♟ "C'est" - Un romancier affronte le siège de Gaza
Explorer le paysage narratif d'une des voix les plus rares du monde littéraire, superbement & richement évocateur comme pour un poème, attentif à tout ce qu'il promet d'évoquer & de susciter en vous.
"C'est"
Un romancier affronte le siège de Gaza.
Par The Floutist, le 1er avril 2024
The Floutist a le plaisir de publier pour la première fois un extrait du roman en cours de Peter Dimock. Ce "fragment", pour reprendre le terme de Dimock, n'est rien de moins qu'une méditation littéraire sur l'impunité de la violence d'État.
L'objet spécifique de sa contemplation est l'affaire déposée le 13 novembre devant le tribunal fédéral américain de Californie contre le président Biden, le secrétaire d'État Blinken et le secrétaire à la défense Austin pour leur complicité et leur incapacité à empêcher le génocide israélien dans la bande de Gaza.
Dimock présente aux lecteurs les trois personnages principaux de son précédent roman, Daybook from Sheep Meadow : Tallis Martinson, son frère jumeau, Christopher Martinson, et Cary Martinson Winslow, la fille de Tallis. Cet extrait poursuit leur histoire. Tallis, qui a souffert d'une sévère dépression nerveuse, a été hospitalisé dans un état de catatonie presque totale. Christopher et Cary lui rendent fréquemment visite dans l'espoir qu'il se rétablisse un jour.

Non conventionnelle et entièrement originale dans sa conception et son exécution, l'histoire est définie par une quête commune : Chaque personnage pratique une "méthode méditative" commune, tient un journal et partage ses expériences. Le but de cette pratique contemplative est de libérer le langage, et donc l'esprit et la pensée, de la domination et de la violence omniprésentes de l'empire.
Dimock est depuis longtemps préoccupé par le pouvoir du langage. Ce n'est que lorsque langage et pensée sont libérés que des moments de "justice historique" deviennent possibles, même si ces moments sont fugaces et même s'ils ne sont vécus nulle part ailleurs que dans l'esprit de la personne adepte de cette technique méditative. Si l'on comprend, comme le fait Dimock, que le langage lui-même est l'une des nombreuses victimes de l'empire, tout espoir de surmonter les crises existentielles auxquelles nous sommes aujourd'hui confrontés passe nécessairement par la libération du langage du carcan imposé par le capitalisme de la fin de l'ère impériale.
Le mode narratif de Dimock - la "méthode méditative" qui consume les trois personnages - s'attaque à la réalité de notre époque, marquée par la brutalité de l'empire, l'héritage du colonialisme et du racisme, les guerres sans fin, et aujourd'hui, le génocide de Gaza, perpétré en temps réel au vu et au su du monde entier, et notre incapacité collective à le faire cesser.
Décrit comme un romancier expérimental, Dimock repousse les limites du langage et de la structure narrative pour créer une nouvelle forme littéraire dans laquelle histoire, philosophie, décisions de justice, artefacts culturels et fiction sont juxtaposés, contemplés, ordonnés et réordonnés dans une mosaïque kaléidoscopique de langage et d'images.
La nouveauté n'est pas là pour le plaisir de la nouveauté. L'intention de Dimock n'est pas de choquer ou d'offenser, encore moins de divertir ou de distraire. Sa finalité est de créer une littérature et un langage capables d'aborder le moment dans lequel nous vivons, avec toute la violence, l'horreur et le désespoir qu'il comporte. À cela, j'ajoute : l'espoir - l'espoir que le travail de Dimock et, en fait, son effort même incarnent.
L'œuvre de Dimock est complexe. Dans ses trois romans publiés, comme dans cet extrait, Dimock défie les formes et les trajectoires occidentales traditionnelles. Vous y trouverez de curieux symboles et des références à la musique et à la tablature musicale, ainsi que des passages d'Emmanuel Lévinas, des citations de Karl Marx et bien d'autres choses encore. Il a ajouté des notes en fin d'ouvrage ainsi qu'une annexe pour faciliter la compréhension et l'engagement du lecteur dans la méthode méditative telle qu'elle est décrite.
Plutôt que de vous offrir une boussole et une carte par le biais de cette introduction, je vous invite plutôt à entrer et à explorer ce paysage narratif superbement et richement évocateur comme vous le feriez pour un poème, attentif à tout ce qu'il promet d'évoquer et de susciter en vous.
The Floutist a publié une interview de Dimock sur le web lors de la sortie de son précédent roman. Il est l'une des voix les plus rares du monde littéraire, un artiste qui fait ce que font les meilleurs artistes, en nous permettant de voir et de comprendre le monde, donc d'y réagir, d'une manière entièrement nouvelle. En d'autres termes, son œuvre nous inspire un changement.
Il ne s'agit pas d'un ouvrage à lire comme on le ferait avec le genre de commentaires politiques généralement publiés sur The Floutist. Laissez-vous aller à nager dans ces eaux profondes - et à vous y noyer s'il le faut. Comme je l'ai fait.
Bon voyage ! (En français dans l'article)
- C. M.
"C'est"
Fragment de roman.
Peter Dimock
"Il est du devoir de chacun d'affronter le siège actuel de Gaza..."
- Séquence de phrase de l'ordonnance du juge Jeffrey S. White de la Cour de district des États-Unis accordant le non-lieu et rejetant la demande d'injonction préliminaire des plaignants dans l'affaire Defense for Children International-Palestine, et autres, c. Joseph P. Biden, et autres, 31 janvier 2024.
Mais aujourd'hui est un jour différent. Comment lire la décision du juge à présent ou agir en conséquence après l'avoir relue au cours de la dernière demi-heure ?
Nul ne doute qu'un roman a besoin d'un langage de continuité pour la cohérence de la réflexion. Ce n'est certainement pas trop demander à l'histoire que nous vivons - juste un modèle grâce auquel on peut dire comment cette réflexion, puis ce jour, se relient à n'importe quel autre.
L'historien américain Tallis Martinson est mon frère jumeau. Il a écrit des histoires sur les relations entre civils et militaires depuis la fondation de notre république jusqu'à aujourd'hui. Je m'appelle Christopher Martinson, j'étais son éditeur et j'essayais de faire chanter ses phrases.
...mais il est également de l'obligation de la Cour de rester dans les limites de son champ de compétence... Il existe de rares cas où l'issue souhaitée est inaccessible à la Cour. C'est l'un de ces cas ici. [Malgré les éléments de preuve incontestés dont elle dispose, la Cour est tenue, en vertu des précédents et de la répartition des pouvoirs entre les différentes branches du gouvernement, de s'abstenir d'exercer sa compétence dans cette affaire. Pourtant, comme l'a constaté la CIJ, il est plausible que la conduite d'Israël équivaille à un génocide. Cette Cour implore les défendeurs d'examiner les résultats de leur soutien indéfectible au siège militaire à l'encontre les Palestiniens de Gaza.
Ces phrases - et séquence de phrases - sont également tirées de l'ordonnance rendue par Jeffrey S. White le 31 janvier 2024 devant le tribunal de district des États-Unis. Elle accorde un non-lieu et rejette la demande d'injonction préliminaire des plaignants dans une affaire intentée contre le président Biden pour son manquement à l'obligation impérative et contraignante lui incombant en vertu du droit international de prévenir, de traduire en justice et de punir le crime de génocide.
Lorsque les institutions échouent, les personnes doivent-elles aussi échouer ?
C'est le thème d'un roman en cours de rédaction.
Puis cette réflexion sur l'absence de point de vue cohérent dans un roman : cette perfection moderne, rentable et libérale de la règle - la violence absolue (étant donné la nécessité de l'ordre) de l'impunité niable et autorisée de l'empire, en dehors et au-delà de toute durée pratiquée de la pensée ou de la parole exprimée. Ces rythmes de plaisir pour le confort de la réussite de l'impunité au-delà de tout contenu ou contexte démocratiquement délibératif d'un bien commun pérenne.
Contrairement au juge White, j'ai cessé d'implorer mon président. Je lui ai écrit par deux fois. Mais chaque jour, j'obéis à l'ordre du juge de m'acquitter de mon devoir individuelle "d'affronter le siège actuel de Gaza". Je le fais en apprenant et en récitant - puis en pratiquant (du mieux que je le peux) - la "Méthode méditative pour créer des temps de justice historique" proposée par mon frère. C'est à partir des exercices méditatifs conçus par Tallis que lui, sa fille Cary Martinson Winslow et moi-même espérons désormais créer un terrain d'entente pour un bien-être futur. Nous avons tous trois décidé de pratiquer la méthode et de discuter des résultats obtenus lors de nos rencontres mensuelles dans la salle de jour de l'établissement de soins psychiatriques de longue durée où réside désormais Tallis.
Le 1er février 2024, j'ai commencé à incorporer des fragments de l'ordonnance de non-lieu du juge White dans l'affaire fédérale américaine n° 23-cv-05829-JSW dans le modèle de mémorisation de mon frère. Bien entendu, je ne peux pas encore me porter garant de la qualité des résultats découlant de ma décision de procéder ainsi.
Je vous propose ci-dessous des extraits datés de carnets dans lesquels j'ai consigné ma pratique quotidienne de la méthode proposée par mon frère.
Mais permettez-moi d'abord d'expliquer sa situation pour vous donner une meilleure idée de la façon dont Tallis, Cary et moi-même avons décidé à l'origine de pratiquer sa méthode et de nous réunir pour en discuter. En 2015, Tallis s'est volontairement fait interner dans un établissement de soins psychiatriques de longue durée à la suite d'une grave dépression mentale consécutive à ce qu'il considérait comme son témoignage raté devant une commission du Congrès chargée d'enquêter sur la légalité de l'utilisation de drones armés pour des assassinats ciblés par le personnel du gouvernement américain en dehors des champs de bataille actifs. Les médecins ont par la suite diagnostiqué que Tallis souffrait d'un cas aigu de "mutisme adulte avec des épisodes occasionnels de catatonie maligne".
Cary et moi rendons régulièrement visite à Tallis depuis des années. Nous n'avons pas perdu l'espoir qu'il se rétablisse un jour - ou du moins que son état psychologique s'améliore suffisamment pour qu'il puisse être soigné à domicile. Nous continuons tous trois à pratiquer sa méthode. Cela permet à chacun d'entre nous de se référer, lors de nos visites, aux "progrès" qu'il pense accomplir. Cela nous donne de la force. C'est aussi, j'en suis convaincu, une façon d'affirmer à Tallis que nous continuons à croire en sa santé psychologique sous-jacente de même que nous continuons à croire en l'acuité de sa vision historique.
En tant qu'éditeur professionnel de la famille, je rappelle régulièrement à Tallis et Cary que j'ai l'intention, à un moment donné, de demander à voir le compte rendu de leur pratique de la méthode de Tallis. Ils ont donné leur accord provisoire. Mon but, leur ai-je expliqué, sera de compiler un recueil d'extraits pour démontrer les avantages pratiques de cette méthode, à la fois pour nous-mêmes et peut-être pour d'autres participants potentiels à la vision excentrique mais générative, voire transformatrice, de Tallis.
J'ai assuré à mon frère Tallis et à sa fille Cary qu'ils garderaient un total contrôle éditorial sur leurs contributions individuelles. Néanmoins, je leur demanderai de limiter leurs modifications au minimum. Je souhaite que les extraits qui apparaissent - comme ceux que j'ai reproduits ci-dessous - ne portent que les marques d'une altération mineure tout en laissant à leurs auteurs leurs prérogatives d'examen, de révision et d'approbation finale.
Pour des raisons qu'il n'est pas nécessaire d'évoquer ici, le titre que j'envisage d'adopter pour toute publication plus complète de la méthode de Tallis et des notes écrites par nous trois qui en ont découlé, sera emprunté, à la demande de Tallis, au titre qu'il souhaitait donner à son dernier ouvrage scientifique inachevé, aujourd'hui abandonné. Ce titre est John James Audubon Looks Up in Haiti (qu'on pourrait traduire en français par John James Audubon incite à porter le regard sur Haïti).
Il suffit de dire que ce travail concernait l'engagement profond de Tallis dans la petite enfance de John James Audubon, né Jean Rabine (ou Rabin). Audubon était un fils blanc illégitime, élevé jusqu'à l'âge de six ans et demi dans l'une des plantations de sucre de son père (Jean Audubon) aux Cayes (Les Cayes est une commune d'Haïti, chef-lieu du département du Sud et de l'arrondissement des Cayes dans la péninsule de Tiburon), à Saint-Domingue (Haïti après 1804). Sa mère est morte huit mois après sa naissance et il a été élevé par la maîtresse métisse et chef de famille de son père, Catherine "Sanitte" Bouffard, ainsi que par sa demi-sœur Marie-Madeleine, âgée de neuf ans.
Dans son dernier ouvrage historique, Tallis a voulu reconstituer un portrait de l'enfance d'Audubon, de la petite enfance à l'âge de six ans et demi, couvrant les années 1785 jusqu'au déclenchement de la Révolution haïtienne, le 22 août 1791. Tallis pensait que l'histoire de la publication, entre 1827 et 1838, du grand ouvrage d'Audubon, The Birds of America, ne pouvait être racontée ou comprise avec précision sans une histoire parallèle de l'enfance de l'artiste. Seule une juxtaposition narrative de ces deux périodes de la vie d'Audubon pourrait mettre en lumière la signification de l'absence presque totale de la figure humaine dans l'art américain presque magnifique de ce grand artiste et naturaliste.
Tallis m'a dit un jour en plaisantant que l'une des confirmations de sa réflexion sur Audubon était que l'enchère gagnante lors de la vente aux enchères d'une série complète des quatre volumes originaux d'Audubon, The Birds of America, reste le deuxième montant le plus élevé jamais payé pour un livre rare (9,65 millions de dollars en 2018, soit 11,48 millions de dollars en dollars d'aujourd'hui). Seuls les exemplaires de la Bible de Gutenberg ont atteint de tels sommes.
Christopher
27 janvier 2024 (Samedi 4h38 du matin)
Mariupol pour le passé, Kahn Younès aujourd'hui : la destruction de tous à Rafah pour l'avenir : Mais d'abord, tous les morts de l'histoire témoigneront avec la persuasion irréfutable de leur silence forcé sous l'aile ininterrompue d'un moineau. Utilisez ces mots pour un chant, pour remplir l'idée de justice historique, pour valoriser le temps en tant que durée et poids de la distance dans un intervalle de sens. Ceci pour notre discours vivant : "La destruction totale est la négation de la paix".
[Note : Les mots cités sont rapportés comme étant ceux du président Dwight D. Eisenhower à la fin de 1952, alors qu'il était président élu, après que ses conseillers militaires en planification de guerre nucléaire lui eurent présenté le pouvoir destructeur de la bombe à hydrogène et la nécessité stratégique pour les États-Unis d'adopter la politique de destruction mutuelle assurée contre l'Union soviétique ; voir Benjamín Labatut, Maniac (2023) 169...]. (1)
(Ces extraits reprennent tous les sélections de citations de Tallis, les titres de chapitres et les aquarelles d'Audubon à mémoriser, à rappeler et à méditer par ceux qui mettent en pratique sa méthode. Tallis a toujours espéré que chacun finisse par adopter son propre modèle de mémorisation et de tablature musicale une fois convaincu de l'utilité générale de sa méthode pour créer des "cadres méditatifs pour habiter les intervalles de justice historique" en s'occupant quotidiennement et de manière disciplinée des associations libres spontanées de son propre esprit). (2)
Modèle de mémorisation et tablature des notes de musique
[1. Note : 6. Langage : "Nous essaierons de montrer etc. ..." (EL) ⇒ INTERVALLE → Note 5. L'État : "Thématisation et conceptualisation, qui sont d'ailleurs indissociables etc. ..." (EL) ⇒ INTERVALLE → Note 2. Immédiateté : "La Nature, bien lue, n'est-elle pas ce dont on pense communément qu'elle est tout simplement le symbole. ... Nous sommes exposés au danger d'oublier ce langage que toutes les choses et tous les événements parlent sans métaphore" (HDT) ; 2. Chapitre II : "Dès que la pensée se tarit" (NM) ; 3. Oiseau 4 : Sterne arctique (1833)].
[Voir Les oiseaux d'Amérique, planche 250. La gravure est réalisée à partir d'une peinture faite par Audubon sur le pont d'un navire au large de la côte du Labrador à la fin du mois de juin 1833. Dans la méthode de méditation historique de Tallis Martinson, cette image doit être contemplée en association avec les souvenirs textuels suivants de William Ingalls, un étudiant en médecine de vingt ans, membre de l'expédition au Labrador, qui s'est vivement souvenu, soixante ans plus tard, des mots exacts de l'artiste (capturant dans sa transcription le son de l'anglais d'Audubon, souvent remarqué par les observateurs contemporains pour ses inflexions et ses accents français étranges). Audubon a parlé à Ingalls alors qu'il était en train de peindre "d'après nature" l'oiseau qu'il avait abattu la veille. Comme il le faisait toujours par souci de précision et de simplification, Audubon avait fixé le corps de l'oiseau à la planche de pin tendre à l'aide de clous métalliques. Il avait disposé le spécimen de manière à imiter la scène dont Ingalls et lui-même avaient été témoins la veille. Dans la cacophonie des hommes et des garçons qui abattaient de nombreux oiseaux, une sterne arctique était tombée et gisait aux pieds d'Ingalls, désorientée et terrorisée, mais indemne. À ce moment-là, un autre oiseau, peut-être son compagnon, plongea à la verticale jusqu'à quelques centimètres de l'oiseau couché sur le sol, comme pour l'inspecter, tenter de le réconforter ou de l'aider. La veille, Audubon avait noté la vive réaction d'Ingalls à cette scène et en avait fait la remarque dans son journal. Lorsque Ingalls s'est approché d'Audubon le lendemain soir à bord du navire, alors qu'Audubon était en train de peindre la scène de l'oiseau plongeant à la verticale dont ils avaient été témoins ensemble, Ingalls a rapporté : "J'ai porté mon ombre à la petite table à laquelle était assis Mr Audubon. Il a levé les yeux et m'a salué en me disant : "Bonjour, Sangrido" (il me nommait ainsi le premier jour), "Il est là, il a peur, il est terrifié, il vous regarde, vous ne pouvez l'aider"" (3).
Tallis :
Mercredi 31 janvier 2024
"Chaque individu a l'obligation ou le devoir de ..."
[1. Note 8 (Octave). Lucidité : "Tout le monde sera facilement d'accord etc. .... La paix se concrétise par cette aptitude à s'exprimer. L'eschatologie rompt avec la totalité des guerres et des empires dans lesquels on ne s'exprime pas. La première vision de l'eschatologie (ici distinguée des opinions révélées de la religion positive) révèle la possibilité même de l'eschatologie (ndr : définition Larousse : Ensemble de doctrines et de croyances portant sur le sort ultime de l'homme après sa mort (eschatologie individuelle) et sur celui de l'univers après sa disparition (eschatologie universelle)), c'est-à-dire la rupture avec la totalité, la possibilité d'une signification sans contexte. L'expérience de la moralité ne procède pas de cette vision, elle la consomme. L'éthique est une optique. Mais c'est une vision sans image, dépourvue des vertus synoptiques totalisantes et objectivantes de la vision, une relation ou une intentionnalité d'un type tout à fait différent, etc..." (EL) ⇒ INTERVALLE → Note 1. Travail : "Le travail est le feu vivant et génère la forme. Il est le caractère transitoire des choses, leur temporalité en tant que leur formation par le temps vivant" (Karl Marx, Hiver 1857-58) ⇒ INTERVALLE → Note 5. L'État : "Thématisation et conceptualisation, d'ailleurs inséparables, ne sont pas la paix avec l'Autre mais l'annulation ou la possession de l'Autre. La possession affirme l'autre mais dans le cadre de la négation de son indépendance. Le "je pense" se réduit au "je peux", à une appropriation de ce qui est, à une exploitation de la réalité. L'ontologie (ndr : étude de l'être) comme philosophie première est une philosophie du pouvoir. Elle s'inscrit dans l'État et dans la non-violence de la totalité sans se prémunir contre la violence dont vit cette non-violence et qui apparaît comme la tyrannie de l'État. La vérité, censée réconcilier les personnes, existe ici de manière anonyme. L'universel se présente comme impersonnel, et c'est une autre inhumanité" (EL) 2. chapitre III. "L'idée d'égalité universelle est un accomplissement historique" ; 3. Oiseau 2. Grive des bois (1822)].
Cary :
31 janvier 2024
Il faudrait le dire autant de fois qu'il y a de règles pour que l'agencement de toutes ces pierres ait un jour la chance de rentrer chez elles. Une forêt d'hiver du Nouveau Monde : une forêt du vert le plus sombre et le plus profond. Hier, j'ai vu un petit faucon gracile - il s'agissait peut-être d'un mâle "épervier brun", maintenant que j'ai regardé - briller délicatement au sommet de l'épicéa le plus haut. Il n'y en avait pas d'autre dans les environs. La délicatesse de son mouvement m'a semblé être le sentiment le plus profond que l'on puisse éprouver, que l'on puisse ressentir. Rien n'existait entre les intervalles de la patience naturelle de la grâce de l'intention non pressée et non forcée de son prédateur - un modèle parfait pour la temporalité d'un état profond proche de la douceur non hésitante d'une force plaisante et non consentante. Aujourd'hui, l'homme a dit (il a sûrement dû le lire à haute voix à quelqu'un d'autre) - en tout cas, il l'a écrit et c'est la version qui nous est parvenue : "Marx pour chaque âme" - j'ai dit à mon père qu'à des fins de mémorisation, il devait compléter le fragment de phrase tiré de l'ordonnance de non-lieu du juge et de son refus de la demande d'injonction préliminaire des plaignants. Je lui ai demandé de modifier son texte comme suit :
"Il est du devoir de chacun d'affronter le siège actuel de Gaza, mais il est également du devoir de la Cour de rester dans les limites de son champ de compétence". (Extrait de l'ordonnance du juge Jeffrey S. White, 31 janvier 2024.)
Nous devons réapprendre à nous exprimer à partir d'ici.
[1.Note 4. La justice : "Affirmer la priorité de l'Être sur les Vivants ?) etc...". (EL) ⇒ INTERVALLE → Note 5. L'État : "La thématisation et la conceptualisation, d'ailleurs inséparables, ne sont pas la paix avec l'autre mais l'annutlaion ou la possession de l'Autre. La possession affirme l'autre mais dans le cadre de la négation de son indépendance. Le "je pense" se réduit au "je peux", à une appropriation de ce qui est, à une exploitation de la réalité etc....". (EL) ⇒ INTERVALLE → Note 6. Langue : "Nous allons essayer de montrer etc....Le même est essentiellement l'identification au sein du divers, de l'histoire ou du système. Ce n'est pas moi qui résiste au système comme le pensait Kierkegaard, c'est l'Autre" (EL) ; 2. Chapitre I : "La complicité de la présence" ; 3. Oiseau 1. La grande aigrette, peinture de John James Audubon (peut-être sa plus grande) exécutée avec son apprenti prodige de quatorze ans, Joseph Mason, à la Nouvelle-Orléans à l'automne 1821, non utilisée pour la gravure représentant l'espèce dans The Birds of America (1827-1838) d'Audubon].
Ajout à la méditation d'aujourd'hui après la récitation intérieure des passages mémorisés applicables : "Une impunité de mauvaise foi détonante à laquelle aucun enfant de Palestine n'a jamais été destiné à survivre (certains le formulent déjà) : Marx pour chaque âme ; la Palestine pour patrie ; la dépossession pour chaque ami".
Christopher :
1er février 2024
Un discours lorsque l'État échoue et doit disparaître. Les personnes doivent-elles échouer lorsque les institutions le font ? Voici un discours. Faisons-en plus avec - et rendons justice ainsi aux uns et aux autres - la violence de la force ne peut devenir son propre argument justificatif. Lorsqu'un État - ou tout porte-parole de l'État - affirme cette structure constitutive de l'impunité et que nous lui obéissons, nous brisons la cohérence de toute continuité pour laquelle il vaut la peine d'attendre ou pour laquelle il vaut la peine de mourir. D'autres mots, d'autres actes, d'autres principes que la mauvaise foi empoisonnée que l'État inaugure lorsqu'il déclare sa justice parfaite hors d'atteinte, lorsqu'il s'incline devant les bourreaux qu'il a légalement jugés responsables de génocide, non pour prévenir ou punir, mais pour implorer : "Il y a de rares cas où l'issue souhaitée est inaccessible à la Cour. C'est le cas ici. La Cour est tenue par les précédents et la division de nos branches coordonnées du gouvernement de s'abstenir d'exercer sa compétence dans cette affaire. Pourtant, comme l'a constaté la CIJ, il est plausible que la conduite d'Israël équivaille à un génocide. Cette Cour implore les défendeurs d'examiner les résultats de leur soutien indéfectible au siège militaire contre les Palestiniens de Gaza". (Extrait de la décision du juge Jeffrey S. White de rejeter la demande d'injonction préliminaire dans l'affaire Defense for Children International-Palestine, et. al, v. Joseph P. Biden, et. al, 31 janvier 2024)
Ces mots pour cela : Marx pour chaque âme ; la Palestine pour patrie ; la dépossession pour chaque ami. Le conférencier sur le podium dit : "La cohérence en tant que cadre narré de la continuité au sein de la modernité est un intérêt vital pour l'État".
Modèle de mémorisation et tablature musicale
Ad libitum ( jusqu'à plus soif, à l'infini) :
Notes de fin d'ouvrage
1- La citation complète d'Eisenhower est la suivante : "Il n'est pas nécessaire que nous développions une capacité de destruction assez puissante pour tout anéantir. La destruction totale est la négation de la paix".
2- Une annexe est jointe à cette présentation d'extraits de la pratique de la méthode de Tallis, énumérant les textes et les œuvres d'art à partir desquels il a construit son propre modèle de mémorisation et sa tablature de notes musicales.
3- Christopher a appris à pratiquer la méthode de Tallis en effectuant les étapes suivantes de manière méditative : il commence par observer calmement les associations libres lui traversant l'esprit jusqu'à ce qu'il soit frappé par une phrase ou un ensemble de mots particuliers lui venant spontanément à l'esprit. Il note alors ce fragment de pensée sans chercher à en déchiffrer le sens. À partir de là, il note toutes les formulations qui lui viennent ensuite à l'esprit. Dans cette note du 27 janvier, ce processus a donné lieu à ce qui suit : "Mariupol pour le passé, Kahn Younès aujourd'hui : la destruction de tous, etc. ...", qui se termine par "La destruction totale est la négation de la paix".
Plutôt que de laisser ces fragments de mots issus de l'interaction de pensées partielles sombrer dans l'abîme de l'oubli sans mémoire, Tallis tente de s'y accrocher en les écrivant, puis en procédant de manière méditative pour les aligner sur son modèle de mémorisations antérieures valorisées. Il fait vaguement correspondre la succession de mots et de phrases de son association libre à un inventaire rapide des huit textes mémorisés de sa gamme musicale, puis place la phrase musicale qu'il construit intuitivement à partir de trois de ces "notes" dans l'un des quatre chapitres possibles de son modèle, et enfin juxtapose cette phrase musicale à l'image que son esprit se fait de l'une des quatre aquarelles originales d'Audubon représentant des oiseaux d'Amérique.
L'intérêt de tout cela, selon Christopher, est la génèse d'une discipline permettant d'habiter des temps de réflexion momentanément libérés des pressions idéologiques immédiates. Il espère qu'une telle discipline, dérivée des associations libres de son propre esprit, lui apprendra à se percevoir comme un participant potentiel à un récit historique de paix universelle raisonnablement légitime. Il ressent les phrases musicales de trois notes que ses méditations génèrent silencieusement comme créant potentiellement un espace temporel de liberté, à l'instar de la direction donnée par le compositeur à l'interprète d'une partition musicale écrite pour qu'il joue un passage particulier : ad libitum. Dans ses carnets, Tallis qualifie ces tentatives d'habiter les intervalles méditatifs entre les récitations internes de ses textes mémorisés "d'effort civique pour des temps de justice vécus au milieu des coercitions sans faille des guerres perpétuelles de notre empire".
Annexe
Résumé schématique du modèle de mémorisation et de la tablature musicale de Tallis Martinson
Notes mémorisées de la gamme musicale diatonique de la méthode méditative de Tallis Martinson
Note 1. Le travail : "Le travail est le feu vivant qui génère la forme. Il est l'éphémère des choses, leur temporalité comme leur formation par le temps vivant". Karl Marx, 1857-58 (21 mots)
Note 2. Immédiateté : "La nature, bien interprétée, n'est-elle pas ce dont on pense généralement qu'elle n'est que le symbole. ... Nous risquons d'oublier ce langage que toutes les choses et tous les événements expriment sans métaphore". Henry David Thoreau, 1849, 1854 (35 mots)
Note 3. La possession : "La possession est avant tout cette forme par laquelle l'Autre devient le même en devenant mien". Emmanuel Levinas, 1961, 46 (15 mots)
Note 4. La justice : "Affirmer la priorité de l'Être sur les vivants, c'est déjà décider de l'essence de la philosophie ; c'est subordonner la relation avec celui qui vit (la relation éthique) à une relation avec l'Être, qui, impersonnelle, permet l'appréhension, la domination des existants (une relation de connaissance), subordonne la justice à la liberté". Emmanuel Levinas, 1961, 45 (56 mots)
Note 5. L'État : D'après : "Thématisation et conceptualisation, d'ailleurs inséparables, ne sont pas la paix avec l'Autre mais l'annulation ou la possession de l'Autre" à "La vérité, qui devrait réconcilier les personnes, existe ici de façon anonyme. L'universel se présente comme impersonnel, et c'est là une autre inhumanité". Emmanuel Levinas, 1961, 46 (109 mots)
Note 6. La langue : De : "Nous essaierons de montrer que la relation entre ce même et cet autre - à laquelle nous semblons imposer des contraintes si extrêmes - est le langage" à "Mais dire que l'autre peut rester complètement autre, qu'il n'entre que dans la relation de conversation, c'est dire que l'histoire elle-même, identification du même, ne peut prétendre totaliser le même et cet autre. L'absolument autre, dont l'altérité est dépassée dans la philosophie de l'immanence sur le plan prétendument commun de l'histoire, maintient sa transcendance au sein de l'histoire. Ce même est essentiellement identification au sein du divers, ou de l'histoire, ou du système. Ce n'est pas moi qui résiste au système, comme le pensait Kierkegaard, c'est l'autre". Emmanuel Levinas, 1961, 39-40 (581 mots)
Note 7. Le désir : De : "Le désir est absolu si. ..." à "C'est ce perpétuel report de l'heure de la trahison. qui implique le désintéressement de la bonté, le désir de l'absolument autre ou la noblesse, dimension de la métaphysique". Emmanuel Levinas, 1961, 34-35 (363 mots)
Note 8 (Octave). Lucidité : De : "Chacun conviendra aisément qu'il est de la plus haute importance de savoir si l'on n'est pas dupe de la morale. La lucidité, l'ouverture de l'esprit sur le vrai, ne consiste-t-elle pas à apercevoir la possibilité permanente de la guerre ?" à "La paix est générée par cette aptitude à la parole. ... [L'éthique est une optique, mais c'est une "vision" sans image, une relation ou une intentionnalité d'un tout autre type". Emmanuel Levinas, 1961, 21-23 (1202 mots)
Titres des chapitres du modèle de mémorisation de la méthode de Tallis Martinson.
Chapitre I. "La complicité de la présence"
Chapitre II. "Dès que la pensée se tarit (Nadezhda Mandelstam)"
(Le titre du chapitre II est tiré de L'espoir abandonné de Nadezhda Mandelstam, 1974, 10. Mandelstam écrit : "Dès que la pensée se tarit, elle est remplacée par des mots. Un mot est trop facilement transformé d'un signe significatif en un simple signal, et un groupe de mots en une formule vide, dépourvue même du sens que de telles choses ont dans la magie. Nous commençons à échanger des phrases toutes faites sans nous apercevoir qu'elles ont perdu tout sens vivant. Pauvres créatures tremblantes, nous ne savons pas ce qu'est le sens, il a disparu du monde. Le sens nous sera rendu lorsque nous reprendrons nos esprits et que nous nous rappellerons que nous sommes responsables de tout".)
Chapitre III. "L'égalité universelle est un accomplissement historique"
Chapitre IV. "L'État est un instrument nécessaire mais insuffisant de la justice historique"
Planches sélectionnées parmi The Birds of America (Les oiseaux d'Amérique)
Quatre aquarelles originales de John James Audubon parmi plus de 435 utilisées pour la gravure des planches de The Birds of America (1827-1838)
La grande aigrette (1821) (non utilisée pour The Birds of America)
La grive des bois (1822)
L'aigle royal (1835)
La sterne arctique (1833)
Sources textuelles du modèle de mémorisation et de la tablature des notes de musique de Tallis Martinson.
Karl Marx (1857-58), voir Grundrisse : Foundations of the Critique of Political Economy (Fondements de la critique de l'économie politique) (Rough Draft), traduit avec un avant-propos de Martin Nicolaus (Penguin Books in association with New Left Review, 1973). (Parfois noté dans le modèle de mémorisation de Tallis comme : (KM)).
Henry David Thoreau (écrit en 1849 et 1854), voir A Week on the Concord and Merrimack Rivers and Waldenv (Une semaine sur les rivières Concord et Merrimack) ; or, Life in the Woods (La vie dans les bois). (HDT)
Emmanuel Levinas, Totalité et infini : Essai sur l'extériorité (1961). (EL)
Nadezhda Mandelstam, Hope Abandoned (L'espoir abandonné) (1974). (NM)
John James Audubon, The Birds of America (1827-38). (JJA)
John James Audubon, Writings and Drawings (écrits et dessins), édité par Christoph Irmscher, Library of America (1999).
Alexandra Mazzitelli, Marjorie Shelley et Roberta J. M. Olson, Audubon's Aviary (La volière de ….) : The Original Watercolors for The Birds of America (Aquarelles originales des Oiseaux de l'Amérique)(2012).
Richard Rhodes, John James Audubon : The Making of an American (La fabrication d'un Américain) (2004).
Charles Rosen, Le style classique : Haydn, Mozart, Beethoven (1971).
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