❖ L'histoire secrète du Hamas
Comprendre la dynamique, garder à l'esprit nombre d'autres façons d'assembler les pièces de ce puzzle pour former un tableau différent. Cet essai n'est pas l'histoire mais la réflexion de J. Corbett.
L'histoire secrète du Hamas
Par James Corbett , le 14 avril 2024, Substack de l’auteur
N'est-il pas cocasse de constater que les "informations" de l'establishment donnent à leur public l'impression d'être informé alors même que celui-ci est d'une ignorance confondante ? Un événement tel que le faux drapeau du 7 octobre a lieu et, soudain, les mêmes personnes qui étaient incapables de situer Israël sur une carte sont devenues des experts autoproclamés de la région, répétant consciencieusement tous les points de discussion sur le conflit israélo-palestinien qu'ils ont entendus aux informations du soir.
Bien entendu, lorsque vous essayez d'approfondir des points précis avec ces personnes, vous vous heurtez rapidement aux limites de leurs connaissances.
Interrogez-les sur le Hamas, par exemple, et vous entendrez probablement dire que le Hamas :
est un groupe terroriste dûment désigné ;
a juré de détruire Israël ;
a remporté une élection à un moment donné et dirige maintenant Gaza comme un État terroriste théocratique ; et
est composé de lâches qui lancent des roquettes sur Israël et se servent de femmes et d'enfants comme boucliers humains.
Comme c'est souvent le cas, ces extraits médiatiques régurgités contiennent certes des éléments de vérité. Mais les erreurs et les omissions dans ce récit conventionnel, favorable aux sionistes, suffisent à faire en sorte que ceux qui le croient et le reprennent sans réfléchir ne tombent pas seulement dans l'erreur, mais aussi dans l'erreur la plus dangereuse.
Oui, les masses irréfléchies adhérant à cette propagande se fourvoient à propos d'Israël. Il ne s'agit pas du pauvre opprimé démocratiquement élu du Moyen-Orient, mais d'une puissance nucléaire dévoyée et d'un État d'apartheid exerçant une influence démesurée sur le monde grâce à l'espionnage (tant réel que virtuel), aux subterfuge, au lobbying et au chantage. Israël a été formellement réprimandé pour son nettoyage ethnique des Palestiniens et est accusé de massacres, d'atrocités, de crimes de guerre et de génocide au cours de ce dernier conflit en date.
Mais ces perroquets de la propagande ne se trompent pas seulement sur Israël. Ils se trompent aussi sur le Hamas.
Ou, à tout le moins, ils ne connaissent pas la véritable histoire du Hamas.
Qu'est-ce que le Hamas ? Quelle est son origine ? Quels sont ses objectifs ? Et, surtout, comment est-il parvenu au pouvoir dans la bande de Gaza ?
Aujourd'hui, répondons à ces questions et dissipons, une fois pour toutes, le nuage d'ignorance qui plane sur ce conflit.
L'histoire/le récit du Hamas
Si vous êtes curieux de connaître l'histoire du Hamas et que vous êtes un citoyen lambda (c'est-à-dire parfaitement inconscient de la guerre de l'information de cinquième génération qui fait rage autour de vous), vous commencerez peut-être votre recherche de réponses là où les contrôleurs de l'information veulent que vous commenciez toutes vos recherches à savoir, Google.
Et si vous vous aventurez dans cette bibliothèque de Babel, vous finirez sans doute par cliquer sur le premier résultat : la page Wikipédia sur le Hamas. Vous y apprendrez quelques informations de base sur l'organisation, telles que :
Le Hamas est un "mouvement politique et militaire islamiste sunnite palestinien qui gouverne certaines parties de la bande de Gaza occupée par Israël".
Son nom dérive de HMS, l'acronyme de l'expression arabe Ḥarakah al-Muqāwamah al-ʾIslāmiyyah ("Mouvement de résistance islamique"), qui se traduit par le mot arabe ḥamās (signifiant "zèle", "intégrité" et/ou "bravoure").
Il s'est engagé dans des opérations de combat contre Israël depuis 1989 dans le but d'établir un califat islamique en Palestine ; etc.
Si vous avez un peu de patience et de persévérance, vous pourrez découvrir d'autres informations intéressantes sur l'histoire du Hamas en consultant les notes et les références de l'article de Wiki. (Exemple : rappelez-vous quand le gouvernement irlandais a expulsé un diplomate israélien pour avoir falsifié des passeports irlandais lors d'une opération du Mossad visant à assassiner le logisticien en chef du Hamas).
. . . Mais, quelle que soit votre patience, vous constaterez rapidement que les réponses aux questions les plus importantes sur le Hamas ne se trouvent pas sur Wikipédia, plateforme de toute évidence manipulée par des agents sionistes pour éliminer toute information critique à l'égard d'Israël.
Alors, si vous cherchez la vérité pure et dure sur le Hamas, vers qui vous tourner ?
<sarc>Pourquoi pas, vers les Forces de défense israéliennes (FDI), bien sûr !</sarc>.
C'est vrai, les FDI ont une vidéo explicative pratique de six minutes qui prétend vous raconter "l'histoire intégrale du Hamas", dans laquelle vous apprendrez (ATTENTION !) que le Hamas :
est "une organisation terroriste qui dirige Gaza" ;
recourt aux "attentats-suicides, aux attentats à la voiture piégée, aux enlèvements et aux tirs de roquettes sur Israël" dans le cadre de sa campagne visant à "tuer les juifs" ; et
a pris le pouvoir après que le gouvernement israélien altruiste a courageusement retiré ses colonies illégales de Gaza en 2006.
Vous apprendrez également que le Hamas reçoit 100 millions de dollars par an de l'Iran, fonds qu'il utilise pour fabriquer "des roquettes, des drones et un réseau de tunnels souterrains de 500 kilomètres de long".
Pour finir, vous apprendrez qu'enfin quelqu'un s'attaque au problème du Hamas une fois pour toutes, et vous serez choqués (choqués ! je vous le répète !) d'apprendre que ce "quelqu'un", c'est Tsahal !
. . . Mais comme vous êtes du genre sceptique, vous vous demandez peut-être si c'est une bonne idée de prendre pour argent comptant la propagande de l'armée israélienne au sujet de ses propres ennemis. Ainsi, pour tenter d'équilibrer le point de vue manifestement biaisé des FDI avec un point de vue tout aussi biaisé sur l'autre partie du conflit, vous pourriez vous tourner vers Son of Hamas, qui prétend être un récit de la bouche même du chef de file du Hamas, sur sa création et ses activités ultérieures.
Cette autobiographie est écrite par Mosab Hassan Yousef, fils du cofondateur du Hamas, Hassan Yousef. Elle contient des informations de première main remettant en cause l'histoire officielle du Hamas. Ainsi, Yousef affirme que le Hamas n'a pas été fondé en 1987, comme l'affirme Wikipédia, mais lors d'une réunion secrète des autorités spirituelles palestiniennes et des chefs de la résistance qui s'est tenue à Hébron en 1986.
Le livre contient également des informations intéressantes sur la vie de Yousef, qui a grandi à Ramallah dans l'ombre de l'occupation militaire israélienne, et raconte comment la rage des Palestiniens face aux mauvais traitements israéliens a débouché sur la première Intifada et la création du Hamas.
... Mais en poursuivant votre lecture, vous découvrirez que Yousef a été recruté par le Shin Bet - l'agence de sécurité israélienne - alors qu'il purgeait une peine dans une prison israélienne dans les années 1990. Vous apprendrez ensuite sa collaboration active avec les Israéliens pour traquer, arrêter et contrecarrer ses compatriotes palestiniens (y compris son propre père, le cheikh Hassan Yousef). Finalement, vous vous rendrez compte que vous ne lisez pas du tout la version du Hamas. Vous lisez simplement une autre version de la propagande israélienne.
Alors, si vous décidez de tout reprendre à zéro, vous pouvez décider de vous tourner vers des sources primaires. Vous déterrerez la charte originale du Hamas de 1988 et lirez que le "Mouvement de résistance islamique" (c'est-à-dire le Hamas) :
est "l'une des ailes des Frères musulmans en Palestine" ;
s'efforce de "hisser la bannière d'Allah sur chaque centimètre carré de la Palestine" :
considère que la Palestine est "un Waqf (droit) islamique consacré aux générations musulmanes futures jusqu'au jour du Jugement dernier" et que, par conséquent, "la loi régissant la terre de Palestine [est] la charia (loi) islamique" ;
définit le nationalisme comme "faisant partie du credo religieux", ce qui signifie que "résister à l'ennemi et le réprimer devient le devoir individuel de chaque musulman, homme ou femme" ;
rejette "les prétendues solutions pacifiques et les conférences internationales" comme étant en contradiction avec ses principes ; et
estime que "face à l'usurpation de la Palestine par les Juifs, brandir l'étendard du djihad est une obligation".
... Mais comme vous êtes un chercheur assidu soucieux de toujours corroborer les informations (même les "sources primaires" comme la charte du Hamas), vous pourriez creuser un peu plus et tomber sur Hamas: A Beginner's Guide de Khaled al-Hroub, professeur d'études moyen-orientales à l'université Northwestern au Qatar, qui affirme que la charte du Hamas n'est en aucun cas un document officiel du Hamas.
La charte a été rédigée au début de l'année 1988 par une seule personne et rendue publique sans consultation générale appropriée du Hamas, sans révision ni consensus, au grand regret des dirigeants de ce mouvement dans les années qui ont suivi. L'auteur de la charte faisait partie de la "vieille garde" des Frères musulmans dans la bande de Gaza, complètement coupée du monde extérieur. [Les dirigeants et les porte-parole du Hamas ont rarement fait référence à la charte ou l'ont rarement citée, preuve qu'elle est désormais perçue comme un fardeau plutôt que comme une plate-forme intellectuelle qui embrasse les principes du mouvement.
Vous pouvez même vous aventurer plus loin dans le terrier du lapin académique pour en savoir plus sur ce lien entre les Frères musulmans et le Hamas. Et, pendant que vous y êtes, vous tomberez peut-être sur Hamas: A Historical and Political Background, un article scientifique publié dans l'édition de l'été 1993 du Journal of Palestine Studies. Cette version de l'histoire du Hamas, rédigée par Ziad Abu-Amr, ancien professeur associé de sciences politiques à l'université de Birzeit et actuel vice-premier ministre de l'État de Palestine, replace le Hamas dans son contexte historique en l'identifiant comme une émanation palestinienne des Frères musulmans.
Jusqu'aux années 1980, lorsque le Jihad islamique radical s'est détaché de la société des Frères musulmans, l'histoire des mouvements islamiques en Palestine se résume à l'histoire de la confrérie. Celle-ci avait été fondée en Égypte en 1928 par Hasan al-Banna et s'était rapidement répandue dans d'autres parties du monde arabe. Dans sa tentative de revitaliser l'appel islamique, al-Banna a mis l'accent sur trois éléments : la renaissance, l'organisation et l'éducation. Fondamentalement, l'objectif du mouvement d'al-Banna, comme celui d'autres groupes de renaissance islamique, était de transformer la société pour qu'elle se rapproche le plus possible de celle établie par le prophète Mahomet et ses compagnons. Cela impliquerait l'établissement d'un État islamique, sans distinction entre la religion et le gouvernement, et dans lequel le Coran et la sunna serviraient de base pour tous les aspects de la vie.
Ce récit de la fondation du Hamas nous conduit de 1973 - date à laquelle le dynamique cheikh palestinien Ahmed Yassine, qui se déplace en fauteuil roulant, a créé la branche palestinienne des Frères musulmans à Gaza - aux événements de 1987. En décembre 1987, une série d'incidents de plus en plus graves a conduit à une manifestation dans le camp de réfugiés de Jabalia, où l'un des manifestants, Hatem al-Sisi, âgé de 17 ans, a été abattu par un soldat israélien. La nouvelle du meurtre d'al-Sisi s'est rapidement répandue, déclenchant un certain nombre de protestations, de manifestations, de grèves et d'émeutes dans toute la Palestine occupée par Israël. C'est le début de ce que l'on appellera la première Intifada.
Selon Abu-Amr, c'est ce soulèvement massif des Palestiniens en décembre 1987 qui a incité le cheikh Ahmed Yassin à organiser une série de réunions stratégiques rassemblant certains des membres les plus éminents de la confrérie palestinienne à Gaza. Après plusieurs jours de réunions, ce groupe a publié une déclaration appelant les Palestiniens à s'opposer à l'occupation israélienne. Et, selon Abu-Amr, le Hamas considère aujourd'hui qu'il s'agit de son premier tract sérialisé.
... Mais nous en revenons à l'affirmation de Mosab "fils du Hamas" Yousef selon laquelle le groupe a été fondé en 1986 - c'est-à-dire avant l'Intifada - et non en 1987 comme cela a été rapporté précédemment. Ce point est important car, insiste Yousef, le Hamas existait déjà en 1986 et le cheikh Yassine et ses compagnons conspirateurs du Hamas - y compris le propre père de Mosab Yousef - avaient passé un an à attendre un incident "qui pourrait servir de justification au soulèvement". L'assassinat d'al-Sisi n'était, selon Yousef, que cela : une excuse commode pour une révolte.
Alors, après toutes ces recherches, sommes-nous plus près de répondre à nos questions sur le Hamas ? Peut-être pas.
... Mais à ce stade, il convient de garder à l'esprit que l'histoire n'est généralement rien d'autre que son/sa propre histoire. Notre compréhension de l'histoire dépend entièrement des sources que nous écoutons et de celles que nous ignorons. Et, comme les lecteurs de Corbette le savent déjà, l'histoire qui nous est enseignée est généralement celle écrite par les vainqueurs.
Cela dit, il y a toujours des faits objectifs sur lesquels tout le monde peut s'accorder, et l'histoire du Hamas n'est pas différente. En ce qui concerne cette organisation, la plupart des gens admettent que le Hamas est un mouvement islamique palestinien :
Le Hamas est un mouvement islamique palestinien.
Il reconnaît la nécessité d'une résistance armée et violente à l'occupation sioniste dans le cadre de la lutte pour libérer la Palestine de l'occupation israélienne.
Il a obtenu le soutien des Palestiniens qui se sont sentis frustrés par les dirigeants politiques engagés dans des pourparlers de paix infructueux.
Il possède à la fois une aile militaire et une aile politique.
Il a remporté les élections législatives palestiniennes de 2006 et, après avoir gagné une bataille contre le Fatah en 2007, il gouverne la bande de Gaza depuis lors.
... Mais à partir de là, nous commençons à voir apparaître un fractionnement des récits selon des lignes idéologiques. Que signifie le fait que le Hamas gouverne la bande de Gaza ? Le Hamas est-il un gouvernement ? A-t-il été légitimement élu ? A-t-il toujours un mandat pour gouverner ? S'agit-il d'une organisation politique ? D'un mouvement de libération armé ? D'une organisation terroriste radicale ? Ou les trois à la fois ?
Toutes ces questions sont valables et je pourrais sans aucun doute les explorer dans un traité beaucoup plus vaste que celui-ci.
... Mais une question se détache comme étant d'une importance primordiale. La réponse à cette question constitue une pierre de Rosette pour décoder la véritable histoire du Hamas. Cette réponse est aussi largement admise qu'elle est soigneusement ignorée. Mais si elle venait à être révélée, elle pourrait radicalement modifier la compréhension qu'ont les masses moyennes, non informées et consommatrices de médias mainstream de l'ensemble du conflit israélo-palestinien.
Cette question est la suivante :
Si le Hamas est vraiment une organisation terroriste à ce point monstrueuse (comme la propagande israélienne voudrait nous le faire croire), comment a-t-il pu prospérer à Gaza, une prison à ciel ouvert minutieusement contrôlée, surveillée et soumise à un blocus par l'armée israélienne ?
En d'autres termes :
Comment le Hamas est-il devenu un ennemi aussi redoutable du gouvernement israélien, sous le nez de ce dernier ?
Israël et le Hamas
Si vous avez suivi la situation de près dans la région depuis un certain temps, vous ne serez pas surpris d'apprendre que le Hamas a été encouragé et soutenu par des éléments de l'establishment politique, militaire et de renseignement d'Israël depuis le début de son existence.
Le fait qu'Israël ait activement soutenu le Hamas n'est nullement une "théorie du complot". C'est un fait bien documenté attesté à maintes reprises par des initiés israéliens et rapporté maintes et maintes fois par les médias mainstream.
Prenons l'exemple de l'article du Wall Street Journal de 2009 intitulé How Israel Helped to Spawn Hamas (Comment Israël a contribué à faire naître le Hamas). Dans cet article, le journaliste Moshav Tekuma cite Avner Cohen - juif né en Tunisie ayant travaillé comme fonctionnaire israélien à Gaza dans les années 1970 et 1980 - déplorant que "le Hamas, à mon grand regret, est la création d'Israël". Selon Cohen, la stratégie israélienne a consisté dès le début à encourager les radicaux islamiques en Palestine pour contrecarrer le véritable ennemi d'Israël : les dirigeants palestiniens laïques qui cherchaient à obtenir le statut d'État palestinien par des moyens pacifiques et diplomatiques.
Au lieu d'essayer d'endiguer les islamistes de Gaza dès le départ, explique Avner Cohen, Israël les a tolérés pendant des années et, dans certains cas, les a encouragés afin de faire contrepoids aux nationalistes laïques de l'Organisation de libération de la Palestine et de sa faction dominante, le Fatah de Yasser Arafat. Israël a coopéré avec un religieux infirme et à moitié aveugle, le cheikh Ahmed Yassine, alors même qu'il jetait les bases de ce qui allait devenir le Hamas. Le cheikh Yassine continue d'inspirer les militants aujourd'hui ; lors de la récente guerre à Gaza, les combattants du Hamas ont affronté les troupes israéliennes à coups de "Yassine", des grenades primitives propulsées par fusée nommées ainsi en l'honneur du chef religieux.
L'article du Journal poursuit en corroborant cette affirmation, citant le général de brigade de l'armée israélienne à la retraite Yitzshak Segev, qui a même admis avoir organisé un voyage en Israël pour le cheikh Yassine afin que ce dernier puisse recevoir un traitement à l'hôpital. Comme Segev l'a avoué plus tard à un autre journaliste : "Le gouvernement israélien m'a alloué un budget et le gouvernement militaire en alloue aux mosquées".
Il existe de nombreux autres exemples de la complicité israélienne dans le renforcement du Hamas.
En 2013, Yuval Diskin, chef du service de sécurité israélien Shin Bet de 2005 à 2011, a déclaré au Yedioth Ahronoth : "Si nous observons les choses au fil des ans, l'une des principales personnes à avoir contribué au renforcement du Hamas a été [le Premier ministre israélien] Bibi [Benjamin] Netanyahou, depuis son premier mandat en tant que Premier ministre".
En 2019, l'ancien Premier ministre israélien Ehud Barak est apparu à la radio de l'armée israélienne, où il a estimé que la "stratégie de Netanyahou est de maintenir le Hamas en vie et en pleine forme [...] même au prix de l'abandon des citoyens [du sud] [...] afin d'affaiblir l'Autorité palestinienne à Ramallah".
Yasser Arafat a déclaré à un journal italien que "le Hamas est une créature d'Israël" et a affirmé que l'ancien Premier ministre israélien Yitzhak Rabin le lui avait avoué en personne.
Les masses tristement mal informées et abreuvées par les médias mainstream que nous avons identifiées au début de cette exploration - celles qui se croient informées sur le conflit Israël/Hamas alors qu'elles ne font que recracher les discours des têtes parlantes - pourraient être déconcertées par tous ces francs aveux. "Mais pourquoi Israël soutiendrait-il ses ennemis ?", pourraient-ils demander avec perplexité.
Heureusement, il n'est pas difficile de répondre à cette question. Selon Ehud Barak, la logique veut qu'"avec le Hamas, il est plus facile d'expliquer aux Israéliens qu'il n'y a personne avec qui s'asseoir et personne à qui discuter". En d'autres termes, un ennemi palestinien radical et violent offre aux Likoudniks radicaux et violents une excuse pour ne jamais avoir à s'engager sérieusement dans des pourparlers de paix avec le peuple palestinien.
Une fois de plus, il est important de souligner qu'il ne s'agit pas d'une théorie du complot. C'est une politique israélienne publiquement reconnue. Comme Haaretz l'a ouvertement admis au lendemain du 7 octobre, Netanyahou a même avoué utiliser cette stratégie lors des réunions de son cabinet ministériel :
"Quiconque veut contrecarrer la création d'un État palestinien doit soutenir le Hamas et transférer de l'argent au Hamas", a-t-il expliqué lors d'une réunion des membres de la Knesset de son parti, le Likoud, en mars 2019. "Cela fait partie de notre stratégie : isoler les Palestiniens de Gaza des Palestiniens de Cisjordanie".
Comment cette stratégie se traduit-elle dans la réalité ?
Prenons l'exemple du cas de l'hôpital al-Shifa. Rappelez-vous quand Netanyahou a remporté le prix des Fake News au début de l'année pour avoir vanté la ridicule séquence animée des FDI montrant comment le "Hamas-ISIS" (peu importe le nom) "transforme les hôpitaux en quartiers généraux de la terreur".
Et vous souvenez-vous que les FDI ont ensuite publié une vidéo (démentie) révélant que ce quartier général de la terreur était en fait constitué de deux fusils et d'un appareil d'IRM ("Hourra !") ?
Quelle que soit la différence entre l'effrayante caricature brossée par l'armée israélienne du bunker du Hamas et la réalité tout à fait banale, elle soulève quelques questions intéressantes, telles que :
À part le Hamas, qui aurait pu construire un tel bunker ?
Et quelle raison auraient-ils de construire un bunker sous un hôpital, si ce n'est pour utiliser cet hôpital comme écran pour leurs activités terroristes ?
Oh, c'est vrai. Le bunker n'a pas été construit par le Hamas. C'est Israël qui l'a fait, à l'époque où les troupes israéliennes occupaient Gaza. Et pourquoi Israël a-t-il construit le bunker ? Selon Ehud Barak, c'était "pour permettre à l'hôpital d'avoir davantage d'espace pour fonctionner compte tenu de la taille très limitée de ces enceintes".
Vous pigez à présent comment ce jeu fonctionne : Le gouvernement israélien fait quelque chose, puis attend que tout le monde oublie ce qu'il a fait, et prétend ensuite que le Hamas a fait cette chose - et qu'il l'a accomplie à des fins terroristes. Les Israéliens utilisent alors ce prétexte pour justifier l'invasion militaire de Gaza déjà planifiée.
Le même argument peut être avancé pour les attaques à la roquette contre Israël qui, avant le faux drapeau du 7 octobre, constituaient le principal argument d'Israël contre le Hamas. Ces roquettes sont construites à partir de transferts de fonds et de matériaux - des transferts que le gouvernement israélien a explicitement facilités et que Netanyahou a défendus à maintes et maintes reprises. Comme Netanyahou lui-même l'aurait déclaré lors d'une réunion des Likoudniks en 2019 :
"Quiconque s'oppose à un État palestinien doit soutenir l'acheminement de fonds vers Gaza, car le maintien de la séparation entre l'AP [Autorité palestinienne] en Cisjordanie et le Hamas à Gaza empêchera la création d'un État palestinien".
Il y aurait encore beaucoup à dire sur le rôle d'Israël dans le soutien au Hamas, mais il est peut-être temps de s'attaquer à la plus grande question qui soit, à savoir....
Qu'est-ce que cela signifie ?
Qu'un gouvernement arme, finance, entraîne et soutienne secrètement ses ennemis supposés est parfaitement compréhensible pour ceux qui ont étudié l'histoire du terrorisme sous faux drapeau.
En effet, ceux qui ont regardé mon documentaire de cinq heures sur l'histoire secrète d'Al-Qaïda (The Secret History of Al Qaeda) reconnaîtront déjà les nombreux parallèles entre cette histoire et l'histoire secrète du Hamas. Par exemple, les origines des Frères musulmans du Hamas pourraient nous rappeler que - bien qu'ils soient des ennemis supposés - les Britanniques ont collaboré avec les Frères à plusieurs reprises, allant même jusqu'à financer secrètement le groupe en 1942. Cela pourrait également nous rappeler que les services de renseignements militaires israéliens ont tenté d'imputer à la confrérie leur propre opération terroriste sous faux drapeau en Égypte en 1954 (opération Susannah).
Mais il n'est pas nécessaire d'être un étudiant en histoire de la conspiration pour comprendre ce qui se passe ici. Même le journaliste du New York Times Thomas Friedman a prouvé que les horloges en panne ont raison deux fois par jour en formulant efficacement le concept de base dans son article de 2021 intitulé For Trump, Hamas and Bibi, It Is Always Jan. 6 (Pour Trump, le Hamas et Bibi, c'est toujours le 6 janvier) :
Comme Trump, Bibi et le Hamas se sont maintenus au pouvoir en suscitant et en surfant sur des vagues d'hostilité à l'égard de "l'autre". Ils recourent à cette tactique chaque fois qu'ils sont en difficulté politique. En effet, chacun d'entre eux a été le partenaire le plus précieux de l'autre dans cette tactique depuis que Netanyahou a été élu pour la première fois Premier ministre en 1996, à la suite d'une vague d'attentats-suicides du Hamas.
Oui, tout comme Bush et les néoconservateurs qui l'ont manipulé ont été stimulés par les événements du 11 septembre et tout comme Poutine a été stimulé par les attentats à la bombe dans les appartements russes en 1999, Netanyahou l'a été par les attaques du Hamas.
Il n'est guère surprenant que cette culture du croque-mitaine, qui dure depuis des années, ait abouti aux événements du 7 octobre ; en fait, c'était peut-être inévitable. La seule chose qui a fait échouer le plan soigneusement élaboré par Netanyahou et ses conspirateurs Likoudniks pour rallier les Israéliens autour du drapeau et susciter un soutien mondial pour une nouvelle campagne de nettoyage ethnique, c'est que les peuples du monde entier sont bien plus nombreux et plus prompts à voir clair dans cette évidente opération montée de l'intérieur qu'ils ne l'ont été pour le 11 septembre ou d'autres incidents similaires sous faux drapeau dans le passé.
Il est vrai que certaines mises en garde s'imposent ici. Tout d'abord, il ne s'agit pas de dire que le Hamas - ou, plus précisément, les Brigades Izz ad-Din al-Qassam qui forment l'aile militaire du Hamas - est entièrement fictif. Ce n'est pas comme si ces combattants du Hamas étaient tous des Israéliens déguisés ou que leurs armes étaient factices. Cela ne signifie pas non plus que les combattants du Hamas sont d'innocents pacifistes incompris ne voulant pas faire de mal à une mouche et étant les malheureuses victimes des calomnies israéliennes.
Au contraire, de la même manière qu'"Al-Qaïda" se compose principalement de véritables fondamentalistes islamiques - des idiots utiles ne se rendant pas compte que leurs attaques ne sont couronnées de succès que dans la mesure où elles servent les objectifs de terreur sous faux drapeau de leurs ennemis -, les rangs des combattants du Qassam comptent sans doute aussi une majorité de vrais disciples de la cause islamiste radicale.
Une fois de plus, il est important de comprendre la dynamique : les fou furieux du Likoud ont besoin des éléments les plus extrêmes du Hamas pour que le public israélien reste terrifié et réclame la sécurité. De même, les partisans de la ligne dure du Hamas ont besoin des sionistes radicaux du gouvernement israélien, de l'armée, des institutions politiques et religieuses pour poursuivre leur campagne contre les Palestiniens afin de justifier leur idéologie sans compromis et de lutte jusqu'à la mort.
Il convient par ailleurs de garder une autre chose à l'esprit. L'article que vous lisez en ce moment même n'est pas de l'histoire. C'est son histoire. En l'occurrence, la mienne. Il y a beaucoup, beaucoup d'autres façons d'assembler les pièces de ce puzzle pour former un tableau différent. Une explication complète du Hamas devrait inclure un examen bien plus approfondi de la différence entre ses éléments politiques et militaires que ce que j'ai eu le temps de présenter ici, par exemple.
Si vous voulez lire une histoire bien documentée présentant un argument très différent du mien, je vous suggère de lire l'article perspicace de Robert Inlakesh pour The Last American Vagabond sur le sujet Did Israel Really Create Hamas ? (Israël a-t-il vraiment créé le Hamas ?).
Ceci étant précisé, il est important de se souvenir de deux dernières choses.
Primo, nous devons toujours garder à l'esprit que les dirigeants potentiels des populations - qu'il s'agisse de Netanyahou et des Likoudniks en Israël ou du Hamas et de ses dirigeants à Gaza - jouent à des jeux géopolitiques de haut niveau afin de s'assurer le plus grand avantage pour eux-mêmes.
Secundo, nous devons nous rappeler que ce sont les innocents pris au piège de ce conflit sans qu'ils y soient pour rien - évidemment les Palestiniens victimes actuellement d'un génocide, mais aussi les Israéliens - qui paient de leur vie pour ces jeux.
Tant que nous ne reconnaîtrons pas ces ignobles vérités, nous ne pourrons jamais écrire une fin heureuse à cette histoire meurtrière.
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