❖ Antony Blinken, entre folie & mensonges
Folie en déclarant à CBS News que les USA donneraient à la Pologne le "feu vert" pour envoyer des Mig-29 en Ukraine & mensonges en bafouant délibérément la loi devant le Congrès en plein génocide
La folie d'Antony Blinken
Deux ans après que le Pentagone a démenti son projet d’instaurer une zone d’exclusion aérienne contre la Russie en Ukraine, le "haut diplomate" américain remet le couvert en promouvant une idée encore plus folle, écrit Joe Lauria.
Par Joe Lauria, le 20 septembre 2024, Consortium News
Le 7 mars 2022, deux semaines après l'entrée de Moscou dans la guerre civile en Ukraine, le secrétaire d'État américain Antony Blinken a déclaré à CBS News depuis la Moldavie que les États-Unis donneraient à la Pologne, membre de l'OTAN, le "feu vert" pour envoyer des avions de combat Mig-29 en Ukraine afin de faire respecter une zone d'exclusion aérienne contre les aéronefs russes.
La présidente de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, et le chef de la majorité au Sénat, Chuck Schumer, ont également soutenu l'idée d'une zone d'exclusion aérienne. Mais quelques jours plus tard, le Pentagone a rejeté l'idée et s'est engagé dans une bataille importante avec le département d'État et les membres du Congrès pour empêcher une confrontation militaire directe de l'OTAN avec la Russie, qui pourrait déclencher les horreurs les plus inimaginables de l'histoire.
Une zone d'exclusion aérienne "risquerait d'entraîner une réaction importante de la part de la Russie susceptible d'accroître les perspectives d'une escalade militaire avec l'OTAN", selon le porte-parole du Pentagone de l'époque, John Kirby.
Le président Joe Biden s'est retrouvé au milieu de la mêlée. La pression exercée sur la Maison-Blanche par certains membres du Congrès ainsi que par le corps de presse était implacable et visait à faire entrer l'OTAN dans la guerre de manière irréfléchie.
Joe Biden s'est finalement rangé du côté du ministère de la Défense, et n'a pu être plus explicite sur les raisons de ce choix. Il s'est opposé à une zone d'exclusion aérienne de l'OTAN au-dessus de l'Ukraine pour lutter contre les avions russes, a-t-il déclaré, car
"cela s'appelle la Troisième Guerre mondiale, d'accord ? Soyons clairs, les gars. Nous ne participerons pas à la troisième guerre mondiale en Ukraine".
Le secrétaire américain à la défense, Lloyd Austin, l'a soutenu :
"Le président Biden a clairement indiqué que les troupes américaines ne combattraient pas la Russie en Ukraine, et si vous établissez une zone d'exclusion aérienne, il est certain que pour la faire respecter, vous devrez affronter des avions russes. Et là encore, cela nous placerait en situation de guerre avec la Russie".
(Le plan de l'administration était, et est apparemment toujours, de faire tomber le gouvernement russe par le biais d'une contre-offensive par procuration ainsi que d'une guerre économique et d'information, et non d'une guerre militaire directe).
Blinken, qui est sorti du rang pour s'exprimer plus haut que le président et le Pentagone, a perdu cette manche. Il est surprenant qu'il ait conservé son poste. Mais il a survécu et est revenu à la charge.
Implacable
L'imprudence de Blinken s'est à nouveau manifestée la semaine dernière lorsqu'il a colporté une histoire - reprise avec empressement par le Guardian et le New York Times - selon laquelle Joe Biden approuverait une demande britannique visant à lancer ses missiles Storm Shadow en profondeur sur le territoire russe.
L'article du Guardian du 11 septembre stipulait :
"Le secrétaire d'État américain, Antony Blinken, a donné l'indice le plus fort à ce jour indiquant que la Maison Blanche est sur le point de lever ses restrictions sur le recours par l'Ukraine à des armes de longue portée fournies par l'Occident sur des cibles militaires clés à l'intérieur de la Russie, avec une décision qui aurait déjà été prise en privé.
S'exprimant à Kiev aux côtés du ministre britannique des affaires étrangères, David Lammy, Blinken a déclaré que les États-Unis avaient "dès le premier jour" été disposés à adapter leur politique en fonction de l'évolution de la situation sur le champ de bataille en Ukraine. Nous continuerons à le faire", a-t-il souligné.
Pour procéder au tir des Storm Shadows britanniques, l'Ukraine devra s'appuyer sur les soldats techniques britanniques présents sur le terrain en Ukraine et sur la technologie de géolocalisation des États-Unis. Le chancelier allemand Olaf Scholz a révélé que ces soldats britanniques se trouvaient déjà en Ukraine.
En d'autres termes, il s'agirait d'une attaque de l'OTAN contre la Russie, déguisée en attaque ukrainienne. Cela signifierait que les États-Unis et le Royaume-Uni sont en guerre contre Moscou, ce que Blinken semble souhaiter et a déclaré qu'il allait se produire.
Le lendemain, le président russe Vladimir Poutine a averti que le lancement de tels missiles en Russie
"signifierait que les pays de l'OTAN - les États-Unis et les pays européens - sont en guerre contre la Russie. Si tel est le cas, nous prendrons les décisions qui s'imposent en réponse aux menaces qui pèseront sur nous, en gardant à l'esprit que l'essence du conflit a changé."
Pourtant, le New York Times a publié le même jour un article titré : "Biden est prêt à approuver l'utilisation par l'Ukraine d'armes occidentales de longue portée en Russie".
Le Guardian a quant à lui ajouté :
"Des sources du gouvernement britannique ont indiqué qu'une décision avait déjà été prise pour autoriser l'Ukraine d'utiliser des missiles de croisière Storm Shadow sur des cibles à l'intérieur de la Russie, bien que celle-ci ne devrait pas être annoncée publiquement vendredi lorsque Starmer rencontrera Biden à Washington DC".
Les propos de Blinken ont manifestement fait naître chez le Premier ministre britannique Keir Starmer l'espoir de satisfaire son désir de frapper la Russie avec l'arsenal de missiles à longue portée de son pays, bien que Poutine ait déclaré que cela signifierait une guerre directe avec l'OTAN.
Blinken et les Britanniques tentent de nous mener au bord du gouffre.
La raison à Arlington
Sauf que le Pentagone, pourvoyeur de la violence la plus monstrueuse de l'histoire du monde, a fait reculer le monde.
Pour la deuxième fois au moins - de notoriété publique - le ministère de la guerre a assuré la paix face à l'insouciance des néocons, sous la houlette de Blinken.
Starmer a été renvoyé de la réunion de la Maison Blanche sur son vol affrété de British Airways en ruminant ce revers. Il avait manifestement été amené par Blinken à croire que l'affaire était entendue : les États-Unis laisseraient la Grande-Bretagne attaquer la Russie avec ses missiles à longue portée en utilisant la technologie américaine - même si les Américains n'autorisaient pas l'utilisation de leurs propres missiles ATACMS à longue portée.
Le Times de Londres a rapporté que
le refus de Biden d'approuver "a surpris les fonctionnaires britanniques qui avaient écouté attentivement les allusions d'Antony Blinken, le secrétaire d'État américain, selon lesquelles l'Amérique s'apprêtait à autoriser Storm Shadow, une arme anglo-française s'appuyant sur les systèmes de guidage GPS américains".
La rage de Starmer de vouloir frapper la Russie illustre la haine pathologique persistante de l'élite britannique à l'égard de ce pays, qui remonte à plusieurs siècles, alors que la rivalité géostratégique des Américains avec Moscou est peut-être plus tempérée, bien que déterminée.
Les limites de Biden face aux néoconservateurs
Biden s'est avéré être un belliciste suprême, son plaidoyer en faveur de l'invasion illégale de l'Irak et sa complicité dans le génocide à Gaza en étant les exemples les plus flagrants.
Comme ses deux prédécesseurs, Biden a permis aux néoconservateurs d'accéder à des postes de pouvoir au sein de son administration. Mais on peut se demander dans quelle mesure Biden est lui-même un néoconservateur, par opposition à un belliciste traditionnel.
Créature de Washington depuis plus d'un demi-siècle, il semble respecter le jugement de l'armée sur les questions militaires et, dans ses bons jours, comprend que même l'Amérique a des limites.
Barack Obama a laissé Hillary Clinton, la "reine des bellicistes", faire entrer la reine des néocons Victoria Nuland dans son administration. Donald Trump a laissé les néocons John Bolton et Mike Pompeo entrer dans son administration. Quant à Biden, il a Blinken (et, pendant un temps, Nuland aussi).
Au lieu de bannir ces personnes, on les laisse s'éterniser et entraîner les États-Unis dans des échecs toujours plus périlleux : Irak, Afghanistan, Gaza et Ukraine, laissant derrière eux une mer de dollars dilapidés et un océan de sang.
En tant que carriériste, Blinken a dit ce qu'il avait à dire pour parvenir là où il est. En 2015, Obama a sagement décidé de ne pas armer l'Ukraine après le coup d'État de 2014 mené par Nuland et Biden, ne voulant pas contrarier la Russie, pour laquelle il a dit que l'Ukraine était un intérêt vital, alors que ce n'était pas le cas pour les États-Unis.
À l'époque, Blinken était secrétaire d'État adjoint d'Obama. Pour soutenir la position du président, il a déclaré lors d'une conférence à Berlin :
"Si vous jouez sur le terrain militaire en Ukraine, vous jouez avec la puissance des Russes, parce que la Russie est juste à côté. Elle dispose d'une quantité considérable d'équipements et de forces militaires juste à la frontière. Tout ce que nous avons fait en tant que pays en termes de soutien militaire à l'Ukraine est susceptible d'être égalé, puis doublé, triplé et quadruplé par la Russie".
Mais une fois libéré des contraintes imposées par Obama, il s'est rallié à la politique ukrainienne agressive de Biden au sommet du département d'État. Depuis cette position, et avec un vide de pouvoir à la Maison Blanche dû à la démence de Biden, Blinken a ouvertement poussé l'agenda néocon, exposé clairement dans le rapport 2000 du Projet pour un Nouveau Siècle Américain (Project for a New American Century).
Et quel est cet agenda ? À une autre époque, avant que ce terme ne devienne un vilain mot, il aurait été fièrement proclamé sous le nom d'impérialisme. Il recèle l'orgueil démesuré, le sentiment d'invincibilité et d'impunité de n'importe quel empire de l'histoire.
Le PNAC promulgue clairement qu'aucune puissance ou alliance de puissances ne sera autorisée à s'élever pour faire obstacle à la quête folle des néoconservateurs visant à exploiter la puissance américaine pour dominer le monde. Une alliance de puissances comme celle de la Chine, de la Russie et des pays BRICS, qui n'a fait que s'accélérer en opposition à l'aventurisme néoconservateur désordonné.
Malgré les nombreux désastres qui s'accumulent, notamment en Irak, en Palestine et maintenant en Ukraine, les néoconservateurs ne se laissent pas décourager et n'ont aucune retenue. Il s'agit de pouvoir et de meurtre, mais ils le rendent acceptable pour eux-mêmes avec un langage enjôleur sur l'Amérique qui sauve le monde pour la démocratie.
Leur conviction en leur propre suprématie, enveloppée dans le drapeau américain, reste fanatique, quelles que soient la mort et la destruction qu'ils infligent. Ils refusent de comprendre que la puissance américaine a des limites et, pour la mettre à l'épreuve, ils risquent tout.
En 2019, Blinken s'est associé à l'archi-néoconservateur Robert Kagan pour rédiger une tribune dans le Washington Post plaidant en faveur d'une utilisation plus agressive de la puissance américaine à l'étranger et contre les tendances nationales du pays au non-interventionnisme.
La femme de Kagan, Nuland, ayant quitté l'administration Biden et le conseiller à la sécurité nationale, Jake Sullivan, s'étant rangé du côté des réalistes, Blinken s'est imposé comme le leader incontesté de ceux que George H.W. Bush appelait les "fous du sous-sol".
C'était il y a 30 ans. Aujourd'hui, les néoconservateurs sont bien installés et seules la retenue du Pentagone et la persuasion de Sullivan ont permis à Biden de s'éloigner du bord du gouffre.
Pour cette fois.
Joe Lauria est rédacteur en chef de Consortium News et ancien correspondant aux Nations unies pour le Wall Street Journal, le Boston Globe et d'autres journaux, dont la Gazette de Montréal, le London Daily Mail et le Star de Johannesburg. Il a été journaliste d'investigation pour le Sunday Times of London, journaliste financier pour Bloomberg News et a commencé sa carrière professionnelle à 19 ans comme pigiste pour le New York Times. Il est l'auteur de deux livres, A Political Odyssey, avec le sénateur Mike Gravel, préfacé par Daniel Ellsberg, et How I Lost By Hillary Clinton, préfacé par Julian Assange.
📰 https://consortiumnews.com/2024/09/20/the-madness-of-antony-blinken/
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Blinken appelé à démissionner pour avoir menti en affirmant qu'Israël ne bloquait pas l'aide parvenant à Gaza
"Lorsqu'un haut fonctionnaire américain ment au Congrès en plein génocide pour que le gouvernement puisse continuer à financer ce génocide, il bafoue délibérément la loi et prolonge les souffrances de millions d'innocents."
Par Jake Johnson, le 25 septembre 2024, Common Dreams
Le secrétaire d'État américain Antony Blinken a été appelé à démissionner mardi à la suite d'un rapport de ProPublica décrivant comment il a contredit les conclusions des experts de son propre ministère afin de maintenir le flux d'armes américaines vers Israël, lesquelles ont été utilisées à plusieurs reprises pour commettre des crimes de guerre dans la bande de Gaza.
"Le secrétaire d'État Blinken et l'administration Biden ont ignoré le blocus par Israël de l'aide humanitaire à la population souffrante de Gaza - ce qui constitue une violation de la loi américaine - et ont menti à ce sujet au Congrès
Lorsqu'un haut fonctionnaire américain ment au Congrès en plein génocide afin que le gouvernement puisse continuer à financer ce génocide, il bafoue délibérément la loi et prolonge les souffrances de millions d'innocents en ayant désespérément besoin. Que notre gouvernement cesse de financer leur massacre", a déclaré Nihad Awad, directeur exécutif national du Conseil des relations américano-islamiques (CAIR). .
Ajoutant,
"Il doit démissionner et l'administration Biden doit être tenue pour responsable de sa violation de la loi et de sa complicité dans le génocide israélien à Gaza".
L'article de ProPublica offre un compte rendu détaillé, étayé par des communications internes et autres documents, de la manière dont le département d'État dirigé par Blinken a remis au Congrès un rapport allant à l'encontre des conclusions des experts au sein du département ainsi que de celles de l'Agence américaine pour le développement international (USAID).
Cette dernière agence a indiqué directement à Blinken, dans un mémo datant d'avril, qu'Israël entravait délibérément l'acheminement de l'aide humanitaire américaine, une constatation conforme aux évaluations des Nations unies et d'autres groupes extérieurs. En vertu de la législation américaine, le gouvernement fédéral ne peut fournir d'armes ou autres matériels militaires aux pays qui font obstacle à l'aide humanitaire américaine.
Pourtant, dans un rapport remis en mai au Congrès, le département d'État a conclu que le gouvernement israélien n'interdisait pas ou ne restreignait pas le transport ou la livraison de l'aide humanitaire américaine au sens de la section 620I de la loi sur l'aide à l'étranger (Foreign Assistance Act).
Une fonctionnaire du département d'État, Stacy Gilbert, a démissionné à la suite de la remise du rapport final au Congrès, déclarant dans un communiqué après son départ :
"Il existe de nombreuses preuves montrant qu'Israël est responsable du blocus de l'aide" et "il est absurde et honteux de le nier".
Les obstructions à l'aide humanitaire se poursuivent. Selon une analyse publiée la semaine dernière par une coalition d'organisations de défense des droits de l'homme, le siège israélien empêche actuellement plus de 80 % de l'aide alimentaire d'atteindre Gaza, alors que l'enclave fait face à la famine.
Awad, du CAIR, a déclaré mardi que "le secrétaire Blinken a potentiellement commis un crime par ses mensonges".
"Le peuple américain mérite des dirigeants honnêtes et intègres pour représenter ses valeurs et protéger ses intérêts", a-t-il déclaré.
D'autres ont fait écho à l'appel lancé à Blinken pour qu'il démissionne ou soit démis de ses fonctions par les législateurs. Les républicains du Congrès font actuellement pression pour que ce dernier soit condamné pour outrage, mais pour une affaire sans aucun rapport avec le soutien des États-Unis à la guerre d'Israël contre Gaza.
Sam Perlo-Freeman, un universitaire ayant travaillé comme chercheur pour l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (SIPRI) et la Campagne contre le commerce des armes, a déclaré que Blinken "devrait démissionner ou être mis en accusation".
"Bien sûr, a-t-il ajouté, la plupart des membres du Congrès étaient très heureux qu'on leur mente et auraient dû dénoncer Blinken pour la vérité".
📰 https://www.commondreams.org/news/blinken-resign
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