'Israël, bien que les détracteurs ainsi dénigrés soient souvent eux-mêmes juifs.
Les pages d'opinion de la ville sont empreintes d'un sentiment de ravissement. Le comité éditorial du New York Post (18/04/24) a salué tant la répression des manifestations que les pressions exercées par le Congrès pour que des mesures aussi radicales soient prises contre la liberté d'expression :
"Nous sommes heureux de voir Shafik se lever.... Le Congrès mérite d'être félicité pour avoir mis les éducateurs au pied du mur sur cette question".
Ajoutant :
"Le monde universitaire a traité les manifestations anti-israéliennes avec des gants".
En d'autres termes, les universités ont permis à un trop grand nombre de personnes de penser et de s'exprimer de manière critique sur un sujet d'actualité majeur.
Dans "At Columbia, the Grown-Ups in the Room Take a Stand", la chroniqueuse du New York Times Pamela Paul (18/04/24) a salué l'expulsion, déclarant à propos du campement que pour le "passant, la fureur et le sentiment moralisateur affichés faisaient froid dans le dos" et que pour les partisans d'Israël, "cela devait être d'une souffrance inimaginable". En d'autres termes, les experts conservateurs ont décidé que les espaces sécurisés des campus où la parole est interdite pour protéger les émotions des auditeurs sont une bonne chose, selon le sujet. Paul (aucun lien de parenté !) serait-il favorable à l'interdiction des manifestations en faveur de Taïwan ou de l'Arménie parce qu'elles pourraient offenser les étudiants chinois et turcs ?
Et pour Michael Oren, éminent politicien israélien, les étudiants de Columbia n'ont pas assez souffert. Il a déclaré à propos de Columbia dans une tribune du Wall Street Journal (19/04/24) :
"La reconnaissance de l'incapacité de l'université à mettre en œuvre les mesures qu'elle avait adoptées pour protéger sa communauté juive a été absente. [Shafik] n'a pas abordé la question de savoir comment, sous la bannière de la liberté d'expression, Columbia est devenue inhospitalière pour les Juifs. Elle n'a pas reconnu que les manifestations incendiaires telles que le campement étaient le fruit de l'inaction de l'université."
Shafik avait assuré à ses interrogateurs du Congrès que Columbia avait déjà suspendu 15 étudiants pour avoir défendu les droits de l'homme des Palestiniens, suspendu deux groupes d'étudiants - Jewish Voice for Peace et Students for Justice in Palestine (Jewish Telegraphic Agency, 11/10/23) - et même renvoyé un instructeur (New York Times, 17/04/24).
L'audience a été pour le moins bizarre : un républicain de Géorgie a demandé à la présidente si elle voulait que son campus soit "maudit par Dieu" (New York Times, 18/04/24). ("Certainement pas", a-t-elle répondu).
L'ancienne économiste de la Banque mondiale avait manifestement été ébranlée après avoir vu comment le maccarthysme du Congrès avait évincé deux autres présidentes de l'Ivy League (FAIR.org, 12/12/23 ; Al Jazeera, 1/02/24).
Protégés de l'obligation d'entendre
"Ce qui s'est passé hier lors de ces auditions devrait préoccuper tout le monde, quels que soient ses sentiments sur la Palestine et ses opinions politiques Les événements d'hier sont une démonstration de l'attaque croissante et de l'intensification de l'éducation libérale en général", a déclaré Rebecca Jordan-Young, professeur d'études féminines au Barnard College, à Democracy Now ! (18/04/24).
Sa collègue, l'historienne Nara Milanich, a déclaré dans la même interview :
"Il ne s'agit pas tant d'antisémitisme que d'attaques contre des domaines de recherche et d'enseignement, qu'il s'agisse du droit de vote, de la sécurité des vaccins ou du changement climatique - des domaines de recherche qui sont inconfortables, gênants ou controversés pour certains groupes. C'est donc essentiellement ce à quoi nous assistons : l'antisémitisme est utilisé comme arme dans une vaste attaque contre l'université."
Le corps enseignant juif de Columbia s'est élevé contre l'utilisation abusive de l'antisémitisme pour faire taire les étudiants, mais ceux qui sont au pouvoir ne l'écoutent pas (Columbia Spectator, 10/04/24).
Shafik a justifié l'autorisation des arrestations massives, qui, selon de nombreuses personnes, étaient inédites sur le campus depuis les manifestations de 1968 contre la guerre du Vietnam.
"Les individus qui ont établi le campement ont violé une longue liste de règles et de politiques. Par le biais de conversations directes et par écrit, l'université a fourni de nombreuses notifications de ces violations", a-t-elle déclaré (BBC, 18/04/24).
Une politique suggérée par le "groupe de travail sur l'antisémitisme" de l'université, selon un administrateur de l'université qui a également témoigné (New York Times, 18/04/24) :
"Si l'on doit chanter, on ne doit le faire qu'à un certain endroit, de sorte que les personnes ne souhaitant pas l'entendre ne soient pas obligées de l'entendre".
Recul à travers le pays
Pendant ce temps, l'Université de Californie du Sud a annulé le discours de fin d'études que devait prononcer la major de promotion Asna Tabassum, une musulmane qui s'était prononcée en faveur de la Palestine (Reuters, 18/04/24). L'université a invoqué des "risques de sécurité" anonymes ; The Hill (16/04/24) a noté qu'"elle avait des liens vers des sites pro-palestiniens sur ses médias sociaux". Andrew T. Guzman, le provost et vice-président senior pour les affaires académiques, a déclaré dans un communiqué que l'annulation était "cohérente avec l'obligation légale fondamentale - y compris les attentes des régulateurs fédéraux - que les universités agissent pour protéger les étudiants et assurer la sécurité de la communauté du campus" (USC Annenberg Media, 15/04/24).
Cela se produit alors que la liberté académique recule à travers tout le pays. Les républicains de l'Indiana ont récemment adopté une loi permettant à un conseil politiquement désigné de refuser ou même de révoquer la titularisation de professeurs d'université si le conseil estime que leurs cours manquent de "diversité intellectuelle" - tout en les menaçant s'ils semblent "susceptibles" de "soumettre les étudiants à des opinions politiques ou idéologiques" jugées sans rapport avec leurs cours (Inside Higher Ed, 21/02/24).
Benjamin Balthaser, professeur associé d'anglais à l'Université de l'Indiana à South Bend, s'est exprimé à notre rédaction au sujet de l'audition du Congrès :
"Aucune autre définition du sectarisme ou du racisme n'assimile la critique d'un État, même une critique féroce et hostile, à un groupe ethnique ou religieux tout entier, en particulier à un État qui se livre à des crimes de guerre et à des crimes contre l'humanité continus et documentés. À cette absurdité s'ajoute le fait que de nombreux accusés ne sont pas seulement juifs, mais qu'ils ont des liens étroits avec leur communauté juive. Faire une telle équation suppose une homogénéité collective ou de groupe qui est elle-même une forme d'essentialisme, voire de racisme : On ne peut réduire les gens aux crimes de leur État, et encore moins à ceux d'un État situé à des milliers de kilomètres et dont la plupart des Juifs ne sont pas citoyens."
Évidemment, les chasses aux sorcières contre les gauchistes dans la société américaine sont souvent motivées par l'antisémitisme. Balthaser poursuit :
"L'extrême droite a longtemps déployé l'antisémitisme comme arme de censure et de répression, associant la judéité au communisme et à la subversion lors des première et deuxième vagues de "peurs rouges". Non seulement les formes antérieures du maccarthysme visaient massivement les Juifs (les Juifs constituaient les deux tiers des "accusés" convoqués devant l'HUAC en 1952, alors qu'ils représentaient moins de 2 % de la population américaine), mais elles le faisaient en prétendant cyniquement protéger les Juifs contre le communisme. Il se produit aujourd'hui quelque chose de très similaire : Mobilisant le trope raciste de l'adhésion des Juifs à Israël, les politiciens d'extrême droite utilisent les accusations d'antisémitisme pour faire taire toute critique à l'égard d'Israël et, ce faisant, promouvoir leurs idées antisémites sur la judéité dans le monde."
Réduire au silence au nom de la "liberté d'expression"
Ces universités ne restreignent pas simplement la liberté d'expression parce que les administrateurs n'aiment pas ce discours en particulier, ou par crainte que des manifestations pro-palestiniennes ou des membres du corps enseignant qui s'expriment n'effraient les donateurs et ne leur fassent pas signer de gros chèques. Cette situation est le fait d'acteurs étatiques - les républicains du Congrès, en particulier - usant de leur pouvoir en commission et de leurs sycophantes dans les médias pour exiger plus de licenciements, plus de suspensions, plus de censure.
J'écris depuis des années (FAIR.org, 23/10/20 , 17/11/21 , 25/03/22), comme beaucoup d'autres, sur les plaintes des Républicains concernant la "culture de l'annulation" sur les campus qui supprime la liberté d'expression. L'une des plus grandes hypocrisies est que les soi-disant conservateurs de la liberté d'expression prétendent que les activistes des campus réduisent les conservateurs au silence, mais n'ont pas grand-chose à dire sur la censure flagrante et les licenciements politiques lorsqu'il s'agit de la Palestine.
Il ne s'agit pas d'une simple incohérence morale. C'est l'agenda anti-éveil qui est à l'œuvre : Lorsque la critique de la droite est considérée comme la principale menace pour la liberté d'expression, il n'y a qu'un pas à franchir pour demander à l'État de "protéger" la liberté d'expression en réduisant au silence les critiques - dans ce cas, les dissidents qui s'opposent au soutien des États-Unis au militarisme israélien.
Mais il ne s'agit pas seulement de la Palestine ; la répression des manifestations en faveur de la Palestine fait partie d'une guerre plus large contre le discours et la pensée. La droite a déjà ouvert la voie à des assauts contre la liberté d'enseignement avec des interdictions visant la théorie critique de la race adoptées dans 29 États.
Si l'État peut désormais étouffer et punir les discours contre le meurtre de civils à Gaza, quelle sera la prochaine étape ? Alors qu'une autre commission du Congrès enquête sur la prétendue infiltration du Parti communiste chinois, les politologues chinois seront-ils les prochains visés (Reuters, 28/02/24) ? Avec la prolifération des lois des États contre les manifestations en faveur de l'environnement (Sierra, 17/09/23), assistera-t-on à un nouveau maccarthysme à l'encontre des climatologues ? (L'auteur Will Potter a tiré la sonnette d'alarme au sujet d'une "peur verte" il y a plus de dix ans - People's World, 26/09/11 ; CounterSpin, 01/02/13).
Les universités et la presse sont censées être des lieux où nous sommes libres de discuter des questions d'actualité, même si cela implique d'entendre des opinions susceptibles d'être difficiles à digérer pour certains. Sans ces espaces de libre pensée, nos droits au premier amendement ne signifient pas grand-chose. Si quelqu'un qui prétend être un absolutiste de la liberté d'expression ne cite pas la guerre menée par le gouvernement contre la liberté d'expression et de rassemblement sur les campus comme sa préoccupation numéro un aux États-Unis à l'heure actuelle, c'est un imposteur.
Ari Paul a écrit des articles pour The Nation, The Guardian, The Forward, The Brooklyn Rail, Vice News, In These Times, Jacobin et bien d'autres.
📰 https://fair.org/home/the-mccarthyist-attack-on-gaza-protests-threatens-free-thought-for-all/
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8- ➤ La présidente du groupe parlementaire de la France Insoumise est convoquée à son tour pour "apologie du terrorisme"
Une attaque qui marque le saut répressif opéré par l’État pour s’en prendre aux soutiens de la Palestine et impose une riposte collective.
Par Hugo Simon, le 23 avril 2024, Révolution Permanente
Ce mardi, la député et présidente du groupe LFI à l’Assemblée nationale Mathilde Panot a annoncé être convoquée par la Direction de la Police Judiciaire de Paris dans le cadre d’une enquête pour "apologie du terrorisme". D’après la député du Val-de-Marne, cette convocation se fonderait sur le communiqué officiel de son groupe parlementaire publié le 7 octobre.
Il s’agit d’une nouvelle étape dans l’offensive menée par l’Etat pour réprimer les soutiens à la Palestine, après la condamnation du secrétaire général de l’UD CGT 59 à 1 un an de prison avec sursis pour "apologie du terrorisme", la convocation pour ce même motif de nombreuses personnalités politiques et syndicales comme Anasse Kazib, la candidate LFI aux européennes Rima Hassan, la journaliste SIhame Assbague ou les étudiants de Solidaires étudiant.es EHESS.
Alors que jamais un président de groupe parlementaire n’avait été visé de la sorte en raison d’une expression politique, cette convocation de Mathilde Panot, présidente du troisième groupe le plus nombreux à l’Assemblée, marque un saut dans l’escalade répressive. En s’attaquant à une personnalité qui fait partie de la direction d’une force politique arrivée en troisième positon au dernier scrutin présidentiel, l’Etat veut faire passer un message clair : tous ceux qui soutiennent la Palestine sont menacés de poursuites et de mesures répressives.
Cette convocation survient également dans le contexte des élections européennes, après l’interdiction la semaine dernière d’une conférence de Jean-Luc Mélenchon et Rima Hassan, par l’Université de Lille puis par la Préfecture du Nord. Dans le même sens ce lundi, l’Université Paris-Dauphine a annulé une conférence organisée par le Comité Palestine de l’université, qui réunissait la militante franco-palestinienne Rima Hassan et Ivar Ekeland, un ancien président de Paris-Dauphine engagé dans le mouvement universitaire pour la Palestine, prétextant un risque de "trouble à l’ordre public". En pleine campagne électorale, la criminalisation du soutien à la Palestine permet d’empêcher l’expression d’opposants.
A l’heure où Israël a reçu le feu vert des Etats-Unis pour lancer son offensive sur Rafah, où se sont réfugiés 1,3 millions de Gazaouis, cette vague de criminalisation inédite de la solidarité avec le peuple palestinien fait figure de soutien au génocide en cours en Palestine. A nouveau, cette convocation pose la question de construire une riposte collective et un front contre la répression et pour la défense des droits démocratiques. Sur Twitter, Anasse Kazib, porte-parole de RP a ainsi expliqué : "Les convocations n’ont pas fini de pleuvoir, il faut se réunir d’urgence et construire une réponse collective". Face à des attaques anti-démocratiques inédites, il y a urgence !
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