🚩 Julian Assange : Actualité semaine #6 - Février 2024 🎗⏳
De plus en plus d'articles (21), dont beaucoup novateurs, à l'approche des deux jours cruciaux. En espérent que ces efforts portent leurs fruits et n'arrivent pas trop tard... Free the truth !
“Le courage, c'est de chercher la vérité et de la dire, c'est de ne pas subir la loi du mensonge triomphant qui passe et de ne pas faire écho aux applaudissements imbéciles”.
- Jean Jaurès, discours à la jeunesse prononcé à Albi en juillet 1903
◾️ ◾️ ◾️
SOMMAIRE :
1 - La vie même d'Assange est en jeu - Mary Kostakidis
2 - Arguments juridiques pour l'audience d'extradition de Julian Assange à la Haute Cour les 20 et 21 février - Stella Assange
3 - La rapporteuse spéciale des Nations unies sur la torture exhorte le gouvernement britannique à empêcher l'extradition imminente de Julian Assange - Communiqué de presse Nations Unies
4 - Citoyenneté à Assange : Rome, ne sois pas stupide - Vincenzo Vita - suivi de L'Appel de l'association Articolo21 au maire de Rome
5 - Le Parlement européen accueille une exposition sur Julian Assange avant le verdict d'extradition du Royaume-Uni - Eleonora Vasques
6 - "Julian Assange est censét mourir à petit feu" - Uli Kreikebaum
7 - Une visite à Julian Assange en prison - Jeffrey Sterling
8 - Secret d'État et audiences publiques, 1ère partie - Craig Murray
9 - Campagne Amnesty International : Libérez Julian Assange : une mobilisation mondiale - Amnesty International Italie
10 - Application du "Terrorism Enhancement" à l'encontre d'un ex-programmeur de la CIA pour divulguation d'informations : une évolution radicale - Kevin Gosztola
11 - Monsieur le Haut Commissaire : Aidez à libérer Assange - Christophe Peschoux
12 - L'artiste qui, pour protéger Julian Assange, prend en otage des œuvres d'art de grande valeur - Nadia Beard
13 - Le juge Andrew Napolitano présente un argument en faveur de la non-extradition de Julian Assange vers les États-Unis - Adam Dick
14 - Assange doit être libéré sur-le-champ : la liberté d'information n'est pas un crime - Par Stefania Ascari
15 - Julian Assange : Démasquer la vérité sur fond de tensions mondiales & de batailles juridiques - Dimitris Eleas & David Andersson
16 - Trop c'est trop, il est grand temps de libérer Julian Assange - Alan Rusbridger (ex-rédacteur en chef du Guardian)
17 - Compte à rebours jusqu'au jour J : La CIA aurait comploté pour éliminer Assange - n°1 - Kevin Gosztola
18 - "Free Julian" - La musique a-t-elle encore le pouvoir d'aider à libérer un prisonnier politique ? - ZE!TPUNKT
19 - Projection d'Ithaka à l'Assemblée nationale - Consortium News
20 - Le dernier fichier de mises à jour concernant Julian Assange et les personnes et questions connexes - Document mis à jour le 1er février 2024
21 - Aussi noir que soit notre humour, plus sombre encore est le gouvernement : Le cas Julian Assange - Matthew Alford
◾️ ◾️ ◾️
1- ♟ La vie même d'Assange est en jeu
Julian Assange saura bientôt s'il pourra bénéficier d'un dernier recours au Royaume-Uni dans sa lutte contre l'extradition, ou s'il devra bientôt faire face à la cruelle vengeance des États-Unis, explique Mary Kostakidis.
Vidéo de 13’ avec sous titres disponibles
Par Mary Kostakidis, le 4 février 2024, Consortium News
Ce texte est la transcription du discours prononcé par Mary Kostakidis lors d'une conférence sur Julian Assange qui s'est tenue à Sydney, en Australie, le 29 janvier dernier.
Dans l'affaire de l'extradition de Julian Assange, la juge Venessa Baraitser a estimé qu'il ne survivrait pas à une incarcération dans une prison Supermax aux États-Unis et qu'il se suiciderait très probablement.
L'un des derniers témoins du procès d'extradition, qui aura duré quatre semaines en 2020, était celui d'un avocat américain dont le client, Abu Hamza, était détenu à l'ADX Colorado, là où Julian est susceptible d'être envoyé. Abu Hamza n'a plus de mains. Il a été extradé du Royaume-Uni après avoir reçu l'assurance des États-Unis que le système pénitentiaire était en mesure de répondre aux exigences particulières d'un tel prévenu.
Son avocat a déclaré que, selon les assurances données, il ne serait pas placé en isolement total, mais que c'est pourtant ainsi qu'il a été détenu, dans le cadre de mesures administratives spéciales, et que les États-Unis n'ont pas davantage honoré leurs engagements en matière de protection des droits de l'homme - sa cellule ne disposait pas de toilettes - et qu'il avait été dépouillé de toute dignité, contrairement à ce que prévoyaient les garanties.
Dans le cas de David Mendoza Herrera, le gouvernement espagnol a réussi à obtenir que son ressortissant, extradé vers les États-Unis après avoir reçu des assurances non tenues par les États-Unis, revienne dans son pays. Washington a été contraint d'agir après que la Cour suprême espagnole a menacé de suspendre le traité d'extradition entre l'Espagne et les États-Unis.
Les assurances fournies par les États-Unis dans leur appel de 2021 auprès de la Haute Cour contre la décision du tribunal de district dans l'affaire Assange n'ont pas été vérifiées devant le tribunal et ont été automatiquement acceptées, un juge se déclarant totalement confiant dans la fiabilité de la garantie fournie par le gouvernement des États-Unis et distinguant les garanties émanant d'un État de celles d'un diplomate.
(Bien que la garantie d'un diplomate puisse comporter une signature différente au bas de la page, elle n'apparaît certainement qu'après l'approbation du supérieur hiérarchique, mais de toute évidence, cela fait une différence).
Toutefois, il est essentiel de noter que les assurances étaient également conditionnelles - pouvant être révoquées à tout moment, et ne valant donc pas le papier sur lequel elles étaient écrites, quel qu'en soit le signataire.
Cependant, depuis cette décision, la Cour suprême du Royaume-Uni a rendu un arrêt historique dans une affaire où le gouvernement britannique avait accepté des garanties fournies par un gouvernement étranger (le Rwanda). Elle a déterminé que de telles assurances ne peuvent pas être automatiquement acceptées et qu'il est nécessaire de procéder à un "contrôle judiciaire significatif, indépendant et fondé sur des preuves, axé sur la protection des droits de l'homme sur le terrain dans le pays en question".
Dans le cas de Julian, il s'agit des droits de l'homme des prisonniers de la sécurité nationale aux États-Unis, de leur traitement et des conditions dans lesquelles ils sont détenus.
Les Nations unies considèrent l'isolement cellulaire au-delà de deux semaines comme une forme de torture - les rapporteurs spéciaux l'affirment depuis des décennies. En condamnant le traitement de Chelsea Manning dans une prison américaine, Juan Mendez, alors rapporteur spécial sur la torture, a déclaré :
"L'isolement cellulaire prolongé soulève des préoccupations majeures, le risque de préjudice grave et irréparable pour la personne détenue augmentant avec la durée de l'isolement et l'incertitude quant à sa durée... Ma définition de l'isolement cellulaire prolongé s'applique à toute période de plus de 15 jours. Cette définition correspond à la constatation de la plupart des publications scientifiques qui établissent qu'après 15 jours, certaines modifications des fonctions cérébrales se produisent et que les effets psychologiques néfastes de l'isolement peuvent s'avérer irréversibles". (souligné par l'auteur).
Abu Hamza est en isolement depuis neuf ans. Son avocat a déclaré que marcher lui était trop douloureux en raison de la longueur de ses ongles d'orteil, et que ses demandes pour qu'ils soient coupés avaient été ignorées.
Évolutions récentes et significatives de l'état de santé d'Assange
L'acceptation automatique et la fiabilité des assurances n'étaient pas le seul problème à l'époque.
Un problème sérieux est apparu au cours de l'audience : l'absence de prise en compte de l'évolution de l'état de santé de Julian. Il s'agit d'un manquement grave car la décision rendue était fondée sur les assurances que le système pénitentiaire américain pouvait atténuer les facteurs de risque connus - le risque qu'il se suicide. Or, il avait développé un autre facteur de risque physique majeur.
Après l'audience d'extradition de quatre semaines devant la juridiction inférieure, au cours de laquelle Assange a comparu enfermé dans une cabine en verre au fond du tribunal, l'empêchant de communiquer avec ses avocats, il a été autorisé à comparaître par vidéoconférence depuis Belmarsh lors des audiences de fond ultérieures.
Dès le début de l'appel américain, l'avocat d'Assange et le juge se sont brièvement entretenus avant l'audience pour dire que l'accusé avait décidé de ne pas comparaître en raison d'une augmentation de son traitement médicamenteux.
Il était extraordinaire et inconcevable qu'il choisisse de ne pas assister à l'audience par vidéoconférence. En effet, son épouse Stella m'a informé plus tard qu'il avait voulu comparaître mais que la prison ne l'avait pas autorisé à le faire.
Son absence et l'explication qu'il m'a donnée ont mis en évidence un réel problème.
Assange n'a pas manqué une seule audience. Il a fait preuve d'une grande détermination dans sa lutte pour s'engager et participer au drame se déroulant au tribunal, malgré d'énormes difficultés telles que l'impossibilité d'attirer l'attention de ses avocats (après s'être vu refuser les outils et le temps nécessaires à la préparation de sa propre défense), et en dépit des médicaments et d'une détérioration spectaculaire de son état de santé, comme l'a si bien documenté l'ancien rapporteur des Nations unies sur la torture, Nils Melzer, dans son livre intitulé en anglais The Trial of Julian Assange : A Story of Persecution, en français L’affaire Assange : Histoire d'une persécution politique.
Pourquoi a-t-il été si lourdement médicamenté au point de ne pas être en mesure de s'asseoir dans la salle de vidéoconférence de Belmarsh ? Quelle est la justification de cette intensification de la médication ? Cette question était directement liée à la décision que le tribunal devait prendre, mais je n'ai entendu aucune question de la part du juge à ce sujet et l'audience s'est poursuivie.
Puis, étonnamment, quelque temps après le début de l'audience, Julian est apparu.
Nous, les journalistes qui observions l'audience via un lien, pouvions le voir sur nos écrans dans une fenêtre. Il devait pouvoir voir et entendre le juge, de même que les personnes présentes dans la salle d'audience pouvaient le voir sur un moniteur, tout comme nous.
Il avait l'air très mal en point, et pas seulement drogué. Il lui fallait s'aider de son bras pour soutenir sa tête, mais un côté de son visage était visiblement affaissé et un de ses yeux était fermé.
Au cours de ces audiences, nous avons eu droit à de brefs aperçus très sporadiques de l'accusé - le temps de constater qu'il continuait à observer sa propre procédure judiciaire, même si c'était d'une manière dépersonnalisée. J'ai demandé à l'hôte du lien vidéo sur le site de discussion de nous le montrer davantage - nous avions besoin de le voir plus souvent et mieux, car il semblait souffrant et en difficulté.
Les journalistes sont avertis, lorsqu'ils rejoignent la liaison vidéo, que l'utilisation de la fonction de chat à d'autres fins que la communication sur des questions techniques et uniquement avec l'animateur (les audiences ont souvent été paralysées par des problèmes audio) peut entraîner le retrait de l'accès à l'audience. Mais une bonne partie de la trentaine d'autres journalistes présents sur la liaison envoyaient des messages Me Too sur le chat. Fait remarquable, et à mon grand soulagement, l'animateur a accepté de nous montrer Julian plus souvent et plus longtemps que lors des audiences précédentes.
Après la surprenante nouvelle que Julian n'allait pas assister à sa propre audience, je n'ai pas compris qu'étant donné son état, il n'y ait eu ni question ni ajournement lorsqu'il s'est présenté. Ceux qui décidaient de son sort n'étaient nullement perturbés par son état, ou n'avaient pas remarqué ce qui nous apparaissait comme une évidence flagrante.
Julian s'est bien efforcé de se concentrer, mais il était manifestement extrêmement diminué. Il a fini par abandonner, s'est levé et éloigné de la caméra de surveillance. C'était comme s'il ne pouvait plus supporter l'humiliation d'être scruté par des inconnus, témoins de sa tentative infructueuse de maîtriser son corps et son esprit, un esprit pourtant toujours très affûté et qui ne lui avait jamais fait défaut.
Le public a appris quelque neuf semaines plus tard, et quelques jours après que le jugement ait ouvert la voie à l'extradition de Julian, qu'il avait en fait subi un AIT - un accident ischémique transitoire ou un accident vasculaire cérébral mineur - souvent précurseur d'un accident majeur et catastrophique (autrement dit un AVC), nécessitant l'accès urgent à un IRM crucial pour lui sauver la vie.
J'ignore si l'on sait exactement quand Julian a fait cette attaque. La surveillance des prisonniers n'est pas vraiment conçue pour détecter et réagir promptement à des symptômes aussi silencieux et furtifs. L'attaque s'est-elle produite avant l'audience ? Est-ce la raison pour laquelle il était si lourdement médicamenté ? Ou s'est-il produit au moment de l'audience ?
Une chose est claire : il a eu un accident vasculaire cérébral, son état a donc évolué, et les garanties acceptées n'en ont pas tenu compte, bien que la décision de la Cour ait été rendue longtemps après l'accident vasculaire cérébral et quelques jours avant qu'elle ne soit finalement rendue publique.
L'un des deux juges présidant l'appel américain, Ian Duncan Burnett, était à l'époque juge en chef de la Haute Cour. Sa décision dans l'affaire du citoyen britannique Lauri Love a créé un précédent en refusant l'extradition vers les États-Unis sur la base d'un état de son état de santé.
Cette décision a fait naître l'espoir qu'il ne reviendrait pas sur la décision du tribunal de district dans le cas de Julian. Mais comme l'a fait remarquer le professeur de droit Nils Melzer, nul besoin de faire appel au président de la Cour suprême dans une affaire où celui-ci a déjà établi un précédent susceptible d'être suivi. En revanche, son concours est indispensable si son précédent doit être infirmé.
Tout au long de l'audience, l'arrêt rendu dans l'affaire Lauri Love a été omniprésent dans nos esprits et ce dernier était présent à la Cour, mais nous avons réalisé que cette voie potentielle s'avérait être une impasse lorsqu'elle a finalement été soulevée par les avocats de Julian.
Le président de la Cour suprême a répondu rapidement, dédaigneusement et catégoriquement : "Oh, mais il s'agissait d'un cas tout à fait différent. Il avait de l'eczéma" (mot pour mot dans ma mémoire).
Ainsi, la différence entre l'extradition ou non se résumait à l'eczéma, et Julian n'allait pouvoir se réjouir devant ce tribunal malgré l'aggravation manifeste de son état de santé tant physique que psychologique.
Julian a demandé l'autorisation de faire appel de la décision de la Haute Cour devant la Cour suprême, laquelle a estimé qu'il n'y avait pas de points de droit défendables pouvant servir de base à un appel.
L'audience à venir
Sur deux jours, les 20 et 21 février, un panel de deux juges de la Haute Cour décidera si Julian peut faire appel de la décision du secrétaire d'État de l'extrader et de la décision de la juge Baraitser sur la base de tous les motifs invoqués par Julian et rejetés par la juge, tels que la nature politique de l'accusation et l'impossibilité d'un procès équitable à son égard aux États-Unis.
La fiabilité et la pertinence des garanties données par les États-Unis, à savoir qu'il ne sera pas détenu dans une prison à sécurité maximale, ni dans le cadre d'un S.A.M. (Mesures Administratives Spéciales), que son suicide pourra être évité, qu'il sera renvoyé en Australie pour y purger sa peine à un moment donné, n'ont pas été vérifiées par le tribunal, et désormais l'état de santé pour lequel ces garanties ont été données a évolué. Entre-temps, la Cour suprême [du Royaume-Uni] a rendu une décision historique dans une autre affaire, concernant la nécessité d'un contrôle judiciaire des assurances données par les gouvernements étrangers.
Une lettre adressée au début de l'année au ministre de l'intérieur britannique par un groupe de parlementaires de tous bords est extrêmement importante et opportune. Elle appelle à "entreprendre d'urgence une évaluation approfondie et indépendante des risques pour la santé et le bien-être de Mr Assange s'il devait être extradé vers les États-Unis".
Julian Assange a demandé à assister en personne à l'audience de ce mois-ci afin de pouvoir communiquer avec son équipe juridique.
À l'issue des deux jours d'audience, les juges pourront prendre une décision immédiate ou réserver leur jugement.
Si Assange obtient gain de cause, une date sera fixée pour l'audience d'appel.
Si le droit d'appel lui est refusé, aucune autre voie de recours n'est possible au niveau national.
Il peut alors s'adresser à la Cour européenne des droits de l'homme, qui a le pouvoir d'ordonner un sursis à son extradition - instruction prévue au titre de l'article 39, qui n'est accordée que dans des "circonstances exceptionnelles". Il pourrait toutefois s'agir d'une course contre la montre pour déposer le recours avant que Julian Assange ne soit embarqué dans un avion pour les États-Unis.
Si Julian Assange est extradé et que les États-Unis parviennent à l'inculper, il ne bénéficiera pas d'un procès équitable et il est peu probable qu'il reçoive la protection constitutionnelle accordée aux citoyens américains ; les États-Unis auront ainsi redéfini en droit le journalisme d'investigation comme étant de l'"espionnage".
Ils auront démontré que les lois nationales américaines, mais pas les protections, s'appliquent internationalement aux citoyens non américains.
Cela aura coûté à Assange sa liberté et probablement sa vie - un exemple pour tous ceux qui tenteraient de discréditer le récit sanctionné par l'État. Un récit que les journalistes indépendants et les citoyens de Gaza ont fait voler en éclats de manière explosive, quotidienne, universelle et irrévocable.
La journaliste Mary Kostakidis a présenté SBS World News pendant deux décennies, en tant que première présentatrice nationale de journaux télévisés à heure de grande écoute en Australie. Parmi ses précédents articles, citons "Watching the Eyes" pour Declassified Australia. Mary Kostakidis couvre la procédure judiciaire d'extradition de Julian Assanges en direct sur Twitter.
📰 https://consortiumnews.com/2024/02/04/mary-kostakidis-assanges-very-life-at-stake/
◾️ ◾️ ◾️
2- ♟ Arguments juridiques pour l'audience d'extradition de Julian Assange à la Haute Cour les 20 et 21 février
Source Twitter X Stella Assange (@Stella_Assange), le 4 février 2024
1 - Il est inconcevable que Julian Assange soit extradé pour être poursuivi et puni en raison de ses opinions politiques dénonçant la criminalité d'État.
Julian Assange est poursuivi pour avoir exposé la criminalité du gouvernement américain, en particulier les crimes de guerre et la torture.
Il existe de nombreuses preuves des opinions politiques d'Assange sur l'importance de la transparence permettant de demander des comptes aux gouvernements et de les dissuader de commettre d'autres abus à l'avenir.
L'extradition pour des opinions politiques n'est pas légale.
Les nouvelles preuves apparues depuis l'audience concernant les plans de la CIA pour kidnapper et/ou tuer Assange renforcent encore davantage ce motif.
2 - Julian Assange ne saurait être extradé pour faire l'objet de poursuites dans un contexte où le droit pénal est étendu d'une manière sans précédent et imprévisible.
C'est la première fois dans l'histoire des États-Unis qu'un éditeur est poursuivi pour avoir obtenu ou publié (par opposition à une fuite) des secrets d'État américains. Les rédacteurs de la loi sur l'espionnage (Espionage Act) n'avaient pas l'intention de faire entrer les éditeurs dans son champ d'application ; des experts incontestés ont montré que la réception et la publication de secrets d'État étaient monnaie courante et qu'il existait une "pratique ininterrompue de non-poursuite" à l'encontre des éditeurs.
L'accusation "franchit une nouvelle frontière juridique" et "rompt avec tous les précédents juridiques". L'extradition exposerait donc Assange à une extension inédite et imprévisible du droit pénal.
Son extradition constituerait une grave violation de l'article 7 de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH).
3 - Julian Assange ne devrait pas être extradé, les poursuites dont il fait l'objet constituant une grave violation de son droit à la liberté d'expression.
La publication de secrets d'État peut jouer un rôle vital dans une société démocratique et les poursuites pénales et les condamnations pour de telles publications dissuaderont la presse de jouer ce rôle de "chien de garde". L'acte d'accusation américain contre Assange criminalise des pratiques journalistiques essentielles et impose une peine disproportionnée (175 ans).
L'extradition d'Assange constituerait une grave violation de l'article 10 de la CEDH.
4 - Julian Assange ne saurait être extradé étant donné que les États-Unis affirment qu'il pourrait ne bénéficier d'aucune protection au titre du premier amendement.
Les États-Unis ont déclaré qu'ils feraient valoir au procès que Julian Assange ne bénéficierait pas de la protection du premier amendement (protection de la liberté d'expression) car il n'est pas un ressortissant américain (il est australien). En d'autres termes, en tant qu'accusé, il serait lésé lors d'un procès puisqu'il n'est pas citoyen américain.
5 - L'extradition doit être interdite car Julian Assange ne bénéficiera pas d'un procès équitable.
Il ne pourra pas présenter une défense d'intérêt public. Dans le système américain, il existe une tradition de négociation coercitive des plaidoyers par le biais d'une inculpation à outrance afin d'obtenir une condamnation. Julian Assange risque 175 ans de prison pour ses activités journalistiques.
Le jury sera composé de personnes liées aux agences de sécurité nationale et aux sous-traitants du gouvernement américain, et donc certainement préjudiciables à Julian Assange. Les jurés seront également sensibles aux commentaires publics du président des États-Unis et du directeur de la CIA, portant ainsi atteinte à la présomption d'innocence.
Les preuves obtenues grâce au traitement inhumain et dégradant de Chelsea Manning, à l'espionnage de ses avocats et à la soustraction illégale des dossiers juridiques de Julian Assange à l'ambassade d'Équateur ne permettent pas d'envisager un procès équitable.
L'extrader constituerait une grave violation de l'article 6 de la CEDH.
6 - Le traité américano-britannique interdit l'extradition pour des délits politiques, ce qui signifie que l'extradition de Mr Assange violerait le traité, le droit international et constituerait un abus de procédure (y compris l'article 5 de la CEDH).
Les infractions dont Assange est accusé sont toutes formellement des "infractions politiques pures" et sont donc interdites à l'extradition en vertu de l'article 4, paragraphe 1, du traité d'extradition entre les États-Unis et le Royaume-Uni. Les États-Unis commettent un abus de procédure en formulant une demande d'extradition interdite par le traité.
7 - Demande renouvelée d'admission de nouveaux éléments de preuve concernant les projets américains d'enlèvement, de remise et d'assassinat de Mr Assange en 2017 - pertinents pour ses droits au titre des articles 2 et 3 de la Convention européenne des droits de l'homme.
La CIA a prévu d'enlever et d'assassiner Assange. Cela indique qu'il sera soumis à un traitement inhumain et dégradant s'il est extradé vers les États-Unis. Extrader Assange reviendrait à le livrer directement aux mains de ceux-là mêmes qui ont comploté pour l'assassiner.
8 - Le traité d'extradition permettrait aux États-Unis de modifier ou d'ajouter des chefs d'accusation susceptibles d'exposer Julian Assange à la peine de mort.
Si les faits allégués dans la demande d'extradition sont les mêmes, Julian Assange peut être à nouveau inculpé en vertu des dispositions de la loi sur l'espionnage (Espionage Act), qui prévoient la peine de mort. Il convient de noter que Chelsea Manning a été accusée d'avoir "aidé l'ennemi", chef d'accusation passible de la peine de mort, et que des représentants du gouvernement américain ont publiquement qualifié les allégations à l'encontre de Julian Assange de trahison et réclamé la peine de mort.
📰 https://x.com/Stella_Assange/status/1754304210961666285?s=20
◾️ ◾️ ◾️
3- ♟ La rapporteuse spéciale des Nations unies sur la torture exhorte le gouvernement britannique à empêcher l'extradition imminente de Julian Assange
Communiqué de presse de l'OHCHR, le 6 février 2024
Genève, le 6 février 2024 - La Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la torture, Alice Jill Edwards, a exhorté aujourd'hui le gouvernement du Royaume-Uni à mettre un terme à l'éventuelle extradition de Julian Assange vers les États-Unis d'Amérique.
Elle a appelé les autorités britanniques à prendre en considération l'appel de Julian Assange fondé sur des craintes sérieuses que, en cas d'extradition, il risquerait d'être soumis à un traitement assimilable à la torture ou à d'autres formes de mauvais traitements ou de peines.
"Julian Assange souffre d'un trouble dépressif récurrent et installé de longue date. Le risque de suicide a été évalué. Aux États-Unis, il fait l'objet de multiples accusations, notamment au titre de la loi de 1917 sur l'espionnage (Espionage Act), pour la diffusion illégale présumée de câbles et de documents diplomatiques et autres par WikiLeaks. S'il est extradé, il pourrait être placé en isolement prolongé dans l'attente de son procès ou en tant que détenu. S'il est reconnu coupable, il pourrait être condamné à une peine pouvant aller jusqu'à 175 ans de prison", explique Mme Edwards.
Elle précise :
"Le risque d'être placé en isolement prolongé, malgré son état de santé mentale précaire, et de recevoir une peine potentiellement disproportionnée soulève des questions quant à la compatibilité de l'extradition de Mr Assange vers les États-Unis avec les obligations internationales du Royaume-Uni en matière de droits de l'homme, en particulier au titre de l'article 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ainsi que des articles 3 de la Convention des Nations Unies contre la torture et de la Convention européenne des droits de l'homme".
La rapporteuse poursuit ainsi :
"Les assurances diplomatiques de traitement humain formulées par le gouvernement des États-Unis ne constituent pas une garantie suffisante pour protéger Mr Assange d'un tel risque. Ces garanties ne sont pas juridiquement contraignantes, leur portée est limitée et la personne qu'elles visent à protéger peut ne disposer d'aucun recours si elles sont violées".
L'experte ajoute :
"J'appelle le gouvernement du Royaume-Uni à réexaminer minutieusement l'ordre d'extradition de Mr. Assange afin d'assurer le plein respect de l'interdiction absolue et indérogeable du refoulement vers la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et à prendre toutes les mesures nécessaires pour préserver la santé physique et mentale de Mr Assange".
Un dernier appel national, après une longue bataille juridique sur l'extradition de Julian Assange, est prévu devant la Haute Cour de Londres les 20 et 21 février.
Julian Assange fait l'objet de 18 chefs d'accusation aux États-Unis pour son rôle présumé dans l'obtention et la divulgation illégales de documents classifiés liés à la défense nationale, y compris des preuves révélant des crimes de guerre présumés. Il est détenu au Royaume-Uni depuis 2019, à la prison de Belmarsh.
*** *** *** *** *** *** *** *** *** *** *** *** *** *** *** *** *** *** *** *** ***
Alice Jill Edwards
Le Dr Alice Jill Edwards (Australienne) est le septième rapporteur spécial des Nations unies sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants - et la première femme - nommée par le Conseil des droits de l'homme des Nations unies. Sa nomination a été annoncée le 8 juillet 2022 et son mandat a débuté le 1er août. Avocate, universitaire et négociatrice hautement qualifiée, Mme Edwards s'est distinguée par son engagement soutenu en faveur des victimes de violations des droits de l'homme et par ses contributions essentielles à l'élaboration de normes en matière de droit international.
Conseillère auprès de gouvernements, d'organismes internationaux et régionaux, d'institutions nationales et de la société civile, Mme Edwards saisit les défis, les obstacles et les possibilités de réforme, et s'engage dans un dialogue respectueux et courtois. Au cours de ses 25 années de carrière, elle a œuvré en collaboration avec un large éventail de parties prenantes pour améliorer les résultats dans les domaines de la justice pénale, de la police et de l'application de la loi, des services militaires et de sécurité, de l'immigration, de l'asile, de l'apatridie et de la traite des êtres humains, du droit de la discrimination, et des normes pénitentiaires et correctionnelles.
Plus récemment, Mme Edwards a dirigé le secrétariat de l'Initiative pour la Convention contre la torture (CTI), une collaboration intergouvernementale unique visant à parvenir à la ratification et à la mise en œuvre universelles de la Convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (UNCAT) (2016-21). Pendant son mandat, 15 nouveaux États ont adhéré à la Convention et entamé leur parcours de mise en œuvre, dépassant de loin les taux de ratification de la plupart des autres traités relatifs aux droits de l'homme, tandis que plus de 180 États ont participé à des activités de renforcement des capacités et à des visites diplomatiques.
Auparavant, elle a été chef de section - Politique de protection et conseil juridique au Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) à Genève (2010-15), un poste institutionnel clé, après des affectations sur le terrain en Bosnie-Herzégovine, au Rwanda et au Maroc.
Parmi les travaux les plus renommés du Dr Edwards, on peut citer son argument juridique révolutionnaire, désormais accepté comme doctrine au niveau mondial, selon lequel le viol et la violence sexuelle sont des formes de torture et de persécution, ce qui a permis à des centaines de milliers de victimes de demander une protection au titre de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés. En outre, les efforts qu'elle a déployés en Bosnie-et-Herzégovine à la fin des années 1990 pour trouver des solutions appropriées à long terme après la guerre pour les femmes victimes de violences de guerre et leurs familles ont été adoptés en tant que pratique opérationnelle des Nations unies et politique des États. Des parties importantes de son travail sur le terrain ont alimenté son livre influent, Violence against Women under International Human Rights Law (Cambridge University Press, 2011), pour lequel elle a reçu le Audre Rapoport Prize for Scholarship on the Human Rights of Women (Prix Audre Rapoport pour la recherche sur les droits humains des femmes).
Les études de cas empiriques publiées par le Dr Edwards sur les alternatives à la détention administrative et ses arguments juridiques sur l'application du protocole facultatif de l'ONU à la Convention contre la torture (OPCAT) aux centres de détention pour immigrés et réfugiés ont été largement utilisés par l'ONU et les organisations internationales, les gouvernements, les tribunaux et la société civile. Son travail de conceptualisation et d'orientation de la stratégie globale pluriannuelle du HCR - Au-delà de la détention - a été décrit comme un "schéma directeur pour la défense des droits de l'homme". Elle est l'auteure, entre autres, des principes directeurs du HCR en matière de détention et des premiers principes directeurs de l'agence sur la persécution liée au genre ; elle est également l'auteure du document d'information qui sous-tend la recommandation générale n° 32 du Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes (CEDAW) et a fait partie de comités consultatifs pour la révision du protocole d'Istanbul sur les enquêtes et la documentation relatives à la torture et des principes de Mendez sur les entretiens efficaces dans le cadre des enquêtes et de la collecte d'éléments de preuve.
Avec plus de 50 publications et rapports, les principaux ouvrages dont elle est auteure ou co-éditrice sont les suivants : Human Security and Non-Citizens : Law, Policy and International Affairs (2010), Violence against Women under International Human Rights Law (2011), Nationality and Statelessness in International Law (2014), et In Flight from Conflict and Violence : UNHCR's Consultations on Refugee Status and Other Forms of International Protection (2017).
Mme Edwards est membre du conseil d'administration de revues universitaires de premier plan, dont le Torture Journal, une revue en libre accès, et a occupé des postes permanents et auxiliaires dans des universités de premier plan, notamment à Oxford, Londres et Nottingham. Elle est actuellement membre auxiliaire de la faculté du Master d'études en droit international des droits de l'homme de l'Université d'Oxford.
Au début de sa carrière dans les relations internationales, elle a travaillé pour Amnesty International et une ONG de développement au Mozambique.
Mme Edwards parle anglais, français et portugais (niveau intermédiaire).
Le Dr. Edwards est une avocate australienne qualifiée. Elle est titulaire d'un doctorat en droit international public de l'Université nationale australienne, d'une maîtrise en droit international public de l'Université de Nottingham (Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord), d'un diplôme en droit international et comparé de l'Institut international des droits de l'homme René Cassin (France) et d'une licence en droit (avec mention) et en lettres de l'Université de Tasmanie (Australie).
Le mandat de rapporteur spécial de Mme Edwards s'appuiera sur les avantages de la coopération et d'un dialogue constructif, ainsi que sur le partage de conseils concrets et pragmatiques conformes au droit international et aux meilleures pratiques. La clé d'un changement soutenu et à long terme est entre les mains des dirigeants à tous les niveaux, lesquels doivent être impliqués dans l'identification du problème et faire partie de la solution. Elle mettra au premier plan les droits des survivants et de leurs familles, notamment leur droit de s'exprimer et d'être entendus, de participer aux décisions qui les concernent, de bénéficier d'une réadaptation et d'un recours. Elle s'attachera à s'attaquer aux causes, à la prévention et à la responsabilité des pratiques inhumaines et abusives, en appliquant des méthodes et des perspectives féministes et axées sur l'égalité. La représentation et l'implication des communautés seront des thèmes importants de son travail de rapporteur. Des informations détaillées sur l'approche du Dr Edwards et ses domaines d'intervention thématiques seront présentées dans son premier rapport.
📰 https://www.ohchr.org/en/special-procedures/sr-torture/dr-alice-jill-edwards
*** *** *** *** *** *** *** *** *** *** *** *** *** *** *** *** *** *** *** *** ***
Alice Jill Edwards, Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants
Les rapporteurs spéciaux font partie des procédures spéciales du Conseil des droits de l'homme. Les procédures spéciales, le plus grand groupe d'experts indépendants du système des droits de l'homme des Nations unies, est le nom général des mécanismes indépendants d'enquête et de suivi du Conseil traitant soit de situations nationales spécifiques, soit de questions thématiques dans toutes les parties du monde. Les experts des procédures spéciales travaillent sur une base volontaire ; ils ne font pas partie du personnel des Nations unies et ne reçoivent pas de salaire pour leur travail. Ils sont indépendants de tout gouvernement ou organisation et travaillent à titre individuel.
Droits de l'homme des Nations unies, page pays - Royaume-Uni
Pour plus d'informations et les demandes des médias, veuillez contacter M. Alessandro Marra (alessandro.marra@un.org/+41 22 928 93 21).
Pour les demandes des médias concernant d'autres experts indépendants de l'ONU, veuillez contacter Maya Derouaz (maya.derouaz@un.org) ou Dharisha Indraguptha (dharisha.indraguptha@un.org).
Suivez l'actualité des experts indépendants des Nations unies en matière de droits de l'homme sur Twitter @UN_SPExperts
Suivez l'actualité de la Rapporteuse spéciale des Nations unies sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants sur Twitter @DrAliceJEdwards
◾️ ◾️ ◾️
4- ♟ Citoyenneté d'honneur pour Assange : Rome, ne sois pas si stupide ! - L'appel d'Articolo 21
Par Vincenzo Vita, le 7 février 2024, Il Manifesto
Incroyable dictu. La Ville éternelle, la capitale où, à l'époque de l'Empire romain, un non-citoyen pouvait accéder aux plus hautes institutions, freine la reconnaissance de la citoyenneté de Julian Assange à la dernière étape.
Cicéron aurait dédié l'une de ses Philippiques au maire Roberto Gualtieri, à qui l'on doit le feu vert final, ou plutôt le simple choix de ne pas s'opposer à la résolution spécifique. Cette dernière a été approuvée, même avec le soutien des universités locales, par la Commission Roma Capitale le 15 janvier. Le même texte est issu de la motion votée à la quasi-unanimité par l'assemblée du Campidoglio il y a quelques mois, le 17 octobre de l'année dernière.
S'il y avait encore des doutes, il fallait alors les dissiper à ce moment-là. L'acte formel encore manquant avait été précédé d'une discussion qui semblait avoir été exhaustive. C'est ce qui est apparu aux conseillers très engagés et aux conseillers capitolins sur le sujet. C'est aussi ce qu'ont pensé (d'après les applaudissements nourris après ce vote) ceux qui ont suivi le débat, tant sur place qu'à l'extérieur.
Il est donc inexplicable qu'il y ait un frein dans le sprint final vers la ligne d'arrivée, comme l'aurait dit Sergio Zavoli dans ses chroniques du Giro d'Italia.
Une telle éventualité ne serait ni partagée ni comprise. Un vent de tempête s'est levé. On ne peut qu'espérer pécher par excès de pessimisme, mais les voix de l'intérieur sont constantes. Le manifeste a souligné à de nombreuses reprises la gravité de l'affaire qui accable le fondateur de WikiLeaks. L'association Articolo21 a lancé un appel à la citoyenne première. Demain, une conférence de presse sera organisée par l'Ordre des journalistes lui-même. Les accusations en cours n'ont jamais été discutées sur le fond, alors que le calvaire se poursuit depuis 2010.
En cas de doute, il est recommandé de lire deux livres importants : Il potere segreto (2021) de la personne qui écrit sur le sujet depuis le début, Stefania Maurizi, et Il processo a Julian Assange (2023) de l'ancien rapporteur spécial de l'ONU contre la torture, Nils Melzer. C'est précisément l'universitaire suisse qui, entre autres, décrit avec rigueur le changement d'approche opéré lors de l'étude du dossier : d'une méfiance initiale à une conviction acharnée et passionnée de l'innocence d'Assange. Le complot ourdi par les États-Unis, la Suède, la Grande-Bretagne et (en partie) l'Équateur contre l'homme qui a mis son nez dans les arcanes des chancelleries et dans les horribles méfaits des guerres, de l'Irak à l'Afghanistan, s'est dessiné peu à peu dans les documents judiciaires. La création artificielle de l'ennemi fait partie des classiques des études de politique criminelle : l'affaire Dreyfus nous rappelle que la désignation de boucs émissaires au prix de mensonges n'est point une pratique rare. En Italie, on se souvient de la triste époque des accusations fabriquées contre Valpreda et Pinelli.
Le recours au mensonge par Colin Powell pour justifier l'attaque de l'Irak est une séquence malheureusement inoubliable : un avertissement sur l'absence de toute moralité des pouvoirs qui ne respectent pas les règles mêmes qu'ils se donnent formellement. Le temps urge. Le 20 février prochain marquera le Jour J de l'histoire. Sous le regard de Londres, les tribunaux décideront d'accepter ou de rejeter le dernier appel du panel de la défense (en présence de l'épouse de l'avocat du présumé coupable, Stella Moris). En cas de refus, Scotland Yard pourrait illico presto embarquer Assange à bord d'un avion à destination du tribunal compétent de Virginie, sur lequel la CIA a son influence et qui voudrait, non sans hasard, tuer une personne soumise aux pratiques typiques de la torture.
Pourtant, l'Ordre italien des journalistes avait décerné un titre de membre honoraire à l'inquisiteur. Et pas moins de 19 syndicats professionnels en Europe (et au Royaume-Uni même) se sont joints à une lutte pour sa liberté. Il ne s'agit pas d'évaluer les mérites ou les défauts, les goûts ou les dégoûts : lorsqu'un droit est en jeu, c'est ce dernier qui prévaut sur tout le reste. La citoyenneté de Rome parlerait au monde comme un exemple de démocratie et de civilisation. À défaut, ce sera les ténèbres.
📰 https://ilmanifesto.it/cittadinanza-ad-assange-roma-nun-fa-la-stupida
◾️ ◾️ ◾️
Appel de l'association Articolo21 au maire de Rome, Roberto Gualtieri, pour qu'il octroie la citoyenneté d'honneur à Julian Assange
Par la rédaction de Articolo 21, le 5 février 2024
Nous nous attendons à ce que l'Assemblée de la Capitale conclue dans les prochains jours le processus d'octroi de la citoyenneté d'honneur à Julian Assange.
La motion invitant à la reconnaissance de la citoyenneté du fondateur de WikiLeaks a déjà été votée à la quasi-unanimité le 17 octobre dernier. En outre, le 15 janvier dernier, la Commission de la Capitale de Rome a exprimé un avis favorable sur la proposition.
Reste maintenant à obtenir le vote final de la résolution formelle dans l'enceinte du conseil municipal.
Les tribunaux britanniques ont fixé l'audience sur l'appel du groupe de défense au 20 février prochain. En cas de rejet, l'extradition du journaliste d'origine australienne vers les États-Unis deviendra inexorable (l'Ordre italien lui a décerné le titre de membre honoraire et 19 syndicats de journalistes en Europe ont soutenu la lutte pour sa liberté).
Aux États-Unis, une peine probable de 175 ans de prison, c'est-à-dire la mort, l'attendrait. Assange est considéré comme coupable d'avoir révélé les méfaits des guerres en Irak et en Afghanistan.
Ce serait un coup mortel porté au droit même d'informer et d'être informé : un avertissement autoritaire et répressif.
De nombreuses municipalités, comme Reggio Emilia et Naples, par exemple, ont délibéré depuis longtemps.
Il serait très grave que Rome, ville ouverte et démocratique par excellence, ne ferme pas positivement la voie entamée il y a plusieurs mois.
L'association Articolo 21 a donné sa carte de membre à Julian Assange depuis longtemps, parce qu'il est le protagoniste de la difficile quête de la vérité, contre tout pouvoir manifeste ou occulte, contre tout bâillon.
Nous espérons que le maire nous écoutera, ainsi que les nombreuses associations qui se sont mobilisées et les milliers de citoyens signataires de l'appel partagé par Articolo21 avec le réseau NoBavaglio pour la liberté d'information.
Nous jugerions impardonnables tout report ou déni.
◾️ ◾️ ◾️
5- ♟ Le Parlement européen accueille une exposition sur Julian Assange avant le verdict d'extradition du Royaume-Uni
Par Eleonora Vasques, le 7 février 2024, Euractiv
Le Parlement européen a inauguré mardi soir (6 février) une exposition consacrée au fondateur de WikiLeaks, le journaliste Julian Assange, avant la décision de la Haute Cour britannique concernant son extradition vers les États-Unis, attendue les 20 et 21 février.
Assange est actuellement incarcéré à la prison londonienne de Belmarsh. Il est détenu depuis avril 2019, poursuivi par les autorités américaines pour 18 chefs d'accusation après avoir divulgué des documents de l'armée américaine et des câbles diplomatiques sur les conflits en Afghanistan et en Irak. S'il est reconnu coupable, il encourt une peine pouvant aller jusqu'à 175 ans de prison.
L'exposition intitulée L'affaire Assange : Awards & Rewards présente une série de récompenses, la citoyenneté honoraire de la ville italienne de Naples ainsi que des œuvres d'art représentant le fondateur de WikiLeaks et sa famille.
"Nous avons choisi d'exposer les récompenses décernées à Julian Assange pour mettre en lumière le soutien qu'il reçoit tant de la part des institutions que de la société civile", a déclaré à Euractiv l'eurodéputée italienne du Mouvement 5 étoiles, Sabina Pignedoli, qui a promu l'exposition dans les locaux du Parlement européen à Strasbourg, lors de l'inauguration de la soirée.
Quelques eurodéputés assisteront, selon Mme Pignedoli, au procès à Londres, et ont demandé à être présents dans la salle pour "lui témoigner notre soutien", a expliqué l'eurodéputée.
"Le même jour, plusieurs organisations de la société civile se mobiliseront pour protester contre l'extradition de Julian Assange dans différentes villes européennes", a-t-elle expliqué à Euractiv.
L'audience de fin février "sera très probablement l'ultime audience publique de Julian Assange au Royaume-Uni", a déclaré Stella Assange, avocate, militante des droits de l'homme et épouse de Julian, lors d'un entretien avec Euractiv.
"S'il perd cet appel, il aura épuisé tous les recours nationaux au Royaume-Uni, qui prendra des mesures pour l'extrader", a-t-elle souligné.
Stella Assange a également mentionné à Euractiv que le fondateur de WikiLeaks essaierait de faire appel à la Cour européenne des droits de l'homme pour bloquer l'extradition.
"C'est un moment crucial, nous essayons d'attirer le plus d'attention possible", a-t-elle expliqué lors de l'événement, auquel participait également le président de la Fédération internationale des journalistes, Dominique Pradalié.
Julian Assange fait partie des (3) finalistes 2022 du Prix Sakharov, une récompense du Parlement européen dédiée aux individus, groupes ou organisations contribuant à la protection de la liberté de l'esprit.
"Les États-Unis doivent entendre leurs alliés dire que c'est intolérable, que cela affecte les valeurs et les intérêts de l'UE car les États-Unis dépassent leurs frontières, revendiquent leur juridiction dans l'espace européen afin de limiter les libertés de la presse et le droit du public à la vérité en criminalisant le journalisme", a souligné Stella à Euractiv en décembre 2022 lors de la cérémonie de remise du prix Sakharov au Parlement européen à Strasbourg.
Eleonora Vasques est reporter politique et sur le Parlement européen à Euractiv depuis novembre 2021. Dans ses expériences précédentes, elle a travaillé au Parlement européen en tant qu'attachée de presse et correspondante indépendante pour des médias italiens et britanniques depuis Londres, Rome et Bruxelles. Elle a étudié l'histoire moderne à la Sapienza, Université de Rome, puis la politique du Moyen-Orient et l'arabe à la SOAS, Université de Londres.
◾️ ◾️ ◾️
6- ♟ "Julian Assange est censé mourir à petit feu"
Deux semaines avant une possible extradition du fondateur de Wikileaks vers les États-Unis, le journaliste d'investigation de Cologne Günter Wallraff plaide pour la libération immédiate de Julian Assange.
Par Uli Kreikebaum, le 7 février 2024, ksta.de
Les 20 et 21 février, la plus haute juridiction anglaise décidera si Julian Assange peut être extradé vers les États-Unis. Si les juges rejettent l'appel du fondateur de la plate-forme de divulgation Wikileaks, Assange pourrait être poursuivi et condamné aux Etats-Unis en vertu de l'Espionage Act, une loi vieille de plus d'un siècle promulguée pour condamner les traîtres et les espions durant la Première Guerre mondiale et restée inappliquée depuis des décennies. Assange, qui, avec l'aide des médias internationaux, a publié via la plateforme de divulgation Wikileaks des milliers de pièces documentant des crimes de guerre présumés graves perpétrés par l'armée américaine en Afghanistan et en Irak, mais aussi de nombreux autres délits imputables à des entreprises, des gouvernements et des personnes privées, encourt alors jusqu'à 175 ans de prison.
"Assange est criminalisé, bien qu'un tribunal américain ait même expressément confirmé en 2019 que les publications des documents américains relevaient de la liberté de la presse, car aucune information ne correspondant pas à la vérité n'a jamais été publiée", déclare le journaliste d'investigation de Cologne Günter Wallraff, pour qui il est indéniable que "Julian Assange est un prisonnier politique. Il doit servir d'exemple pour les autres journalistes : Ne vous frottez pas aux puissants États de ce monde".
Wallraff est l'un des soutiens allemands les plus notoires d'Assange. En 2022, Assange a reçu le prix Günter Wallraff pour la liberté de la presse et les droits de l'homme, tout comme le militant russe des droits de l'homme Alexei Navalny un an plus tard. Il y a quatre ans, l'écrivain de Cologne avait réuni 130 signataires célèbres pour une pétition en faveur de la libération d'Assange, également signée par l'ancien ministre des affaires étrangères Sigmar Gabriel et Gerhart Baum, ancien ministre de l'intérieur.
Entre-temps, le silence s'est installé autour d'Assange, incarcéré dans la prison de haute sécurité de Belmarsh à Londres.
"Beaucoup trop silencieux", estime Wallraff, "c'est justement avant ce qui pourrait être la dernière audience judiciaire avant un recours à la Cour européenne des droits de l'homme qu'il faudrait un tollé public". Avec une extradition d'Assange vers les États-Unis, "ce n'est pas moins que l'avenir du journalisme libre qui est en jeu - et donc de la démocratie".
Mardi, au siège du Parlement européen à Strasbourg, a été inaugurée une exposition documentant les distinctions internationales d'Assange - et à laquelle, outre l'épouse d'Assange, Stella, Wallraff a contribué par un discours.
Dans cette lettre, l'écrivain rend hommage au fait que "Julian Assange, par son courage, ses mérites et son engagement pour la vérité, a contribué comme peu d'autres journalistes d'investigation à la nécessaire clarification de divers crimes de guerre, dont des crimes contre l'humanité".
On ne peut tolérer que "les journalistes soient poursuivis, torturés et emprisonnés en tant que porteurs de mauvaises nouvelles". Si cela se produit comme dans le cas d'Assange, un climat de peur et de silence sera instauré. Et cela contredit profondément les valeurs démocratiques fondamentales".
Dans son discours, qu'il a fait lire par une collaboratrice en raison de son état grippal, Wallraff a comparé le cas Assange à celui du colonel Dreyfus, dont l'écrivain Émile Zola avait pris l'exemple voici 126 ans pour dénoncer les exactions et l'injustice de l'armée et de la justice.
"En raison d'une manipulation des preuves et d'erreurs juridiques, le colonel Dreyfus - bien qu'innocent - avait été déclaré coupable d'espionnage pour le compte du Reich allemand et condamné à la prison à vie. Dans le cas d'Assange, nous avons tout cela et plus encore : des erreurs juridiques, des preuves manipulées, une torture psychologique ou encore une accusation d'espionnage contre un innocent", explique Wallraff.
Dreyfus fut par la suite d'abord gracié, puis reconnu innocent et pleinement réhabilité.
"Mais pour cela, il a fallu des individus et des collectifs courageux qui se sont engagés avec ténacité et intrépidité en faveur de Dreyfus et donc de la justice. C'est exactement ce que nous devons faire à nouveau aujourd'hui - cela dépend de chacun - jusqu'à ce que Julian Assange soit enfin un homme libre".
Günter Wallraff : Julian Assange n'a pas seulement révélé des crimes de guerre en Irak et en Afghanistan
Selon Wallraff, Assange s'est surtout fait connaître pour avoir révélé des crimes de guerre commis par l'armée américaine en Irak et en Afghanistan.
"Ce qui est souvent ignoré aujourd'hui : Julian Assange a également publié des livres expliquant pourquoi il ne peut y avoir de société juste sans transparence de ses structures de pouvoir - et pas de presse libre si celle-ci est dictée par les intérêts des entreprises ou des gouvernements. Il a notamment publié des milliers et des milliers de documents internes de la secte de scientologie, de nombreuses vidéos brutes d'émeutes au Tibet, brisant ainsi la censure totalitaire chinoise ; ainsi que des dossiers sur des transactions illégales de la banque suisse Julius Baer ou encore le manuel secret de torture américain du camp de prisonniers 'extralégal' de Guantanamo".
Depuis douze ans, Assange "subit pour cela une persécution impitoyable".
Il est "présenté comme l'incarnation du mal et de l'abject, il est littéralement victime de diffamation. C'est ainsi que la CIA, le service secret le plus puissant du monde, pratique la désinformation ciblée et fait chanter un criminel pour obtenir de lui un faux témoignage en tant que témoin principal. Ils ont fait de Julian Assange un paria, un démon égocentrique, un monstre", a critiqué Wallraff.
Günter Wallraff : Julian Assange a besoin de notre soutien, tout comme nous avons besoin de personnes de sa trempe.
Sa vision des choses :
"On joue la montre. On essaie de le tuer à petit feu. Le message est le suivant : "Regardez ce qui arrive à des individus de ce genre ! Nous allons les traquer, nous allons les bousculer" ! L'information représente "l'oxygène de la démocratie. Tout comme Julian Assange a besoin de notre soutien, nous avons besoin de personnes de sa trempe. Nous devons réussir à empêcher son extradition et obtenir sa liberté et sa réhabilitation totale".
◾️ ◾️ ◾️
7- ♟ Une visite à Julian Assange en prison
Tout comme les règles relatives aux visites dans les prisons, le recours à la loi sur l’espionnage est arbitraire et punitif. La justice ou la sécurité n’ont rien à voir là-dedans.
Nous devenons tous prisonniers des caprices des gardiens utilisant l'Espionage Act pour nous maintenir dans l'ignorance et dans le droit chemin. Avec l'extradition d'Assange, la liberté de la presse, la responsabilité des gouvernements et une myriade d'autres libertés supposées contre les persécutions gouvernementales sont en jeu. Si l'utilisation actuelle de la loi sur l'espionnage (Espionage Act) est maintenue, chacun d'entre nous se retrouvera soit visiteur, soit visité. Que l'on soit l'un ou l'autre, cette loi nous envoie tous en prison.
Par Jeffrey Sterling, le 7 février 2024, Progressive Hub
À la mi-décembre 2023, Charles Glass, écrivain, journaliste, animateur et éditeur réputé, a rendu visite à Julian Assange, détenu à la prison de Belmarsh, au Royaume-Uni. Assange y est incarcéré depuis avril 2019. Il attend son dernier appel pour faire échouer les efforts des États-Unis visant à l'extrader pour qu'il ait à répondre de certaines des mêmes accusations auxquelles j'ai été confronté en vertu de la loi sur l'espionnage (Espionage Act). Glass relate sa visite dans un article paru récemment dans The Nation. Son récit m'a renvoyé directement en prison. La visite de Glass à Assange aurait pu être celle qu'il m'aurait rendue.
Je me souviens parfaitement de Charles Glass. Il m'a écrit lorsque j'étais au FCI Englewood, la prison dans laquelle j'ai été incarcéré après avoir été condamné pour violation de la loi sur l'espionnage en 2015. Lui et d'autres m'ont envoyé quelques-uns de ses livres, notamment Americans in Paris et Tribes with Flags. J'ai été extrêmement reconnaissant de ce soutien. Je les avais déjà lus, mais la lecture depuis sa cellule permet d'avoir une perspective différente, même sur des chemins déjà empruntés. Mes yeux de prisonnier les déchiffraient pour la première fois. D'une certaine manière, sa visite à Assange était une ouverture similaire de soutien pour moi-même et mon expérience en prison.
Je n'essaie en aucun cas de me comparer à Julian Assange, mais je sais ce qu'il vit et ce à quoi il est confronté. La déclaration de Glass selon laquelle les "...journées d'Assange se ressemblent toutes : l'espace restreint et clos, la solitude, les livres, les souvenirs, l'espoir que l'appel de ses avocats contre l'extradition et l'emprisonnement à vie aux États-Unis ne puisse aboutir" valait également pour moi. Mais le plus profond pour moi a été de lire l'expérience de Glass en tant que personne rendant visite à un détenu. Pour moi, le temps passé avec un visiteur était une oasis hautement désirée dans le désert sans fin qu'est la prison. Le seul moment où je pouvais avoir un lien plus substantiel avec le monde à l'extérieur des murs de la prison. Les courriels et les lettres sont toujours très appréciés, mais rien ne peut remplacer un contact réel, ou au moins le fait d'être dans la même pièce qu'un être cher ou un sympathisant. La valeur d'un visiteur ne peut être sous-estimée, les autres jours passés à lutter contre la monotonie, l'oppression et l'ennui de la prison ont tous été supportés et endurés pour l'expérience singulière d'une visite. J'imagine qu'Assange a éprouvé la même impatience à l'idée d'une visite prochaine, seul moment de la vie carcérale où l'on peut se rappeler que l'on est toujours en vie, toujours humain.
Glass qualifie habilement de "lugubre" et d'"inhumaine" la prison où est détenu Julian Assange. Je me suis rendu compte que les mêmes qualificatifs s'appliquent à l'expérience vécue par les visiteurs. Ceux-ci, tout comme les détenus, sont soumis à un processus émotionnel et violent pour le simple privilège d'une visite en prison. Me concernant, ce fut une succession d'émotions douloureuses et désirées, avec le point culminant de la visite et la dépression de la séparation au terme de celle-ci. J'ai toujours dû lutter pour éviter que la visite soit entachée par les fouilles à nu déshumanisantes que je devais subir avant et après chacune d'entre elles. Il était difficile de comprendre que mon visiteur avait vécu un enfer similaire. La visite de Glass à Assange m'a fait découvrir l'autre facette des visites aux détenus.
Lors d'une visite en prison, détenu et visiteur sont confrontés à des règles arbitraires, sans véritable sens ni raison. C'est une épreuve décourageante que d'essayer de se conformer aux règles lorsqu'elles évoluent au gré des caprices des gardiens. J'ai eu un petit rire amer en lisant comment les gardiens ont jugé que les livres que Glass avait apportés pour Assange présentaient un "risque d'incendie" et n'étaient donc pas autorisés. Les autres restrictions imposées par Belmarsh sur les livres, la manière dont ils peuvent être reçus et le nombre autorisé pour un détenu ne sont pas très éloignées des mêmes règles arbitraires en vigueur au centre de détention provisoire d'Englewood. Aucun recours, aucune contestation de l'autorité n'est possible à ce niveau. Si vous voulez recevoir une visite ou des livres, vous devez vous plier aux règles, quelles qu'elles soient et quelle que soit la manière dont elles sont appliquées à ce moment-là.
Chaque fois que ma femme Holly venait me rendre visite, je sentais qu'elle s'efforçait de se montrer forte pour moi et de ne pas céder à l'enfer qu'elle devait endurer simplement pour avoir le temps de s'asseoir près de moi et me tenir la main. À maintes reprises, elle a enduré une multitude de règles de visite absurdes et arbitraires à des fins punitives. Holly ne savait jamais si ce qu'elle portait était acceptable ou si la fouille corporelle allait une fois de plus frôler l'agression. À l'approche de la prison, le jour des visites, elle ne pouvait qu'espérer que les gardiens seraient au moins dans un bon jour et qu'ils lui épargneraient peut-être une certaine indignité. Certains gardiens avaient la réputation justifiée, parmi les détenus, d'être inutilement cruels, en particulier avec les visiteuses. J'ai également eu la chance de recevoir la visite d'autres amis, dont Norman Solomon de Roots Action. À bien des égards, je me suis senti horriblement malheureux qu'ils aient dû endurer une telle humiliation pour venir me voir, la prison étant conçue pour vous prouver que vous n'avez que peu de valeur, si tant est que vous en ayez une. J'imagine qu'Assange a pu ressentir la même chose lorsque Glass lui a rendu visite.
Je me suis toujours interrogé sur ce que ressentaient Holly et Norman lorsqu'ils attendaient dans la salle des visites avec d'autres personnes "libres" qui avaient réussi à passer les gardiens pour rendre visite à leurs proches détenus. Bien qu'étrangers l'un à l'autre, ils partageaient un point commun malheureux : ils n'espéraient rien de plus que de passer du temps avec un être cher ou un ami. Quelle que soit leur vie hors des murs de la prison, tous les visiteurs doivent espérer que le système leur accordera au moins le plus simple des besoins humains, le temps.
Un poil honteux, je me suis trouvé quelque peu jaloux de lire que Glass et Assange avaient pu se retrouver face à face lors de leur visite. La configuration du centre de détention provisoire d'Englewood consistait en une rangée de chaises attachées, Holly et moi ne pouvions pas nous faire face. Tout mouvement pour s'asseoir de travers ou bouger sur la chaise afin de se faire face pouvait être un motif de fin de visite. Une fois que je retrouvais Holly, nous pouvions nous étreindre au début et à la fin, voire nous embrasser. Je lâchais rarement sa main lors des visites. Une fois ensemble, nous passions une grande partie du temps à décider ce qu'il fallait prendre dans les distributeurs automatiques. Alors Holly devait me laisser pour faire la queue aux distributeurs, puis au four à micro-ondes. Les choix qui s'offraient à moi, si les gardiens se donnaient la peine de réapprovisionner, n'étaient pas très différents de la camelote que Glass a pu se procurer pour Assange. Je sais qu'Assange ressentait la même chose que moi, quelle que soit la nourriture du parloir. Elle était bien meilleure que celle servie à n'importe quel autre moment en prison.
Une fois les formalités préalables réglées, nous pouvions passer à la visite. Mais le temps n'est jamais suffisant. On en manquait toujours pour pouvoir dire ou entendre ce que l'on voulait ou ce que l'on espérait. En prison, le temps ne passe vite que pendant les visites. Une dernière étreinte, puis la queue pour une nouvelle fouille à nu, voilà comment se terminaient pour moi les visites avec Holly. Je me suis senti chanceux qu'elle fasse partie du premier groupe de visiteurs escortés vers la sortie, de cette façon, aucun de nous ne pouvait voir la souffrance sur le visage de l'autre de l'autre côté de la pièce. La visite de Glass à Assange s'est terminée à peu près de la même manière : le visiteur est libre de sortir, le prisonnier retourne à sa cellule.
Je vous encourage à lire le récit que fait Glass de sa visite à Assange. C'est bien plus que le simple récit d'une visite à une personne en prison, c'est une illustration de l'Espionage Act et de la manière dont il est utilisé par le gouvernement américain pour réduire au silence et punir quiconque ose dénoncer ses méfaits et ses illégalités. Tout comme les règles de visite dans les prisons, le recours à la loi sur l'espionnage est arbitraire et punitif ; la justice et la sécurité n'ont rien à voir là-dedans. Nous devenons tous prisonniers des caprices des gardiens qui utilisent la loi sur l'espionnage pour nous maintenir dans l'ignorance et dans le droit chemin. Avec l'extradition d'Assange, la liberté de la presse, la responsabilité des gouvernements et une myriade d'autres libertés supposées contre les persécutions gouvernementales sont en jeu. Si l'utilisation actuelle de la loi sur l'espionnage (Espionage Act) est maintenue, chacun d'entre nous se retrouvera soit visiteur, soit visité. Que l'on soit l'un ou l'autre, cette loi nous envoie tous en prison. J'étais là, avec Charles Glass, dans le parloir de cette prison. Compte tenu des enjeux si Julian Assange est extradé, nous y étions tous.
Jeffrey Sterling est un ancien chargé de mission de la CIA qui a travaillé pendant près d'une décennie au sein de l'Agence, notamment au sein de l'Iran Task Force. Il a intenté un procès pour discrimination à l'embauche contre la CIA, mais l'affaire a été rejetée au motif qu'elle constituait une menace pour la sécurité nationale. Il a passé deux ans et demi en prison après avoir été reconnu coupable de violation de la loi sur l'espionnage. Aucune preuve incriminante n'a été produite lors du procès et Sterling continue de clamer son innocence. Ses mémoires, "Unwanted Spy : The Persecution of an American Whistleblower, a été publié fin 2019. Il contribue actuellement à ProgressiveHub.net en se concentrant sur les questions relatives aux lanceurs d'alerte.
📰 https://progressivehub.net/a-visit-to-julian-assange-in-prison/
◾️ ◾️ ◾️
8- ♟ Secret d'État et audiences publiques, 1ère partie
Le gouvernement britannique tente de dissimuler l'appel à l'extradition d'Assange - une "audience publique" - derrière un ensemble baroque de règles kafkaïennes.
Non seulement l'État Big Brother veut connaître votre identité et savoir où vous vous trouvez, mais personne d'autre n'est autorisé à regarder l'audience avec vous. Pourquoi ?
Par Craig Murray, le 7 février 2024, blog personnel
Lors des audiences d'extradition d'Assange à la Woolwich Crown Court et à la Old Bailey, la tribune publique était limitée à cinq personnes, voire parfois seulement deux. La pandémie Covid en était le prétexte. Mais l'accès en ligne a été refusé à Human Rights Watch, Amnesty International ainsi qu'à de nombreux autres groupes et individus, y compris des journalistes. Les médias mainstream se sont de toute façon rendus complices en ne rapportant quasiment rien de cette audience, moins d'un pour cent de la couverture accordée à l'affaire Johnny Depp contre Amber Heard.
La Cour internationale de justice s'est réunie à La Haye pour examiner le génocide perpétré par Israël, et l'ensemble de la procédure était accessible à toute personne dans le monde disposant d'une connexion vidéo décente, par le biais d'un lien d'accès libre et sans mot de passe. Tout comme les audiences cruciales de l'appel Assange prévues à la Haute Cour les 21 et 21 février, la CIJ est un tribunal public. Pourtant, les juges de la High Court de Londres ont adopté une série de règles kafkaïennes visant à limiter le nombre de personnes pouvant assister au procès, sous prétexte de libre accès.
Voici l'intégralité de cette absurdité stalinienne. Je vous garantis que vous allez halluciner... (ndr : voir *aperçu traduit en fin de cet article)
N'oubliez pas, comme l'indique ce document, qu'il s'agit d'une "audience publique". Vous devez demander l'autorisation de la regarder et justifier du pourquoi vous le souhaitez. On peut supposer que "C'est une audition publique. La loi exige qu'elle soit publique" n'est pas une raison suffisante. Il n'y a aucune garantie de recevoir l'autorisation.
Vous devez vous trouver en Angleterre ou au Pays de Galles pour pouvoir regarder. Les demandes émanant d'Écosse et d'Irlande du Nord "ne seront en principe pas acceptées". Bien que ce soit le gouvernement britannique qui extrade Julian en vertu d'un traité d'extradition entre le Royaume-Uni et les États-Unis, et non d'un traité d'extradition entre l'Angleterre et le Pays de Galles et les États-Unis.
Julian est un citoyen australien. Mais vous n'êtes pas "officiellement" autorisé à regarder en Australie. C'est le gouvernement des États-Unis qui cherche à extrader Julian. Mais les citoyens des États-Unis ne seront pas "officiellement" autorisés à suivre l'audience en ligne.
Les Écossais et les Irlandais ne seront pas autorisés à regarder, sans doute parce que leur loyauté envers l'État sécuritaire est notoirement connue pour être douteuse ! Je n'ai aucune idée quant au cas des îles Anglo-Normandes ou de l'île de Man.
Non seulement l'État Big Brother veut connaître votre identité et savoir où vous vous trouvez, mais personne d'autre n'est autorisé à regarder l'audience avec vous. Pourquoi ? Quel mal y a-t-il à ce que votre mère la regarde ? Il s'agit d'une putain d'audience publique.
Pourquoi craignent-ils qu'on les regarde ? ? Pourquoi cela les effraie-t-il ? Que pensent-ils que ces vilains téléspectateurs vont faire ? Craignent-ils que Poutine et Xi ne regardent en secret et ne se livrent à un tour de magie diabolique sur internet qui ferait s'effondrer le monde occidental ? Qu'est-ce qui motive cette restriction délirante ?
Pourquoi personne, en dehors de la presse d'État et des médias milliardaires, n'est-il autorisé à fournir des informations en direct sur ce qui se passe à la Cour ? Pourquoi est-il acceptable que CNN donne des informations en direct, mais pas qu'un citoyen concerné le fasse ?
Pourquoi tout le monde doit-il être menacé de deux ans d'emprisonnement s'il enfreint ces règles insensées ?
Je demande instamment à tous ceux qui lisent ce billet de contacter le tribunal comme indiqué à l'adresse listoffice@administrativecourtoffice.justice.gov.uk, et de demander à assister en ligne à l'audience, en suivant les règles énoncées au paragraphe 4 de l'ordonnance du tribunal ci-dessus. Si vous n'êtes pas au Royaume-Uni, veuillez inclure dans vos motivations le fait que les États-Unis revendiquent explicitement dans cette affaire la compétence universelle de leur loi sur l'espionnage pour le monde entier, de sorte que tout le monde est concerné, y compris vous.
Veuillez ensuite faire savoir sur les réseaux sociaux que vous avez déposé votre candidature et encouragez les autres à le faire. Postez des mises à jour lorsque vous recevez une réponse du tribunal, y compris en indiquant régulièrement s'il vous ne recevez pas de réponse. Publiez toutes celles que vous obtenez. Retournez auprès d'eux et argumentez.
Officiellement, il s'agit d'une "audience publique". Officiellement, ces juges sont engagés à rendre une "justice ouverte". Quelle tartufferie ! Que veulent-ils nous cacher ?
* Aperçu
Il est ordonné que,
1. Si les parties souhaitent présenter des observations sur la manière dont le tribunal devrait traiter les demandes de participation à l'audience, présentées en vertu du paragraphe 3 ci-dessous, ces observations doivent être déposées auprès du tribunal au plus tard à 16 heures le 9 février 2024, heure de Paris. Ces observations doivent être déposées auprès du tribunal avant 16 heures le 9 février 2024.
2. Toute personne peut, avec l'autorisation écrite d'un employé du HMCTS [Her Majesty Courts Tribunals Service] ( accordée seulement après l'approbation du tribunal), observer la procédure au moyen d'une liaison audiovisuelle.
3. Toute personne souhaitant obtenir une telle autorisation écrite doit envoyer sa demande à listoffice@administrativecourtoffice.justice.gov.uk avant le 15 février 2024 à 16 heures.
4. Toute personne ("demandeur") sollicitant une autorisation en vertu du paragraphe 3 ci-dessus doit inclure dans sa demande :
(a) son nom complet
(b) l'adresse électronique du demandeur
(c) des informations indiquant si le demandeur se trouve dans la juridiction de l'Angleterre et du Pays de Galles à tout moment pendant qu'il assiste à l'audition à distance (si une instruction de transmission doit être donnée) ; et, si ce n'est pas le cas, des détails sur le lieu où se trouve le demandeur
(d) toute information que le demandeur souhaite apporter à l'appui de la demande, y compris, notamment, les raisons pour lesquelles le demandeur estime qu'il serait dans l'intérêt de la justice de donner une telle instruction, et
(e) une déclaration du requérant dans les termes suivants : "Je consens et m'engage envers la Cour, si je suis autorisé à assister à l'audience à distance, à ne pas enregistrer, prendre des photos et/ou diffuser une quelconque séquence de la procédure. Je reconnais que cela peut constituer un délit et/ou un outrage au tribunal, passible d'une peine d'emprisonnement et/ou d'une amende. Je m'engage à respecter toutes les instructions qui me seront données par la Cour au cours de l'audience.
J'accepte et je prends l'engagement envers la Cour de ne fournir à personne le lien mis à ma disposition pour accéder à l'audience".
5. Une demande d'autorisation non déposée dans les délais prescrits par la présente ordonnance et/ou non conforme au paragraphe 4 de la présente ordonnance pourra être rejetée.
10. La diffusion via le lien nécessite l'activation du lien au moins 5 minutes avant le début de la procédure, afin que les informations puissent être communiquées par le personnel de la Cour avant le début de la procédure.
11. Cette instruction pourra être révisée ou révoquée à tout moment et sans préavis par une nouvelle instruction de la Cour.
12. Toute partie souhaitant modifier ou annuler cette instruction peut le faire sur demande écrite.
13. Dépens de l'affaire.
Note importante : veuillez consulter les règles ci-jointes pour les personnes assistant à des procédures à distance. Tout manquement à ces règles peut constituer une infraction pénale ou un outrage au tribunal, passible d'une peine d'emprisonnement.
RGPD [Règlement relatif à la protection des données] : Vos données à caractère personnel seront traitées afin de faciliter votre présence à l'audience, de veiller au bon déroulement des procédures et d'appliquer les lois et lignes directrices applicables, y compris celles qui requièrent un comportement rigoureux pendant la procédure, interdisent les messages écrits en direct de la cour et la réalisation d'enregistrements audio-visuels. Ces données ne seront pas exploitées à d'autres fins ni conservées dans des fichiers plus longtemps que nécessaire à ces fins.
Motifs :
A) La Cour anticipe le souhait des représentants des médias et du public d'assister à distance à l'audience prévue les 20 et 21 février 2024, pour une période de deux jours. Pour gérer cette situation, nous avons mis en place une procédure par laquelle toute personne souhaitant assister à l'audience à distance peut solliciter des consignes de transmission.
B) Le tribunal n'acceptera pas, en principe, une demande de transmission pour un requérant se trouvant hors Angleterre et Pays de Galles au moment de l'audience. Toute personne introduisant une demande de transmission et ne se trouvant pas en Angleterre et au Pays de Galles est tenue de fournir des informations (conformément au paragraphe 4(d) ci-dessus) quant aux raisons pour lesquelles il serait néanmoins dans l'intérêt de la justice de rendre une ordonnance de transmission à son égard.
C) Les requêtes introduites tardivement, en raison des perturbations qu'elles entraînent pour le travail de la Cour, sont susceptibles d'être rejetées, excepté s'il existe des raisons impérieuses pour lesquelles le requérant n'a pas été en mesure de se conformer aux directives de la Cour.
Fait ce 1er février 2024
Règles pour les observateurs tiers (audition publique)
Vous avez accès à distance à une audience publique. Le pouvoir judiciaire et les services de la Cour s'engagent à assurer une justice transparente
Ceci est soumis à cinq règles simples visant à protéger le processus judiciaire.
1. Ne partagez pas votre lien sans autorisation. Le lien ne doit être utilisé par quelqu'un d'autre que s'il a été approuvé par le tribunal.
2. Adoptez un comportement respectueux. Une audience constitue une affaire sérieuse. Comportez-vous comme si vous étiez dans une salle d'audience. Ne dérangez pas et n'interrompez pas. Suivez les directives du juge. Tout manquement à ces instructions peut entraîner la suppression de l'accès à l'audience.
3. N'enregistrez pas l'audience. L'enregistrement d'une audience est une infraction pénale. Vous ne devez pas enregistrer de vidéo, d'audio, de photos ou de captures d'écran de l'audience.
4. Si vous comptez faire un reportage, soyez prudent. Vous pouvez réaliser un compte rendu en direct par écrit si vous êtes journaliste ou si vous avez l'autorisation expresse du juge présidant l'audience. Dans le cas contraire, les comptes rendus devront être faits a posteriori. Dans tous les cas, des restrictions en matière de reportage peuvent être imposées. Il vous incombe de vérifier si de telles restrictions s'appliquent.
5. Considérez toutes ces règles avec sérieux. Si vous les enfreignez, vous ne risquez pas seulement de perdre votre accès. Vous pourriez vous rendre coupable d'un délit ou d'un outrage à magistrat, passible d'une amende ou d'une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à deux ans.
Pour vous assurer que ces règles sont respectées, nous vous conseillons de
- de trouver un endroit discret et calme pour participer à l'audition
- d'éteindre votre micro ainsi que votre appareil photo
- d'éteindre tout autre appareil, sauf si vous avez la permission de l'utiliser
- de vérifier si des restrictions de déclaration s'appliquent
📰 https://www.craigmurray.org.uk/archives/2024/02/state-secrecy-and-public-hearings-part-one/
◾️ ◾️ ◾️
9- ♟ Campagne Amnesty International : Libérez Julian Assange : une mobilisation mondiale
Par Amnesty International Italie, le 8 février 2024
Les 20 et 21 février, la Cour suprême de Londres décidera si Julian Assange a épuisé toutes les possibilités de s'opposer à son extradition vers les États-Unis. En vue de ces dates cruciales, nous souhaitons réaffirmer une fois encore que le journalisme n'est pas un crime. Nous continuerons à faire pression pour que la demande d'extradition soit rejetée, que les charges soient annulées et que Julian Assange soit libéré.
De Milan à Rome, en passant par Naples et Catane, nous nous joindrons aux actions organisées par FreeAssange Italia. Trouvez l'initiative la plus proche de votre ville sur la carte ! - ndr : voir article 1 de l'actualité Assange semaine 4 - Janvier 2024
OÙ EN SOMMES-NOUS ?
En décembre 2023, la Haute Cour de justice de Londres a décidé d'entendre ce qui pourrait être le dernier appel de Julian Assange au Royaume-Uni contre son extradition vers les États-Unis. Deux jours d'audience ont été fixés aux 20 et 21 février 2024. Dans cette tentative désespérée de Julian Assange de se défendre, les juges devront statuer sur la question de savoir s'il a encore une chance de faire appel auprès d'un tribunal britannique ou d'entamer les démarches administratives en vue d'une extradition imminente. Quant à Julian Assange, il a déjà passé près de cinq ans dans la prison londonienne de Belmarsh, où il est détenu dans l'attente de son procès depuis avril 2019, une détention qu'Amnesty International a jugée très largement arbitraire.
Le 6 juin 2023, la Haute Cour du Royaume-Uni a rejeté le premier appel d'Assange contre le mandat d'extradition, signé par Priti Patel, alors ministre de l'intérieur, en juin 2022. S'il est extradé, Assange pourrait passer le reste de sa vie en prison pour avoir publié des documents secrets diffusés par Wikileaks en 2010. Assange se trouve donc à un moment extrêmement critique de son parcours judiciaire. S'il perdait cet appel, toutes les voies juridiques au Royaume-Uni seraient épuisées et il devrait officiellement faire appel à la Cour européenne des droits de l'homme pour s'opposer à son extradition. Cependant, il n'est pas certain que cette Cour veuille accorder des "mesures provisoires" pour bloquer l'extradition avant que sa requête ne soit jugée recevable et examinée sur le fond. L'offre américaine d'une "assurance diplomatique" pourrait faire obstacle à de telles mesures, auquel cas Assange courrait le risque d'une extradition immédiate et d'une détention subséquente aux États-Unis.
La publication par Wikileaks de documents divulgués à l'organisation par d'autres sources fait partie du processus auquel les journalistes d'investigation et les éditeurs peuvent légalement se livrer dans le cadre de leur activité professionnelle. Les accusations d'espionnage et de fraude informatique portées contre Assange sont motivées par des considérations politiques et violent le droit à la liberté d'expression. En outre, elles peuvent avoir un "impact considérable" sur la liberté des médias dans le monde, en incitant les journalistes et les rédacteurs en chef à s'autocensurer pour éviter le risque de poursuites judiciaires.
📰 https://www.amnesty.it/free-julian-assange-mobilitazione-globale/
◾️ ◾️ ◾️
10- ♟ Application du "Terrorism Enhancement" à l'encontre d'un ex-programmeur de la CIA pour divulguation d'informations : une évolution radicale
Un juge américain a appliqué une "majoration de peine pour terrorisme" lors du prononcé de la condamnation de l'ancien programmeur de la CIA Joshua Schulte, reconnu coupable d'avoir divulgué des documents du "Vault 7" à WikiLeaks.
Par Kevin Gosztola, le 6 février 2024, The Dissenter
Le 1er février, un juge américain a pris la décision extraordinaire d'appliquer une "majoration pour terrorisme" en condamnant l'ancien programmeur de la CIA Joshua Schulte à 40 ans de prison.
L'application d'une peine aggravée pour terrorisme représente une évolution brutale dans les poursuites pour fuites, qui pourrait avoir de profondes répercussions sur la dénonciation des abus et la liberté de la presse.
Joshua Schulte était accusé d'avoir divulgué à WikiLeaks des documents de piratage informatique de la CIA (Vault 7). En juillet 2022, un jury l'a reconnu coupable de plusieurs infractions liées à la loi sur l'espionnage (Espionage Act).
Trente-trois ans et quatre mois de la peine ont été prononcés pour les infractions liées à la loi sur l'espionnage. (Le reste est dû au "matériel d'abus sexuel d'enfants" trouvé en possession de Schulte, une affaire grave qui a fait l'objet d'un autre procès en 2023).
Selon une estimation des avocats de Schulte, l'aggravation a alourdi de 10 à 12 ans sa peine d'emprisonnement.
La majoration adoptée par le juge Jesse Furman a été appliquée à l'un des délits informatiques dont Schulte a été reconnu coupable en vertu de la loi sur la fraude et les abus informatiques (Computer Fraud and Abuse Act, CFAA) - le seul chef d'accusation d'"accès non autorisé à un ordinateur pour obtenir des informations relatives à la défense nationale".
Avec l'adoption de l'USA Patriot Act de 2001, à la suite des attentats du 11 septembre, ce crime particulier a été ajouté à une liste d'infractions désignées comme "crimes fédéraux de terrorisme".
La loi sur l'espionnage n'a pas été ajoutée et ne fait pas partie de la liste des délits américains pour lesquels des majorations liées au terrorisme peuvent être appliquées. Toutefois, l'article de la CFAA concernant les "informations relatives à la défense nationale" contient des termes figurant également dans une disposition de la loi sur l'espionnage.
Les procureurs ont fait valoir que Schulte avait été condamné pour un délit qui était "calculé pour influencer ou affecter la conduite du gouvernement par l'intimidation ou la coercition, ou pour exercer des représailles contre la conduite du gouvernement". Par conséquent, il était nécessaire d'ajouter un élément de terrorisme à sa peine d'emprisonnement.
La défense de Schulte a objecté que la loi sur l'antiterrorisme et la peine de mort effective (AEDPA), qui a élargi les peines pour les infractions liées au terrorisme, était une réponse à l'attentat à la bombe d'Oklahoma City perpétré par Timothy McVeigh. Il estimait que "le gouvernement s'en prenait aux droits et aux libertés individuelles des Américains".
Oussama ben Laden, comme l'a reconnu CBS News, était opposé aux bases militaires américaines au Moyen-Orient et au soutien des États-Unis à l'occupation israélienne des territoires palestiniens. Les attentats du 11 septembre ont donc été perpétrés par des pirates de l'air en représailles à la conduite du gouvernement américain.
En revanche, le gouvernement n'a jamais affirmé que Schulte avait un motif idéologique pour télécharger des fichiers de la CIA et les transférer à WikiLeaks. Schulte était "en colère" à cause de "problèmes de personnel" qui ont conduit à sa réaffectation de la Direction du soutien aux opérations (OSB) de la CIA, où des "outils cybernétiques" étaient mis au point pour les "opérations antiterroristes".
Le gouvernement a répondu : "Le fait que Schulte ait commis ses crimes en utilisant un clavier et une souris plutôt que des explosifs ou des armes à feu ne change rien aux conséquences catastrophiques qu'ils ont eues pour la sécurité nationale".
"La commission de ces crimes", selon le gouvernement, démontre la "difficulté particulière de le dissuader et de le réhabiliter" - précisément le type de préoccupation qui anime l'inclusion de l'aggravation en premier lieu.
Cependant, la défense de Schulte n'a jamais soutenu que le gouvernement ne pouvait pas appliquer une aggravation pour terrorisme à une personne engagée dans des activités cybernétiques criminelles. Elle a simplement affirmé que l'intention ou les motivations de Schulte étaient pertinentes.
Le calendrier du gouvernement américain montre que Schulte ne s'est pas engagé à poursuivre une "guerre de l'information" contre le gouvernement avant décembre 2017 - après que sa caution ait été révoquée et qu'il ait été incarcéré au Metropolitan Correctional Center (MCC) à New York. Le procureur général Bill Barr a ensuite imposé des mesures administratives spéciales, ou SAM, qui ont donné lieu à un traitement qu'une plainte de sa défense a décrit comme "véritablement odieux, inconcevable, cruel et hors du commun".
Comme le rapporte Matthew Russell Lee, le juge Furman a estimé qu'il importait peu que Schulte soit "différent" de McVeigh ou de Ben Laden. Le juge a estimé que le comportement de Schulte visait à exercer des représailles contre le gouvernement américain.
Selon le juge, la plus grande fuite d'informations sensibles de la CIA dans l'histoire de l'agence n'était pas simplement le produit d'un conflit sur le lieu de travail.
Rappel de la façon dont Chelsea Manning a été accusée d'aider l'ennemi
Peu d'inculpations d'employés ou de sous-traitants du gouvernement en vertu de la loi sur l'espionnage ont également inclus le chef d'accusation de crime informatique, qui peut être assorti de mesures d'aggravation en matière de terrorisme.
Sous la présidence de Donald Trump, la lanceuse d'alerte de la NSA, Reality Winner, le lanceur d'alerte du FBI, Terry Albury, et le lanceur d'alerte sur les drones, Daniel Hale, auraient pu être accusés d'avoir outrepassé l'accès autorisé pour obtenir des "informations relatives à la défense nationale". Pourtant, le ministère de la justice ne l'a pas fait.
Le lanceur d'alerte de la NSA Edward Snowden n'a pas non plus été accusé d'avoir violé cette partie de la CFAA lorsqu'il a été inculpé en 2013.
En revanche, la lanceuse d'alerte de l'armée américaine Chelsea Manning, qui a fourni plus de 700 000 documents à WikiLeaks, et le fondateur de WikiLeaks Julian Assange, qui a publié ces documents, ont tous deux été accusés d'avoir enfreint cette disposition.
Manning a été poursuivie par l'armée américaine dans le cadre d'un système juridique distinct, et les procureurs militaires n'ont pas tenté d'appliquer un renforcement de la qualification terroriste lors de la détermination de la peine après qu'elle a été reconnue coupable d'avoir enfreint la CFAA. Néanmoins, les procureurs ont accusé Manning d'avoir "aidé l'ennemi".
Les procureurs militaires ont affirmé qu'elle avait sciemment fourni des "renseignements" à "l'ennemi, par des moyens indirects". Lors d'une audience en 2011, une vidéo de propagande d'Al-Qaïda a été diffusée, dans laquelle figurait Adam Gadahn, porte-parole du groupe terroriste. Il a mentionné les câbles du département d'État américain divulgués par Manning et a exhorté les djihadistes à tirer parti d'un "large éventail de ressources sur l'internet".
Plus tard, l'armée américaine a affirmé que des "supports numériques" avaient été découverts lors de la descente de la SEAL Team 6 dans le complexe de Ben Laden à Abottabad, au Pakistan, en mai 2011. Ces supports contiendraient une lettre de Ben Laden à Al-Qaïda demandant à un membre de rassembler des informations du ministère de la défense. Une réponse a été envoyée, contenant des rapports d'incidents militaires en Irak et en Afghanistan, ainsi que des câbles diplomatiques.
Le juge, le colonel Denise Lind, a demandé aux procureurs si Manning aurait été accusée d'avoir "aidé l'ennemi" si elle avait transmis les documents au New York Times. Les procureurs ont indiqué que cela n'aurait fait aucune différence.
Après l'acquittement de Manning par Lind, les défenseurs de la liberté de la presse et du premier amendement ont été quelque peu soulagés. Par exemple, Floyd Abrams, qui a représenté le Times dans l'affaire des Pentagon Papers, a écrit : "Cette vision étonnamment large de ce qu'il faut faire pour aider un ennemi aurait mis en péril une large part d'un journalisme inestimable".
Ce que la condamnation de Schulte signifie pour Assange
Malheureusement, cette "vision extensive à couper le souffle" a fait surface dans l'affaire contre Schulte. La première section de la note de condamnation du gouvernement accusait WikiLeaks d'avoir "rendu publics" les "cyber-outils de collecte de renseignements" aux "adversaires de l'Amérique", et reprenait plus tard l'affirmation de la CIA selon laquelle la publication équivalait à un "Pearl Harbor numérique".
Lors du procès de Schulte en 2022, Paul Rosenzweig, ancien chercheur invité de la Heritage Foundation et farouche opposant d'Assange et de WikiLeaks, a témoigné en tant qu'"expert WikiLeaks" du gouvernement. Le gouvernement a demandé à Rosenzweig si WikiLeaks s'était concentré sur "une cible particulière".
"Il est statistiquement vrai que l'écrasante majorité des informations qu'ils ont publiées concernent les États-Unis. D'autres pays ont effectivement fait l'objet d'un certain nombre de fuites, mais l'écrasante majorité d'entre elles concernent les États-Unis", a-t-il répondu.
Bien que l'argument en faveur d'une aggravation pour terrorisme n'accusait pas explicitement Schulte d'aider indirectement des groupes terroristes, WikiLeaks a été clairement présenté au tribunal comme une organisation à laquelle quelqu'un transmettrait des informations s'il voulait exercer des représailles contre le gouvernement américain.
Prouver que Schulte était déterminé à exercer des représailles était essentiel pour que les procureurs obtiennent une aggravation pour terrorisme. En outre, il est raisonnable de penser que les procureurs estimaient que les actions de Schulte aidaient les terroristes parce qu'il savait que WikiLeaks publierait des informations sur les cyber-outils.
Dans le cas d'Assange, le ministère de la justice est encore plus explicite. Les procureurs ont recyclé des preuves supposées qui n'ont pas réussi à convaincre un juge militaire que Manning avait "aidé l'ennemi".
Comme l'a écrit l'agent spécial du FBI Megan Brown dans une déclaration sous serment à l'appui de l'acte d'accusation contre Assange, l'équipe 6 du SEAL a recueilli "un certain nombre de supports numériques" lors de son raid contre le complexe de Ben Laden. L'équipe a découvert
"1) une lettre de Ben Laden à un autre membre de l'organisation terroriste Al-Qaïda dans laquelle Ben Laden demandait à ce membre de rassembler les documents du ministère de la défense publiés par WikiLeaks,
et 2) une lettre de ce membre d'Al-Qaïda à Ben Laden contenant des informations tirées des rapports sur la guerre d'Afghanistan publiés par WikiLeaks".
Les procureurs du gouvernement pourraient facilement utiliser les médias numériques dans le cadre d'une argumentation visant à obtenir une aggravation de l'accusation de terrorisme si Assange est reconnu coupable d'avoir commis un délit informatique. Cette qualification agravante permettrait au Bureau des prisons de soumettre Assange à des conditions d'incarcération extrêmement sévères.
Plus important encore, rien, après la condamnation de Schulte, n'empêche le gouvernement américain de poursuivre systématiquement les fuites en accusant la personne accusée d'une divulgation non autorisée d'avoir enfreint la loi sur l'espionnage et la loi sur le financement du terrorisme. De cette manière, la peine peut être assortie d'une majoration pour terrorisme.
Cela permettrait au gouvernement de réprimer encore plus durement toute personne divulguant des informations à la presse, y compris les médias indépendants qui, comme WikiLeaks, ont ouvertement critiqué les opérations de l'armée américaine ou de la sécurité nationale.
Ou, comme l'a résumé la Freedom of the Press Foundation, "lorsque les représentants du gouvernement ont trouvé un accusé aussi antipathique que l'ex-employé de la CIA Joshua Schulte, ils ont saisi l'occasion d'intensifier leur guerre contre les divulgateurs par des moyens qu'ils pourraient utiliser plus tard pour punir les vrais lanceurs d'alerte".
📰 https://thedissenter.org/terrorism-enhancement-against-schulte-stark-development/
◾️ ◾️ ◾️
11- ♟ Monsieur le Haut Commissaire : Aidez à libérer Assange
Dans une lettre ouverte, Christophe Peschoux, récemment retraité du Bureau des droits de l'homme des Nations unies, exhorte son ancien supérieur à aider l'éditeur de WikiLeaks, dont l'appel en justice sera entendu à Londres dans le courant du mois.
Par Christophe Peschoux, le 9 février 2024, Consortium News
Monsieur le Haut Commissaire,
Les 20-21 février prochains, une Haute Cour à Londres décidera du sort de Julian Assange : la liberté ou la mort. Deux juges trancheront si le fondateur de Wikileaks pourra encore interjeter un ultime appel, ou finira ses jours dans une geôle américaine.
Mr Assange n’a commis aucun crime. Son seul forfait est d’avoir dévoilé quelques-uns des crimes des puissants de ce temps. Crime de lèse-majesté !
Les guerres américaines en Irak, en Afghanistan et ailleurs, ont détruit des millions de vies et ruiné ces pays pour plusieurs générations. Personne n’a été poursuivi. Au contraire, ces crimes ont été dissimulés en toute impunité aux États-Unis, alors que Mr Assange est puni pour avoir publié des preuves de certains d’entre eux. Justice politique.
Il est inculpé en vertu d’une loi sur la trahison datant de 1917. Peut-on trahir les lois d’un pays qui n’est pas le nôtre ? La loi américaine serait-elle universelle ? L’accepter ouvrirait dangereusement la porte à l’arbitraire que donne le pouvoir sans contrôle : demain, un autre État puissant pourrait s’arroger le droit, en vertu de la loi du plus fort, de poursuivre un journaliste, un chercheur ou un militant des droits étrangers, accusés d’avoir enfreint sa loi.
Priver quelqu’un de sa liberté est en droit international une décision exceptionnelle, qui doit être dûment motivée pour garantir une justice équitable. Pourtant, présumé innocent comme tout accusé, Mr Assange est emprisonné sans procès depuis près de cinq ans comme un dangereux criminel dans une prison de haute sécurité près de Londres, alors qu’il pourrait être libéré sous caution et placé sous contrôle judiciaire, en attendant l’issue d’une procédure qui de tout évidence traîne les pieds et prend ses aises avec le temps – le bref laps de temps de la vie d’un homme.
Pourquoi le maintenir en prison ? Pour l’empêcher d’échapper à une justice d’évidence dans son cas vouée à lui faire défaut. Les juges britannique qui ont prêté leur nom à cette parodie de justice et l’ont jeté en prison, tel un ennemi public, se demandent-ils pourquoi leurs décisions sont si suspectes ? Présomption d’innocence ? Certes, mais il doit d’abord être puni.
Aux États Unis il est inculpé de 18 chefs d’accusation passibles de 175 ans de prison. Extradé, il aura fort peu de chances d’avoir un procès équitable. Le tribunal qui le jugera est situé à deux pas de la CIA, dans un État truffé d’anciens ou actuels employés de ces "services" dont Wikileaks a révélé certaines des pratiques criminelles. Lors de la procédure d’exception qui lui sera imposée, son droit à la défense sera largement compromis.
Ceux qui depuis 14 ans le trainent dans la boue et le harcèlent, grâce aux puissants relais d’une presse serviles, n’ont aucun intérêt à un procès public prolongé qui ouvrirait la boîte à Pandore des innombrables crimes de l’Amérique. Ils l’ont accusé de viol et d’avoir mis en danger des vies américaines. Ces deux charges n’ont pas résisté à l’épreuve des faits.
D’autres avant lui jugés fort gênants, comme Jeffrey Epstein ou son complice en France, ont été retrouvés "suicidés" dans leur cellule dans des circonstances douteuses. Il sera facile de mettre sa mort sur le compte de l’épuisement et du désespoir d’une vie amputée, privée de sens et de liberté.
Aucun des États européens prônant l’État de droit, la démocratie et les droits de l’homme, tout en les piétinant chaque jour, n’a offert l’asile politique à Mr Assange. Laisser sans mot dire ces États extrader cet homme, au nom d’une justice qui n’est pas la nôtre, mais la robe noire du pouvoir, c’est consentir à s’en faire complice.
Pourquoi cet acharnement de la part de l’ensemble des États occidentaux, de gauche comme de droite dans son cas, à violer toutes les normes nationales et internationales des droits de l’homme ? Est-ce pour faire un exemple dissuadant ainsi quiconque serait tenté de divulguer les crimes de certains États ?
Monsieur le Haut commissaire,
Mr Assange est un défenseur des droits de l’homme ; un journaliste et un éditeur créatif innovant et l’un des nôtres. Il ne devrait pas être enfermé, mais se tenir avec nous au sein de notre bureau dans le feu de l’action. N'est-il pas persécuté pour avoir fait ce que tout journaliste d'investigation sérieux, tout enquêteur sérieux en matière de droits de l'homme, tout ce que chacun d'entre nous dans ce bureau devrait faire au quotidien : enquêter sur des allégations, documenter les crimes des États et d'autres crimes et promouvoir la vérité, la responsabilité et la justice ?
Le combat pour sa liberté n’est pas seulement une bataille pour la libération d’un homme, indûment cloué au pilori public par nos inquisitions modernes. Elle est une des batailles emblématiques de notre époque : celle du droit contre la raison d’État ; de la vérité contre le mensonge ; d’une information libre et vérifiée sans laquelle il ne saurait y avoir de citoyenneté, contre le devoir de transparence incombant à tout gouvernement démocratique.
Ce combat est aussi emblématique de cette fracture qui creuse sa béance au cœur de nos sociétés, et prépare les tyrannies qui viennent et les révoltes qui grondent : C’est confrontation récurrente entre "nous, les peuples" (comme commence le préambule de la Charte de l’ONU) et la violence et l’arrogance des "élites" de ce monde, de plus en plus dissociées de la société et pour qui les droits de l’homme sont devenus un embarras "has been". Les droits de l'homme ne sont-ils pas nés de cette lutte ? L'histoire continue.
Tous les groupes de défense de la liberté de presse et des droits de l’homme considèrent l’inculpation de Mr Assange comme la menace la plus grave pour la liberté de la presse aux États-Unis et ailleurs. Notre bureau, lui, est pourtant resté silencieux. Comment se fait-il que les deux derniers hauts commissaires l’aient soigneusement ignoré et n’aient osé dire un mot pour le défendre ?
Monsieur le Haut-commissaire, je n’ai pas attendu de partir à la retraite en octobre dernier pour informer le bureau sur les menaces que sa persécution faisait poser sur nos droits et nos libertés. J’ai tenu l'équipe de direction informée sur la base d'informations vérifiées. J’ai beaucoup travaillé, sur mon temps libre, et avec plusieurs Rapporteurs spéciaux pour que l’ONU prenne la parole et fasse respecter la loi. Mes mémos successifs étant restés sans réponse, espérant atteindre leur cœur, j'ai composé et envoyé à Mme Bachelet, [qui a occupé le poste de haut-commissaire aux droits de l'homme de l'ONU de 2018 à 2022] puis à vous-même, le poème annexé à cette lettre : "Minuit moins le quart". Votre silence a été suivi par celui de la plupart de mes collègues. La peur de parler et la lâcheté, Monsieur le Haut Commissaire, règnent au sein du Bureau des droits de l'homme des Nations unies.
Je suis bien conscient que votre tâche est l'une des plus difficiles parmi ces nations désunies, chacune d'entre elles tirant sur la feuille de vigne des droits de l'homme pour cacher sa honte.
Je sais aussi que le financement de cet office est politique et que ce sont les Etats les plus riches qui tiennent les ficelles de nos bourses. Mais si ce bureau manque de moyens à la hauteur des défis qu'il doit relever - la primauté d'une loi juste est partout sur la défensive - compromettre son indépendance et son impartialité pour quelques millions de dollars est un calcul douteux.
Ne vaut-il pas mieux un petit navire voguant vaillamment sur les crêtes des normes internationales pour montrer la voie à suivre, qu'un gros paquebot vidé de son âme ?
Plus que d'argent, le monde d'aujourd'hui a grand besoin de la hauteur et de l'autorité morale de quelqu'un qui s'exprime, au-dessus de la mêlée de l'histoire et de ses champs de bataille, pour nous rappeler les dangers d'une démesure déchaînée, pour redresser la barre et éviter le pire. Mais l'autorité morale n'est pas une question de position et ne s'acquiert que par l'intégrité, le courage et l'exemple.
Vous n'avez que quatre ans, Monsieur le Haut Commissaire, pour "faire la différence" dans le monde réel. Quoi que vous fassiez, pour équilibrer le loup et l'agneau, à l'issue de votre mandat, les puissances qui vous ont choisi vous recracheront comme un noyau de cerise. N'échangez pas ce qui reste de l'âme à ce bureau, dont le monde a tant besoin, contre les mirages d'un Haut-Commissariat aux droits de l'homme 2.0.
Révéler la vérité ne doit pas devenir un crime.
N'est-il pas grand temps pour ce bureau de faire entendre sa voix au-dessus des compromis et des intérêts à court terme qui étouffent la vie ? Une voix libérée qui exige, sans pudeur, la liberté de Julian Assange pour le salut de la nôtre.
Il est déjà très tard, Monsieur le Haut Commissaire, il est minuit moins le quart...
Minuit moins le quart...
Il est grand temps mes amis
De réaliser
Que la persécution
De Julian est la nôtre
Qu’il est notre frère
D’arme et de parole
Et l’un des éclaireurs
Des crimes de ce temps
Commis en notre nom…
Prisonnier d’opinion
Au cœur dévoyé
De nos démocraties
Qui montrent par son supplice
Ce qu’elles sont sous leur masque…
Sa persécution
Est une attaque frontale
Portée à la racine
De nos régimes
Et de nos droits :
Notre droit à penser
À réfléchir
À nous informer
À échanger, partager
Et à construire ensemble
De nos mains, de nos cœurs
Et de nos esprits libres
Le monde dans lequel
Nous voulons vivre et aimer…
Je dis le monde dans lequel
Nous voulons vivre
Et pas seulement rêver et passer…
Qu’a-t-il défendu ?
O presque rien !
La liberté d’expression
D’information d’une presse
Qui est encore
Libre et indépendante…
Le droit des citoyens
À la vérité
Notre devoir de savoir
Ce que les gouvernants
Que nous élisons
Font en notre nom
Surtout lorsque dans l’ombre
Dont ils ont tant besoin
Ils commettent leurs crimes…
Le droit des journalistes
Celui de tout chercheur
D’enquêter librement
Sur toute question
D’intérêt public
Et de protéger
Soigneusement leurs sources…
Le droit des lanceurs d’alerte
De divulguer des faits
Qui heurtent leur conscience
Sans peur de représailles
Et le devoir de les protéger
Par le droit, la justice
S’ils sont attaqués…
La protection
De notre vie privée
Indispensable à l’éclosion
De notre être humain…
Le droit à un procès
Juste et équitable
Et à ne pas être privé
De sa liberté
Arbitrairement…
Le droit de ne pas être
Soumis au supplice
Pour avoir agi
En son âme et conscience…
Et le droit au respect
Et à la protection
Par le droit, la justice
Pour avoir osé dire
La vérité…
N’est-ce pas ce que nous
"Aux droits de l’homme"
Des Nations sans amour
Faisons tous les jours ?
Documenter les crimes
Des États et des autres
Exposer leurs mensonges
Promouvoir la justice ?
N’est-ce pas la vocation
De cette institution
Et la raison d’être
De notre engagement
Pour un peu plus d’être
Et un monde moins sombre ?
À travers la persécution
De Julian Assange
Ce sont nos libertés
Qui sont menacées
Les fondements mêmes
De cette démocratie
Qui reste le moins pire
Espace de liberté
Malgré ses souillures
Ses perversions, ses vices
Et ses caricatures
Ses crimes innombrables
Épouvantables
Commis en notre nom…
Combien de pays
Ont été dévastés
De peuples martyrisés
Depuis trop de siècles
Par ce monde chrétien
Qui se prétend libre ?
Ce sont ces fondements
Moraux de notre vie
Qui sont visés au nom
De la raison d’État
De la sécurité nationale
Désormais en sursis
Pour combien de temps encore ?
Il est minuit moins le quart…
Par solidarité
Avec celui qui paye
De sa vie, de sa liberté
Depuis dix ans déjà
Le crime d’avoir dit
Quelques vérités crues
Et d’avoir mis à nu
Certains de nos pouvoirs
Nous avons le devoir
De nous opposer
À son extradition
Qui signera, honteusement
Sa sentence de mort
Dans les caveaux du droit
De qui est le plus fort…
Les voyous qui le réclament
De procédure en procédure
Au nom d’une justice
Qui n’est pas la nôtre
Le garderont à vue
Le reste de sa vie…
S’il ne meurt pas avant
D’épuisement
Et de désespoir
Pour avoir trop cru
À la lumière
Au pouvoir du droit
De la vérité
Et de la justice
Que nos institutions
Sont censées protéger…
S’il ne met pas lui-même
Fin à cette non-vie
Qu’est devenue la sienne
Ayant perdu espoir
De revoir le soleil
Et le bonheur de vivre
Enfin avec les siens…
Il est fort à craindre
Qu’il soit aussi
Retrouvé un matin
Sans vie dans sa cellule
"Suicidé" comme d’autres
Devenus trop embarrassants…
Ceux qui le réclament
Pour avoir mis à nu
Certains de leurs secrets
N’ont pas intérêt
À ce que son procès
Ouvre la boite
À Pandore de leurs crimes…
N’ajoutons pas à son supplice
Le poids de notre indifférence…
Il sera vain ensuite
De pleurer sur ses pas
De demander pardon
De ne pas lui avoir
Tendu la main à temps…
Julian n’a nul besoin
De larmes de crocodiles…
Ce dont il a besoin
C’est de notre fraternité
De notre solidarité
Consciente et active
Et désormais urgente
Chaque minute compte
Il est déjà
Minuit moins le quart…
Ce poème vous invite
À vous joindre en chœur
À cette supplique
Adressée aux iniques
Qui tiennent en leurs serres
La vie de Julian
Pour exiger sa liberté
Et à travers la sienne
Défendre la nôtre…
Cela nous le devons
Non seulement à Julian
Mais aussi à ces valeurs
Précieuses, universelles
Auxquelles nous croyons
Et sommes attachés
Et qui donnent sens
Et beauté à nos vies…
(Avril 2022 - Source en français Arrêt sur Info)
*
Christophe Peschoux est un haut responsable des droits de l'homme et l'un des enquêteurs les plus expérimentés du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme (HCDH). Il a consacré 42 ans, dont la moitié sur le terrain, à la protection des réfugiés et des populations contre la violence des États. Il est l'auteur de deux livres et de plusieurs articles sur l'histoire des Khmers rouges. Il a pris sa retraite en octobre dernier, mais pas pour des causes qui lui sont chères.
📰 https://consortiumnews.com/2024/02/09/dear-mr-high-commissioner-help-free-assange/
◾️ ◾️ ◾️
12- ♟ L'artiste qui, pour protéger Julian Assange, prend en otage des œuvres d'art de grande valeur
Doté d'un coffre-fort suisse de trente-deux tonnes, Andrei Molodkin assure qu'il détruira des œuvres de Picasso, Rembrandt et Warhol si le fondateur de WikiLeaks meurt en prison.
Par Nadia Beard, le 9 février 2024, The New Yorker
Par un après-midi de janvier exceptionnellement chaud, je suis arrivé à Cauterets, petite ville thermale des Pyrénées, dans le sud-ouest de la France, pour rencontrer l'artiste russe Andrei Molodkin. Les rues regorgent d'étals de fromageries. Des télécabines suspendues emmenaient les skieurs au sommet de la montagne, projetant des ombres animées sur les familles déambulant dans la ville. En me baladant parmi elles, je me suis demandé ce que ces familles penseraient si elles savaient ce que Molodkin faisait au sommet de la colline.
Voici quelques années, Molodkin a acheté un vaste sanatorium du 19ème siècle, un bâtiment majestueux, symétrique, de couleur jaune magnolia, aux sols carrelés et au toit à pignon surmonté d'une charpente en fer forgé. Le jour de ma venue, Molodkin, âgé de cinquante-sept ans, portait un pantalon fonctionnel, des bottes de travail et une veste isothermique, tous de couleur noire, lorsqu'il m'a invité à entrer dans le spacieux hall d'entrée du sanatorium. À l'une des extrémités se dressait un coffre-fort de banque suisse de trente-deux tonnes, d'environ trois mètres sur neuf, que Molodkin avait importé d'Amsterdam. L'artiste, ainsi que plusieurs hommes travaillant dans une usine voisine, ont introduit les panneaux du coffre-fort à l'intérieur, puis les ont boulonnés avec le concours de deux conseillers en sécurité venus de Berlin.
Alors que Molodkin s'efforçait d'ouvrir la lourde porte métallique du coffre-fort, j'ai pu compter cinq serrures différentes. À l'intérieur se trouvaient une dizaine de caisses en contreplaqué fabriquées sur mesure, destinées à accueillir un ensemble d'œuvres offertes par des artistes et des collectionneurs. La collection comptera des œuvres de Picasso, Rembrandt, et Andy Warhol, ainsi que des pièces plus contemporaines d'artistes tels qu'Andres Serrano, Santiago Sierra et Sarah Lucas, dont la valeur collective est estimée par l'artiste à une quarantaine de millions de dollars. "Nous avons seize œuvres d'art pour l'instant, mais les gens continuent de nous proposer d'en donner davantage", explique-t-il, une note de satisfaction perceptible dans sa voix. Au milieu des caisses, une petite pompe pneumatique relie deux barils blancs, l'un contenant de la poudre d'acide, l'autre un accélérateur capable de provoquer une réaction chimique suffisamment importante pour réduire tout le contenu du coffre à l'état de débris en l'espace de deux heures.
Le projet s'intitule Dead Man's Switch (en quelque sorte, l'interrupteur du condamné à mort), et le "condamné à mort" en question n'est autre que le fondateur australien de WikiLeaks, Julian Assange, actuellement en détention provisoire dans la prison londonienne de haute sécurité de Belmarsh. En 2010, WikiLeaks a publié une série de fuites provenant de Chelsea Manning, soldat de l'armée, sur les activités militaires américaines en Irak et en Afghanistan. Après que la Suède a émis un mandat d'arrêt européen à l'encontre d'Assange dans le cadre d'allégations d'agression sexuelle (une affaire qui a depuis été abandonnée), Assange s'est réfugié à l'ambassade de l'Équateur à Londres en 2012, où il est resté pendant sept ans. Un mois plus tard, le gouvernement américain ajoutait de nouvelles charges, l'inculpant de violation de la loi sur l'espionnage (Espionage Act) pour son rôle dans la divulgation par WikiLeaks de documents militaires et diplomatiques secrets. L'acte d'accusation a suscité de vives inquiétudes quant à ses implications pour les droits du premier amendement et les journalistes traitant de questions de sécurité nationale.
Les 20 et 21 février 2024, Julian Assange sera entendu par un tribunal dans le cadre de ce qui pourrait être son dernier recours possible contre l'ordre d'extradition des États-Unis. Le jour de l'audience, deux caméras vidéo installées à Cauterets, l'une dans un angle du coffre-fort et l'autre à l'extérieur, commenceront à diffuser des images en direct sur YouTube. Au cas où Assange viendrait à mourir en prison, un bouton télécommandé sera activé pour déclencher la réaction chimique, entraînant la désintégration du contenu du coffre-fort. Selon Molodkin, les œuvres d'art ne seront rendues à leurs propriétaires que si Julian Assange est libéré et qu'il jouisse de sa pleine liberté. L'artiste estime que l'extradition d'Assange vers les États-Unis et son incarcération dans ce pays menaceraient très dangereusement sa vie. "Assange symbolise une ligne rouge", a-t-il dit.
Molodkin a rencontré Stella Assange et des membres de WikiLeaks en mars dernier, à Londres, lors d'une exposition organisée par l'organisation artistique a/political. Lancée en 2013 par l'entrepreneur et collectionneur d'art d'origine kazakhe Andrei Tretyakov (qui a aidé Molodkin à acquérir le sanatorium), cette organisation soutient le travail d'un certain nombre d'artistes souvent engagés sur des sujets politiques provocateurs. Les membres de WikiLeaks "ne sont aucunement impliqués", a précisé l'artiste.
"Lorsque vous exercez une persécution politique, vous attaquez le capital politique d'une personne afin de la réduire au silence et de l'emprisonner plus facilement", m'a confié Stella Assange, au téléphone. Elle a évoqué les risques pour la santé et l'automutilation de son mari en prison, citant également un rapport selon lequel les responsables de la CIA sous Donald Trump ont réclamé des "options" pour tuer Assange. (En 2021, une enquête de Yahoo News a révélé que de hauts responsables de la CIA. et de l'administration Trump auraient eu des discussions sur la manière de l'assassiner Assange, suite à la publication par WikiLeaks, en 2017, d'outils de piratage de la CIA. connus sous le nom de Vault 7). "Comment regagner son capital politique ? Cela se fait à tous les niveaux de la société. [Le projet de Molodkin] est comme une mesure de protection", a-t-elle observé. Elle a déclaré que son mari connaissait et approuvait le projet Dead Man's Switch, dans la mesure où il attirerait l'attention sur son sort. "C'est une sorte de bouclier humain, mais sous forme d'art. Un bouclier artistique".
Dead Man's Switch intervient à un moment où le spectre de la prise en otage d'œuvres d'art de grande valeur comme outil pour atteindre des objectifs idéologiques se répand. Just Stop Oil, un groupe d'activistes écologistes basé au Royaume-Uni, a fait parler de lui pour avoir vandalisé des tableaux célèbres dans des musées afin de protester contre l'utilisation continue des combustibles fossiles. Jusqu'à présent, les encadrements ou les protections ont été physiquement endommagés et la sécurité de nombreux musées a été mise en état d'alerte, mais rien ne prouve que ces interventions ont atteint l'objectif visé, à savoir réduire l'extraction des combustibles fossiles. L'historien de l'art et conservateur britannique Julian Stallabrass a qualifié les actions de Just Stop Oil de "coup de relations publiques, plus un spectacle qu'autre chose". La démarche de Molodkin - du moins pour l'instant - est conceptuelle. Les artistes comme Molodkin, a observé Stallabrass, sont dans une position d'impuissance politique. "Et la réponse à une telle situation est de trouver la chose la plus précieuse à votre disposition et de l'exploiter", a-t-il déclaré.
Molodkin a fait carrière en interrogeant les structures du pouvoir - ainsi que la corruption politique et la violence qui les sous-tendent souvent - à travers son art. Son travail, que la critique Margarita Tupitsyn a décrit dans Artforum comme "un point de rencontre entre les pratiques low- et high-tech", fait partie de la collection permanente du Tate Modern, à Londres. Deux de ses matériaux de prédilection sont le pétrole brut et le sang humain. Dans "Fifa World Cup Filled with Qatari Oil (The Dirtiest Cup)", exposée par a/political en 2022, Molodkin a présenté une réplique en résine acrylique transparente du trophée de la Coupe du monde avec un tube inséré sous le trophée expulsant bruyamment des giclées de pétrole brut à intervalles irréguliers.
L'invasion massive de l'Ukraine par la Russie a poussé environ un million de Russes à partir à l'étranger, mais Molodkin m'a dit que sa réinstallation en France était moins une fuite brutale qu'une séparation progressive. Molodkin s'oppose à l'invasion de l'Ukraine par la Russie, un événement qui, selon lui, a révélé sa propre naïveté à l'égard de Poutine et la possibilité que, comme il le dit, "une agression aussi brutale, des tueries et des bombardements, puissent se produire contre un pays indépendant sans aucune raison". Molodkin a marqué les célébrations du Jour de la Victoire en Russie, le 9 mai 2022, avec sa première œuvre de réalité augmentée. Sur les réseaux sociaux, les visiteurs de la Place Rouge de Moscou et des ambassades russes de Londres et de Washington ont superposé une réplique évidée du portrait de Vladimir Poutine - dégoulinant du sang donné par les amis ukrainiens de l'artiste - à leur environnement. Il a baptisé cette œuvre Poutine gorgé de sang ukrainien.
L'automne dernier, j'ai rendu visite à Molodkin à Maubourguet, petite commune endormie située à un peu plus d'une heure de route de Cauterets, où il vit depuis une dizaine d'années. Il travaille à la Fonderie, une ancienne usine de pièces militaires qu'il a achetée et transformée en centre pour une communauté d'artistes partageant les mêmes idées et venant régulièrement produire des œuvres. Au-dessus de l'entrée du bâtiment principal, j'ai remarqué que la première lettre du néon d'une grande enseigne clignotait, faisant en sorte que le mot rouge bonbon "LAUGHTER" (rire) se lise parfois "SLAUGHTER" (massacre). Molodkin m'a accueillie sous une imposante installation métallique rouge et noire de l'artiste conceptuel Erik Bulatov, né en 1933, sur laquelle on peut lire, en russe, "Tout n'est pas si effrayant". Alors que nous étions en train de la scruter, Molodkin s'est mis à rire. Lorsque je lui ai demandé pourquoi, il m'a répondu : "Parce que le monde est très effrayant !" Pour lui, la plus grande qualité de la Fonderie est qu'"on peut y réaliser des projets impossibles à mener ailleurs". Il ajoute : "Il n'y a aucune règle".
En 2015, l'artiste et photographe américain Andres Serrano, âgé de soixante-treize ans et sans doute plus connu pour Piss Christ, photo représentant un crucifix immergé dans un réservoir de son urine, a utilisé la Fonderie comme site pour développer un projet sur la torture, dans lequel il a invité des résidents locaux à participer à des mises en scène de torture qu'il a ensuite photographiées. L'espace était "parfait pour ce dont j'avais besoin", a déclaré Serrano au téléphone depuis son domicile new-yorkais. Il a contribué à Dead Man's Switch non pas pour des raisons idéologiques, mais parce qu'il a "un faible" pour Molodkin. "Je pense que si des œuvres d'art sont détruites pour une bonne cause, il faut laisser faire", m'a dit Serrano.
L'artiste italien Franko B, de 64 ans, qui a également fait don d'une de ses propres œuvres au projet, visite régulièrement la Fonderie et y a dirigé un atelier de quinze jours destiné aux artistes de la performance, dont l'objectif était, a-t-il dit, "de faire sortir les gens de leur zone de confort". L'atelier a débuté par cinq jours de jeûne et de silence, et comprenait des exercices tels qu'une marche de six heures à travers une cour. "Ici, c'est porte ouverte", a-t-il déclaré.
Molodkin fait partie d'une génération d'artistes politiques russes dont le travail fait appel à des tactiques de choc pour se rebeller contre les carcans de leur époque, parmi lesquels Avdey Ter-Oganyan, dont l'"action" de 1998 consistant à profaner des icônes orthodoxes russes l'a conduit à s'exiler à Prague, et Oleg Kulik, dont l'œuvre la plus connue est une performance nue, datant de 1994, dans laquelle il prend les traits d'un chien enragé. Dans une zone à deux niveaux de la Fonderie, j'ai découvert le travail de l'artiste russe Petr Davydtchenko, qui s'est fait connaître en 2021 après avoir mangé une chauve-souris vivante devant le Parlement européen, à Bruxelles, pour protester contre ce qu'il appelait la distribution inéquitable du vaccin covid-19. Le jour de ma visite, il développait un projet utilisant des rats morts.
Le sud de la France attire depuis longtemps les artistes désireux de créer des coteries créatives à l'écart des centres urbains. Molodkin a été inspiré par l'avant-garde russe, en particulier par le peintre Kazimir Malevich qui, en 1919, a quitté Moscou avec une cohorte d'artistes pour la ville de Vitebsk, où il a fondé une nouvelle théorie de l'art moderne. "Pour quitter la culture dominante, ne pas être influencé par le monde de la consommation et d'autres aspects urbains, il est nécessaire de créer son propre langage", a déclaré Molodkin. "Une telle chose n'est possible que loin des villes".
Molodkin semble prendre plaisir à se remémorer les dysfonctionnements d'une exposition. Il m'a raconté qu'en 2007, lors d'une exposition dans une galerie new-yorkaise, de l'huile provenant de ses œuvres s'était infiltrée dans la galerie située au rez-de-chaussée. "Ils n'étaient pas très contents", se souvient-il en souriant. L'attitude joviale et parfois loufoque de Molodkin peut quelquefois sembler en contradiction avec ses œuvres maculées d'huile et de sang. "Pour travailler contre le pouvoir, il faut avoir de l'humour, même s'il est sombre ou tragique", explique-t-il. "Cela vous permet de penser différemment".
Molodkin se considère comme un absolutiste de la liberté d'expression. "L'Union soviétique m'a appris que le fait de permettre à des gens de contrôler l'information ne peut que les corrompre", a-t-il déclaré. "La liberté d'information et d'expression doit être absolue en toutes circonstances". En 2020, une représentation vidéo d'une de ses œuvres intitulée La Maison Blanche gorgée du sang des citoyens américains devait être projetée sur la façade de l'organisation artistique à but non lucratif CulturalDC, à Washington, D.C. L'événement a toutefois été suspendu après que quatre personnes ont été poignardées à la suite d'une marche dénonçant la victoire électorale de Joe Biden. Selon Kristi Maiselman, directrice exécutive et conservatrice de l'organisation, la décision a été prise "par respect et par souci de sécurité", mais a indigné l'artiste. "Cela m'a prouvé que l'on ne peut montrer ce que l'on veut, que la liberté d'expression n'existe plus", a-t-il déclaré. (Quelques semaines plus tard, l'œuvre a été projetée sur l'hôtel Trump à Washington).
Molodkin et son fils de huit ans vivent dans une villa de deux étages aux volets rouges écaillés, sur le site de la Fonderie. Dans le hall d'entrée de la maison, une toile du sol au plafond, éclaboussée de pétrole brut, présente une déclaration de l'artiste sur les incidents de l'exposition intitulée "Fuck You" As Incident. À quelques mètres de là, un ours blanc en peluche grandeur nature, conçu par Franko B, domine tous ceux qui veulent entrer dans la salle à manger.
Molodkin a grandi à Buy, ville située au nord-est de Moscou. Assis à sa lourde table à manger en bois, il se souvient de son enfance lorsque son père l'emmenait aux bains publics locaux, où il avait été frappé par les étranges tatouages observés sur les baigneurs, dont beaucoup étaient d'anciens condamnés. "Il y avait des tatouages incroyables avec des images religieuses, ce qui était interdit à l'époque", a-t-il déclaré.
Aîné d'une famille de trois enfants, il dit avoir été le seul de la famille à s'intéresser à l'art. Il plaçait des objets métalliques sur les voies ferrées et attendait de voir le résultat. "Chaque morceau de métal que je trouvais, je m'interrogeais sur ce que cela donnerait s'il était écrasé", explique-t-il. Après qu'un des objets a failli faire dérailler un train, ses parents, tous deux enseignants, ont passé deux ans à emmener Molodkin au poste de police local pour des contrôles mensuels, une mesure destinée aux enfants considérés comme dangereux. À quinze ans, Molodkin a obtenu une place dans une école de métallurgie dans une ville voisine.
Molodkin a fréquenté les académies d'art de Saint-Pétersbourg (alors Leningrad) et de Moscou, après avoir passé deux ans comme conscrit de l'armée, une expérience qu'il a décrite comme ayant "changé sa vie". Seul sujet que nous ayons abordé n'ayant jamais suscité de plaisanterie. Alors qu'il avait une vingtaine d'années, il convoyait du matériel militaire par train à travers l'Union soviétique. Un matin, alors qu'il se rendait à la cantine pour le petit-déjeuner, il a vu le corps d'un camarade conscrit qui s'était tiré une balle dans la poitrine après avoir été tourmenté par ses supérieurs. Des soldats traînaient son cadavre sur une toile de tente à côté de Molodkin, laissant une traînée de sang. "J'ai été très choqué", a déclaré Molodkin. "Il devait y avoir une ligne de cent mètres de sang chaud sur l'asphalte". En souvenir de ce conscrit, il a intitulé l'une de ses expositions Bloodline.
En 2009, Molodkin a été choisi comme l'un des sept artistes représentant le pavillon russe, intitulé Victoire sur l'avenir, à la 53ème Biennale de Venise. "J'ai simplement dit à la conservatrice, Olga Sviblova, que mon projet porterait sur le sang et le pétrole", a-t-il dit. L'œuvre, Le Rouge et le Noir, présente des répliques évidées de l'ancienne statue grecque Nike de Samothrace. Selon le texte mural rédigé par Molodkin, les statues ont été remplies de sang prélevé sur des vétérans russes et de pétrole brut importé de Tchétchénie, dont Poutine avait rasé la capitale lors de la deuxième guerre de Tchétchénie. Il a été consterné lorsque le texte expliquant d'où provenaient le sang et le pétrole a été supprimé.
L'installation a attiré l'attention des médias internationaux, mais, selon l'artiste, hormis le fait que Sviblova lui ait dit qu'elle pouvait détruire sa carrière, il n'y a eu aucune répercussion officielle. (Il s'agit d'un rappel brutal de l'ampleur des changements intervenus depuis lors ; aujourd'hui, des citoyens russes peuvent être emprisonnés pour avoir qualifié l'invasion de l'Ukraine de "guerre" sur les médias sociaux. L'incident a néanmoins suscité l'obsession de Molodkin pour la liberté d'expression. Il a rapidement établi un lien avec ce qui est arrivé à Assange, "un homme qui est un exemple pour chacun d'entre nous de ce qui arrive à une personne voulant publier quelque chose qui déplaît à ceux qui détiennent le pouvoir".
Pierre Olivier Rollin, directeur du musée BPS22 à Charleroi, en Belgique, qui a organisé une exposition conjointe de Molodkin et Bulatov, voit dans Dead Man's Switch une tentative de l'artiste de s'associer à l'idée d'Assange. "Détruire des œuvres d'art peut sembler barbare", m'a-t-il dit. "Mais est-ce plus barbare que ce qui arrive à Assange ? Le plus formidable des chefs-d'œuvre justifie-t-il de sacrifier notre liberté ?"
Il est rare que des artistes détruisent leurs propres œuvres, plus rare encore qu'ils détruisent les œuvres d'autrui, et peut-être plus rare encore que des collectionneurs, gardiens de l'art, offrent des œuvres en vue d'une éventuelle destruction. Mais certains collectionneurs ayant fait don d'œuvres à Dead Man's Switch m'ont dit qu'ils avaient leurs raisons. Tretyakov, de a/political, a fait don d'une œuvre de l'artiste grec Jannis Kounellis. La culture est devenue "une autre composante du divertissement", a déclaré Tretyakov. "Le dernier recours est de savoir jusqu'à quel point les gens sont prêts à faire des sacrifices pour ce en quoi ils croient". En tant que collectionneurs ou participants à la vie culturelle, c'est une question qui se pose à nous : Que sommes-nous prêts à consentir ?
Giampaolo Abbondio, gestionnaire de fonds et collectionneur d'art italien qui a fait don d'une œuvre de Picasso au projet, a d'abord refusé la requête de Molodkin. Il a changé d'avis, a-t-il dit, "parce qu'il s'agit moins de Picasso que de l'idée". Tout en espérant que le tableau lui sera rendu un jour, il pense que le "seul point faible" du projet est que si Assange meurt, "nous n'aurons pas de bonnes informations pour faire contrepoids. Nous en aurons plutôt une mauvaise, qui sera la destruction des œuvres d'art".
Il est difficile de vérifier si les œuvres d'art que Molodkin dit vouloir placer dans le coffre-fort s'y trouveront réellement, ou si elles seront détruites si Assange meurt. Il m'a dit qu'il prévoyait d'y placer l'une de ses propres œuvres et a montré au magazine des documents attestant de l'authenticité des œuvres d'art qui, dit-il, se trouvent dans Dead Man's Switch, mais, pour l'essentiel, il n'a pas divulgué leurs noms. Cette omission pourrait compliquer la tâche des ayants droit des artistes qui voudraient entamer une procédure pour mettre un terme au projet. (Ces derniers peuvent toujours retracer des œuvres d'art particulières et vérifier l'identité des collectionneurs, a-t-il souligné, mais "cela leur prendra énormément de temps"). En France, le droit moral donne aux artistes le droit légal de s'opposer à la destruction de leurs œuvres d'art, voire de l'empêcher. Lorsque j'ai demandé à Molodkin ce qu'il pensait de cette loi, il a semblé surpris, déclarant qu'il ne savait pas qu'un tel droit existait. Quoi qu'il en soit, il a insisté sur le fait que les procédures juridiques "ne sont pas dans mon champ d'action ni dans mon intérêt. Si vous commencez à vous préoccuper de ce genre de choses, vous ne ferez jamais d'art contemporain".
Tout le monde n'est pas convaincu des mérites du projet en tant qu'œuvre artistique. Pierre d'Alancaisez, conservateur et critique basé à Londres, siège au conseil consultatif de Freedom in the Arts, une campagne qui met en lumière les questions de liberté artistique et de censure dans les institutions. "Pour autant que je sache, Molodkin n'est pas nécessairement le plus subtil des acteurs, et cela semble tout à fait conforme au type d'intérêt qu'il a en tant qu'artiste", a-t-il déclaré. "En tant que coup d'éclat, ["Dead Man's Switch"] se situe un peu au niveau du genre de travail que fait quelqu'un comme Ai Weiwei, qui est essentiellement ce genre de méta-commentaire… Je pense que l'on peut se demander s'il s'agit d'un acte artistique en soi". Il évoque des œuvres antérieures d'artistes tels que Michael Landy et Gustav Metzger "dont le but était la destruction de l'art". Il considère Molodkin comme une sorte de "spéculateur", faisant du commerce sur la "valeur de tiers" des œuvres d'art de premier ordre. "Peut-être que cette œuvre n'est bonne que si elle n'atteint pas le but de sa campagne", m'a dit d'Alancaisez.
À Cauterets, alors qu'il finissait de faire découvrir le coffre-fort, Molodkin semblait enthousiaste à l'idée de lancer le projet. Mais il ne savait pas très bien comment la force de l'œuvre pourrait être maintenue dans le cas où Assange ne serait ni libéré de prison ni ne mourrait, mais resterait incarcéré, vivant, pendant encore de nombreuses années. Dans ce cas, "l'art restera dans le coffre-fort", a-t-il déclaré. "Nous y ajouterons d'autres œuvres". Cela ressemble à une réflexion après coup.
L'artiste a déclaré avoir engagé ce qu'il a appelé des "négociateurs d'otages professionnels" pour l'aider à écrire une lettre au "président" et à la "secrétaire d'État", les informant que la mort d'Assange en prison précipiterait la destruction d'œuvres d'art inestimables. "Je ne veux pas de cela et vous avez le pouvoir de l'empêcher", peut-on lire dans la lettre. Le Département d'État américain et la Maison Blanche n'ont pas répondu.
En attendant, la présence de ces œuvres d'art dans cette ville de montagne est considérée comme une grande chance, du moins par Jean-Pierre Florence, soixante-treize ans, passionné de randonnée et maire de Cauterets. "C'est formidable que nous ayons autant d'œuvres d'artistes exceptionnels à Cauterets", s'enthousiasme-t-il, tout sourire, en jetant un coup d'œil dans le coffre-fort pour voir où les œuvres d'art et l'acide seront placés. "Je serais fier d'avoir un Picasso ici". L'absurdité comique de se réjouir d'une œuvre d'art qui ne sera pas vue et pourrait même être incinérée n'a pas échappé à l'artiste. Lorsque j'ai regardé Molodkin, il riait.
◾️ ◾️ ◾️
13- ♟ Le juge Andrew Napolitano présente un argument en faveur de la non-extradition de Julian Assange vers les États-Unis
Vidéo de 3‘18’’ avec sous titres disponibles
Par Adam Dick, le 9 février 2024, Ron Paul Institute For Peace & Prosperity
Dans le courant du mois, Julian Assange, fondateur de Wikileaks, doit comparaître pour ce qui pourrait être sa dernière audience sur le sol britannique, dans le cadre d'une procédure d'extradition de la Grande-Bretagne vers l'Amérique. Face à cette situation, Andrew Napolitano, juriste et ancien juge de l'État du New Jersey, a publié vendredi un commentaire vidéo dans lequel il s'adresse aux juges britanniques qui présideront l'audience, les exhortant à rejeter l'extradition.
Napolitano commence son intervention vidéo en qualifiant Assange de "héros américain et aussi de héros international". En outre, il affirme qu'Assange
"est le journaliste le plus important au monde aujourd'hui parce qu'il a eu le courage et la force intellectuelle d'exposer les dérives fatales et obsessionnelles du gouvernement américain et de sa politique étrangère au Proche-Orient".
Les informations publiées par Assange sur le gouvernement américain, qui sont au cœur de la demande d'extradition des États-Unis, sont des informations qui, selon le juge Napolitano, relèvent de la libre publication en vertu de la législation américaine. Citant à l'appui la décision de la Cour suprême des États-Unis dans l'affaire des Pentagon Papers, Napolitano résume la loi concernée comme suit :
"Lorsqu'un journaliste reçoit une information présentant un intérêt concret pour le public, peu importe la manière dont il la reçoit, il est libre de la publier sans encourir de responsabilité civile ou pénale".
Assange devrait donc être protégé par le droit américain contre toute poursuite. Comme le dit Napolitano, qui est membre du conseil consultatif de l'Institut Ron Paul pour la paix et la prospérité, Julian Assange
"ne devrait pas être jugé pour quoi que ce soit" et les efforts déployés pour le poursuivre constituent une "profonde injustice".
Après avoir exposé ces informations, il adresse ses commentaires aux juges de l'audience à venir. Napolitano conclut que
"Julian Assange ne pourra pas bénéficier d'un procès équitable aux États-Unis pour ces accusations" et qu'il ne reverra "jamais la lumière du jour" s'il est extradé, suggérant que Julian Assange passera le reste de sa vie en prison.
En fait, il affirme que l'extradition le tuera. Cela peut sembler extrême, mais il faut garder à l'esprit qu'Assange a déjà souffert dans des conditions épouvantables au cours de ses presque 5 années d'emprisonnement en Grande-Bretagne. Il y a une limite à ce que les gens peuvent supporter, et Assange pourrait atteindre cette limite s'il n'est pas libéré rapidement.
◾️ ◾️ ◾️
14- ♟ Assange doit être libéré sur-le-champ : la liberté d'information n'est pas un crime
Julian Assange a eu le courage de défier ce pouvoir et de le révéler au grand jour. C'est pour cette raison qu'il n'a pu arpenter les rues en homme libre depuis 14 ans, que sa vie a été détruite et qu'il risque aujourd'hui, s'il est extradé, jusqu'à 175 ans d'emprisonnement aux États-Unis. Dans ce même pays où la CIA, l'agence de renseignement la plus puissante du monde, avait élaboré un plan pour le tuer. Comment peut-on penser qu'il puisse être extradé vers ce pays ? Quelle sorte de procédure régulière est-ce là ?
Par Stefania Ascari, avocate & députée, le 9 février 2024, Il Fatto Qutidiano Blog
J'ai débattu aujourd'hui à l'Assemblée de l'interpellation prioritaire adressée au ministre des affaires étrangères sur le cas de Julian Assange. Cette affaire honteusement inique concerne un journaliste grâce auquel nous avons appris, non pas après des décennies, mais en temps réel, avec des preuves documentées, les crimes perpétrés par les gouvernements - tels que la torture à Guantanamo, les déchets toxiques déversés dans nos mers, les vrais visages des guerres en Irak et en Afghanistan, la propagande visant à dompter l'opinion publique en faveur de l'escalade militaire, les lettres diplomatiques entre les États-Unis et l'Italie dans lesquelles notre servilité à l'égard des États-Unis est évidente.
Le 5 avril 2010, Julian Assange a publié une vidéo secrète intitulée Collateral Murder, dans laquelle un hélicoptère américain Apache est vu en train d'exterminer des civils non armés à Bagdad, tandis que l'équipage rit. Ces images sont datées du 12 juillet 2007 et proviennent d'un dossier du Pentagone. Elles ont été prises en temps réel par l'un des deux hélicoptères américains qui ont survolé la ville ce jour-là pour traquer les insurgés et ont témoigné du massacre sans filtre ni censure. Une quinzaine de civils, dont un photographe de guerre respecté de 22 ans ainsi que son assistant et chauffeur de 40 ans, tous deux travaillant pour l'agence de presse internationale Reuters, ont été déchiquetés par des balles de calibre 30 millimètres tirées par l'hélicoptère Apache, tandis que deux enfants irakiens ont été grièvement blessés.
Leur père, au volant d'une camionnette, s'était arrêté pour secourir le chauffeur du photographe de Reuters gisant au sol, grièvement blessé, mais l'hélicoptère l'a criblé de balles achevant le survivant. Seuls les deux enfants de cinq et dix ans, assis à l'arrière du véhicule, ont été miraculeusement sauvés mais ont été très sérieusement blessés.
Ce spectacle a visiblement suscité la satisfaction de l'équipage, comme en témoignent les conversations enregistrées sur la vidéo. L'un d'entre eux a déclaré en riant : "Très bien, je les ai touchés". Et encore : "Matez ces bâtards morts". Dans un premier temps, les autorités américaines avaient affirmé que les personnes tuées étaient des guérilleros, puis que l'attaque s'était déroulée dans le cadre d'une opération de combat avec des forces hostiles. Il s'est ensuite avéré que tout cela n'était que mensonges.
En juin 2010, le magazine américain Wired a révélé qu'en Irak, un jeune Américain d'à peine vingt-deux ans avait été arrêté après avoir déclaré dans des forums de discussion qu'il était l'auteur de la transmission à WikiLeaks de la vidéo "Collateral Murder" et de centaines de milliers d'autres documents secrets du gouvernement américain. Ce jeune homme de 22 ans s'appelait Bradley Manning et était analyste du renseignement au sein de l'armée américaine en mission en Irak ; il a payé chèrement son acte de conscience et de justice. C'est également grâce à Assange que nous avons connaissance des carnets de guerre afghans, publiés le 25 juillet 2010, lesquels ont mis le Pentagone dans tous ses états. Il s'agit de 76 910 rapports secrets sur la guerre en Afghanistan compilés par des soldats américains sur le terrain entre janvier 2004 et décembre 2009, un aperçu sans précédent de ce conflit éloigné et ignoré.
Ces dossiers restent la seule source publique permettant de reconstituer les attaques, les morts et les exécutions extrajudiciaires survenues en Afghanistan entre 2004 et 2009. Julian Assange a démantelé la machine à mensonges des guerres qui n'exportent pas de démocraties ou de protections des droits de l'homme, mais servent à alimenter le secteur militaro-industriel, le commerce des armes et le blanchiment d'argent, ainsi que l'escalade militaire. Une couche invisible de pouvoir qui refuse de se faire exposer, mais désire agir dans l'obscurité de façon à avoir les mains libres.
Comme nous l'a dit Assange, l'objectif de la guerre, concernant par exemple l'Afghanistan, n'est pas de la gagner, l'objectif est une guerre qui se prolonge parce que plus elle perdure, plus l'argent des impôts des citoyens européens et américains sortira de nos poches pour financer le secteur militaro-industriel, les usines d'armement et l'ensemble du business de l'argent et du pouvoir qui gravite autour.
Et nous le savons fort bien, en Italie, où ce niveau de pouvoir n'a jamais été touché et où les instigateurs, les planificateurs et les investisseurs des massacres ayant ensanglanté le pays et entravé et privé de vérité et de justice jusqu'à aujourd'hui restent encore dans l'ombre.
Julian Assange a eu le courage de défier ce pouvoir et de le révéler au grand jour. C'est pour cette raison qu'il n'a pu arpenter les rues en homme libre depuis 14 ans, que sa vie a été détruite et qu'il risque aujourd'hui, s'il est extradé, jusqu'à 175 ans d'emprisonnement aux États-Unis. Dans ce même pays où la CIA, l'agence de renseignement la plus puissante du monde, avait élaboré un plan pour le tuer. Comment peut-on penser qu'il puisse être extradé vers ce pays ? Quelle sorte de procédure régulière est-ce là ? L'État ne peut et ne doit pas garder de secrets, et ceux qui commettent des crimes de guerre doivent finir en prison, et non ceux qui s'y opposent par l'information.
La libre information n'est pas un crime, dévoiler des crimes n'est pas un crime, et les gens honnêtes le savent, à en juger par les nombreuses manifestations dans les rues en faveur d'Assange, les associations qui le surveillent de près, comme Free Assange Italia, les journalistes qui dénoncent les dangers de ce qui se passe, comme Stefania Maurizi, les municipalités italiennes qui ont accordé la citoyenneté honoraire au fondateur de Wikileaks.
Julian Assange est un journaliste, pas un criminel : il doit être libéré.
Liberté pour Julian Assange.
◾️ ◾️ ◾️
15- ♟ Julian Assange : Démasquer la vérité sur fond de tensions mondiales & de batailles juridiques
Dans notre monde complexe, il est essentiel de comprendre les événements mondiaux. Nous avons soif de vérité sur les forêts amazoniennes, le Tibet et la Chine, le Niger en Afrique, l'Antarctique, la Guyane et les tensions actuelles entre la Russie et l'Europe en Ukraine, ainsi que sur le conflit entre le Hamas et Israël soutenu par les États-Unis. Pour prendre des décisions éclairées, nous devons analyser soigneusement les faits.
Par Dimitris Eleas & David Andersson, le 9 février 2024, Pressenza
L'histoire nous enseigne que la vérité peut être réprimée sous des régimes tels que la Russie stalinienne, l'Allemagne hitlérienne ou la guerre d'Irak menée sur la base de fausses informations. Les récits manipulés, les mensonges éhontés ou encore la désinformation ont eu des conséquences dévastatrices, qu'il s'agisse de goulags, de guerres ou de camps de concentration. Pourtant, des individus courageux - Socrate, Abraham Lincoln, Gandhi, George Orwell et Martin Luther King Jr - ont défendu la vérité, quelles que soient les circonstances.
Aujourd'hui, Julian Assange fait partie de ces grands noms. Son travail remet en question les structures du pouvoir, révélant des vérités gênantes occultées par le gouvernement des États-Unis.
Le combat de Julian Assange contre l'extradition des États-Unis est entré dans une phase critique, avec les audiences en appel qui se tiendront devant la Haute Cour du Royaume-Uni les 20 et 21 février.
La nouvelle rapporteuse spéciale des Nations unies sur la torture, Alice Jill Edwards, a appelé mardi le Royaume-Uni à mettre un terme à l'extradition (cf article publié sur cette plateforme), affirmant que si celle-ci avait lieu, Julian Assange risque d'être soumis à un traitement assimilable à la torture ou à d'autres formes de mauvais traitements ou de sanctions.
Dans une pétition lancée par Amnesty International, l'organisation déclare que
"les États-Unis doivent abandonner les poursuites à l'encontre de Julian Assange. Il doit être libéré, il a déjà payé un lourd tribut pour ses actions".
Afin d'exercer la plus grande pression possible sur le tribunal, nous vous invitons tous à soutenir ces événements avant les audiences :
14 février : Le Club de la presse de Genève, en collaboration avec RSF Suisse, organise un entretien en ligne et en personne avec Stella Assange. Stella sera disponible pour des interviews après l'événement.
15 février : La Fondation pour la liberté de la presse (The Freedom of the Press Foundation) organise un événement en ligne sur Assange. Parmi les intervenants figurent Cindy Cohn, directrice exécutive de l'Electronic Frontier Foundation ; Carrie DeCell, avocate principale du Knight First Amendment Institute ; Trevor Timm, directeur exécutif de la Freedom of the Press Foundation ; et Ben Wizner, directeur du Speech, Privacy, and Technology Project de l'ACLU.
Vous trouverez également ce fil de discussion utile de Stella, qui présente les arguments juridiques de l'affaire (cf fil de Stella publié plus haut dans cette actualité de la semaine).
Défendons une information honnête, car elle est notre rempart contre la propagande et notre voie vers un monde plus juste.
Dimitris Eleas est un écrivain basé à New York, un chercheur indépendant et un activiste politique.
David Andersson est un journaliste indépendant, écrivain, militant et auteur de The White West : A Look in the Mirror.
◾️ ◾️ ◾️
16- ♟ Trop c'est trop, il est grand temps de libérer Julian Assange
La dernière tentative du fondateur de Wikileaks pour lutter contre l'extradition vers les États-Unis nous confronte à des questions fondamentales sur la liberté de la presse et le pouvoir de l'État.
L'auteur de cet article, Alan Rusbridger, est le rédacteur en chef de Prospect et l'ancien directeur de Lady Margaret Hall, à Oxford. Il a été rédacteur en chef du Guardian de 1995 à 2015.
Par Alan Rusbridger, le 10 février 2024, Prospect
Peut-être avez-vous oublié l'existence de Julian Assange.
Voilà onze ans qu'il a disparu de la scène publique, d'abord dans la claustrophobie de l'ambassade d'Équateur, puis, près de cinq ans plus tard, derrière les mur de la prison de haute sécurité de Belmarsh. Loin des yeux, loin du cœur.
Tout cela est sur le point de changer alors qu'il mène une ultime tentative devant la Haute Cour de Londres pour éviter son extradition vers les États-Unis et la très forte probabilité qu'il disparaisse une fois de plus, cette fois dans un pénitencier d'État pour une période extrêmement longue.
Pourquoi devrions-nous nous en préoccuper ?
Les personnes qui ne s'en soucient guère ne manquent pas. Ils peuvent ne pas aimer Assange - et il faut reconnaître qu'il a une capacité unique à perdre des amis et à se mettre des gens à dos. Nombreux sont ceux qui, dans les médias, estiment qu'il n'est pas un "vrai" journaliste et qui, par conséquent, refusent de lever le voile sur son cas. et ne lèveront donc pas le petit doigt pour le défendre. Certains ne lui ne lui pardonneront jamais son rôle dans la fuite d'informations sur la campagne d'Hillary Clinton en 2016, et l'accusent d'être le laquais de Poutine.
Et puis il y a ceux et celles qui ont une foi touchante dans les recoins secrets de notre État, et qui déplorent que l'on soulève le couvercle. James Bond en est le symbole mondial, même si le contre-récit est parfois plus proche de George Smiley ou de Jackson Lamb de Slow Horses. Je n'oublierai jamais un éminent rédacteur en chef qui, au plus fort des révélations d'Edward Snowden, écrivait : "Si les services de sécurité insistent sur le fait que quelque chose est contraire à l'intérêt public... qui suis-je pour ne pas les croire ?".
En d'autres termes, faites confiance à l'État. S'il vous dit "sautez", votre rôle est de demander "jusqu'où ?".
Mais pourquoi le feriez-vous ? "L'État" - ne le savons-nous pas - se trompe systématiquement sur toutes sortes de points. Il en va de même, inévitablement, pour l'État secret, l'État sécuritaire, l'État profond - quel que soit le nom qu'on lui donne.
Feriez-vous confiance à la police ou aux services de sécurité pour surveiller toutes vos communications et tous vos mouvements ? Pas si vous avez lu Orwell. N'avez-vous pas remarqué les défaillances/subtilités des services de renseignement qui ont contribué à façonner la politique des États-Unis et du Royaume-Uni avant l'attaque désastreuse contre l'Irak en 2003 ? C'est vrai ?
Avez-vous ignoré les allégations avérées de torture et de restitution pendant et après le 11 septembre ? Avez-vous raté les découvertes de surveillance illégale dans le sillage des révélations de Snowden ? Haussez-vous les épaules lorsque vous lisez que la police ou les services de renseignement s'infiltrent dans les groupes de protestation et se comportent d'une manière telle que cela fait l'objet de l'enquête britannique secrète en cours sur l'infiltration policière ?
En d'autres termes, l'État sécuritaire - pour tout le travail qu'il accomplit, qui est bon et nécessaire - doit être surveillé et tenu de rendre des comptes. D'autant plus qu'il dispose d'immenses pouvoirs sur la vie des individus, y compris sur des questions de vie ou de mort.
Mais toute tentative d'examen, étant donné que les parties les plus obscures de l'État sont soutenues par un bouclier protecteur de plus en plus prohibitif de lois et de sanctions, n'est pas chose facile.
Au fil des ans, un travail précieux a été accompli par les lanceurs d'alerte - pensez à Daniel Ellsberg, Clive Ponting, Chelsea Manning, Thomas Drake, Katharine Gun, Edward Snowden. Et puis il y a le genre hybride d'individus comme Assange - en partie activiste, en partie journaliste, en partie éditeur, en partie hacker.
Presque tous ces individus suivent un même modèle. Ils sont dénoncés avec véhémence par l'État comme traîtres et méprisables. Puis vient une forme de réévaluation : les jurys les innocentent, l'opinion publique évolue, les présidents, après réflexion, commuent leurs peines. Enfin, il y a une forme de rédemption : ils sont célébrés dans des films hollywoodiens et/ou honorés pour leur courage. Daniel Ellsberg, au moment de sa mort l'année dernière, avait acquis une sorte de statut d'icône en tant que personne ayant fait ce qu'il fallait quand il le fallait.
Et donc maintenant, Julian Assange. Bien sûr, ils le détestent. Bien sûr qu'ils veulent en faire un exemple. Bien sûr, ils n'admettront jamais, au grand jamais, que les révélations de Wikileaks sur les guerres d'Afghanistan et d'Irak contiennent ne serait-ce qu'un microbe d'intérêt public.
Il est évident qu'ils veulent mettre fin à tout examen de l'État secret. Ces dernières années, l'Australie, le Royaume-Uni et les États-Unis ont, de diverses manières, tenté de mettre des bâtons dans les roues de ceux qui voudraient braquer un projecteur malvenu. Des peines de prison plus longues, la criminalisation du droit de détenir, et a fortiori de publier, des documents classifiés, la menace d'injonctions pour empêcher la publication, le droit d'espionner les journalistes et leurs sources, la poursuite des activistes et d'autres personnes qui pourraient présenter un "risque".
Et voilà qu'ils veulent s'emparer d'Assange, sans doute encouragés par la réaction discrète de la communauté internationale des journalistes à sa mise en accusation. Mais il est temps de se réveiller et de s'alarmer.
"Si l'accusation aboutit", dit James Goodale, "le journalisme d'investigation basé sur des informations classifiées sera quasiment condamné à mort". Goodale, aujourd'hui âgé de 90 ans, mérite d'être écouté depuis qu'il a pris la défense du New York Times lors de la publication, en 1971, des Pentagon Papers, le dossier autrefois secret divulgué par Ellsberg, qui révélait la vérité sur la guerre du Viêt Nam. Et, oui, c'est devenu un film de Steven Spielberg avec Meryl Streep et Tom Hanks. Le temps est un grand guérisseur.
Assange, citoyen australien, doit-il être extradé ?
Imaginons un autre scénario. Une journaliste américaine, basée à Londres, commence à enquêter, par exemple, sur le programme d'armement nucléaire de l'Inde. Ses rapports enfreignent clairement la loi de 1923 sur les secrets officiels de ce pays. L'Inde veut la poursuivre et, avec un peu de chance, l'emprisonner pour une longue période - pour décourager les autres.
Pouvez-vous imaginer les circonstances dans lesquelles cette journaliste américaine serait embarquée sur un vol d'Air India à destination de Delhi ? Bien sûr que non : aucun gouvernement américain ne le permettrait. Alors pourquoi - alors que même le premier ministre australien, Anthony Albanese, a clairement indiqué qu'il pensait qu'il était temps de le libérer - continuons-nous à utiliser les précieuses ressources des tribunaux et des prisons pour débattre de l'ampleur de la punition pouvant être infligée à Assange ?
Je sais qu'Assange est à certains égards un personnage complexe, même si je défendrai toujours le travail que nous avons accompli ensemble lorsque j'étais rédacteur en chef du Guardian, sur les registres des guerres d'Irak et d'Afghanistan et sur les câbles diplomatiques. Je comprends pourquoi la défense d'Assange par la communauté journalistique au sens large a été quelque peu atténuée.
Mais je sais qu'ils ne s'arrêteront pas à Julian Assange. Le monde de la surveillance quasi-totale, simplement esquissé par Orwell dans 1984 ("Nineteen Eighty-four"), est aujourd'hui d'une terrifiante réalité. Nous avons besoin de courageux défenseurs de nos libertés. Ils ne seront pas tous des héros hollywoodiens, pas plus que ne l'était le Winston Smith d'Orwell.
Mais je suis d'accord avec Albanese et son message clair au président Biden. Trop c'est trop. Libérez-le.
Alan Rusbridger est le rédacteur en chef de Prospect et l'ancien directeur de Lady Margaret Hall, à Oxford. Il a été rédacteur en chef du Guardian de 1995 à 2015.
◾️ ◾️ ◾️
17- ♟ Compte à rebours jusqu'au jour J : La CIA aurait comploté pour éliminer Assange - n°1
Une série de dix articles précédant une audience cruciale qui pourrait être le dernier espoir de Julian Assange, le fondateur de WikiLeaks, d'éviter l'extradition vers les États-Unis.
Ces articles seront rassemblés sur un seul et même post mis à jour au dur et à mesure de leur parution.
Note de la rédaction : avant une audience capitale devant la Haute Cour de justice britannique les 20 et 21 février, la série de dix articles intitulée "Compte à rebours jusqu'au jour J" mettra en lumière les principaux aspects de la demande du fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, de faire appel de son extradition vers les États-Unis.
Par Kevin Gosztola, le 10 février 2024, The Dissenter
L'extradition devrait être bloquée, la CIA ayant apparemment comploté pour enlever, empoisonner ou assassiner le fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, alors qu'il bénéficiait de l'asile politique dans l'ambassade de l'Équateur à Londres.
Selon l'équipe juridique de Julian Assange, l'extradition porterait atteinte à son droit à la vie et à celui de ne pas être soumis à la torture ou à des peines ou traitements inhumains ou dégradants, conformément à la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH).
En septembre 2021, Yahoo News a diffusé une enquête
"basée sur des conversations avec plus de 30 anciens fonctionnaires américains, dont huit ont décrit les détails des propositions de la CIA visant à enlever Assange".
Le directeur de la CIA, Mike Pompeo, aurait "défendu" des projets visant à enlever Assange après que WikiLeaks a publié les documents de Vault 7 en 2017. Pompeo était favorable à une opération de restitution qui aurait impliqué de s'introduire dans l'ambassade de l'Équateur pour en faire sortir Assange et l'amener aux États-Unis "via un pays tiers".
"Une version moins extrême de la proposition impliquait que des agents américains arrachent Assange de l'ambassade et le remettent aux autorités britanniques", a ajouté Yahoo News.
UC Global, une société de sécurité espagnole, a espionné Assange alors qu'il se trouvait à l'ambassade, avec le soutien présumé de la CIA. L'ordinateur portable utilisé par le directeur d'UC Global, David Morales, contenait un dossier portant la mention "CIA".
"Le mot "CIA" apparaît plusieurs fois sur un disque dur externe de marque Western Digital, sur lequel David Morales conservait les projets et les opérations que son entreprise - UC Global, S.L. - était chargée de mener à bien", a également rapporté le journal espagnol El País.
Au cours d'une audience qui a duré un mois en septembre 2020, deux divulgateurs d'UC Global ont témoigné pour appuyer l'opposition à l'extradition d'Assange. Le "témoin n° 2", comme il a été appelé, a affirmé que Morales avait proposé de laisser la porte de l'ambassade ouverte, ce aurait ensuite été traité comme une "erreur accidentelle" afin qu'Assange puisse être kidnappé.
Les "contacts de Morales aux États-Unis" ont également discuté de son empoisonnement, selon le "témoin n° 2".
Selon Yahoo News, plusieurs "hauts responsables" de la CIA et de l'administration du président Donald Trump ont sollicité des "croquis" ou des "options" pour tuer Assange. Des discussions sur l'assassinat du fondateur de WikiLeaks se sont tenues "aux plus hauts niveaux", et un ancien haut responsable du contre-espionnage a déclaré :
"Il ne semblait y avoir aucune limite".
Sous la présidence de Barack Obama, le ministère de la justice avait refusé d'engager des poursuites au titre de la loi sur l'espionnage. Mais les discussions de la CIA concernant l'embarquement d'Assange sur un vol de restitution ont semé la panique parmi les hauts fonctionnaires du ministère de la justice. Aucune accusation n'était sous scellés, et si Assange était enlevé, aucune "base légale ne permettrait de le juger aux États-Unis".
Les procureurs ont alors accéléré la rédaction des chefs d'accusation et, en décembre 2017, au cours de la première année de la présidence de Trump, le ministère de la Justice disposait d'un acte d'accusation sous scellés.
Plus de cinquante ans auparavant, la CIA a compromis de la même manière les poursuites engagées par le ministère de la justice au titre de la loi sur l'espionnage contre Daniel Ellsberg, le lanceur d'alerte des Pentagon Papers.
Une unité clandestine connue sous le nom de White House Plumbers (plombiers de la Maison Blanche) s'est introduite dans le cabinet du psychiatre d'Ellsberg en septembre 1971. Ellsberg a également écrit dans ses mémoires "Secrets" qu'une douzaine d'agents de la CIA, dont l'agent d'origine cubaine Bernard Barker, ont été amenés de Miami dans le but de l'attaquer et de lui briser les deux jambes lors d'un rassemblement au Capitole le 3 mai 1972.
L'affaire Ellsberg a été classée sans suite le 11 mai 1973, et le juge William Byrne a déclaré que "l'ensemble des circonstances" avait heurté le "sens de la justice".
"Les événements curieux ont infecté de manière incurable la poursuite de cette affaire", a encore déclaré Byrne.
Les juges de la Haute Cour britannique devraient interroger le Crown Prosecution Service, qui poursuit l'extradition au nom du gouvernement américain. Ils devraient interroger les procureurs de la Couronne : si les allégations à l'encontre de la CIA sont vraies, comment l'affaire peut-elle se poursuivre ?
Sur cette seule base, la cour d'appel pourrait accorder une audience d'appel complète en bonne et due forme et annuler la décision d'extradition.
Pour en savoir plus, voici où vous pouvez acheter un exemplaire de mon livre, "Guilty of journalism : The Political Case Against Julian Assange" (Coupable de journalisme : L'affaire politique contre Julian Assange).
📰 https://thedissenter.org/countdown-day-x-cia-alllegedly-plotted-kill-assange/
◾️ ◾️ ◾️
18- ♟ "Free Julian" - La musique a-t-elle encore le pouvoir d'aider à libérer un prisonnier politique ?
Libérez Julian Assange : la musique a-t-elle encore le pouvoir d'aider à libérer un prisonnier politique ? Ce chœur mondial tente de le faire.
Par la rédaction de ZE!TPUNKT, le 8 févriert 2024
Rainer Bartesch, un corniste, joueur de cor des Alpes et compositeur allemand, a diffusé hier le clip de Julian Assange Mantra. Le journaliste diseur de vérité Julian Assange est accusé par les États-Unis et a été arrêté à Londres et y emprisonné depuis presque cinq ans après avoir obtenu l'asile pendant des années à l'ambassade de l'Équateur. Les premières accusations de viol ont d'abord pu être rejetées faute de preuves. Mais aux États-Unis, Assange est considéré comme un traître pour avoir publié, via sa plateforme journalistique Wikileaks, des secrets militaires et des crimes de guerre commis pendant la guerre des États-Unis contre l'Irak et l'Afghanistan. Il est menacé d'extradition vers les États-Unis.
La Haute Cour britannique a décidé en décembre 2023 de tenir une audience sur deux jours les 20 et 21 février 2024. Il y sera décidé si des recours lui sont encore ouverts ou s'il doit se tourner vers la Cour européenne des droits de l'homme.
Selon Amnesty International, Julian Assange risque de se voir infliger de graves violations des droits humains aux États-Unis, notamment des conditions de détention pouvant s'apparenter à de la torture ou à d'autres mauvais traitements.
Levez-vous ! Descendez dans la rue, manifestez-vous, faites des flashmobs, donnez le maximum !
Julian Assange a tout donné pour nous ! Vous êtes ceux que vous attendiez !
Ce chœur est composé de voix provenant de plus de 100 contributions de personnes du monde entier, de la Turquie au Brésil. Mona (Corona Bavaria) et Rainer Bartesch ont réussi à les motiver à participer et à enregistrer leur voix en quelques jours. Rainer Bartesch a ensuite réalisé un incroyable travail de Sisyphe en créant un véritable chœur à partir des enregistrements envoyés.
Rainer Bartesch : "Cette chanson de soutien entend manifester collectivement l'aboutissement souhaité à travers une énergie intérieure positive. Chacun peut y contribuer ! Partagez la vidéo, entonnez-la, envoyez l'énergie de votre cœur, donnez le maximum. Julian Assange a tout donné pour nous ! Et encore une fois, MERCI à tous les choristes !"
Le mantra peut être téléchargé gratuitement sur le site de Corona Bavaria (voir ci-dessous) et distribué pour être chanté.
Laissez un pourboire via https://de.tipeee.com/corona-bavaria
Plus sur : www.rainerbartesch.de Téléchargements musique sur www.coronabavaria.de Participation :Briefaktion von Amnesty International
📰 https://zeitpunkt.ch/free-julian
◾️ ◾️ ◾️
19- 🎥 Projection d'Ithaka à l'Assemblée nationale
Par Consortium News, le 9 février 2024
Arnaud Le Gall introduit la projection. Avec Dominique Pradalié, présidente de la FIJ (+ de 600 000 journalistes de 187 pays), Laurent Dauré et la participation par lien vidéo de John Shipton. Questions du public.
◾️ ◾️ ◾️
20- ♟ Le dernier fichier de mises à jour concernant Julian Assange et les personnes et questions connexes
Mis à jour le 1er février 2024
Pour Retrouver articles clés, tweets, mèmes, et/ou rester en contact avec cette ligne temporelle, cliquez sur le lien ci-dessous.
Le jour J est imminent !!!
📰 https://docs.google.com/document/d/1YDUL2riBNz-N2By4fGtVkx-sByfzFAC71ADk3L6Ss1U/edit?pli=1
◾️ ◾️ ◾️
21- ♟ Aussi noir que soit notre humour, plus sombre encore est le gouvernement : Le cas Julian Assange
Par le Dr Matthew Alford, le 11 janvier 2024, Substack
Julian Assange, fondateur de WikiLeaks, a passé son cinquième Noël à attendre son procès dans une prison londonienne. Les dates d'appel annoncées pour les audiences d'extradition des États-Unis se sont succédé. Nous avons enfin une notification officielle : la Haute Cour de justice britannique rendra sa décision le 21 février 2024.
J'ai initialement rédigé cet article pour une manifestation organisée par la campagne Don't Extradite Assange (DEA). Je me plais à l'appeler la DEA parce que cette affaire me donne envie de devenir un hors-la-loi, de rendre ma licence, et de coffrer les vrais criminels à l'hôtel de ville.
Je devrais pourtant faire confiance aux États-Unis. Vous savez qu'ils ont pour politique de ne jamais négocier avec les terroristes ? Oui, apparemment, ils ne changeront jamais le prix lorsqu'ils vendent des armes à des terroristes.
Humour ! La satire a beau être noire, le gouvernement, lui, l'est encore plus. Et cela n'est nulle part plus flagrant que dans la persécution de Julian Assange.
Les Nations unies ont qualifié le traitement réservé à Assange de torture, mais ce terme me semble avoir perdu de sa force. Oui, sa situation judiciaire globale - plus de 2 400 jours piégé dans une ambassade, 1 700 jours enfermé dans une prison de haute sécurité sans procès, la CIA enregistrant ses conversations avocat-client et complotant pour l'assassiner - constitue une torture... mais des détails, relayés par des initiés, viennent enfoncer le couteau dans la plaie.
Pour monter son dossier, la prison a finalement mis un ordinateur à la disposition d'Assange, mais certaines touches du clavier étaient bloquées. Ils l'ont diagnostiqué séropositif, puis déclaré plus tard qu'il s'agissait d'un faux diagnostic.
Si je ne comprenais pas mieux, je dirais qu'il s'agit d'actes sadiques, le premier étant une parodie perverse d'Assange en tant que pirate informatique présumé ; le second un riff sur les allégations sexuelles abandonnées en 2010, qui découlaient du fait qu'une des femmes était entrée dans un poste de police - non pas pour signaler un crime - mais pour demander si elle pouvait obliger Assange à passer un test de dépistage des maladies sexuellement transmissibles (MST). "Par ici, madame", se sont empressés de dire les hommes en bleu fort réjouis.
D'autres décisions de l'État suscitent un sourire nauséeux lorsqu'elles quittent l'âme. Lorsque des gardiens ont trouvé une lame de rasoir dans la cellule d'Assange, les procureurs n'ont reconnu qu'à contrecœur que le journaliste était suicidaire, un dossier indiquant que la prison l'avait puni pour avoir caché la lame existe. Ces bureaucrates assurent désormais au tribunal, du bout des lèvres, qu'il sera en sécurité dans sa prochaine résidence - la sécurité dans un supermax se révèle trop stricte pour se suicider.
Assange serait probablement détenu 23 heures par jour dans le cadre de mesures administratives spéciales, dans des conditions réservées aux 50 personnes les plus misérables des États-Unis. Le seul plaisir consiste en une lettre occasionnelle, lue à travers une trappe en verre dans le cadre d'une unité de gestion des communications. On dirait un groupe de réflexion blairiste - on a envie de s'y noyer, non ?
La dernière photo d'Assange est un cliché granuleux de la télévision en circuit fermé, au cours duquel il est victime d'une petite attaque cérébrale, que l'accusation a d'abord jugé simulée. Cette image devrait être emblématique, mais elle n'a même pas dépassé le blog de Caitlin Johnstone, sur lequel elle a été publiée.
La leçon est claire. Lorsque le gouvernement britannique voit des signes d'attaque cérébrale, il agit RAPIDEMENT :
Façade : C'est tombé d'un côté ? Bon.
Armes : En vendre le plus possible.
Discours : Si le discours est libre, il faut le faire taire.
Temps : si vous dénoncez nos crimes, vous serez emprisonné.
Si tout le reste échoue, Keir Starmer remettra votre flux sanguin en marche. Il déteste que quelqu'un ait la "frousse", comme son bureau l'a dit au directeur du parquet suédois à propos d'Assange : "Ne vous avisez surtout pas !".
Il existe apparemment une photo plus récente - un Assange en kilt lors de son mariage avec Stella. La prison a refusé de la diffuser pour des raisons de "sécurité nationale", mais je soupçonne que c'est parce que ses jambes étaient trop décharnées. Le couple s'est vu refuser la chapelle de la prison, mais sa radieuse et infatigable épouse a néanmoins déclaré qu'ils "se sentaient enveloppés par l'amour", ce qui était effectivement le cas.
Il n'y a pas eu de photo de mariage dans le magazine Hello ! pour ce couple exceptionnel - malgré leur notoriété, malgré le fait que la robe de Stella était une création Vivienne Westwood, malgré le statut iconographique de Julian Assange en tant que prisonnier politique.
Le public n'a pas été témoin de grand-chose, l'accès au tribunal étant extrêmement difficile. Une grande galerie publique était à disposition, mais elle a été réservée à deux personnes seulement : le haut-commissaire australien et son épouse, lesquels ne se sont jamais présentés.
Fait inouï, l'un des informateurs rémunérés par le FBI, témoin de l'accusation, a été condamné pour fraude, détournement de fonds et maltraitance d'enfants. Il a admis avoir menti en affirmant qu'Assange lui avait demandé de pirater des comptes gouvernementaux.
De telles particularités entraîneraient ordinairement le classement de l'affaire. Pour ajouter à la perversité, l'homonyme du juge qui a rejeté la précédente tentative d'Assange d'empêcher l'extradition est Jonathan Swift, le plus grand écrivain, satiriste, essayiste, pamphlétaire politique, poète et anglo-irlandaisde de ces îles.
L'extradition vers les États-Unis intensifierait encore le "châtiment cruel et hors du commun" infligé à Assange, interdit par la constitution américaine de 1791 et la déclaration des droits de l'Angleterre de 1689.
La législation appliquée depuis des siècles est jetée aux oubliettes afin que nous puissions broyer à mort notre plus grand journaliste, qui a non seulement mis en lumière les systèmes étatiques et privés du monde entier en matière de corruption, de surveillance illégale et d'attaques sous faux drapeau, mais qui a également élaboré un outil de réception des dossiers permettant de protéger les lanceurs d'alerte. Les charges qui pèsent encore sur Assange ne concernent, dans un nouveau revirement, que son meilleur travail, notamment les images de l'armée américaine tuant 12 innocents depuis son hélicoptère de combat, en toute sécurité.
L'année prochaine, à l'approche des élections britanniques, israéliennes et américaines, sera déterminante pour la sécurité de notre monde : l'environnement, la stabilité internationale et la liberté des médias. Des combats menés par Assange. S'il est extradé, tout journaliste rapportant des informations classifiées - pratique courante - fera l'objet de poursuites, de même que ses éditeurs et ses sources. Dans une courte déclaration commune, les journaux à grand tirage s'accordent à dire qu'il est trop tard pour assurer le bien-être d'Assange.
"Si vous n'aimez pas ça, pourquoi ne pas aller vivre en Russie ?". Je les entends se gausser. La réponse est évidente : "Je ne voudrais surtout pas faire l'expérience de notre politique étrangère".
Nous pouvons réellement faire la différence : les manifestations n'ont pas empêché les États-Unis de bombarder l'Irak en 2003, mais elles les ont probablement empêchés de bombarder l'Iran en 2008, et les nouvelles plaintes du public ont définitivement empêché David Cameron et Barack Obama de bombarder la Syrie en 2013.
Le peuple doit à nouveau agir pour contraindre les puissants, puisque plus personne n'est en mesure de le faire. "Si les guerres peuvent être déclenchées par des mensonges, observe le Mandela de notre siècle, la paix peut être instaurée par la vérité." Dans un autre registre, il s'est inspiré de Thomas Paine : "Nous avons le pouvoir de reconstruire le monde", mais il a ajouté, dans un élan de joie : "Et nous le ferons".
Après la manifestation, j'ai organisé un spectacle de comédie. Je raffole des blagues sombres, mais les miennes ne sont jamais aussi crues ou violentes que celles que notre gouvernement fait subir à Julian - comme à nous-mêmes.
N'oubliez pas que lorsque l'État sécuritaire frappe, il faut agir AU PLUS VITE : plus promptement vous agirez, mieux nous sauverons la démocratie.
Pour plus de détails et une discussion sur l'affaire, écoutez ma dernière interview ici avec Pacifica Radio à New York - (Vidéo de 11’30’’ sans sous titres disponibles)
Matthew Alford : La pire année jamais connue. Les relations internationales n'ont jamais été aussi peu réjouissantes. Producteur de Theaters of War (2022) Writer with No Hands (2014) Doctorat sur le modèle de propagande de Noam Chomsky
Vidéo de 5’30’’ avec sous titres disponibles
📰 Lien de l'article original :
◾️ ◾️ ◾️